Rwanda-Justice Internationale. Non respect et ingérence : Trop c’est trop !

Les prisonniers rwandais de l’ONU détenus au Bénin s’opposent à l’intervention du gouvernement rwandais dans la procédure de libération anticipée ou la commutation de peine prévue par les statuts du TPIR et du MTPI. (Lire le Mémorandum complet ici)

Dans un mémorandum d’une vingtaine de pages  adressé par lettre datée du12 juin 2018, quatorze rwandais prisonniers de l’ONU  ont manifesté leur désapprobation à ce que le gouvernement rwandais du FPR de Paul Kagame puisse intervenir dans n’importe quelle procédure pour l’exécution des peines infligés par les tribunaux de l’ONU. 

Dans ce mémorandum adressé au Juge Président du Mécanisme pour les Tribunaux Pénaux Internationaux (MRPI) sous le couvert du Régisseur de la prison civile d’Akpo-Missérété où ils sont incarcérés, les détenus démontent arguments en appui que le régime de Paul Kagame n’est pas qualifié pour intervenir ou donner un quelconque avis dans les procédures prévues par les statuts de ces tribunaux.

Ayant été d’abord surpris par la requête du président du MTPI au gouvernement rwandais pour qu’il donne son avis sur la libération  conditionnelle prévisible des détenus Aloys Simba, Dominique Ntawukuriryayo et Hassan Ngeze car remplissant les conditions prévues par les statuts, ces prisonniers ont alors fait remarqué d’autres faits inadmissibles dans cette affaire. 

  1. Ils font remarquer que par arrogance et mépris dont il est familier, le gouvernement de Kigali n’a pas répondu dans les délais que lui avait fixés le Président du MTPI, mais a au contraire exigé qu’on lui fournisse des documents des dossiers auxquels il n’a aucun droit d’accéder ;
  2. Ils font ensuite état de la campagne médiatique lancée par le même régime pour faire pression sur le MTPI. C’est dans ce cadre qu’ils faut placer la la dite lettre  écrite par les soi-disant « Membres de la Communauté Rwandaise » mais dont les signataires ne sont en fait que, soit des militants et agents du FPR disséminés en Occident, soit des anciens employés du bureau du Procureur du TPIR qui avaient été utilisés pour inculper les cadres hutu depuis 1996, soit alors  des aventuriers qui ont fait de la chasse aux opposants hutu de Kagame leur bizness comme le français Alain Gauthier.
  3. Ces prisonniers démontrent aussi que par cette action le gouvernement rwandais peut saper l’indépendance et l’impartialité du MTPI en l’obligeant à réviser ses décisions antérieures.
  4. L’impression que les TPIR et le MTPI n’étaient et ne resteront pour l’Histoire que des Justice du Vainqueur est perceptible. Ceci s’ajoute à l’impact négatif qu’a laissé le TPIR pour avoir assuré l’impunité au FPR de Paul Kagame alors que la répression de ses possibles crimes était aussi dans son mandat.
  5. Les mêmes prisonniers rappellent que le régime du FPR de Paul Kagame repose sur le mensonge. Raison pour laquelle il remue ciel et terre pour mettre la main sur les archives du TPIR. Il voudrait ainsi faire disparaitre toute preuve de son implication dans le drame rwandais qui aurait été  documentée par le TPIR ;
  6. Enfin les prisonniers rwandais de l’ONU au Bénin demandent au MTPI et à la Communauté Internationale de refuser de cautionner le mensonge et l’impunité. Le gouvernement du FPR de Paul Kagame  a une responsabilité énorme dans le génocide rwandais. Il est donc logiquement lui aussi justiciable devant le MTPI. Il n’est donc pas à consulter pour donner son avis sur les décisions à prendre par le même MTPI. Ils ont d’ailleurs fait remarquer au passage que le régime de Paul Kagame se moque des décisions des tribunaux internationaux car il continue à considérer les acquittés par ces cours comme coupables. Ce fait est illustré par le cas de l’ancien préfet de Cyangugu Emmanuel Bagambiki qui après son acquittement devant le TPIR, le régime du FPR de Kagame a aussitôt fait condamner « à perpétuité » par ses tribunaux d’exception pour les mêmes accusations et sur bases des mêmes témoins à charge qui pourtant avaient été confondus et ridiculisés à Arusha.  On comprendra alors pourquoi aucun libéré du TPIR ne peut retourner vivre au Rwanda.

Lire le Mémorandum complet ici

Bruxelles, le 25.06.2018

Emmanuel Neretse