Mr Octavien Ngenzi

Projection de « Tuez-les tous » , Audition de M. Raphaël GLUCKSMANN, un des réalisateurs de « Tuez-les tous », Audition de Mme Odette KAMPIRE, épouse de Jean MPAMBARA bourgmestre de Rukara, Audition de M. Guillaume ANCEL, ex militaire qui a participé à l’Opération Turquoise

Visionnage du film « Tuez-les tous » réalisé par Raphaël GLUCKSMANN qui a été interrogé par la suite.

Il explique que dans l’histoire de l’humanité, il y a trois génocides reconnus dont deux qui ne font aucun débat.

Le génocide des Tutsi ressemble à celui des Juifs. Il y a eu une planification. Il a été planifié, avec une envie d’exterminer. Ce n’est pas une guerre. Très souvent on le confond avec une guerre mais là l’objectif est d’exterminer jusqu’au dernier. Il a découvert le génocide des tutsi à 15ans et cela aurait changé sa vie. Il est content que la France fasse ce genre de procès. Il explique qu’il y avait des listes, les escadrons de la mort pour embrigader des tutsi. Il annonce qu’Alison Des Forges avait découvert des papiers de propagandes où il était écrit que les hutu étaient victimes des tutsi pour mettre dans la population la terreur.

Il est à préciser que souvent les témoins à chargent parlent de listes et de papiers mais personne ne vient avec ou ne donne des sources de ces documents.

Echanges avec la cour

La présidente lui demande d’expliquer pourquoi il dit qu’en France, ce génocide intéresse peu. Il explique qu’on parle de massacres interéthniques, de haine tribal mais que ce n’est pas ça car le Rwanda était un pays centralisé de type européen donc ils savaient très bien ce qu’ils faisaient.  Il faut une organisation extrêmement rationnelle d’un Etat pour que ça marche. C’était entretenu par une propagande. Ce n’est pas une explosion spontanée de haine. En France c’est toujours un débat car il y a des gens qui ont pris parti mais dire qu’il y a un double génocide au Rwanda c’est comme dire que l’armée rouge a aussi commis un génocide. Il y a eu les crimes de guerre par le FPR au Congo et au Rwanda oui mais cela ne remet pas en cause le génocide.

Le génocide est rendu possible par 40 ans de propagande. On déshumanise l’autre, on l’appelle cafard (il faut rappeler que l’appellation de cafard=Inyenzi était un surnom que les rebelles du FPR s’étaient donné eux même). Il explique que les tueurs ont des listes des tutsi pour ne pas tuer par erreur des hutu. A la demande de Madame la présidente il confirme que le sociologue qui a dit qu’il n y a pas de génocide sans négationnisme avait raison. Il dit oui, qu’on le voit avec la réaction des nazis et la destruction des chambres à gaz après la défaite.

Sur la réalisation du film, il explique qu’avec trois amis et inspirés par un article de Saint Exupéry, ils ont écrit le film avec un scénario basé sur des recherches et lectures avec des documents de 1994. Ils ont fait une enquête au Rwanda pendant 6 mois pendant lesquels ils ont interrogés des tueurs, des témoins et des rescapés. Mais les soldats français qui sont accusés dans ce film n’ont pas voulu participer. C’est France 3 qui a diffusé le film.

Pour lui, les époques changent. Il explique qu’aujourd’hui c’est plus simple de faire savoir la vérité sur l’implication de la France car le Président Emmanuel Macron était jeune lors de la tragédie et il permettra facilement l’accès à la vérité. Contrairement à ses prédécesseurs comme François Mitterrand. Il dit que la France serait le seul pays qui ne s’est pas excusé de sa passivité face au génocide.

Sur la mise en cause de la véracité des témoignages, il explique que le Rwanda est un pays qui ne met pas du tout en avant les rescapés, que leur parole est au contraire muselée. On leur dirait selon lui que « votre tristesse est gênante, nous avons un pays propre, vous ne pouvez pas dire que vos voisins hutus sont des tueurs ». Son lui les pseudos chercheurs qui viennent dire que les témoins mentent c’est faux. Ces rescapés n’ont pas la parole au Rwanda ils ne l’ont pas ici non plus. (Il ignore peut être que c’est sur leurs accusations infondées que les deux accusés ont été condamnés à perpétuité il y a deux ans).

