CONFÉRENCE SUR LE RESPECT DE LA DIGNITÉ HUMAINE  AU RWANDA : LE CAS DES DISPARITIONS FORCÉES ET DE LEUR IMPACT SUR LA VIE DES VICTIMES ET DE LEURS PROCHES

LT. Col Cyiza Augustin et son épouse

15 ANS DE DISPARITION DU LT COL AUGUSTIN CYIZA : 23 AVRIL 2003 – 23 AVRIL 2018

A l’occasion de la commémoration de 15 ans de disparition forcée du Lieutenant Colonel Augustin CYIZA, une conférence organisée par l’Association internationale sans but lucratif, la Fondation CYIZA pour l’égalité, la paix et la justice au Rwanda , ayant pour nom d’usage FONDATION CYIZA, s’est tenue à Lille, le 14 avril 2018. Le thème de cette conférence était : «le respect de la dignité humaine au Rwanda : Le cas des disparitions forcées et de leur impact sur la vie des victimes et de leurs proches.»

Lieutenant Colonel Augustin CYIZA, ancien Vice-président de la Cour Suprême et Président de la Cour de Cassation du Rwanda, leader de la Société civile, fût enlevé à Kigali, RWANDA, par un commando de l’armée rwandaise sous le régime du FPR, le 23 avril 2003, torturé, puis assassiné. La conférence s’inscrivait dans le cadre de la réalisation des idéaux et des valeurs défendus par Augustin CYIZA.

Les participants ont pris le temps de passer en revue la personnalité et la vie d’Augustin CYIZA afin d’en tirer des valeurs à garder et à suivre pour l’intérêt de tous. Voici quelques unes de ces valeurs et qualités d’Augustin CYIZA :

  • Le franc-parler – personnalité libre
  • La Compassion
  • Plus négociateur que guerrier
  • Défenseur des droits de l’homme
  • Lutteur pour l’émancipation des sciences humaines et sociales
  • Homme public poursuivant les intérêts de tous
  • Vrai patriote
  • Homme d’action : Il a sauvé des vies notamment pendant le génocide
  • Combattant Contre les politiques de massacres et de terreur
  • Homme honnête et intègre
  • Intellectuel
  • Travailleur
  • Croyant Chrétien, converti.
  • Pour beaucoup plus de détails, on se référera à l’ouvrage collectif  intitulé : « Augustin CYIZA : Un homme libre au Rwanda » qui a été publié en 2004.

Au moment où les rwandais commémorent pour la 24ème  fois le génocide perpétré contre les Tutsi en 1994, la fondation CYIZA pense à tous ceux qui ne sont plus parmi nous, soit du fait qu’ils ont été assassinés, enlevés et portés disparus, soit qu’ils ont été victimes des tueries en masse, sans distinction des gouvernements au pouvoir ni de l’ethnie de la personne. Il s’agit notamment de  HABARUGIRA Damascène, RWIGARA Assinapol, NTIRUGIRIBAMBE Chrysostome, Député HITIMANA Léonard, Lt Col CYIZA Augustin, Emmanuel MUNYAKAZI et sa femme MUKAKALISA Marie Goretti enlevée torturée puis détenue illégalement avant d’être libérée dans des conditions de santé déplorables, André KAGWA Rwisereka, Col Patrick KAREGEYA, les trois Evêques et certains de leurs collaborateurs tués à Gakurazo, pour ne citer que quelques uns. Beaucoup d’entre eux ont été victimes de tortures de toutes sortes. Des menaces d’assassinat ont été manifestées pour d’autres dont le Général KAYUMBA Nyamwasa. Pour ce qui concerne les droits de l’homme, Il est urgent que le Rwanda dirigé par le Président Paul KAGAME cesse ces actes ignobles et respecte la dignité de la personne humaine.

A la même occasion, nous saluons le courage de tous les défenseurs des droits fondamentaux au Rwanda,  comme l’égalité, la paix et la justice, dont Diane RWIGARA, Victoire INGABIRE, Kizito MIHIGO, MUSHAYIDI Déogratias, Docteur NIYITEGEKA Théoneste et bien d’autres qui ont été victimes d’arrestations arbitraires ou qui croupissent injustement dans des maisons de détention officielles ou clandestines tel que le Vétérinaire Ambroise CYUBAHIRO et beaucoup d’autres qui n’ont pas pu avoir droit à un procès équitable et condamnés injustement à cause de leur ethnie, origine, capacités intellectuelles, niveau d’études ou de leurs biens.

Eh bien les batwa, les tutsi et les hutu ont tous droit à la commémoration des leurs qui ont été victimes d’injustices.

Les conséquences des disparitions forcées et d’autres violations des droits de l’homme sur la vie des victimes et de leurs proches sont multiples. La liberté d’opinion n’y a pas sa valeur. Les droits de l’homme y sont bafoués au point que la déclaration suivante ne fait pas honte au Président KAGAME ni à son petit groupe au pouvoir : «j’ai tué ton père, j’ai tué ta mère mais vote pour moi. » C’est le despotisme, l’autocratie déclarée.

Une des techniques utilisées par le pouvoir en place au Rwanda est celle des disparitions forcées afin de faire taire les innocents gênants. Que prévoit la législation Rwandaise à propos des disparitions forcées? Tant que les autorités rwandaises se rendent encore coupables de disparitions forcées, le Rwanda ne ratifiera pas la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées car c’est par cette ratification que le Rwanda permettra que toute personne victime d’une violation puisse adresser des plaintes au Comité des disparitions forcées. C’est pourquoi dans le droit interne on ne verra jamais les dispositions en rapport avec les disparitions forcées.

Par contre, le code civil prévoit des dispositions se rapportant aux cas de disparition en général que ce soit le décès certain, même si le corps n’a pas été vu (naufrage, attaques génocidaires, etc.) ou en cas d’une personne partie sans ne plus être revu. Dans ce dernier cas, le code en vigueur prévoit les délais plus réduits que ceux prévus par le code civil depuis 1988. En effet pour obtenir le jugement déclaratif d’absence, c’est deux ans d’absence lorsque la personne absente a laissé un administrateur de ses biens, dans le cas contraire, c’est 4 ans au lieu de 5 ans. Quant au jugement déclaratif de décès, il faut 5 ans au lieu de 7 ans.  En résumé, en droit rwandais, pour obtenir un jugement déclaratif de décès en cas de disparition d’une personne, il faut 7 ou 9 ans, suivant le cas, aux quelles il faut ajouter le temps de la procédure dont une année de publicité.

Au moment où nous rendons hommage au Lieutenant Colonel Augustin CYIZA, notre cher époux, père, frère et ami, nous estimons que la meilleure façon de le faire, est de poursuivre la réalisation de ses idéaux et ses œuvres qui s’inscrivent dans les différentes valeurs protégées par les instruments internationaux des droits de l’homme, dont le respect de la personne humaine, la liberté, la paix et la justice.

Nous soutenons la devise d’Augustin de transcender les barrières et de ressouder les fractures dans le but de contribuer à la défense des droits fondamentaux de l’homme (sans distinction), de la dignité de la personne humaine et de l’égalité des droits inaliénables qui constituent les principes énoncés dans la charte des nations Unies et repris dans les différents instruments internationaux et dans le droit interne rwandais.

Nous poursuivons la lutte contre l’impunité et soutenons la valorisation des talents de chacun refusant ainsi la médiocrité longtemps soutenue par les autorités  et certaines personnes au Rwanda.

Fait à Lille, le 23/04/2018

Pour la FONDATION CYIZA
Fondation pour l’égalité, la paix et la justice au Rwanda, asbl
AMANI Byusa