Autopsie du « modèle rwandais » que les superpuissances entendent étendre à toute l’Afrique

Nous appelons « modèle rwandais », un régime qui serait installé dans un autre quelconque  pays du monde et qui aurait les caractéristiques du régime installé au Rwanda depuis 1994. L’installation d’un tel régime doit se faire sous certaines conditions qui, pour le cas du Rwanda, furent toutes remplies en 1994. Une fois installé, ce que nous appelons  « péri-modèle politique rwandais », dans ce sens qu’il faut intégrer tous ses contours, se caractérise par certains aspects qui, dans des modèles classiques, étaient considérés comme négatifs voire carrément immoraux, mais qui, pour la pérennisation du « péri-modèle rwandais », doivent être promus en idéaux politiques à favoriser.

Les conditions pour l’installation d’un « péri-modèle rwandais » dans un pays donné

Ces conditions sont aussi cyniques dans leur conception que brutales dans leur réalisation :

  • Le « modèle rwandais » doit être installé dans un pays après sa totale destruction. Celle-ci peut être délibérément provoquée ou encouragée dès qu’elle apparaît à l’horizon ;
  • Le modèle doit trouver un acte fondateur fort sur lequel s’appuyer pour trouver une certaine légitimité mais surtout pour jouir de l’impunité. Cet acte  peut être inventé de toutes pièces et imposé à l’opinion ou alors en s’employant à travestir les faits historiques en leur collant des qualificatifs  allant dans ce sens par exemple en qualifiant les massacres interethniques de « génocide ».
  • Confier la gestion locale du modèle à un petit groupe marginal et sans aucune assise populaire qui, de ce fait, se retrouve dans un pays donné avec un pouvoir dont il ne pouvait même pas rêver et qui restera toujours redevable et dépendant des puissances qui l’ont créé et promu.

Les principaux caractéristiques du «modèle rwandais »

  • Un régime dictatorial d’après les normes généralement reconnues en science  politique ;
  • Un régime qui ne peut être critiqué ni dans la presse ni dans les institutions internationales, mais au contraire qui ravit se thuriféraires en les rémunérant grassement ;
  • Un régime pour lequel même les institutions internationales sont promptes à mentir ou à falsifier les statistiques quand il faut le défendre ;

Ce modèle est donc d’abord caractérisé par l’illégitimité politique des détenteurs du pouvoir. Il s’agit généralement d’une clique d’aventuriers ou d’un groupe social marginal sur l’échiquier politique du pays concerné, mais dans tous les cas, un groupe qui ne pourrait jamais  prétendre à l’accaparement du pouvoir dans ce pays par des voies démocratiques n’eut été sa  promotion par les superpuissances . 

Ensuite, le « péri-modèle rwandais » est caractérisé par une militarisation à outrance du pays où il est instauré. En fait, le groupe marginal choisi par les superpuissances doit se considérer et , avec raison, comme «  une armée possédant un pays » que comme « un pays possédant une armée » comme le veut la théorie politique classique. Si au sein de ce groupe (forcément minoritaire et à volonté) toutes le nombre de personnes aptes à porter les armes s’avéreraient insuffisant pour quadrier et  soumettre le pays, le recours aux mercenaires serait de  mise avec l’aide et l’expertise des superpuissances.

La gouvernance dans un pays où ce « modèle rwandais » a été installé est assurée par un « Gouvernement Mondial » agissant sous la couverture d’un gouvernement visible formé par la clique promue par les superpuissances. Ce « Gouvernement Mondial », un concept toujours en essai mais qui espère prendre de l’envol grâce au cas du Rwanda, est composé d’anciens leaders politiques, de grands managers de l’industrie et de la finance mondiale, des magnats de la presse internationale… mais qui, tous, sont animés de ce même projet : celui de diriger le monde en se passant des peuples et surtout des principes classiques de la politique et de la diplomatie qui ont prévalu au XX° siècle.

Ainsi les valeurs comme la démocratie, les droits de l’homme, la liberté de parole, l’indépendance de la justice, la justice sociale…sont rejetées et remplacées dans ce pays devenu une entreprise commerciale appartenant aux actionnaires , par le profit, agrandir le fossé entre possédants qui doivent gagner chaque jour davantage  et les démunis qui doivent continuer à être exploités. Des mécanismes mis en place pour faire taire toute critique au modèle, le culte de la personnalité envers l’Administrateur Délégué désigné par les grands actionnaires (les multinationales des grandes puissances) de cette entreprise et qui s’appelle ailleurs, pour la forme, «  Chef d’Etat ».