Son film a été réalisé sans crainte mais il rajoute effectivement que c’était une enquête sur les rescapés et c’est simple. En revanche si on devait enquêter sur le FPR c’est autre chose…

Il date le début du génocide en 1993 avec la naissance du hutu power. Avec BAGOSORA, Agathe HABYARIMANA et le projet génocidaire.

Sur le plan concerté

Il faut savoir que dans la loi française, la validité du génocide est conditionnée par la présence d’un plan concerté. Or dans tous les dossiers des rwandais accusés de génocide, le plan concerté n’a jamais été prouvé, même pour BAGOSORA qui est considéré par certains comme le cerveau du génocide. C’est donc un point qui pose problème car les accusateurs doivent le faire apparaitre à tout prix comme l’indique l’ancien procureur dans le procès en première instance Philippe COUROYE dans sa conférence « le procès des génocidaires rwandais ». Ils vont alors chercher des éléments de ce plan qui n’existe pas. Sinon leurs thèses tombent comme un château de cartes.

Maitre LAVAL avocat du CPCR après avoir rendu hommage à un membre de la famille du témoin,  lui explique l’importance de ce plan concerté et lui demande de le caractériser. Il répond que non seulement il y avait un plan concerté mais il a été exactement exécuté comme il avait été préparé. Il explique que les 20 miliciens qu’il a pu interroger disaient « on nous disait d’aller à tel barrage à tel heure. Donc il y avait un plan ». Ces caractéristiques décrites n’étaient évidemment pas des preuves convaincantes pour prouver un plan concerté.

Il explique tout de même que parfois l’autorité sur place refusait de commettre le génocide par exemple le Préfet de Butare qui a été tué. Il explique qu’il existe des listes, que chacun connaissait son rôle donc c’est ce serait ça le plan auquel même les bourgmestres adhéraient.

Ce témoin a fait une comparaison étrange pour justifier de la très bonne organisation du Rwanda qui prouve que le génocide était bien organisé. Il explique que quand tu vas au Rwanda, il y a tellement de policiers partout que tu peux laisser ta caméra dans la rue et revenir l’y retrouver le lendemain. Sauf que ça c’est le Rwanda d’aujourd’hui avec le FPR et que le génocide s’est passé il y a 24 ans. Et que depuis la politique a changé. Donc justifier l’organisation du génocide par les caractéristiques du Rwanda vu d’aujourd’hui, c’est vraiment une mauvaise comparaison.

L’avocate de la LICRA revient sur la théorie de la propagande en miroir traitée par Alison Des Forges, elle lui demande si les pseudos chercheurs dont il parlait ne seraient pas justement dans la continuation du génocide. Il explique qu’il faut être dérangé pour parler de double génocide. Qu’il faudrait se demander si on peut parler ainsi du génocide des juifs sans avoir un gout de sang dans la bouche.

Echanges avec l’avocat Général dans l’objectif de minimiser le rôle de la France qui est montré du doigt

Vous avez évoqué l’ambiguïté de la France, est ce qu’elle n’aurait pas été aussi victime de cette propagande ? Il répond qu’en effet les français ont été embrigadés. Je ne dis pas que la France a voulu y participer. Je pense que la France a voulu coute que coute arrêter le FPR  et la propagande a fonctionné auprès de nos dirigeants naïfs mais finalement racistes de se dire que ce gouvernement intérimaire n’était pas assez intelligent pour mettre en place le génocide. Ils les ont roulé dans la farine mais je ne dirai pas que c’est la France qui a tout organisé et que les rwandais étaient utilisés. Ils ont cru à la propagande des hutu.

L’avocat général continue dans la thèse que la France a été prise au piège de ses intérêts politiques et demande si finalement le seul reproche qu’on peut lui faire n’est pas qu’elle ne s’est toujours pas excusée. Le témoin répond que la France a versé des salaires aux tueurs avec nos impôts, donné des armes aux rwandais au Congo, et laissé les massacres se faire par les miliciens.

