Refugiés Rwandais à Bukavu-RDC abandonnés à leur triste sort : Lettre du comité de ces refugiés au Chef de Bureau du HCR Bukavu

Comité des Refugiés

Urbains de Bukavu

RDC                                                                24/04/2015

 

 

Objet : Vie précaire des réfugiés urbains

de Bukavu et mauvaise gestion

des commissions de réinstallation.

Monsieur le Chef de Bureau du HCR Bukavu,

 

Monsieur le Chef de Bureau,

Nous avons l’honneur de recourir à votre haute compétence pour l’objet repris en marge.

En effet, Monsieur le Chef de Bureau, les réfugiés urbains de Bukavu souffrons depuis un bon nombre d’années des blessures intérieures causées par le fait d’être attachés au Bureau du HCR dont certains agents et encore incontournables nous ont toujours démontré et continuent à le faire qu’ils combattent nos intérêts. C’est la raison qui fait que nous n’arrivons pas à nous remettre des traumatismes physiques et morales causées par les guerres pérennes qui nous ont fortement secoués pendant  20ans dans le pays d’accueil.

L’instabilité inhérente à la vie nomade que nous avons menée fuyant ces guerres nous ont laissé un grand vide économique qu’il fallait combler par une aide consistante du HCR et d’autres humanitaires mais malheureusement ceux qui devaient plaider pour nous font le contraire. C’est ainsi que nous sommes parmi les réfugiés les plus souffrants du monde.

La précarité excessive qui nous menace n’est pas une invention, elle est réelle et elle a fortement touché tel que signalé dans notre rapport du 20 juin 2014, quatre ONG nationaux et internationaux à savoir ADEPAE Action pour le Développement et la Paix Endogène de la RDC, Solidarité Volontaires pour l’Humanité (SVH) de la RDC, RM (Rhema Ministries) du Burundi, DRC (Danish Refugees Council de Danmark qui, au terme de leur enquête effectuée fin 2012 sur la vie des réfugiés au Sud-Kivu, ont fait passer sur les antennes de la Radio OKAPI leur conclusion selon laquelle les ONG humanitaires devraient adopter une attitude plus humaine envers les réfugiés.

Nous sommes conscients que la première ambition du HCR est que les réfugiés, sans aucune distinction, soient bien traités et aidés. Mais malheureusement tous les agents du HCR ne travaillent pas dans cette optique. Quelques uns vont dans le sens contraire et les réfugiés en pâtissent. C’est cela le nœud des problèmes dont souffrent principalement les réfugiés d’ici à Bukavu.

Le 05 juin 2014, le consultant de la Banque mondiale en visite ici en RDC s’est entretenu avec les membres du comité des réfugiés urbains. Il a failli verser les larmes quand il a vu notre santé comparativement à celle des réfugiés de Lubumbashi (RDC) et de la Zambie.

A côté d’être servis par certaines gens qui se soucient le moins possible de nos peines voire même s’en réjouir, les réfugiés urbains de Bukavu souffrent encore de la gestion obscure en leur défaveur, des différentes commissions de réinstallation qui viennent ici à Bukavu depuis 2010. Pourtant, ces commissions constituaient pour beaucoup un grand espoir de voir un jour leurs conditions de vie changer.

A ce propos, les réfugiés se plaignent :

–      Du manque d’information sur la présence de ces commissions et leurs critères de sélection,

–      Du choix clandestin et partial des candidats à l’interview opéré par Mme NADIA NABINTU BARHEZA assistante au service de protection en collaboration avec Mme Claudine NDABARINZE (N’zuba) assistante au service communautaire en raison de leur ancienneté de plus ou moins 10ans sans bouger. Notre regret est que cette ancienneté ne sert pas à améliorer les services rendus aux réfugiés mais plutôt à bloquer toute initiative visant le bien – être de ces derniers. Leurs rapports souvent erronés et irréels à la hiérarchie, en qualité d’agents de terrain et d’experts du bureau en raison de leur ancienneté déroutent souvent cette dernière dans ses initiatives et activités en faveur des réfugiés. C’est ainsi qu’il y a eu fin 2009 coupure prématurée de presque toute l’assistance aux réfugiés (logement, ration, scolarisation des enfants) sans analyse préalable sur le comment allaient vivre les réfugiés et sur un substitut valable de cette assistance.

