LE PROCÈS DE VICTOIRE INGABIRE CONTRE L’ETAT RWANDAIS CE 22/03/2017 DEVANT LA COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES

Les Forces Démocratiques Unifiées (FDU-INKINGI), Parti politique d’opposition au régime du Front Patriotique Rwandais (FPR) au pouvoir au Rwanda, portent à la connaissance du public que le procès de leur présidente, Mme Victoire INGABIRE, se tiendra contre l’Etat Rwandais, ce 22/03/2017 à 9h devant la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) sise à Arusha en Tanzanie.

 Les FDU-Inkingi espèrent que le report au 22/03 du procès initialement prévu le 16/03 ne servira pas de   prétexte par Kigali pour ne pas comparaître devant la Cour.

La présidente des FDU-Inkingi est arrivée au Rwanda le 16/01/2010 en provenance des Pays-Bas, son pays d’exil, pour faire enregistrer son parti. Elle voulait également se présenter à l’élection présidentielle de 2010. Elle fut incarcérée suite au discours prononcé au Mémorial du génocide à Gisozi. Dans ce discours elle avait osé, pour la première fois, réclamer une justice pour tous. En effet, les crimes contre l’humanité commis au Rwanda contre les Hutu, n’ont jamais fait l’objet de jugement. Or, pour les FDU-Inkingi et pour Mme Victoire INGABIRE, une justice pour tous est la seule garantie d’une paix durable et d’une véritable réconciliation.

Comme il s’est avéré, Mme Victoire INGABIRE fut condamnée longtemps avant même son jugement. Pour rappel, le Président KAGAME a déclaré, le 23/03/2010 : “ This woman will certainly be where she belongs (prison) ; now the outsiders who want so badly INGABIRE to be an opposition leader here or later be our President, well, they may wait for a while” = Cette femme sera certainement où elle doit être; maintenant, les étrangers qui veulent tellement INGABIRE comme leader de l’opposition ici ou par la suite comme notre Présidente, eh bien, ils peuvent attendre pendant un certain temps. » Le ton était solennellement donné.

Peu après, la condamnation d’avance de Mme Victoire INGABIRE fut reprise, publiquement, par Mme Louise MUSHIKIWABO Ministre des Affaires Etrangères et Mr Martin NGOGA Procureur Général du Rwanda. Mme Victoire INGABIRE fut donc condamnée le 30/10/2012 à 8 ans de prison par la Haute Cour de justice, et le 13/12/2013 à 15 ans de prison par la Cour Suprême du Rwanda.

Sa condamnation fut dénoncée par des organisations de droit de l’homme et le Parlement Européen:

AMNESTY INTERNATIONAL déclara : « The case of opposition party leader Victoire INGABIRE is the culmination of a flawed trial that included politically motivated charges = Le cas de la leader du parti d’opposition Victoire INGABIRE est l’aboutissement d’un procès inéquitable dont les accusations étaient fondées sur des motifs politiques ».

HUMAN RIGHTS WATCH « characterized the trial as unfair because the charges were political, the evidence was unreliable, INGABIRE was denied the presumption of innocence, and the judiciary was biased =  Human Rights Watch a caractérisé le procès d’inéquitable car les accusations étaient politiques, la preuve n’était pas fiable, Victoire INGABIRE s’est vue refuser la présomption d’innocence et le processus judiciaire était biaisé ».

Dans sa Résolution 2016/2910(RSP) du 06/10/2010, le PARLEMENT EUROPEEN : « Condamne fermement les procès politiquement motivés, la poursuite d’opposants politiques et l’issue décidée à l’avance du procès ; insiste sur le fait que les procès et les chefs d’accusation ne sauraient reposer sur des lois vagues et imprécises interprétées à mauvais escient, comme c’est le cas dans l’affaire Victoire INGABIRE »

Ayant épuisé toutes les voies de recours intérieures, Mme Victoire INGABIRE a finalement eu recours le 03/10/2014 à la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples sur base de l’article 34(6) de son Protocole. L’audience publique fut fixée 04/03/2016. Contre toute attente le 29/02/2016, le Rwanda fit une déclaration annonçant son retrait de la Commission pour lui permettre de revoir l’article 34 (6) du Protocole de la Cour, et demanda en même temps à la Cour de suspendre toutes les affaires impliquant le Rwanda devant elle, y compris l’affaire Victoire INGABIRE.

Prenant bonne note de cette déclaration, la Cour informe les parties de ce que l’audience publique se tiendrait comme prévue le vendredi 04/03/2016 à 9h00. Le Rwanda refusa à Mme Victoire INGABIRE de se rendre à Arusha, la privant ainsi du droit de se présenter devant ses juges. L’audience du 04/03/2016 eut donc lieu et la Cour entendit les avocats de la défense en l’absence de l’Etat Rwandais. La Cour avait, au cours de sa 41ème session ordinaire le 03/06/2016, rendu publique sa décision AFCHPR/Reg/APPL. 003/2014/036, de lever la suspension dans l’Affaire n°003/2014 INGABIRE Victoire contre l’Etat Rwandais, en statuant : « La Déclaration spéciale de retrait faite par le Rwanda pour examiner l’Article 34 (6) est soumise à la notification d’une durée de 12 mois pour devenir effective ; elle n’affectera pas le procès dans l’Affaire INGABIRE ni ceux des autres affaires qui sont pendantes devant la Cour ».

Déçu par cette décision de la Cour, le gouvernement rwandais change de stratégie. Il renonce à son intention de retrait de la Cour et fait plutôt élire, en juillet 2016 par l’AG de l’Union Africaine réunie à Kigali, un juge rwandais au sein de la CADHP, en la personne de Mme Marie-Thérèse MUKAMULISA anciennement juge à la Cour Suprême. Ainsi le Rwanda devient juge et partie au sein de la Cour Africaine des Droits de l’Homme.

Fait à Londres le 12 Mars 2017

Justin BAHUNGA,

Commissaire chargé des Relations extérieures aux FDU-Inkingi et Porte-parole des FDU-Inkingi.

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Communiqué Procès VIU version FR 15 mars