Echanges avec la Défense

Maitre BOURGEOT commence par expliquer et préciser au témoin que le sujet qu’il a développé pendant tout son témoignage qui est le double génocide et le négationnisme n’est pas du tout l’objet du procès et que personne ne niait l’existence du génocide des tutsi.

Elle lui demande s’il connait les relations qu’avait Alison Des Forges avec le FPR à la fin de ses travaux. Il explique qu’effectivement les relations étaient mauvaises car elle souhaitait enquêter également sur les exactions du FPR pendant et après le génocide puis au Congo. Mais qu’elle considérait à part le génocide des tutsi.  Elle lui explique donc que ce n’est pas parce qu’on s’intéresse aux exactions du FPR qu’on nie de facto le génocide des tutsi. On peut faire les deux sans pour autant minimiser le génocide des tutsi.

Lorsqu’on lui demande s’il met le professeur GUICHAOUA dans les pseudos chercheurs qu’il a évoqué, alors que ce dernier nous avait donné des exemples précis de faux témoignages notamment une réunion de futurs témoins à charge pour s’accorder sur les faux témoignages à donner, ou le faux dossier d’extradition mis sur pied par le parquet rwandais en un temps record  (voir compte rendu du 17 avril).

Il répond que non, que peut être que GUICHAOUA a des exemples précis qu’il ne connait pas mais qu’en général les rescapés ne sont pas mis en avant.

Il explique que lui, il n’avait pas eu de souci dans ses recueils de témoignages mais c’est peut-être parce qu’il en faisait dans un sens et reconnait que peut être si on veut enquêter dans l’autre sens c’est autre chose.

Le faux témoin du film « tuez-les tous », l’exemple parfait

L’avocate lui fait savoir que Janvier AFRICA, un prisonnier qui est témoin dans son film et qui atteste dans plusieurs procès à ARUSHA que l’ « Escadron de la Mort » existait était en réalité un membre du FPR qui se fait passer pour un ancien hutu et la cerise sur le gâteau c’est que ce dernier serait revenu sur ses faux témoignages.

On lui dit qu’il a tort quand il explique que le FPR ne veut plus qu’on parle de génocide. Et que même si son film est sorti en 2004, contrairement à lui, GUICHAOUA, a été invité plusieurs fois à témoigner à ARUSHA pour son expertise.

Témoignage d’Odette KAMPILE

Le témoin se présente et explique qu’elle va parler de son parcours puis dire ce qu’elle sait sur NGENZI.

Sur son parcours

Elle était à Kigali le 6 avril et le 7, elle a appris en même temps que son mari qui était le bourgmestre de RUKARA que l’avion du président HABYARIMANA avait été descendu. Les combats provoqués par le FPR ont continué à provoquer les afflux de réfugiés qui venaient du nord, ce qui avait déjà commencé depuis les attaques d’octobre 1990. Arrivé au 10 avril, les choses s’aggravaient son mari l’a amené avec ses enfants chez sa belle-sœur à KAYONZA où ils sont restés deux jours et le 12 au soir, il les a déposés chez NGENZI puis il est reparti. Le lendemain matin, son mari a croisé à un carrefour de KAYONZA des militaires qui parlaient d’attaquer l’église de KABARONDO où des gens du FPR s’étaient infiltrés et au domicile de NGENZI car ils le soupçonnaient d’avoir caché des tutsi.

Il leur a demandé s’ils peuvent le laisser venir récupérer sa famille qui s’y cachait, ils ne lui ont pas répondu et il s’est dépêché d’aller chez NGENZI, lui informer de l’attaque qui se préparait, il a pris sa famille et ils sont repartis chez un ancien bourgmestre de KAYONZA. Le FPR avançait de plus en plus et ils ont fui vers la Tanzanie en passant par RUSUMO. Ils ont traversé la frontière le 28 au soir et ils sont arrivés à BENACO. Ils y ont séjourné deux ans avant d’être rapatriés de force au Rwanda avec ses enfants. Elle a été emprisonnée 4 ans avant d’être acquittée. C’est d’ailleurs dans ces prisons qu’elle a entendu parler de NGENZI, les prisonniers disaint qu’il était innocent et lui reprochaient rien. Elle a rendu visite à son mari qui était enfermé à ARUSHA, et une fois rentrée, ils ont voulu la remettre en prison et c’est de cette façon qu’elle a fui avec ses enfants. Elle est partie au KENYA puis à Mayotte puis elle est venue en France à Rouen.

