Rwanda : Les crimes contre les Hutus en phase décisive de validation …

L’histoire récente du Rwanda est un perpétuel recommencement ! Karenzi Karake, chef de renseignement rwandais a été arrêté à Londres le 20 juin 2015. Ce militaire tutsi de 54ans et ancien compagnon de guerre du président actuel Paul Kagame, est accusé par la justice internationale (notamment la justice espagnole)  d’avoir tué les ressortissants espagnols qui étaient au Rwanda entre 1994 et 2000. Il est également accusé d’avoir commis, au cours de la même période, des crimes de guerre et de génocide contre les hutus rwandais et congolais.

Cette arrestation intervient suite à un acte d’accusation émis par l’Espagne, visant environ 40 responsables du pouvoir actuel rwandais, dont Emmanuel Karenzi Karake.

Selon cet acte d’accusation, certains espagnols assassinés par les militaires rwandais étaient des humanitaires qui ont assisté aux crimes commis par le FPR (1994-2000) et qui étaient potentiellement des témoins gênants.

Pour rappel, ce militaire rwandais n’est pas le premier à être arrêté en Europe.  Mme Rose Kabuye, militaire et ancien chef de protocole du président Kagame a été arrêtée le 9 novembre 2008 en Allemagne, puis extradée vers la France où elle a été mise en examen le 18 novembre  pour « complicité d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste » (implication dans l’attentat contre l’avion du président Juvenal Habyarimana, abattu le 6 avril 1994). Le gouvernement rwandais aurait su mettre la pression sur les autorités et la justice françaises qui ont été obligés de lever le mandat d’arrêt visant Mme Rose Kabuye.

Rappelons également que le 27 août 2010, le journal Le Monde s’est procuré une version quasi-définitive du rapport de l’ONU (Mapping) de 600 pages, rassemblant des « éléments inédits et accablants » concernant des crimes commis par les militaires rwandais, entre 1993 et 2000. Ce rapport soulignait  notamment  des  faits qui pourraient être qualifiés de génocide, commis contre les hutus au Congo entre 1996 et 1998 par les militaires  rwandais ou soutenus par le Rwanda.

Ce rapport a suscité une levée le bouclier au sein de la classe politique rwandaise. Celle-ci a su faire taire, non sans difficultés, toutes les voix que s’élevaient pour réclamer des actions concrètes en réponse à ce rapport macabre.

Encore, tout récemment (octobre 2014), la BBC a diffusé le documentaire « Rwanda’s untold story » (L’histoire du Rwanda jamais contée). Dans ce documentaire, certains épisodes  reviennent sur des accusations portées contre le président Paul Kagame, notamment les crimes de guerre, les massacres de masse au Congo, les assassinats politiques, etc. Suite à ce documentaire,  la diffusion des programmes de la BBC en langue rwandaise a aussitôt été interdite au Rwanda.

Jouer au chat et à la souris !

On a l’impression, cette fois-ci, que la communauté internationale, en l’occurrence certains occidentaux, découvre  progressivement la complexité de la question rwandaise. Il était plus simple, il y a quelques années, de dire de façon automatique que seuls les hutus ont tué et que seuls les tutsis ont été tués. Le gouvernement rwandais, soutenu par certaines personnalités et médias influents,  a pesé de tout son poids pour entretenir cette vision manichéenne de la situation rwandaise.

Aujourd’hui, il est de plus en plus incontestable que les hutus ont été massivement tués, dans diverses circonstances (je rappelle les massacres à grande échelle des hutus de l’ancienne commune Giti). Y a-t-il encore d’autres preuves à fournir ?  Il ne reste plus que l’action de justice, semble-t-il,  pour déterminer l’ampleur de ses crimes et en dégager les responsables.  La communauté internationale (l’occident en l’occurrence) et le gouvernement rwandais semblent dorénavant se tester mutuellement, sous forme d’« action-réaction ».

Cependant, les rwandais souhaitent qu’on sorte de ce qui, désormais, ressemble au « jeu » qui n’en finit plus (entre la communauté internationale et le gouvernement rwandais) pour aborder sérieusement la question. La mise en place d’une justice internationale impartiale est plus que jamais nécessaire pour aider les rwandais à sortir définitivement du tunnel.

En revanche, Les débats sur les crimes commis contre les hutus et les conséquences qui pourront en découler ne devront pas faire oublier  les massacres des tutsis ainsi que les rescapés.  Dès lors que la situation rwandaise sera clarifiée par la justice,  sans parti-pris entre les hutus et les tutsis, les rwandais aspireront, ce jour là, à la réconciliation et à la paix durables. Pour y arriver, on ne peut qu’interpeller le monde entier pour aider le Rwanda avec bienveillance. Le rôle de l’occident est plus que jamais incontournable.

Faustin Kabanza