LES LIVRES DE HASSAN NGEZE: DES RAMASSIS DE MENSONGES, DE FABULATIONS ET DE RUMEURS

Par le colonel BEMS Anatole Nsengiyumva

“Le Mensonge a beau construire mille cases, la Vérité les habitera toutes” (Proverbe africain).

Monsieur Hassan NGEZE a récemment publié deux livres qui ont pour titres “Igicumbi cy’ikinyoma” pour l’un, et “Ukuli kwahishuwe” pour l’autre. J’ai lu ces deux livres, et j’ai senti le besoin pour moi d’en faire quelques commentaires, pour dire au public et à la communauté des lecteurs, ce que je sais sur certains points repris dans ces livres, et ce que je pense sur les raisons qui ont poussé Monsieur Hassan NGEZE à évoquer certaines choses.

D’ores et déjà, le lecteur remarquera que Monsieur Hassan Ngeze, dans les deux livres, s’est acharné contre certaines personnes, dont moi-même, et a aussi cherché à se mettre trop en valeur. Il fait montre d’un narcissisme sans mesure.

Mais comme il s’est trop appesanti sur moi de façon particulière, je voudrais, avant de parler du contenu des livres, dire comment j’ai connu Monsieur Hassan NGEZE, et quelles furent ses relations avec moi. Ainsi, le lecteur comprendra pourquoi il s’acharne tant contre moi, et ce depuis l’année 1994. Quand je vais aborder le contenu des livres, je ne parlerai bien sûr pas de tous les détails repris dedans, car ce serait assez fastidieux. Je ferai recours à certains documents, presque tous écrits par Ngeze, pour faire mieux comprendre ce que je dis.

PREMIERE PARTIE: COMMENT J’AI CONNU MONSIEUR HASSAN NGEZE ET SES RELATIONS AVEC MOI

Avant l’invasion du Rwanda par le FPR le 1er octobre 1990, j’étais à Kigali où je travaillais à l’Etat-Major de l’Armée Rwandaise, et j’y suis resté jusqu’en juin 1993. J’étais alors responsable du renseignement militaire à l’Etat-Major. Je voyais souvent des rapports qui provenaient de Gisenyi, parlant d’un certain semeur de désordres, et qui s’appelait Hassan NGEZE. Je ne l’avais pas encore vu. Les rapports précisaient que ce Hassan NGEZE était manipulé par un certain très riche homme d’affaires appelé Valens KAJEGUHAKWA. Ce dernier était très bien connu au Rwanda.

Monsieur Hassan NGEZE écrivait souvent des articles incendiaires dans un journal appelé KANGUKA – à ne pas confondre avec KANGURA – créé par Monsieur Valens KAJEGUHAKWA. Monsieur Hassan NGEZE était donc au service de Monsieur KAJEGUHAKWA, et signait des articles souvent préparés par ce dernier. C’est ce que disaient beaucoup de rapports en provenance de Gisenyi. En plus de ses articles incendiaires, Monsieur Hassan NGEZE était présenté comme étant souvent impliqué dans des désordres dans la ville et la région de Gisenyi. C’est pourquoi il était souvent arrêté et écroué.

J’ai vu Monsieur Hassan NGEZE pour la première fois vers mi-1990. En ce moment-là, Monsieur Valens KAJEGUHAKWA avait décidé de rejoindre le FPR en Ouganda peu avant l’invasion, et il cherchait un prétexte pour justifier son départ. C’est pourquoi il créa une situation où il prétendit que des militaires de l’Armée Rwandaise à Gisenyi, avaient tenté de l’attaquer et le tuer. Cette affaire est bien connue par ceux qui étaient alors au Rwanda, et je n’irai pas dans les détails. Mais toujours est-il que le Chef d’Etat-Major de l’Armée nous a demandés, le Lieutenant-Colonel BEM Ephrem RWABALINDA, alors G3 à l’Etat-Major de l’Armée Rwandaise, et moi-même, de nous rendre à Gisenyi pour essayer de connaître la vérité dans cette affaire.

Arrivés à Gisenyi, nous avons d’abord contacté le commandant local, alors le Major BEM Juvénal BAHUFITE, qui nous conseilla d’aller trouver un certain Hassan NGEZE, un très proche de Valens KAJEGUHAKWA, mais qui était en train de se brouiller avec son patron. Il affirma que Hassan NGEZE allait certainement nous dire ce qui s’était réellement passé. Nous avons cherché Monsieur Hassan NGEZE, et nous nous sommes entretenus avec lui. Il nous a raconté des choses, notamment que toute l’histoire était un montage de la part de son patron, Monsieur KAJEGUHAKWA, qui voulait rejoindre le FPR en Ouganda.