Sur la personnalité de NGENZI

Il a épousé une ancienne camarade de classe, Bellancila. C’est un homme bien, qui accueillait tout le monde, toutes ethnies confondues. Elle l’a vu blessé. Il avait échappé à une tentative d’assassinat par des miliciens qui disaient que c’était un complice du FPR. Même dans le camp des réfugiés, il était serviable, à Mayotte il avait gardé le même tempérament de bienveillance. La nuit du 12 au 13, quand elle était chez lui, elle l’a vu inquiet et malheureux. Il était paniqué et fatigué. On voyait sur son visage qu’il était dépassé par les évènements.

« Lorsque j’ai su qu’on l’a accusé de génocide j’étais bouleversée mais ça ne m’a pas tant étonné que ça car même mon mari il avait été accusé à tort ».

Sur la réaction de son mari lorsqu’il a appris la mort du président HABYARIMANA, il était paniqué car c’était catastrophique. La situation deviendrait ingérable. Il part faire le tour dans la commune de KAYONZA mais le 10 il amène sa famille chez sa sœur à KAYONZA. Elle explique que si devant le juge ils avaient dit au juge qu’ils sont allés chez NGENZI le 10, c’était la date de départ de chez eux mais ils se sont souvenus après qu’ils ont d’abord séjourné deux jours chez sa belle-sœur avant d’arriver chez NGENZI. Qu’il n y a aucune raison d’avoir omis cela exprès. La présidente rappelle en effet que cela n’a aucune incidence dans le dossier mais qu’il est important que les informations soient précises.

A la demande de madame la présidente, elle précise qu’elle n’a vu personne chez NGENZI quand elle y était, en revanche dans la matinée, elle a entendu des coups de feu mais elle ne sait pas si ce sont des grenades ou des fusils et tout le monde a paniqué. Elle précise également qu’elle n’a vu personne d’autre qui s’était réfugié chez Ngenzi, ce que Ngenzi lui-même va confirmer que le 13 au matin, il n’y avait pas encore de réfugiés tutsi chez lui car ils sont venues évidement le soir en sortant de l’église après l’attaque de l’église. Il est donc normal qu’elle n’ait pas vu de réfugiés. La présidente précise que le mari du témoin avait dit qu’il y avait des réfugiés, Ngenzi précise qu’il le dit parce qu’ils en ont parlé par la suite mais il les a pas vu lui-même car ces réfugiés sont arrivés après l’attaque de l’église et non pas avant.

NGENZI évoque deux employés de maisons qui étaient sur place, madame la présidente lui dit qu’il a caché cette information qui montre que le bourgmestre avait beaucoup d’avantages jusqu’à avoir des employés de maison. Ngenzi explique qu’au Rwanda tout le monde avait des gens pour l’aider et que ce ne sont pas des avantages du bourgmestre car ce ne sont pas des agents de l’état payés avec le budget de la commune mais sur les charges personnels. En effet  cela fait également parti des différences de culture, en France on pense que quelqu’un qui a une aide-ménagère est forcément riche où qu’il a des avantages alors qu’au Rwanda c’est courant d’autant plus que cela ne coute pas plus d’1 euro si on converti son salaire en Euro.

Pour revenir sur le témoignage d’Odette KAMPILE, elle évoque l’emprisonnement de son mari qui a duré 6 ans avant d’être acquitté à ARUSHA.

Questionnée sur l’organisation du camp de réfugiés de BENACO, elle explique qu’au début tout le monde était mélangé mais le HCR a organisé le camp en communes pour faciliter la gestion.

L’avocat des parties civiles GISAGARA lui demande si la seule raison qui lui fait penser que NGENZI était innocent était le fait qu’elle le connaissait avant et que son mari avait subi la même accusation alors qu’il était innocent ?

Elle lui dit que s’il a bien suivi son explication, elle a précisé qu’elle a été emprisonnée pendant 4 ans et qu’elle a suivi les GACACA qui se passaient en prison ou les coupables et accusés discutaient sur l’implication de chacun et qu’ils disaient que NGENZI était innocent. Ce ne sont pas des paroles en l’air.

