6 avril 1994 -6 avril 2018 au Rwanda et au Congo-Zaïre. Vingt-quatre ans de mensonge

Dr Charles Onana

Par Charles Onana

6 avril 1994 -6 avril 2018 au Rwanda et au Congo-Zaïre. Vingt-quatre ans de mensonge, vingt-quatre ans de silence, vingt-quatre ans d’inertie, vingt-quatre ans de malaise, vingt-quatre ans d’embarras, vingt-quatre ans d’injustice…

Donnez-nous les noms de ceux qui ont tué Juvénal Habyarimana et Cyprien Ntariyamira, deux chefs d’État africains en exercice, le 6 avril 1994 au Rwanda à 20h30 à l’aéroport de Kigali !

Ne tournez plus autour du pot en polémiquant, en louvoyant, en échafaudant et en multipliant des hypothèses farfelues à l’infini, parlant bruyamment du génocide pour rendre la question principale inaudible : qui sont les auteurs de l’assassinat de deux présidents africains le 6 avril 1994 au Rwanda ? Pour quelle raison deux présidents en exercice ont-ils été tués dans un aéroport placé sous la protection des Nations Unies à Kigali ? Je sais que j’agace certains en faisant régulièrement revenir cette question comme un serpent de mer mais la redondance est astucieusement pédagogique. Il ne faut pas arbitrairement chercher à s’en défaire si l’on parie sur l’intelligence et même sur la bêtise.

Deuxième question agaçante : qui sont les auteurs de la déstabilisation du Congo et du massacre de millions de Congolais depuis 1994, date du déploiement de l’Opération Turquoise dans ce pays ?

Question subsidiairement agaçante : Pourquoi parle-t-on chaque année des morts rwandais tout en gardant le silence sur plus de dix millions de morts au Congo ? Les millions de Congolais sont-ils moins importants que 800 000 ou 1 million de Rwandais ?

Il y a quelque chose de puant et de malsain dans ce dossier. N’encouragez pas la comptabilité macabre, mais elle peut très vite s’installer chez les Congolais si l’hypocrisie et le cynisme persistent. J’attends toujours que l’on nous démontre que deux présidents africains sont morts sans raison et presque par hasard le 6 avril 1994 au Rwanda. Je suis même prêt à entendre qu’ils se sont tués tous seuls en se suicidant collectivement comme les membres d’une secte obscurantiste. Mais, démontez-nous comment cela est arrivé !

Il semble aussi, et je suis prêt à l’entendre, que plus de dix millions de Congolais se sont suicidés chez eux, que les femmes congolaises réussissent l’exploit de commettre des viols contre elles-mêmes tous les jours et que c’est pour cela que tout le monde se tait. Dites-nous toutes sortes de choses invraisemblables mais de grâce démontrez-le ! Certains, comme moi, sont curieux de comprendre et aiment des démonstrations claires et documentées. Il est troublant de constater que ceux qui affirment beaucoup de choses sur le Rwanda évitent toujours la confrontation intellectuelle rigoureuse. Ils sont souvent seuls sur les antennes de tous les médias, loin de tout contradicteur exigeant. C’est probablement un oubli des rédactions ou la peur d’être démasqué.

Cela fait maintenant vingt-quatre ans que l’on pleure sur le génocide, les machettes, la planification, les milices, la France, les génocidaires, les crânes, les os, les mémoriaux et commémorations de toutes sortes, mais rien sur les auteurs de l’élimination de deux présidents ni sur la déstabilisation du Congo. Jusqu’où va-t-on continuer ce cirque fâcheux où l’on traite les Africains comme de grands enfants impubères ? Jusqu’où ces derniers vont-ils continuer d’accepter eux-mêmes ce traitement méprisant en continuant d’avaler gentiment des histoires fabriquées sur leur propre sort ?

Manifestement, l’Union Africaine est de plus en plus crispée devant cette question des auteurs de l’assassinat de deux chefs d’État africains et des auteurs de massacres des millions de Congolais et du pillage massif du Congo. L’Afrique croit-elle pouvoir se développer en dormant tranquillement sur les cadavres de ses enfants et en se taisant honteusement sur l’assassinat de ses chefs d’État ? Lumumba assassiné, vous ne dites rien. Somora Machel assassiné, vous ne dites rien, Sankara assassiné, vous ne dites rien.

Kabila assassiné, vous ne dites rien. Vous attendez d’être tous exterminés pour vous réveiller ?

Au fond, dites-nous, de qui ou de quoi avez-vous peur en gardant ce silence gêné ? « Les morts ne sont pas morts » dit le proverbe. Tous ces crimes que vous étouffez par lâcheté ou par complaisance vont resurgir contre votre gré. Tous ces morts innocents broyés et ensevelis en terre africaine vous répondront et vous comprendrez peut-être ! Ou peut-être pas… En attendant, ayez peur, soumettez-vous et soyez heureux ! Vos enfants seront fiers de vous !