Hassan NGEZE avait été en fait fâché par le fait que pour faire la publicité de son montage, Monsieur Valens KAJEGUHAKWA, au lieu de faire recours à NGEZE qui était sur place à Gisenyi, a préféré appeler Monsieur Vincent RWABUKWISI, son autre agent dans le journal Kanguka, mais qui vivait à Kigali. NGEZE aurait senti un certain manque de confiance de la part de son patron. C’est pourquoi d’ailleurs, quelques temps après, Hassan NGEZE aurait fondé son journal KANGURA, de même format que KANGUKA, et même couleurs de couverture. Il y avait lieu de confondre les deux journaux.

J’ai vu Hassan NGEZE pour la deuxième fois le 31 mai 1991 au Mutara. Ce jour-là, des journalistes de la presse publique et privée s’étaient rendus sur le terrain, pour voir comment les Forces Armées Rwandaises contrôlaient toute la frontière de notre territoire. Le FPR attaquait encore à partir du territoire ougandais. Je pilotais alors ces journalistes, en compagnie du Commandant du secteur opérationnel du Mutara, alors le Colonel BEM NSABIMANA. Il y avait 28 journalistes. Un moment donné, Monsieur Hassan NGEZE prétendit qu’il m’avait dit le jour où le FPR allait attaquer, mais que nous n’avions pris aucune mesure pour le repousser. C’était faux. Je lui ai demandé pourquoi il lançait un tel mensonge devant tout un groupe de journalistes. Sans rire, il me répondit qu’il voulait blaguer tout simplement!

J’ai rencontré Monsieur Hassan NGEZE pour la troisième fois début mai 1994, alors que j’étais à Gisenyi depuis presque une année. Et c’était après la mort du Président HABYARIMANA. Ngeze était arrêté et amené au camp militaire de Gisenyi. J’en parle dans les lignes qui suivent.

Pourquoi est-ce que Hassan NGEZE s’acharne contre moi avec obstination ?

En avril 1994, quand le Président HABYARIMANA a été assassiné, je me trouvais à Gisenyi où j’exerçais les fonctions de Commandant du secteur opérationnel. Les premiers jours qui ont suivi la mort du Président HABYARIMANA, je n’ai pas vu Hassan NGEZE. Je ne l’ai vu ni le 6, ni le 7, le 8 ou le 9 avril 1994, contrairement à ce qu’il raconte. Son absence a été remarquée, d’autant plus que moi je craignais que la mort du Chef de l’Etat, suite à un assassinat, risquait de créer une situation de troubles, que Monsieur Hassan NGEZE affectionnait et favorisait habituellement. Et les troubles risquaient de favoriser l’entrée des éléments du FPR dans mon secteur opérationnel, et causer beaucoup de dégâts au sein de la population.

En date du 9 avril 1994 dans la matinée, lorsque les violences avaient commencé dans beaucoup de régions au Rwanda, y compris dans la préfecture de Gisenyi, alors que nous faisions tout pour y faire face avec beaucoup de difficultés, j’ai entendu quelqu’un qui parlait au mégaphone monté sur un véhicule qui circulait en ville, disant que la population devait s’abstenir de boire de l’eau de robinet, car les “Inyenzi” l’avaient empoisonnée. Ceci était très dangereux par les temps que nous vivions. Je me suis informé, et l’on m’a dit que c’était Monsieur Hassan NGEZE qui tenait ces propos, à partir d’un mégaphone monté sur son véhicule. Heureusement, ce même jour, il y avait une réunion du Préfet de préfecture avec la population de la ville de Gisenyi, pour essayer de ramener le calme devant la situation qui prévalait. J’en ai profité pour suggérer au Préfet de fustiger les allégations de Monsieur Hassan NGEZE relatives au prétendu empoisonnement de l’eau par “les Inyenzi”. Quand le Préfet m’a donné la parole au cours du meeting, j’en ai aussi parlé, et j’ai dit à la population que les allégations de Monsieur Hassan NGEZE étaient tout simplement une mauvaise blague. Mais c’est ce jour-là que Monsieur Hassan NGEZE se manifestait pour la première fois, depuis la mort du Président Habyarimana. Du moins pour moi, c’était la première fois que j’apprenais sa présence à Gisenyi en ces jours.

Les jours qui ont suivi, nous avons connu une drôle de situation. En effet, chaque nuit vers 02-03 heures, nous entendions des coups de feu très nourris, dans le quartier habité par Monsieur Hassan NGEZE, dans la ville de Gisenyi, secteur Gacuba I. Au début, nous avons pensé à une attaque de la ville par le FPR. Mais finalement, nous avons su qu’il s’agissait de jeunes qui vivaient chez Monsieur Hassan NGEZE, considérés comme ses gardes du corps, qui s’adonnaient à des tiraillements intensifs avec des armes à feu. La population était apeurée, et cette situation était intolérable. Je me suis demandé d’où Monsieur Hassan NGEZE avait eu ces armes, et je n’ai pas eu de réponse.