Implémentation du « modèle rwandais » au Rwanda-même puis dans toute la région

Pour le Rwanda, pays martyr qui devait servir de laboratoire pour le « modèle  rwandais », il fut difficile de remplir certaines conditions comme évoqué ci-haut. Il a fallu près de quatre ans pour que le Rwanda soit complètement détruit afin d’y installer ce modèle.

Depuis le 01 octobre 1990, l’armée régulière ougandaise lâcha ses éléments d’origine tutsi sur le Rwanda. Ceux-ci se révéleront efficaces pour hâter la mise en place de ce modèle. Ces soldats tutsis commandés à l’époque par le Chef des Renseignements Militaires de l’Armée ougandaise, un certain… Paul Kagamé  vont se montrer particulièrement  inhumains. Ils tuaient tout sur leur passage dès le franchissement de la frontière entre l’Ouganda et le Rwanda. Lorsqu’en 1993, ils parvinrent à occuper une petite partie de la préfecture de Byumba frontalière  avec l’Ouganda, le monde fut stupéfait de constater que près d’un million de paysans hutu avaient été chassés de leurs terres et venus s’entasser dans les faubourgs de Kigali. Ceux qui n’avaient pas eu la chance de fuir avaient tout simplement été exterminés par  les soldats tutsi de l’armée régulière ougandaise commandés par Paul Kagamé. Celui-ci  avait pour se  mission, reçue des superpuissances, d’instaurer au Rwanda un modèle qui devait être répandu sur toute l’Afrique.

Tony Blair, Paul Kagame, Rick Warren

Pour remplir la condition qui devrait permettre à la clique marginale, cruelle et surtout honnie du peuple rwandais de se faire prévaloir d’une certaine  légitimité et surtout de jouir d’une impunité juridique pour ses crimes, il a fallu que les commanditaires de Paul Kagamé lui fasse commettre l’irréparable à savoir l’assassinat du président hutu Juvénal Habyarimana pour provoquer la colère des Hutu,  ce qui serait alors qualifié de « génocide contre les Tutsi ». Le 6 avril 1994, Paul Kagame a non seulement pas abattu le président hutu rwandais Juvénal Habyarimana, mais il aussi tué le président hutu burundais Cyprien Ntaryamira. Ainsi il venait de se débarrasser de trois président hutu en moins de six mois d’intervalle mais au final, il venait d’obtenir son « génocide ». Il lança une offensive sur tous les fronts, bénéficiant des renseignements militaires des USA (photo aériennes, communications captées…) et appuyés cette fois-ci ouvertement par les troupes des pays voisins comme la Tanzanie , le Burundi, l’Ethiopie, …et s’empara du pays en juillet 1994 en clamant qu’il venait « d’arrêter un génocide » ! Depuis, le monde ne jure que par cette supercherie et l’ancien garçon de rue de Kampala qui avait rejoint le maquis de Museveni en 1983 pour échapper aux rafles de la police qui visaient les vagabonds est actuellement présenté au monde comme un« visionnaire, un homme exceptionnel, d’une intelligence supérieure à la normale etc… » , alors qu’il n’a été créé et n’est là que pour implémenter un modèle de gouvernance conçu par les superpuissances et dont il ignore les tenants et les aboutissants.

Le régime rwandais actuel remplit parfaitement les conditions sine qua non du « péri-régime rwandais » tel que conçu pas les superpuissances. La clique tutsi venue d’Ouganda a d’abord militarisé tout le pays. Tout tutsi en âge de porter les armes est militaire ou l’a été. C’est une évidence. Mais comme cette clique ultra-minoritaire qui a accaparé tous les rouages du pouvoir ne peut pas  occuper tous les  postes, elle recourt aux étrangers  plutôt que de risquer de donner des postes stratégiques aux Hutu non sûrs. A ce sujet, ce sont les USA et la Grande Bretagne qui proposent les cadres à nommer souvent ayant une double ou triple nationalité dont la dernière qu’ils défendraient à outrance est la rwandaise. Pour les cadres subalternes dans les services de sécurité, un « Munyamulenge » congolais, un Somalien, un Ougandais munyankole, un Burundais tutsi, un Tanzanien muha…,tous ceux-là passent avant un Rwandais perçu comme « Hutu » ou « Twa », car selon les initiateurs de ce « modèle rwandais », ces étrangers seraient plus sûrs car, croient-ils, plus proches de la clique tutsi venue d’Ouganda que du reste de  la population rwandaise! Et curieusement Paul Kagame semble y croire ou est obligé de le croire.

