Rwanda: limogeage d’Olivier Nduhungirehe, le tweet de trop?

Rwanda: limogeage d’Olivier Nduhungirehe, le tweet de trop?

Ruhumuza Mbonyumutwa  , avril 10, 2020

En près de 10 ans de présence sur Twitter et avec près de 51 000 tweets, il s’était fait une réputation au point d’être régulièrement surnommé « l’ambassadeur du Rwanda auprès de Twitter ».

Il était sur tous les fronts et gare à quiconque osait le contredire. Que ce soient les fans de Rayon sport, Human Rights Watch, Donald Trump, les diplomaties belges, sud-africaines ou ougandaises, jamais il ne rechignait à décocher un crochet virtuel à quiconque dont l’opinion le contrariait et aucune cible ne semblait hors d’atteinte.

Il n’avait aucune limite, pas même celles de la décence, comme lorsqu’il qualifiait la population congolaise de « peuple candide vivant toujours à l’ère primitive » ou lorsqu’il dansait sur les tombes de critiques de Kigali comme celles de Pierre Péan ou Camir Nkurunziza.             

Malgré sa fonction de numéro deux de la diplomatie rwandaise, jamais il ne se souciait des conséquences diplomatiques que pouvaient avoir ses tweets, comme lorsqu’il qualifiait la France de pays où la « chienlit » est érigée en mode d’expression politique, Donald Trump « d’idiot » à la veille de son élection, ou encore les Belges de « descendants de Leopold II et des assassins de Patrice Lumumba » après qu’un ministre belge de la Coopération se soit hasardé à appeler Kigali à une attitude constructive dans la Région des Grands Lacs.

Malgré qu’en 10 ans il avait blessé et offensé d’innombrables personnes et personnalités de haut rang, au point d’être à deux doigts de provoquer une crise diplomatique entre le Rwanda et l’Afrique du Sud, suite à un tweet jugé offensant sur la ministre sud-africaine en charge des relations internationales, il avait toujours bénéficié d’un soutien indéfectible du régime. Louise Mushikiwabo, sa supérieure hiérarchique à l’époque, étant allée jusqu’à le qualifier de « fine diplo » après qu’un média belge se soit surpris de la nomination d’une personnalité aussi controversée que lui au poste d’ambassadeur du Rwanda en Belgique. 

Paradoxalement, alors qu’il a régulièrement dépassé les limites de la décence dans ses écrits, c’est son tweet le plus digne qui lui aurait valu son limogeage. « Chaque rwandais commémore ses êtres chers. C’est l’objectif de Kwibuka. Personne n’a le droit de dicter à d’autres quand et comment commémorer »,  avait-il ainsi tweeté le 7 avril 2020, provoquant l’ire de certains Rwandais qui ont comparé son propos à celui de Victoire Ingabire à son retour au Rwanda et pour lequel l’opposante avait été injustement emprisonnée pendant 8 ans.

Dans un pays souvent dénoncé pour sa pratique d’un apartheid mémoriel et dans lequel encore hier une dame de 80 ans a été emprisonnée pour idéologie génocidaire pour avoir rappelé à sa voisine, qu’elle aussi avait perdu les siens en 1994, ces propos ne pouvaient être tolérés.

Malgré qu’il avait aussitôt fait amende honorable en supprimant son tweet, la sanction était lourde et immédiate. « Aujourd’hui, 9 avril 2020, le Président de la République a renvoyé l’ambassadeur Olivier Nduhungirehe pour avoir de manière consistante fondé son action sur ses opinions personnelles plutôt que sur les politiques du gouvernement.»

Loin du ton arrogant sur lequel il a forgé sa réputation, c’est en toute humilité qu’il accueilli son limogeage « je suis reconnaissant envers son excellence Paul kagame pour la confiance qu’il a placé en moi au cours des deux dernières années et demi, lorsque j’ai ai eu le privilège de servir comme Ministre d’Etat au sein du Ministère des affaires étrangères du Rwanda en charge de la communauté est-africaine. Je suis déterminé à continuer à servir mon pays et le gouvernement rwandais à d’autres titres. »

Lui qui aura tant réussi à faire parler de lui au cours des dernières années, parvient une énième fois à cristalliser les discussions sur les réseaux sociaux autour de son nom, cette fois-ci à son détriment, la plupart se réjouissant de son limogeage, d’autres lui témoignant leur sympathie; un baroud d’honneur avant de définitivement lever le rideau?