L’avocat insiste pour que le témoin dise qu’elle est allée visiter son mari plusieurs fois à ARUSHA en venant du RWANDA, elle lui répondit qu’elle n’a été le voir qu’une seule fois en partant du RWANDA et que d’ailleurs c’est au retour qu’ils ont voulu l’emprisonner de nouveau, elle a fui après avoir été avertie par un de ses camarades avec qui elle avait été acquittée qui venait de recevoir chez lui des agents qui lui ont présenté un document l’accusant de génocide. Deux de ses anciens codétenus ont été emprisonnés de nouveaux et trois autres ont été tués !

L’avocat lui fait remarquer qu’elle a été acquittée au RWANDA que cela montre bien qu’il y a des gens au Rwanda qui témoignent à décharge et qui n’ont pas de problème par la suite.

Réponse : « A quel prix ?» Savez-vous ce qu’ils sont devenus ? Ils ont tous eu des problèmes. Ils ont dû fuir le pays. Il est arrivé la même chose à ceux qi ont témoigné pour son mari à ARUSHA, certains ont été tués et d’autres ont dû fuir le pays !!! Elle donne des noms et détails sur ce qu’ils sont devenus.

Aucune question de la partie civile après ces réponses qui ont laissé tout le monde bouche bée. Car elles confirmaient l’impossibilité de trouver des témoins à décharge, étant donné que les gens risquent leur vie en témoignant à décharge pour une personne poursuivie par le parquet de KIGALI. Rien de mieux qu’une personne qui l’a vécu pour l’expliquer.

Sur les réactions de monsieur NGENZI elle explique qu’elle n’a pas beaucoup échangé avec lui mais qu’elle l’a trouvé préoccupé par ce qui arrivait à sa population. Il traitait tout le monde de la même façon hutu et tutsi étaient bien accueillis chez lui.

Concernant les accusations qu’elle a subi elle, elle dit qu’on lui reprochait de ne pas aimer les tutsi mais qu’elle a démontré le contraire.

On lui a demandé si elle avait entendu parler de BARAHIRA en prison, elle a répondu non. Elle a confirmé ce qu’elle avait dit sur NGENZI lors de son audition et sa personnalité bienveillante.

Audition de Guillaume ANCEL, Cadre dirigeant dans un groupe de protection social

Il a fait partie de l’Opération Turquoise à partir de fin juin 1994. Il explique qu’il était surpris de la présentation officielle de l’Opération Turquoise qui était différente de ce qu’il a lui vécu sur le terrain. Il aurait voulu donner son témoignage auprès de la mission parlementaire  mais cela n’a pas été accepté. Il a démissionné de l’armée en 2005 et là il a souhaité de nouveau témoigner. Il explique que lorsque sa fille publie un livre, il y raconte un épisode de ce qu’il a vécu au Rwanda et les gens lui demandent si ce n’était pas de la fiction et lui demandent plus sur l’histoire du Rwanda. Depuis 2014 il fait plusieurs interviews mais il a subi des pressions des gens qui veulent l’empêcher de parler. Il raconte dans un livre son expérience et le rôle de la France dans le génocide. Il explique qu’ils avaient comme mission de remettre au pouvoir le gouvernement génocidaire puis par la suite de créer une zone sûre pour permettre à ce même gouvernement vaincu de s’exiler. Il aurait même assisté à une livraison d’armes au Zaire dans un camp de réfugiés hutu.

Il souhaitait rajouter que cette opération n’était pas qu’humanitaire.

Ils n’ont rien fait pendant les massacres car ils n’ont reçu aucun ordre jusqu’au 30 juin alors qu’ils étaient prêts et qu’ils auraient pu arrêter le génocide à certains endroits. De la même façon, début juillet ils étaient prêts à lutter contre le FPR mais l’ordre a été annulé. Il explique qu’il lutte pour que les archives soient rendus publiques. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Le témoin explique toute fois il ne s’est pas déplacé dans la région de KIBUNGO et donc qu’il ne sait rien des accusés. Mais pour justifier sa présence et l’importance de son témoignage il explique qu’en juillet 1994, il a eu à faire à un bourgmestre et un prêtre qui lui ont raconté qu’ils avaient exterminé les tutsi et ils lui ont montré qu’ils avaient assez d’armes pour le faire. Des armes qu’il aurait par la suite confisquées. Il ajoute que cette histoire montre à quel point les bourgmestres et les prêtres étaient impliqués dans le génocide.

