Commune Giti : refuge des tutsis pendant le génocide…

A ce jour, la commune Giti était seulement connue pour avoir réussi à  maintenir l’unité au sein de sa population pendant le génocide  de 1994, avant que le FPR n’arrive sur les lieux. Tout le monde le sait, aucun Tutsi résidant dans cette commune n’a été tué en 1994.

La protection des tutsis, pendant cette période, ne s’est pas limitée exclusivement aux tutsis de cette commune, ceux des régions avoisinantes, étant parvenus à fuir et à mettre leur pied sur le sol de Giti espéraient eux aussi s’échapper aux tueurs. Or, ceci n’a pas été particulièrement souligné par les médias alors que beaucoup de familles ont été bien accueillies et protégées à Giti

Certaines familles parfois en compagnie de leur bétail venaient de la commune Rutare.  Dès qu’elles arrivaient à Mutambiko (tout près de la paroisse Rwamiko à Giti), elles pouvaient ainsi lâcher le souffle, soulagées. Elles partaient plus ou moins tranquillement chez des amis ou des connaissances pour y être hébergées.

Un dimanche à Mutambiko (la frontière avec la commune Rutare), un groupe de trois bonhommes (probablement venus de Kiyombe), voulut s’emparer des biens d’une famille qui fuyait les massacres de Rutare. Instantanément, grâce à l’initiative de quelques personnes notamment  Savio N., pour ne citer que lui, la bande de malfaiteurs fut dissuadée, sous une forte tension, d’abandonner leurs actes.  La bande, abasourdie,  poursuivit son chemin en direction de Kigali.

La commune Giti a par ailleurs accueilli, souvent à ses risques, les personnes venues d’autres communes voisines notamment Murambi, Muhura, Gikomero, Gikoro, etc.

Témoignage d’une rescapée tutsie : Mlle UWAMALIYA

Ce témoignage a été recueilli par le journaliste John Mugisha, publié le 28/02/2014, par le site internet « The East African », sous le titre en anglais « Was Giti a safe haven for Tutsi or not? ».

Mlle Uwamaliya, étudiante à l’université au Rwanda, serait originaire de l’ancienne commune Gikomero, séparée de la commune Giti par le lac Muhazi.  Ses propos retracent son parcours et celui de sa famille en 1994: « On nous disait que si nous arrivions à atteindre la rive opposée du lac (à Giti), nous serions sauvés, rien de mauvais ne nous arriverait ».

La famille de Mlle Uwamariya, poursuit le témoignage, et beaucoup de ses voisins ont donc marché toute la nuit, traversant les secteurs de Bumbogo, Gikomero et Rutunga avant d’atteindre le lac Muhazi, dans laquelle les milices Interahamwe noyaient de nombreux Tutsis. Par chance,  les tueurs ne les ont pas  vus. Vers l’aube, ils débarquèrent en toute sécurité de leur bateau sur le rivage Giti. Ils furent accueillis par les habitants de Giti et restèrent chez eux jusqu’à ce que le Front Patriotique Rwanda (FPR) Inkotanyi ait libéré le pays en Juillet de 1994 ».

Bref, le retour à ces témoignages,  21ans après le génocide,  est un appel à la conscience de chaque rwandais, pour ne pas perdre de vue que cette commune s’est montrée humaine,  ayant été la seule à protéger une partie de la population extrêmement menacée.  Certains décideurs politiques ou militaires du pouvoir rwandais actuel ont fait tout pour faire taire tout ce qui s’est passé à Giti.  Celle-ci ressemble actuellement à bien d’autres communes sans aucune marque de différence.

Les habitants de Giti, bouche-bée, ne savent pas à quel saint se vouer, certains ayant été injustement présentés aux fameuses juridictions gacaca, outrancièrement instrumentalisées. Ces dernières n’ont pas hésité à condamner les innocents de Giti, leur infligeant mordicus toutes les peines, allant du « simple » travail forcé dit d’intérêt général à la perpétuité..

Paradoxalement, les vrais bourreaux qui ont tué un grand nombre de  hutus de Giti continuent à se balader, certains occupant des postes de responsabilité dans le pays, sans être traduits à une quelconque forme de justice. Ironie de l’histoire!

Les habitants de l’ancienne commune Giti attendent désespérément qu’il y ait une justice, une reconnaissance  et une réhabilitation à la hauteur de tout ce qui s’est réellement passé à Giti.

Faustin Kabanza