Ruhumuza Mbonyumutwa

Source: Jambonews.net

1 COMMENT

  1. Ndhuhungirehe Olivier, Hutu de service, était exhibé par Kagame comme un produit d’exhibition touristique au titre de preuve de la prétendue réconciliation entre Abahutu et Abatutsi.
    Il vient d’être renvoyé par le même Kagame. Qu-a-t-il fait pour mériter le limogeage?
    Certains commentateurs de son renvoi évoquent un mot constitutif de négation du génocide des Batutsi qu’il aurait prononcé ou écrit à savoir l’évocation des victimes Bahutu.
    Tous les Rwandais ont écouté le message de Kagame lu à la télévision par lui le 7 avril 2020 le jour de 26 ème anniversaire de la commoration du génocide dit des Batutsi (mont intégré dans les lois rwandaises en 2008). L’intégralité de son message est sur la toile et conséquemment accessible aux publics rwandais et international même s’il est uniquement en Kinyarwanda. Kagame a limpidement dit ce qui suit.
    Les crimes qui ont été commis au Rwanda contre les Rwandais. En claire, il a dit, les crimes qui ont été commis au Rwanda ont touché tous Rwandais. Pour lui, les victimes sont exclusivement des Rwandais et non pas exclusivement les Batutsi.
    Nul part dans son message Kagame dit: les massacres contre les Batutsi, le génocide, le génocide des Bututsi. Kagame nie-t-il l’existence des Bahutu, des Batutsi et des Batwa au Rwanda? Sûrement pas. Pour lui les massacres qui ont été commis au Rwanda concernent les Bahutu, les Bautu et les Batwa. Les victimes sont donc les Bahutu, les Batutsi et les Batwa. C’est pour éviter des répétions que Kagame a dit que les Victimes des ces massacres sont des Rwandais.
    Si Nduhungirehe Olivier a évoqué les victimes Bahutu, mot qui n’a pas été prononcé par son patron même une seule fois, ses propos sont manifestement une reprise pure et simple du message de Kagame lu devant des millions de Rwandais à la télévision par Kagame en personne ou par son hologramme le 7 avril 2020.
    L’ex-Secrétaire d’Etat s’est illustré dans la répétition des propos de son maître et les quelquefois saupoudrés. Il était donc un chantre éclairé du régime Kagame.
    Au regard des faits, les mots prononcés par lui ne peuvent sûrement pas constituer un crime de minimisation du génocide dit des Batutsi.
    Au contraire, c’est Kagame qui, en omettant sciemment de prononcer les mots génocide et génocide des Bututsi dans son message ci-dessus évoqué, a commis la minimisation voire la négation du génocide des Batutsi dont ce pauvre ex-secrétaire d’Etat a été accusé par les oligarques du régime Kagame. Il s’ensuit que si ces oligarques qui ont demandé et obtenu la tête de ce Muhutu de service sont conséquents avec eux-mêmes, dès lors qu’il est manifeste que c’est Kagame qui mérite le renvoi et nullement Nduhungirehe et ils doivent actionner le commandant suprême pour minimisation et négation du génocide des Batutsi. Force est de constater misérablement et pitoyablement leur silence de tombeau sur les affirmations de Kagme du 7 avril 2020.
    Kagame est abonné absent depuis plusieurs semaines. C’est son hologramme qui a lu le message ci-dessus évoqué le 7 avril 2020. Au vu du désordre qui règne sur l’ensemble du Rwanda et au sein du gouvernement rwandais, la question posée est la suivante : qui dirige effectivement le Rwanda ?
    Une seconde question : le premier ministre étant un porteur distributeur du courrier ou vaguemestre, quel l’auteur effectif du limogeage de Nduhungirehe ?
    Une troisième question: évoquer la mort de son petit frère Janvier Ndhungirehe, qui a été fusillé par les soldats du FPR est-il constitutif du crime de minimisation du génocide dit des Batutsi, mot qui n’a pas été évoqué par Kagame dans son message du 7 avril 2020? Au vu des faits, c’est ce sont les membres du Groupe Nyiramongi Jeannette qui dirigent effectivement le Rwanda. Ils occupent plus de trois quart des postes au sein du gouvernement et tous les postes stratégiques dans tous les secteurs publics et parapublics y compris l’armée. Le commandant en chef n’est pas celui consacré par les lois rwandaises et reconnu comme tel par les Rwandais mais J.Nyiramongi. Pour s’en rendre compte ou vérifier l’effectivité de mes affirmations, il suffit de bien lire les biographies des oligarques du premier cercle du régime rwandais et leurs liens croisés. En vertu de quel loi vigueur le Premier ministre est-il compétent pour limoger un ministre? Dans quel cas le premier ministre rwandais remplace-t-il le président? Quel est la situation institutionnelle actuelle dans notre pays? Y-a-t-il vacance présidentielle? Dans l’affirmative, depuis quand, comment et pourquoi? Où est planqué le Président? Pourquoi est-il absent et que fait-il?

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