Oslo:L'Union européenne prix Nobel de la paix : ce que veut dire ce choix

EUROPE – Alors qu’elle traverse une crise de confiance des plus sérieuses, l’Europe vient de recevoir une distinction inattendue, vendredi 12 octobre, avec le prix Nobel de la paix qui lui a été décerné à Oslo (Norvège). Quel est le sens de cette récompense, cinquante-cinq ans après le Traité de Rome qui a posé les bases de l’Union européenne ?

La raison officielle : paix, démocratie et droits de l’homme

C’est la raison officielle pour laquelle le comité Nobel a décerné son prix à l’UE. « L’Union et ses héritiers ont, pendant six décennies, contribué à promouvoir la paix et la réconciliation, la démocratie et les droits de l’homme en Europe », écrit le comité. « Pendant soixante-dix ans, l’Allemagne et la France se sont livrées trois guerres. Aujourd’hui, une guerre entre l’Allemagne et la France est inimaginable. Cela montre comment, en établissant une confiance réciproque, des ennemis historiques peuvent devenir des partenaires », poursuit le texte.

Dans cet esprit, le comité Nobel souligne que les adhésions, dans les années 1980, de la Grèce, de l’Espagne et du Portugal, ont été conditionnées par une évolution démocratique dans ces pays. Et que, depuis la chute du mur de Berlin, la division Est-Ouest a trouvé son épilogue, la démocratie a été renforcée, et les conflits ethniques réglés.

« Ce prix montre que les valeurs de solidarité, de confiance réciproque et autres peuvent amener un monde meilleur », a réagi l’ancien président de la Commission européenne Jacques Delors. « Il est juste que l’effort extraordinaire accompli par les Européens et leurs dirigeants pour établir une paix définitive sur leur continent, historiquement ravagé par les guerres, soit reconnu et honoré », a pour sa part déclaré l’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing.

« C’est un prix non seulement pour le projet et les institutions représentant un intérêt commun, mais aussi pour les 500 millions de citoyens qui vivent dans notre Union », se sont félicités Herman Van Rompuy, président du Conseil de l’Union européenne et José Manuel Barroso, président de la Commission européenne dans un communiqué commun.

La raison officieuse : un encouragement pour sortir de la crise

« L’UE connaît actuellement de graves difficultés économiques et des troubles sociaux considérables », a reconnu le président du comité, Thorbjorn Jagland. Même si le jury du Nobel ne l’évoque pas ainsi, ce prix sonne comme un encouragement pour l’Europe à surmonter les crises, économique et institutionnelle, qui la minent.

Le paradoxe d’avoir attribué un prix Nobel à une institution en crise n’a pas manqué d’être relevé par les eurosceptiques. L’eurodéputé britannique Nigel Farage estime par exemple que « l’UE a créé de la pauvreté et du chômage pour des millions de gens », tandis que Marine Le Pen la considère comme « le premier facteur de désunion et de montée des tensions entre les nations européennes ».

Face aux risques d’éclatement, ce prix incitera-t-il les dirigeants européens à envisager un saut fédéraliste ? Pour Maurice Faure, dernier signataire français vivant du traité de Rome en 1957 – il était alors secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères – l’Union européenne doit faire « un pas vers la fédération, indispensable à la survie de la construction européenne. »

François Hollande souligne quant à lui que ce Nobel confère à l’Europe « une responsabilité encore plus grande, celle de la préservation de son unité, de la capacité à promouvoir la croissance et l’emploi, et de la solidarité dont elle doit faire preuve à l’égard de ses membres ».

FTVi