Sur cette histoire qui tombe comme un cheveu sur la soupe et qui montre que c’est un élément fourni pour condamner et apporter un jugement non fondé aux accusés. Il parait évident qu’il lui a été demandé de rajouter à son témoignage cet élément. Ce qui est étonnant c’est que lorsqu’on lui demande des précisions sur ce bourgmestre, son nom, s’il a été condamné, le témoin ne le sait pas.

L’avocat général ne comprend pas en quoi le témoin craint que son témoignage soit supprimé alors qu’il est publié et accessible sur internet. Il explique que c’est lui-même qui l’avait partagé mais que là ce n’est pas le même témoignage. Que ce qu’il a révélé en 2014 sur la réalité de l’Opération Turquoise a provoqué des réactions violentes et qu’on l’a traité de mythomane.

Maître EPSTEIN lui demande qui le traite de mythomane ?  Il explique que c’est un site d’extrême droite.

L’avocat d’Octavien NGENZI évoque ensuite un article du Monde qui rapporte son envie de témoigner suite à un colloque de la Fondation Jean Jaurès. Le témoin donne des précisions.  Il explique que partout on lui dit que ce qu’il a à dire est déjà connu, on lui dit que son témoignage est faux car personne d’autre ne raconte cette histoire.

On lui demande pourquoi il n’a pas écrit depuis longtemps, depuis 1995 ? Il explique que c’est vrai qu’il ne l’a pas fait mais qu’il est parti en mission à Sarajevo par la suite et il était pris par cette mission. Mais qu’on lui interdisait d’en parler également.  Dans l’article du monde, on parle d’un crime qu’il aurait commis, le témoin précise qu’heureusement que ces faits sont prescrits. Et il explique que son équipe après avoir confisqué les armes d’un groupe de 15 miliciens ils les ont tué car un d’eux portait un gilet pare-balles qui avait appartenu à un parachutiste belge, qui avait surment été tué. Il précise que ces miliciens portaient des restes humains autour du cou. Le témoin confirme que son livre a été préfacé par Stéphane AUDOIN-ROUZEAU sur question de maitre EPSTEIN.

Madame la présidente va ensuite lire l’enquête de personnalité concernant Octavien NGENZI qui le décrit comme un homme bon, non raciste qui a toujours aimé tout le monde sans distinction. Que ce soit avant, pendant et après le génocide. Un bon père de famille qui fait tout pour élever ses enfants malgré la distance imposée par la prison.

Elle demande à l’accusé si lors de sa condamnation par le gacaca au Rwanda il a été condamné aussi à des réparations ? Evidement la présidente ignore que cette condamnation est une pure invention, mais NGENZI rappelle poliment qu’il ne le sait pas, que même la condamnation par le GACACA il ne l’a appris que dans ce dossier. NGENZI souhaitait expliquer d’avantage pour montrer les anomalies de ce dossier de GACACA mais on lui demande de répondre par oui ou non. Il explique qu’il ne bénéficie pas des revenus de ses biens qui sont gérés par un proche et que ce dernier subit des rackets et utilise le reste pour nourrir la famille.  Il rappelle tout de même que ses biens intéressent beaucoup les accusateurs car même ces derniers jours, une équipe est allée sur place se renseigner sur ces biens accompagnée d’un proche d’une partie civile. Cela montre que des parties civiles ont un grand intérêt dans sa condamnation.

Madame la présidente revient sur l’enquête de personnalité car l’épisode où il a été attaqué par les Interahamwe y est mentionné par les gens interrogés mais Ngenzi ne revient pas dessus. Il lui répond que c’est un simple oubli. En effet, on ne peut pas raconter tout ce qui nous est arrivé dans la vie dans une description de sa vie de quelques pages. Ce qui est sûr c’est que ce fait est réel et relaté par plusieurs personnes et NGENZI en a parlé depuis ses premières auditions.