Israël-Rwanda : les masques tombent

Par Charles Onana

En 1994, lorsque les populations rwandaises, fuyant l’avancée du FPR de Paul Kagame qui s’apprête à prendre le pouvoir à Kigali, se déversent massivement au Congo-Zaïre, toutes les organisations humanitaires ne parlent que de la crise humanitaire sans précédent et du génocide. Personne ne demande ce qui est à l’origine de cette crise ni pourquoi le Congo-Zaïre en devient la cible. Très vite, les autorités israéliennes décident de lancer une opération humanitaire à Goma sous le nom de code « Internes of hope » (Médecins de l’espoir). Cette mission passe inaperçue car tout le monde parle de l’Opération Turquoise.

Pourtant, elle n’est pas que médicale car les autorités de Tel-Aviv, ayant demandé et obtenu le survol du territoire congolais, déploient également des forces spéciales et des éléments chargés du renseignement à proximité des militaires de l’Opération Turquoise. En dehors de l’aspect humanitaire affiché, quelle est donc la part réservée au politico-militaire?

Pendant que le Congo-Zaïre peine à contenir ces réfugiés venus du Rwanda, des instructeurs israéliens arrivent à Kigali pour former les rebelles du FPR constituant la nouvelle armée rwandaise. Une véritable coopération s’instaure entre Kigali et Tel-Aviv. Parallèlement, il naît dans les milieux universitaires et associatifs un étrange discours évoquant une similitude entre la Shoah et le génocide des Tutsis au Rwanda. Une comparaison inadéquate qui commence à s’imposer comme une donnée irréfutable. Pour accorder un semblant de crédit à cette curieuse association entre deux événements historiques et politiques totalement distincts, la revue d’histoire de la Shoah du centre de documentation juive de Paris publie un livre intitulé : « Rwanda, 15 ans après. Penser et écrire l’histoire du génocide des Tutsi ». Des militants français pro-israéliens deviennent des défenseurs de la « cause tutsie ». La démarche intrigue mais le silence règne.

En 2007, un ancien directeur adjoint du Mossad n’hésite pas à considérer Paul Kagame comme le plus grand leader africain de tous les temps. Curieuse appréciation ! En France, en Belgique et au Canada, se forme un très influent réseau d’associations pro-israéliennes en soutien aux victimes du génocide Tutsi au Rwanda. Ce réseau se charge directement d’attaquer et de discréditer des écrivains ou des personnalités qui considèrent que la version officielle de la tragédie rwandaise est fausse. L’écrivain québécois, Robin Philpot est ciblé et violemment attaqué par le réseau canadien et l’écrivain Pierre Péan est, lui aussi, attaqué par le réseau français, principalement par l’ancien président de l’Union des Étudiants Juifs de France (UEJF). L’écrivain et enquêteur français est accusé de racisme et traîné devant les tribunaux par SOS-racisme. Malgré des pressions de toutes sortes, Péan gagne son procès. La vérité triomphe mais la calomnie reste.

En 2013, Kagame se rend à Jerusalem et y est accueilli comme un excellent ami d’Israel. Il déclare à Netanyahu qu’il se sent « chez lui ». En 2015, les dirigeants israéliens négocient avec lui la déportation de réfugiés Africains au Rwanda contre beaucoup de dollars. Des défenseurs des droits de l’homme israéliens s’indignent : »Comment est-ce qu’on peut faire du commerce d’êtres humains ? Comment les pays d’Afrique peuvent-ils accepter de faire du commerce avec des Africains ? ». Le scandale ayant éclaté sur la place publique, Kagame admet du bout des lèvres : « nous avons été approchés. Je sais qu’il y a eu des discussions entre le Rwanda et Israël, et qu’il y a un débat dans l’État hébreu autour de ces migrants africains ». En fait, l’accord entre Israël et le Rwanda a été signé pour l’envoi de migrants Africains à Kigali. Il sera révélé par deux ONG israéliennes ASSAF et Hotline for migrant Workers. Kigali devenait ainsi la « poubelle » israélienne des migrants africains indésirables. Le même Kagame, pour masquer la honte du serviteur de basses œuvres, va prétendre accueillir les migrants africains torturés en Libye. Comment le tortionnaire des Ougandais, des Rwandais et l’exterminateur des Congolais peut-il soudainement se transformer en défenseur des droits de l’Homme ? Il faut rappeler que la cour suprême israélienne avait refusé d’autoriser la déclassification des documents portant sur les ventes d’armes d’Israël au gouvernement rwandais qualifié par Kagame de « génocidaire ». Il n’a jamais osé parler aux Israéliens comme il parle aux dirigeants français. Il ne s’est jamais risqué non plus à faire la moindre allusion à ces rapports entre Israël et les «génocidaires». C’est dire l’exceptionnel courage du président de l’Union Africaine !

Au vu de ce qui précède, il est très étonnant de constater qu’un pays aussi endetté que le Rwanda, classé comme à risque par l’OCDE en 2017 et ne figurant pas parmi les dix pays les plus riches d’Afrique d’après la Banque Africaine de Développement en 2018, se voie en position d’entrée à l’OCDE avec l’aide d’amis israéliens, notamment l’ex procureur Yeruda Weinstein et l’ancien ambassadeur d’israël à l’ONU, Ron Prosor. Pas sûr que la RDCongo, pillée et saignée par le Rwanda, depuis plus d’une décennie, y fasse un jour son entrée, même avec l’aide de la communauté internationale ou de son nouveau « roi » Dan Getler.

Les liens très étroits entre les associations pro-israéliennes, Israël et Paul Kagame sont de moins en moins discrets. Il est donc logique que la France soutienne ex nihilo la candidature de la ministre rwandaise des Affaires Étrangères à la tête de la Francophonie, même si Paul Kagame est un francophobe viscérale, un anti-français notoire et qu’il a imposé l’anglais au détriment du français dès son arrivé au pouvoir. Ceux qui passent du temps à voir en Paul Kagame, la nouvelle référence de la gouvernance en Afrique alors qu’il traite ses compatriotes hutu comme des « Palestiniens » ou comme le régime raciste de Prétoria traitait les Noirs en Afrique du Sud et qu’il embastille ou élimine les Tutsi qui osent lui tenir tête, auront de réelle difficultés à faire croire aux Africains encore éveillés qu’il est le successeur de Nelson Mandela. Le Rwanda peut devenir membre de l’OCDE, une grande partie d’Africains avisés s’en moquent. Ils savent déjà qu’il est un serviteur de l’oncle SAM et des Israéliens en Afrique et qu’il contribue à la recolonisation masquée du continent noir.