Pour les superpuissances,  le « modèle rwandais » laborieusement mis en place à partir de 1994 sur un territoire appelé « Rwanda » qui, pour elles n’est qu’un « cluster » ou pôle de compétitivité de 26 338 km², le gouvernement mondialiste qui le dirige est officiellement appelé : « Presidential Advisery Council »(PAC ). Celui-ci constitue en fait le Conseil d’Administration (CA) de cette entreprise commerciale qu’est devenu le Rwanda. Ce CA comprend des personnalités politiques aussi controversées que Tony Blair ou Bernard Kouchner, des magnats de l’industrie et de la finance comme Warren Buffet, Kaia Miller  ou Sorros, des nouveaux milliardaires générés par les nouvelles technologies comme Bill Gate ou Michael Fairbank, des administrateurs des fondations louches destinées à couvrir des opérations mafieuses à travers le monde comme la «  Fondation Clinton », des chercheurs et théoriciens de la nouvelle économie mondialisée comme Michael Porter ou encore des gourous télévangélistes devenus milliardaires et stars médiatiques comme Joe Ritchie. Ils ont imposé Paul Kagamé comme Chef Executive Officer (CEO) ou Administrateur Délégué de cette entreprise commerciale appelée Rwanda. Ceux qui sont présentés comme des ministres d’un gouvernement d’un Etat rwandais  souverain ne sont que des « collaborateurs » du chef de l’entreprise  commerciale. Voilà pourquoi ce qui fait office de « gouvernement rwandais » n’est jamais critiqué pour ses violations des Droits de l’homme, son verrouillage de l’espace démocratique pour empêcher toute revendication démocratique de se faire entendre, son mépris et l’asservissement de la population. Ces préoccupations et exigences ne sont pas sur la feuille de route de ceux qui ont reçu pour mission de transformer ce qui était un pays souverain en un espace économique ( cluster) à occuper par une entreprise commerciale mondialisée à qui il ne faut surtout pas parler des exigences morales en termes politiques.

Le « malheur » du Burundi

Le Rwanda et le Burundi  sont souvent appelés des « jumeaux de l’Afrique centrale ». En effet, ces deux petits pays partagent presque tout : une même langue appelée kinyarwanda ou kirundi selon que l’on se trouve au nord ou au sud de l’Akanyaru , rivière faisant frontière ; une même composition ethnique de la population et dans les mêmes proportions ( 85% de Hutu, 14 % de Tutsi et 1 % de Twa) avant qu’au Rwanda il ne soit entrepris un rééquilibrage depuis 1994 par le seul levier possible : réduire la majorité par élimination physique. « Vider un fut rempli à l’aide d’une capsule de bouteille » comme l’avait promis Paul Kagame après  1994 ; un même passé colonial d’abord comme colonie allemande avant de passer à la tutelle belge après la défaite de l’Allemagne en 1918 ; une domination des monarchies féodales tutsies favorisées et encouragées par le pouvoir de tutelle pour maintenir la majorité hutu en servitude ; le recouvrement à la même date, le 01 juillet 1962, de l’indépendance.

Mais toute similitude s’arrête là. A l’indépendance, le Rwanda devint une République démocratique dans laquelle la majorité hutu tenue jusque là en servitude par la féodalité tutsi accéda au pouvoir . Tandis qu’au Burundi, le pays devint souverain sous un régime monarchique tutsi. La monarchie tutsi fut renversée le 28 novembre 1966 par des jeunes officiers tutsi encore plus extrémistes que leurs congénères  féodaux. Pour se prémunir de la contagion rwandaise, à savoir une probable prise du pouvoir par la majorité hutu, des pogroms récurrents eurent lieu au Burundi dans lesquelles des milliers de hutu périrent .Ce fut le cas en 1965, 1968, 1972 qui, cette année là, prirent l’allure d’un génocide car pas moins de 300.000 hutus « instruits » furent massacrés par l’armée tutsi.