En guise d’exemples illustrant notre plainte ;

Vous vous souvenez Monsieur le Chef de Bureau, lors de votre première rencontre avec le comité en date du 05 juin 2014, parmi les problèmes vous présentés, il y avait celui de sa scolarisation de enfants réfugiés à l’école primaire dont les frais scolaires étaient payés en partie par le HCR depuis la remise de cette assistance il y a 2 ans. Quand vous avez posé la question de savoir pourquoi on ne supporte pas tous les frais, Mme Claudine, soutenue par Mme NADIA a répondu que le problème en est que beaucoup de réfugiés font inscrire leurs enfants dans des écoles privées. Très choqués par ces propos nous avons tout de suite démenti en demandant qu’elles exhibent un exemple des enfants qui étudient à l’école privée où on paye beaucoup. L’exemple n’a pas été trouvé parce qu’elles savent bien que les enfants des réfugiés étudient dans des écoles publiques. Pourtant, quand on a repris l’assistance aux enfants du primaire, Mme Claudine elle-même a initié un système de moyenne par lequel le HCR payait un montant beaucoup inférieur aux frais scolaires exigés. Elle a appliqué ce système pendant deux ans malgré les cris des réfugiés que ce système pénalise les enfants dont les parents n’ont rien pour compléter. Heureusement qu’après avoir été touché par le problème vous avez fait la majoration et nous vous remercions. Nous restons cependant en attente de votre bonne réaction pour les enfants du secondaire délaissés.

Quand votre prédécesseur, Mme Charlotte RIDUNG est revenue au Bureau du HCR Bukavu, les réfugiés sont allés la voir. Parmi les problèmes que nous avons présentés, il y avait celui des vulnérables abandonnés à leur triste sort alors que la coupure de l’assistance fin 2009 avait beaucoup aggravé leur situation. Mme Claudine n’a pas hésité à affirmer devant Mme Délégué qu’il y avait des vulnérables réfugiés qui étaient assistés. Après notre enquête dans la communauté, nous avons manqué un seul bénéficiaire. Quand nous avons réclamé au service communautaire la liste de ces vulnérables bénéficiaires de l’assistance, l’Assistante n’a pas pu la montrer. C’est après cette réclamation qu’on a commencé à recevoir les dossiers de certains vulnérables et il y a 6 mois qu’ils ont eu une petite assistance ponctuelle. Nous disons merci mais nous demanderions que cette assistance soit au moins trimestrielle parce que les vulnérables de notre communauté sont incapables de faire quoi que ce soit pour pouvoir survivre. Si Mme Charlotte  avait eu la vraie information, elle aurait pu intervenir à temps mais voilà que les vulnérables ont passé 4,5ans abandonnés, sans aucune assistance.

Sur base de ces 2 exemples pris parmi tant d’autres, nous nous demandons, « Si les mensonges de ces 2 Assistantes de terrain atteignent un tel degré à notre présence, qu’en est-il à notre absence ? ».

Pour le moment, les réfugiés sont tellement asphyxiés qu’ils ne peuvent pas s’empêcher de parler parce que c’est impossible de mourir sans lancer des cris même si on ne peut pas tout écrire. C’est ainsi que, dans sa réunion ordinaire du 25 octobre 2014, le comité des réfugiés urbains, après avoir été embrouillé par les cris des réfugiés sur la clandestinité qui a caractérisé comme d’habitude la gestion de la commission de réinstallation présente ici à Bukavu au cours de ce mois d’octobre a décidé à l’unanimité de 6 membres qui étaient présents sur 7 qui composent le comité de dénoncer cette situation et de vous présenter ouvertement l’origine principale des problèmes dont souffrent les réfugiés de Bukavu depuis des années.

Il s’agit :

Mme MUKANTAZINDA Laurence, Présidente

Mr MUTEMBEREZI Daniel, Vice – Président

Mr RAJABU Apollinaire, Secrétaire

Mme AKITERETSE Jeanne, Conseillère

Mr VYAMUNGU André, Conseiller

Mr HAVUGIMANA François, Conseiller

Seul était absent Monsieur SIDOLI James, trésorier. Comme nous travaillons sur la voix de la majorité, cette décision a été prise et elle est ainsi exécutée.

Revenant sur le choix des candidats à l’interview, il a été caractérisé depuis 2010 par l’exclusion de certaines familles. Il y en a qui n’ont jamais apparu devant une commission de réinstallation et aucune explication ne leur a été donnée. Signalons que depuis 2010 nous comptons au moins 3 commissions de réinstallation qui ont passé ici à Bukavu.

