Kagame à Nyabihu. L’empereur cynique devant une population lucide.

« He killed my ma, he killed my pa, but I will vote for him”[1]. Ceci était l’un des slogans de Charles Taylor lors des élections de 1997 qu’il a gagnées avec son parti « National Patriotic Party ». Taylor voulait rappeler aux Libériens qu’ils n’avaient pas d’autres choix que de voter pour lui et son parti patriotique. Sinon il pouvait les « écraser », comme il avait écrasé leurs parents.

Paul Kagame avec son Rwandan Patriotic Front (FPR) battent campagne au Rwanda dans le cadre des « élections » gagnées d’avance. Aussi bien pour Paul Kagame que Charles Taylor, avec leurs partis « Patriotiques, les victoires sont toujours « assurées et écrasantes ». Les deux hommes ont fait la même carrière (seigneur de guerre, criminel, président) et ont beaucoup de choses en commun : régner sur une population terrorisée, meurtres, persécutions et déportations dans leurs pays respectifs, mener la guerre et semer la mort dans les pays voisins.

Taylor est déjà condamné et Kagame fait toujours chanter à la population rwandaise le même slogan “He killed my ma, he killed my pa, but I will vote for him”. Ce n’est pas pour rien que Charles Taylor voulait purger sa peine au Rwanda, chez son semblable Kagame. N’est-ce pas une façon pour Taylor de rappeler à la CPI qu’il y a d’autres criminels, comme lui, mais qui sont encore en fonction et d’évoquer la situation « de deux poids deux mesures ».Taylor croupit en prison anglaise après la condamnation de la Cour Pénale Internationale à 50 ans de prison ferme. A qui le tour ?

Au moment où Taylor est condamné, au moment où le General Terminator Bosco Ntaganda, officier du Patriotic Front -Inkotanyi de Kagame, qui accomplissait ses nombreuses missions dans différents conflits armés au Rwanda et dans la région des grands lacs africains, surtout en RDC, est entre les mains de la même cour, et au moment où les peuples de la région des grands lacs ainsi que leurs amis demandent justice, l’empereur sanguinaire force la population déjà meurtrie et terrorisée à venir écouter ses discours cyniques, qui se résument comme ceci : « I killed your ma, I killed your pa, but you will vote for me ». C’est ce qu’il vient de répéter à la population de Nyabihu, à Rambura. Son message est, on ne peut plus, clair : soit vous votez pour moi, soit je vous écrase, comme j’ai écrasé les vôtres.

Ces rassemblements forcés rappellent les pratiques « Songamane » du FPR. Avec ces méthodes, les militaires du FPR rassemblaient plusieurs milliers de personnes sur un même endroit, ils les encerclaient ensuite, les laissaient passer plusieurs heures sans manger ni boire, les triaient selon les critères que le FPR doit un jour expliquer aux proches des victimes, et enfin les massacraient en tirant massivement des balles réelles avec fusils d’assaut et en lançant des grenades sur elles. Et pour Kagame et son Front patriotique, cela est ce dont les rwandais ont besoin. Vraiment ? Moi je ne suis pas d’accord avec vous.
Et bien, monsieur Kagame, nous sommes d’accord sur un autre point: ne pas voter pour vous, signifie la mort pour la population déjà soumise à une forme de terreur et à une nouvelle forme de colonisation que vous avez introduite dans la région des grands lacs.

Monsieur Kagame, encore une fois vous allez vous faire voter massivement par la population terrorisée. Je ne condamne pas cette population tellement meurtrie, que je connais bien et dont j’admire l’intelligence. Ce peuple est lucide est son analyse est impeccable: A quoi bon de ne pas voter pour vous, si cela ne change rien des résultats des élections « techniquées » d’avance? En plus le peuple sait que vos jours sont comptés et donc n’a aucun intérêt à s’attirer des représailles inutiles. Monsieur Kagame, bientôt vous ne serez plus là, mais le peuple, lui, sera toujours là. Alors, ce peuple vous laisse cracher vos balivernes et, à travers vos élections gagnées avant les urnes, elle vous caresse dans le sens de votre poil.

Monsieur Kagame, vous voulez continuer à faire régner la terreur au Rwanda et dans la région. Vous terrorisez la population afin de vous maintenir au pouvoir et ainsi échapper à la justice. Monsieur Kagame, comme monsieur Taylor, vous allez vaincre les élections sans péril, triompher sans gloire et régner sans légitimité. Oui, votre règne, comme celui de Taylor, est basé sur la terreur et le manque de toute légitimité. Mais cela ne peut plus durer.

Monsieur Kagame, vous laisser au pouvoir serait irresponsable. Vous laisser continuer à prendre ce peuple en otage serait soutenir votre terreur. Ne pas vous traduire en justice, sachant que vous avez causé la mort à plus de 6 millions d’africains, c’est humilier les peuples africains. Condamner votre égal Charles Taylor et vous laisser en liberté serait ni moins ni plus l’application de la petite phrase « deux poids, deux mesures » et serait humilier les peuples africains. Et les peuples africains de la région des grands lacs ne l’accepteront pas cela. Je suis d’accord que la justice de la CPI humilie les leaders africains.

Mais ces « leaders » africains-là s’humilient eux-mêmes davantage en se comportant comme de petits dieux chez eux. Et cette humiliation vous attend, monsieur Kagame. Si elle n’est pas faite par la CPI, elle sera faite par le peuple rwandais et par les peuples de la région.

Peuple rwandais et peuples de la région, vous allez bientôt prendre votre destin en main. Le combat qui s’annonce, ne se lit pas à travers les lunettes ethniques. C’est un combat pour la dignité, la liberté et l’égalité pour tous. Je le répète pour tous. C’est un combat contre toute forme de discrimination, en commençant par l’ethnisme. Rendez-vous dans les prochains jours.

Emmanuel Ndahayo
Allemagne
Le 31/07/2017