NON À L'HUMILIATION ET À L'APAISEMENT: POURQUOI LA FRANCE DOIT RÉSISTER ET REJETER LA DIPLOMATIE DANGEREUSE DE KAGAME?

En juin 1994, en qualité de Secrétaire Général du Front Patriotique Rwandais (FPR) j’ai conduit une délégation qui s’est entretenue avec le Ministre français des Affaires Etrangères, Alain Juppé. L’objectif de ma délégation était de dissuader le gouvernement français de lancer l’opération turquoise, l’opération de maintien de la paix qui a été toujours au coeur des relations acrimonieuses entre la France et le régime FPR de Paul Kagame depuis cette époque. Je suis rentré bredouille et déçu. Les enjeux étaient grands.

Avant cela, le FPR avait envoyé une délégation composée de leaders de haut niveau, Gerald Gahima et Claude Dusaidi, à New York et à Washington DC en vue de dissuader les Nations Unies et les Etats Unis de ne lancer auçune mission de maintien de la paix au Rwanda.

La dichotomie de la stratégie incessante du FPR envers la France et les Etats Unis dérive du raffermissement mutuel des deux: craintes et considérations. D’abord, parce que le FPR était intrinsèquement une organisation d’exilés Tutsis, il considérait la France comme une nation hostile à cause de ses liens avec le gouvernement rwandais sous le régime du Président Habyarimana, un Hutu. De fait, la percéption populaire au sein des membres du FPR était que les Français et même les Belges avant eux, étaient pro- Hutu. Les twists et tours de l’histoire sont tels que dans le Rwanda d’après 1994, l’opinion populaire au sein des communautés Hutu et Tutsi est que les Americains et Britanniques sont pro-Tutsi. En deuxième lieu, en donnant l’ordre d’abattre l’avion présidenteil qui transportait le Président Juvénal Habyarimana, Kagame a simultanément déraillé l’Accord de Paix d’Arusha, et déclenché le génocide et les massacres de 1994 dans les quels Tutsis et Hutus ont été victimes.
Pour le FPR, une opération de maintien de la paix dirigée par la France ou les Nations Unies était perçue comme une menace contre une victoire militaire totale. Lorsqu’Alain Juppé informa notre délégation que l’opération dirigée par la France avait pour objectif de sauver des Tutsis, Kagame m’intima l’ordre de répliquer que “tous les Tutsis qui devaient mourir étaient déjà morts et qu’il n’y en avait plus à sauver”. Ceci devint le thème standard de mobilisation et de réplique à Washington DC et New York.

Essentiellement, c’est cette insensibilité, cette froideur, et cette considération calçulée du général Paul Kagame ainsi que la soif du pouvoir à tout prix par son FPR, qui ont amené les relations Rwanda – France à ce récent et dangereux degré de crise. Quand le Juge d’instruction, Jean-Louis Bruguière, inçulpait le Président Paul Kagame et d’autres officiers militaires du FPR pour l’assassinat du Président Juvénal Habyarimana et de son homologue du Burundi, Cyprien Ntaryamira, le FPR criait au loup. Pour Kagame et le FPR, c’ était considéré comme une nouvelle preuve que la France était toujours anti- Tutsi, anti- FPR, et surtout anti – Kagame. L’ ordre de marche pour nous tous qui servaient le système était de s’attaquer partout à la France par tous les moyens possibles, y compris les mensonges, tromperies et dénis.

Les relations amères entre la France et le Rwanda peuvent-elles être réparées sous le régime de Paul Kagame? La réponse à cette question est absolument non.

Premièrement, le maintien au pouvoir de Kagame et du FPR survit et s’épanouit bien dans ce narratif qui perpétue des affabulations calçulées en vue d’entretenir un ressenti de çulpabilité pour la France et la Communauté internationale. Dans ce narratif, les français sont des mauvais gars qui ont épaulés d’autres brutes, les Hutus, pour commettre le génocide; et que la communauté internationale a échoué à prévenir et arrêter le génocide contre les Tutsis, qui ont été sauvés par Kagame et le FPR. Ce récit est sciemment muet sur le rôle de Kagame dans l’assassinat du President Habyarimana qui déclencha le génocide. Malgré des erreurs de la France et de la communauté internationale dans les politiques et actions envers le Rwanda à l’époque, ce récit du FPR dénie le fait que l’Opération Turquoise ait sauvé des Tutsis et des Hutus. Cette version truquée est pour Kagame et le FPR, une dépendance ainsi qu’une potion magique. C’est grâce à cela ques des aides sont déversées abondamment et que des questions en rapport avec les droits de l’homme, la démocratie et la responsabilité restent taboues. Sans cela, le régime cesserait d’exister.

