Goma est tombé presque sans combats

Débordant de rebelles en armes, un camion circule lentement dans le centre de Goma. « Mais dans quel pays sommes-nous? », s’interroge une jeune habitante de cette ville stratégique de l’Est de la République démocratique du Congo, (RDC) tombée mardi, quasiment sans combats, sous le contrôle des mutins du M23.

Ils sont arrivés mardi matin par la route de l’aéroport, sous une pluie battante qui tombait sur la ville située au bord du lac Kivu. A leur entrée dans Goma, quelques échanges de tirs d’armes légères ont été entendus. Puis les habitants ont vu les soldats de l’armée régulière disparaître des rues, tout comme les policiers.

Dès la mi-journée, plus eu aucune détonation ne retentit. Enfant et adultes qui s’étaient terrés à l’abri des maisons ressortent dans les rues, curieux, et la ville de plus de 300.000 habitants recommence à s’animer.
Un policier sort d’une villa, son arme au dessus de la tête. Les rebelles prennent son arme, retirent le chargeur, et le laissent repartir, désarmé, sans même l’interroger.

Au « rond-point des banques », le cadavre d’un soldat de l’armée régulière est l’objet de toutes les curiosités.
Ailleurs, la ville ne porte pas de traces de destructions dues à des bombardements ou à des déplacements d’engins blindés. Mais à l’hôpital Heal Africa, on annonce que 37 personnes blessées par balles ont été soignées: 12 enfants et 25 adultes dont trois femmes enceintes. Deux ont perdu leur bébé.

Comme sur un terrain d’opération, une douzaine de rebelles passent, en ligne. Disciplinés, concentrés, ils ne répondent pas aux questions et se positionnent dés que les éclaireurs marquent un arrêt, en tête de la colonne.

Ils sont vêtus de tenue de camouflage appelées « cache-cache » à Goma et chaussés de bottes en plastique noire comme les membre de l’AFDL (Alliance des forces démocratique pour la libération), la rébellion partie de l’est en 1996 qui avait porté au pouvoir Laurent Désiré Kabila (père de l’actuel président Joseph Kabila), avec le soutien du Rwanda.

« Mais dans quel pays sommes-nous? », demande Suzanne Bita, 28 ans, habitante de cette ville déjà prise par des rebelles en 1996 et en 1998. « Les gens qui viennent d’arriver à Goma viennent du Rwanda (…) il est temps que les dirigeants de notre pays nous disent la vérité sur la gestion de notre province. Nous n’allons pas accepter que chaque fois, les pays voisins viennent marcher sur notre démocratie », lance-t-elle.

Nous ne savons pas où aller

Un autre passant, Christophe Paluku, 30 ans, s’approche, amer: « Nous ne savons pas où aller sinon j’aurais quitter la ville avec toute ma famille. C’est inacceptable que ce genre d’histoire revienne au Nord-Kivu », dit-il.

La plupart des habitants semblent pourtant soulagés qu’il n’y ait pas eu de vrais combats en ville, même si l’un d’entre eux a vu sa maison détruite par un char qui a tourné trop court dans la rue. Les « éclats se terminent », commente un Congolais du quartier Office.

Mais seuls les « rwandophones » (Hutu et Tutsi congolais) disent leur satisfaction d’avoir vu partir une armée qui les rançonnait et des policiers qui exigeaient de l’argent à chaque contrôle. Les autres ne veulent rien dire.

Les soldats des Nations Unies, omniprésents jusqu’à la semaine dernière dans Goma, se font rares. Quelques voitures de liaison siglées UN passent sans que les rebelles ne s’en formalisent, ainsi que des camions d’approvisionnement en eau.
Les seuls blindés visibles sont ceux du bataillon indien de la Monusco (Mission des Nations unies pour la stabilisation en RDC) qui gardent la zone aéroportuaire dévolue aux Nations unies.

Le porte-parole militaire du mouvement du 23 mars (M23), le colonel Viannay Kazarama, a quitté les collines de Rutshuru pour venir à Goma. Et, à la radio locale, il a demandé à tous les militaires et policiers en poste dans la ville de se rendre. Il les a appelés à se présenter mercredi matin au stade de football de Goma, afin de s’y faire enregistrer et identifier.

AFP