POURQUOI LE RWANDA A FRÔLÉ LA CATASTROPHE ÉNERGÉTIQUE EN 2004?

Par Victor Manege Gakoko

La réponse est simple. Le gouvernement du FPR n’a pas voulu suivre et mettre en œuvre la stratégie énergétique que nous avions proposée en 1993 à la Banque Mondiale et qui l’avait approuvée.

Retour sur les évènements. Au lendemain de la prise du pouvoir du FPR en juillet 1994, certains cadres plus influents du FPR ont ciblé les sociétés d’état plus juteuses et faciles à « écrémer ». C’est le cas notamment de Rwandatel et d’Electrogaz à l’époque.

Alors qu’en 1995, j’étais expert électricien et coordonnateur par intérim du Projet de Réhabilitation du Secteur de l’Énergie financé par la Banque Mondiale, un certain Sam Nkusi, directeur de Rwandatel, m’a approché me demandant de lui servir d’intermédiaire auprès de la Banque Mondiale. Plus précisément, Sam Nkusi voulait que la Banque Mondiale le soutienne pour qu’il cumule les fonctions à la fois de directeur d’Electrogaz et de Rwandatel. Je savais que la Banque Mondiale n’allait pas accepter et ne s’immisce jamais dans les nominations internes comme telles mais j’ai tout de même porté connaissance à qui de droit le souhait de Sam Nkusi. Dois-je préciser que Sam Nkusi était aussi chef du conseil d’administration d’Elegrogaz.

Pour barrer la route à Sam Nkusi et le décourager de son ambition démesurée, la Banque Mondiale demanda subtilement au gouvernement rwandais de procéder aux audits comptables de toutes les sociétés para-étatiques y compris Rwandatel (et c’est précisément Rwandatel qu’on visait) ainsi que tous les projets financés par la Banque Mondiale. Mordicus Sam Nkusi s’objecta à cette proposition de la Banque Mondiale et s’insurgea publiquement contre cette institution.

Après mon départ du projet « énergie », Sam Nkusi changea de stratégie pour la conquête d’Electrogaz en renonçant d’être directeur de Rwandatel. Il y parvint sans difficulté car le gouvernement rwandais exhausa ses vœux. Après avoir pris connaissance des difficultés qu’Electrogaz commençait à avoir dans la production, le « machiavel » Sam Nkusi y trouva une opportunité pour se faire de l’argent. Il retarda express tous les projets qui devaient pallier au déficit énergétique pourtant prévisible.

Le pire arriva, la demande d’électricité (à cause surtout du boum immobilier) dépassa trois fois l’offre). Le sauveur Sam Nkusi proposa au gouvernement d’acheter en urgence des groupes électrogènes pour secourir la ville de Kigali. Le gouvernement lui donna le feu vert et il se chargea de la transaction. Il paraît que Sam Nkusi a commandé six groupes électrogènes (d’occasion) devant totaliser 9MW. Installés au poste de transformation de Jabana et mis en service, cette centrale thermique n’a jamais dépassé 6MW. Et après une année, seulement trois groupes sur six étaient restés en service. Entre temps, Sam Nkusi occupait le fauteuil de secrétaire d’état à l’énergie et aux communications. Ce scandale de la centrale thermique du poste de Jabana devenant criant et public, le tout-puissant Sam Nkusi fut obligé de démissionner pour essayer d’étouffer l’affaire.

Ce retard accusé dans l’accroissement de la capacité de production de l’énergie électrique au Rwanda va continuer à se répercuter sur les années à venir qu’on le veuille ou pas.

Les solutions idoines sont l’exploitation au maximum des sites frontaliers et pour le long terme réaliser l’interconnection avec le réseau ugandais. Cela suppose de revenir à la casse départ en diplomatie et au préalable privilégier la politique de bon voisinage.

NB : Informations collectées auprès des sources dignes de foi.