En plus, presque toutes les familles qui ont été interviewées ont eu des réponses négatives d’où les réfugiés mettent en doute l’interprétariat assuré par Mme NADIA. Il est à savoir que la grande majorité des réfugiés qui savent bien s’exprimer, qui n’ont donc pas besoin d’interprète n’ont jamais eu accès à ces commissions de réinstallation. Les familles qui ont été interviewées et n’ont pas encore eu leurs réponses ne comprennent pas pourquoi. On se demande également pourquoi depuis 2010 aucune famille de réfugiés n’a quitté Bukavu pour la réinstallation alors que les commissions de réinstallation ne cessent pas d’arriver. S’il aurait des familles qui seraient parties elles ne seraient pas du tout prises parmi les réfugiés que nous avons connus ici à Bukavu exception faite de Mme Mukanyemera Claudine et ses 2 enfants qui ont été portés disparus en 2012.  S’ils ont été réinstallés, nous ne savons pas.

Pourtant en 2007, les réfugiés Burundais de 1972 ont été réinstallés dans toute transparence ; les interviews ont été affichées et même le départ a été bien organisé. Nous avons d’ailleurs été contents de ce que certains parmi nous ont eu cette chance. Pour quoi ne pas procéder de la même manière ?

Revenant sur la commission de réinstallation qui est arrivée ici à Bukavu, au cours de ce mois d’octobre 2014, les réfugiés ont été de nouveau choqués de la plus grande clandestinité dans laquelle Mme NADIA et Claudine ont a appelé les candidats à l’interview sans même informer les réfugiés dès la présence de cette condition et de ses critères de sélection. Cet état des choses a provoqué un mauvais climat entre les réfugiés et le comité qu’ils jugent inapte par le simple fait de ne pas pouvoir leur donner des éclaircissements en rapport avec cette commission. Si les commissions de réinstallation arrivent pour les réfugiés, s’ils en sont informés, où en est le mal ? La communauté regrette très amèrement de cette clandestinité toujours entretenue par les 2 susdites assistantes en matière de réinstallation.

Eu égard à ce qui précède, nous proposerions :

–      Que tous les dossiers soient réétudiés y compris ceux – là qui ont été mis sous la table par les 2 assistantes de terrain ;

–      Que le choix des dossiers à présenter aux commissions de réinstallation et l’interprétariat soient faits par des personnes réellement humanitaires et impartiales ;

–      Que la gestion du dossier de réinstallation ne soit pas un domaine qu’on dirait privé des deux assistantes de terrain en raison uniquement de leur ancienneté parce que l’ancienneté ne signifie pas toujours efficacité dans le service ;

–      Que les autorités du HCR Bukavu arrivent parfois à se passer des rapports souvent erronés des deux assistantes de terrain et chercher à s’imprégner elles mêmes des réalités de la vie des réfugiés sous leur responsabilité afin que leurs actions aient un impact positif sur la vie de ces derniers. Nous vous encourageons Monsieur le responsable du Bureau du HCR Bukavu, à mettre en pratique votre vision de vous  entretenir avec le comité des réfugiés une fois par mois, quelques fois avec tous les réfugiés et d’effectuer vous-même des visites à domicile dans les familles pour voir dans quelle misère les réfugiés croupissent.

Signalons que les autorités du HCR Bukavu dont les réfugiés gardent bonne mémoire sont celles qui ont pu contourner d’une façon ou d’une autre les rapports de ces 2 assistants de terrain qui, malgré qu’elles soient attachées à des services différents collaborent très étroitement pour nuire aux intérêts des pauvres réfugiés.

En attendant qu’il y ait une autre commission de réinstallation qui se présente et pouvoir corriger ce qui a été mal fait, nous demanderions une intervention rapide pour logement et ration sinon nous craignons sous peu le pire de catastrophe humanitaire probable chez les réfugiés à cause de la famine et du manque d’abris.

Comptant sur votre bonne et habituelle compréhension, veuillez agréer Monsieur le Chef de Bukavu, l’expression de notre haute considération.

 

Les membres du Comité :

Mme MUKANTAZINDA Laurence, Présidente

Mr MUTEMBEREZI Daniel, Vice – Président

Mr RAJABU Apollinaire, Secrétaire

Mme AKITERETSE Jeanne, Conseillère

Mr VYAMUNGU André, Conseiller

Mr HAVUGIMANA François, Conseiller