Louis Michel et Paul Kagame

En 1993, contre toute attente, un président hutu  du nom de Melchior Ndadaye fut élu démocratiquement. Ce qui fut considéré dans les milieux tutsi comme une provocation et une humiliation. Et à peine trois mois après son investiture, soit le 22 octobre 1993, il fut sorti de son palais, humilié au mess des officier et massacré par des soldats tutsi dans l’enceinte de l’Etat major de l’armée, une armée qui ,  il faut le rappeler,  était mono ethnique tutsi. Il s’en suivra des massacres à travers tout le pays et surtout dans la capitale Bujumbura. Les jeunes hutu principalement des étudiants hutus de l’université du Burundi qui étaient visés par ces massacres prirent alors le maquis et déclenchèrent une guerre civile qui allait durer 10 ans. Finalement un accord de paix fut signé garantissant notamment l’entrée des Hutu dans les services de sécurité (armée et police) dans une proportion de 50%, ce qui jusqu’ici était inimaginable. Les rebelles furent alors intégrés dans l’armée régulière.

Après une période de transition, en 2005, le leader de la rébellion hutu Pierre Nkurunziza fut élu par l’Assemblée comme président de la République, un autre fait inimaginable quelques années auparavant. En 2010, il sera pour la première fois élu au suffrage universel pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois. Entretemps, au Rwanda voisin, une clique de Tutsi venue d’Ouganda s’était emparée du pouvoir en juillet 1994. Il s’avérera plus tard que cette clique conduite par Paul Kagamé n’était qu’un instrument des puissances qui avaient décidé d’essayer en Afrique un modèle de domination des peuples basé non sur des considérations politiques ou sur des principes du droit international, mais basée seulement sur des principes de l’économie mondialisée, qui considèrent des États classiques comme des « pôles économiques » et des principes démocratiques comme des entraves au profit. En bref le « modèle rwandais ».

Le régime démocratique burundais issu des négociations pour mettre fin à la guerre civile déclenchée en 1995 et légitimé par les élections successives selon la Constitution adoptée après la période de transition, constitue un contre-modèle au « modèle rwandais » que les superpuissances entendent étendre à toute la région. En toute logique, pour ces superpuissances, il faudrait d’abord renverser le contre-modèle burundais  pour espérer installer le « modèle rwandais ».

Et pour faciliter les choses, il se fait qu’au Burundi, certaines personnalités (Hutu comme Tutsi) se présentent en face du monde occidental comme des politiciens mais sans aucune assise populaire et donc n’ayant aucune chance n’accéder au pouvoir démocratiquement. Ces personnalités ayant gouté au pouvoir  pendant la transition ne rêvent que de faire régner au Burundi une période perpétuelle de transition qui les associerait au pouvoir sans élections. Depuis 2010, personnalités  refusent d’aller aux élections et mais exigent un régime de transition…mais vers quoi ?Les superpuissances qui doivent implémenter le « modèle rwandais » dans la région  les ont remarquées et les utilisent  à bon escients.

Ceci explique l’acharnement des tenants du « modèle rwandais » contre le contre-modèle burundais auquel nous assistons depuis 2015. Tenez :