Deuxièmement, Kagame et le FPR ont besoin de se mesurer à une grande puissance comme la France pour rehausser leur stature à l’intérieur et au niveau international. Au niveau intérieur, le FPR n’a jamais eu de légitimité au sein des populations Hutu. Kagame prétend être le seul héro et sauveur des Tutsis. Actuellement ce qui était perçue comme une communauté Tutsi homogène, regroupée ensemble par la peur d’être exterminée, a volé en éclats sous la main de fer de Kagame. Il a besoin de la France comme principal ennemi contre lequel il espère mobiliser les Tutsis craintifs et les Hutus marginalisés.
Troisièmement, il y a aussi une dimension opportuniste de Kagame dans cette approche anti – France. Depuis 1994, le déclin de l’influence française au Rwanda s’est accompagné d’une montée disproportionée de l’influence anglo-saxonne dans cette petite République. Le triangle d’amour Anglo-Américain- Rwanda pourrait être compris comme une relation altruiste, basé sur la générosité bénévole des géants envers le Rwanda, une petite victime. Londres et Washington ne le voient pas de cet oeil. Le Rwanda se trouve à la croisée de la région des grands lacs et de la corne de l’Afrique, régions dans les quelles les Etats Unis et le Royaume Uni voient des intérêts géo-stratégiques, économiques et de séçurité.
Quand Kagame s’affiche comme anti-France, et en même temps s’implique dans des missions manifestes et indirectes, il y a des vivats et des meneurs anglo-américains derrière. Le fait que Bill Clinton et Tony Blair sont les principaux promoteurs de Kagame n’est pas un simple accident.

Et dernièrement et pas le moindre, en antagonisant et en humiliant la France, Kagame se cherche un statut de nationaliste pan-africaniste debout devant une puissance occidentale. C’est une démarche absurde, parce que c’est un tyran sectaire qui domine une nation par des moyens répressifs. Il destabilise la région à travers des conflits directs ou en se cachant derrière des rébellions, partiçulièrement dans la République Démocratique du Congo, et il est profondément dépendant de l’aide occidentale.

En fâce d’un passé difficile au Rwanda, et avec un Kagame constamment provocateur, la France a essayé toutes sortes de soins palliatifs contre une maladie chronique bien ancrée. Nicolas Sarkozy, un Président contrit, a rendu visite au Rwanda en 2010. Kagame a été bienvenu en France. Qu’est ce que la France a reçu en retour? Kagame et le FPR ont interdit le français, en condamnant plusieurs générations de Rwandais à l’illetrisme, en enseignant à toute une nouvelle génération la haine contre les français; il a expulsé un Ambassadeur de France, et a condamné l’actuel à l’isolement; a acçusé la France d’être complice du crime de génocide; a fermé le centre çulturel français à Kigali; et a délibérément cherché à diviser le peuple français et leur gouvernment en jonglant avec la çulpabilité, les dénis et les tromperies.

Le Gouvernement et le peuple français doivent résister et rejeter ces attaques inlassables contre leur dignité. Il n’y aura auçun apaisement suffisant pour Kagame enfin qu’il change d’attitude, de politique et d’action envers la France. Des relations respectueuses,véridiques et mutuellement bénefiques entre la France et le Rwanda seront seulement possibles après Kagame et le FPR.

Raison importante pour la France de mener à terme les conclusions de l’enquête sur l’assassinat des présidents Juvénal Habyarimana du Rwanda et Cyprien Ntaryamira du Burundi. Kagame sait pertinemment que cette enquête constitue son talon d’Achille. Il s’est battu et continuera à se battre contre, avec tous les moyens dont il dispose. La France paie le prix d’avoir touché le nerf sensible de Kagame.

Décidément, les intérêts français à moyen et long termes seront mieux défendus par une politique proactive soutenant des forces démocratiques nationales cherchant à promouvoir un Rwanda juste, libre, pacifique, démocratique et prospère.

Dr. Theogene Rudasingwa
Ancien Secrétaire Général du FPR, Ambassadeur du Rwanda aux Etats Unis, et Directeur de Cabinet du Président Paul Kagame.
Washington DC
USA
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