  • L’Union Européenne, dont on sait que sa position sur le Burundi est dictée par l’eurodéputé et ancien commissaire au développement Louis Michel, est en première ligne pour le renversement du régime démocratique burundais. Le puissant lobby de Louis Michel a vite fait de faire suspendre les aides de l’Union Européenne destinées au Burundi en les réorientant vers des officines qui financent les opposants radicaux repliés à Bruxelles sous le sigle de CNARED en attente d’aller prendre le pouvoir à Bujumbura.
  • L’Union Africaine (UA) a été instrumentalisée par l’Union Européenne qui lui fournit 3/4 de son budget de fonctionnement pour s’impliquer dans le renversement du régime démocratique burundais et y installer un « modèle rwandais ». C’est ainsi que la Commission de l’UA sur proposition du Commissaire à la paix et à la sécurité de cette organisation, bien connu comme un agent occidental, avait, en décembre 2015, décidé en catimini d’envoyer une force de 5000 hommes au Burundi. N’eut été la vigilance des Chefs d’Etats africains, le Burundi serait, depuis décembre 2015, occupé par une force décidée par l’UE et couverte par l’UA ayant pour mission de renverser les institutions démocratiques de ce pays en vue de l’installation d’un « modèle rwandais » dans ce pays.
  • L’Organisation des Nations Unies (ONU) s’est soudainement souciée de paix et de sécurité dans ce pays après une indifférence de plus de 30 ans. En effet on peut se demander comment l’ONU qui, depuis l’indépendance du Burundi en 1962, s’est toujours désintéressée de la situation au Burundi,  soit depuis quelques années aussi  fébrile au sujet de la situation dans ce pays. Mais force est de reconnaître que cet intérêt soudain pour le Burundi n’est pas motivé par un soucis de la paix et de la sécurité des Burundais. En effet depuis 1962, date de son indépendance, le Burundi a été le théâtre des massacres ethniques menés par l’armée tutsi en 1965, 1968 , 1972 , 1988, et 1993. Mais durant cette longue période de la domination tutsi  caractérisée par des massacres quelquefois génocidaires (1972 et 1993),  leJ Kabila, Ban Ki Moon, Paul KagameConseil de Sécurité n’a pris que DEUX résolutions en rapport à la situation au Burundi. Paradoxalement après l’avènement d’un régime démocratique en 2005, le même Conseil de Sécurité vient de prendre pas moins de  SEIZE résolutions. Et pour la seule période de 2015 à 2016, le même Conseil de Sécurité vient de prendre TROISrésolutions  toutes stigmatisant le régime démocratique qualifié de « hutu ».
  • La presse internationale étant un acteur majeur dans l’installation du « modèle rwandais » au Burundi, n’a pas failli à sa mission. Ainsi RFI n’a pas cherché loin. Tous les opposants radicaux repliés en Europe ou au Rwanda pour peu qu’ils savent parler devant u micro pour pourfendre le régime, sont présentés par RFI comme « ses correspondants » ou «  des spécialistes du Burundi ». RFI pousse le bouchon plus loin jusqu’à saper le travail des médiateur et facilitateur dans le dialogue burundais en publiant les points de vue des opposants radicaux comme les seules valables au grand dam des Chefs d’Etats qui pilotent cette initiative. Exemple : RFI a titré que le second round des pourparlers d’Arusha (12-13 août 2016) était un échec avant le communiqué final du facilitateur. D’autres médias français comme France 24 n’hésitent pas à lancer des énormités dès lors qu’il s’agit de charger à tort le régime démocratique du Burundi que l’on voudrait remplacer par un « modèle rwandais » : diffusion de faux documents, donner la parole aux criminels recherchés par la justice de leur pays comme Pacifique Nininahazwe ou Gratien Rukindikiza etc…
  • Tandis qu’en Belgique où vit la majorité de ceux qui devraient aider à l’installation au Burundi du « modèle rwandais », ce sont les « futurs maîtres du Burundi » ( ils sont présentés comme tels dans les chancelleries occidentales) lorsque ce pays sera réduit au « modèle rwandais »  ainsi que les marionnettes qui leur serviront de caution populaire, qui ont droit à la parole.

Le dilemme des Africains  face au « modèle rwandais » 

Les Africains, surtout les leaders politiques ou les aspirants, sont happés par l’attirance au « modèle rwandais » qu’exercent sur eux ceux là même qui ont conçu et décidé d’implémenter ce modèle. Tous les médias, toutes les institutions financières (contrôlées par les mêmes milieux) quitte à trafiquer les statistiques, vantent le « modèle rwandais ». Il est donc tentant pour plusieurs de ces dirigeants africains de

Bernard Kouchner et paul Kagame

souhaiter que ce modèle s’applique chez-eux.  Ce qu’ils devraient savoir, c’est qu’à l’état actuel des choses, ils n’ont pas de choix ou s’ils en ont, il est cornélien. En effet, les superpuissances ont conclu qu’à l’état actuel, les pays n’ont d’autres choix qu’entre : le « Chaos » ou «  le « modèle rwandais ». Selon elles, les Africains ne devraient plus vivre sous des régimes démocratiques stables. Il doit donc être créée une situation politique chaotique comme c’est le cas au Proche Orient et au Maghreb, ce qui arrange formidablement les multinationales qui ne doivent plus passer par des gouvernements forts pour exploiter les pays. Ou alors  vivre sous un « modèle rwandais » quand l’institution étatique est remplacée par une institution commerciale qui s’accapare de tous les attributs d’un Etat sans en être un. Les Africains n’ont donc d’autres choix qu’entre « les Etats  soumis au chaos politique » ou des Etats réduits à des espaces économiques (cluster) gérés par les multinationales (modèle rwandais).

Pièges tendus et manipulation des leaders politiques africains :

Les pièges tendus aux dirigeants africains sont nombreux et sont disséminés sur tous leurs parcours. La presse internationale contrôlée par les inventeurs du « modèle rwandais » ne cesse de faire miroiter les « bienfaits » de ce modèle. Ceux du pré carré français qui souhaiteraient prendre un peu de liberté tomberont par  « la realpolitik » qui veut que la France est partie prenante de cette instrumentalisation de l’Afrique  (chaos ou modèle rwandais) que les superpuissances (dont la France) qui sont appelées à implémenter ces modèles sont en parfaite harmonie.  Seul le calendrier, la géographie  et le rythme des événements pour la provocation du chaos ou l’installation d’un «  modèle rwandais » dans tel ou tel pays, peuvent sembler contradictoires par rapport à ces puissances mais ce n’est qu’en apparence.

L’intérêt pour ces superpuissances de promouvoir en Afrique le « modèle rwandais » est évident. En transformant des anciens Etats souverains en « zones économiques » (cluster) contrôlées par leurs multinationales, ces superpuissances cassent le mythe des Etats souverains étant en principe  sur le même pied d’égalité qu’elles sur le plan du droit international. Les acteurs locaux qui, dans le système classique, sont considérés comme des « chefs d’Etats » et traités comme tels, deviennent des « Administrateurs délégués » qui gèrent leurs espaces économiques, comme Paul Kagame est le CEO de « Rwanda Inc. ». De ce fait, ces superpuissances s’affranchissent des contraintes morales comme le respect des Droits de l’homme, la démocratie, la justice équitable… car ces principes ne sont pas exigibles à une entreprise commerciale qu’est devenu un Etat soumis au « modèle rwandais ».

Quand et comment en finir avec «  le modèle rwandais » ?

On ne peut imaginer une probable fin ou échec du « modèle rwandais » sans d’abord bien analyser son essence, autrement dit son « ADN ». Pour peu qu’on s’ y adonne on s’aperçoit que sa fin est inscrite dans ses gênes.

  1. L’injustice sociale, les inégalités criantes, promues en principes moraux, l’arrogance de la clique au pouvoir, en fait des fonctionnaires des multinationales qui ont acheté le Rwanda,.. tout cela ne peut conduire qu’à une explosion sociale.
  2. La frustration de plusieurs intellectuels qui continueront d’assister à une chosification de la société en l’écartant de la chose politique peut leur faire prendre conscience que le Rwanda mérite mieux queKagame réfugiés d’être vendu aux capitalistes sauvages du monde ;
  3. La clique, à qui a été donnée la mission de rendre le Rwanda un « cluster » aux mains des entreprises des superpuissances, a aussi reçu des missions qui peuvent devenir impossibles à accomplir, ce qui occasionnerait son rejet. La mission d’exporter le « modèle rwandais »  dans la région peut être une mission impossible au CEO Paul Kagamé, même avec l’assurance de ses créateurs. L’effet « boomerang » de ses tentatives d’exporter le modèle à l’étranger serait catastrophiques que même ses créateurs le renieraient et le lâcheraient illico. Alors tous les frustrés et les laisser-pour compte (Rwandais ou autres Africains) prendraient leur revanche.

Donc, dans tous les cas de figure, l’éradication du « modèle rwandais » se fera dans la violence. C’est donc avec intérêt que l’on devrait suivre  la première tentative d’exportation du « modèle rwandais ». Ceci est en cours pour le Burundi et le Général Paul Kagamé en a reçu toutes la latitude de la part des superpuissances qui l’ont créé et mandaté. Reste à voir comment le « Général Impondérable » va lui aussi réadapter ses propres plans.

Emmanuel Neretse

08/08/2016

Source: Echo d’Afrique