Il était absolument nécessaire de mettre fin à cette situation insupportable. C’est pourquoi le conseil de sécurité préfectoral dirigé par le Préfet a dû se réunir en urgence. Il fut décidé que la Gendarmerie devait aller saisir les armes entre les mains des jeunes de Monsieur Hassan NGEZE, et essayer de savoir la provenance de ces armes. La Gendarmerie a essayé de faire ce devoir, mais a rencontré des difficultés. Chaque fois qu’elle se présentait chez Hassan NGEZE, les jeunes qui veillaient, donnaient l’alerte, et certains d’entre eux montaient sur le toit de la maison, menaçant les gendarmes avec des grenades et des armes à feu. Les gendarmes se retiraient.

Quand la Gendarmerie a avoué les difficultés qu’elle avait de remplir la mission lui assignée, j’ai proposé au conseil de sécurité préfectoral de me laisser faire cela avec des militaires. J’ai reçu l’autorisation, et le Procureur local m’a donné un mandat de perquisition en bonne et due forme. J’ai organisé l’opération. J’ai donné pour cela la mission au Major UWIMANA François Xavier qui était mon officier S2-S3, en charge du renseignement et des opérations dans le secteur opérationnel. Il a préparé la mission, et m’a proposé d’utiliser les militaires du 42 ème bataillon, conduits par leur commandant, le Capitaine ingénieur HABIMANA Faustin. J’ai approuvé la proposition, et l’opération eut lieu un matin très tôt, vers 5 heures.

Quand les jeunes qui veillaient chez Hassan NGEZE ont aperçu les militaires, ils ont senti que les choses étaient sérieuses, et ils n’ont pas tenté de résister comme ils le faisaient avec la Gendarmerie. Ils ont plutôt fui. La maison de NGEZE a été fouillée. NGEZE n’a pas été trouvé sur place. Nous avons plutôt saisi huit fusils d’assaut de différentes marques, et un poste radio émetteur/récepteur de marque Kenwood, juste le même type que ceux qui étaient utilisés par le FPR. Je n’ai pas pu trouver Hassan NGEZE pour l’interroger sur la provenance de ces armes et de cette radio, ni sur les personnes avec lesquelles il était en communication radio. Il devait par ailleurs me dire pourquoi il s’était constitué une milice armée, et qui lui avait donné l’autorisation. C’est pourquoi, en donnant la situation à l’Etat-Major de l’Armée, j’ai demandé en même temps que l’on m’aide à retrouver Hassan NGEZE, car il avait une autre habitation à Kigali, dans le quartier BIRYOGO. L’Etat-Major de l’Armée m’a demandé de lancer un télégramme de recherche, adressé à toutes les unités; ce que j’ai fait immédiatement.

En date du 2 mai 1994, le Préfet de préfecture a tenu un autre meeting au stade Umuganda de Gisenyi, toujours avec la population locale. J’en ai profité pour fustiger le comportement de Monsieur Hassan NGEZE, tout en expliquant à la population ce qui s’était passé. Un moment donné, j’ai entendu Monsieur Hassan NGEZE parler à la Radio Rwanda. Il donnait une interview. Il félicitait les membres de la population qui contrôlaient les barrages routiers sur la route Gisenyi-Kigali, pour empêcher les infiltrations du FPR. Il a ajouté que le tronçon de la route de Gisenyi à Gakenke était vraiment bien gardé, mais que le tronçon Gakenke-Kigali, “en passant par Rushashi”, n’était pas bien contrôlé, de façon que les infiltrés du FPR pouvaient passer sans difficulté. J’ai immédiatement envoyé un télégramme à l’Etat-Major, demandant que l’on m’aide à retrouver ce Monsieur NGEZE qui se trouvait à Kigali, pour que je puisse terminer le dossier des armes, du poste de radio émetteur/récepteur, ainsi que des miliciens privés qui vivaient chez lui.

Quelques temps plus tard, Monsieur Hassan NGEZE a été intercepté plutôt dans la ville de Gisenyi. Les militaires en patrouille l’ont rencontré et me l’ont ramené. C’était le 7 mai 1994 dans l’avant-midi. Le lendemain 8 mai 1994, j’ai demandé au Major UWIMANA François-Xavier de l’interroger. Ce dernier a confié la tâche au Lieutenant BIZUMUREMYI Anastase, un officier qui avait longtemps travaillé à la Gendarmerie, car il était gendarme jusque fin 1993-début 1994. Quand l’interrogatoire venait à peine de commencer, j’ai reçu un télégramme assez laconique du Ministre de la Défense, qui disait ceci: “Devoir libérer immédiatement et sans condition, Monsieur Hassan NGEZE en détention chez-vous”. Je l’ai directement libéré. Je n’avais pas de choix. Je n’ai donc pas pu savoir qui lui avait fourni les armes, ni le poste radio, et je n’ai pas pu savoir avec qui il avait été en communication radio. J’étais désappointé.

Quand il a été libéré, Hassan NGEZE est directement parti. Je croyais qu’il rentrait chez lui dans la ville de Gisenyi. Mais moins de deux heures après, il a été ramené au camp militaire par un officier du camp militaire de Bigogwe. Comme je n’avais pas encore eu le temps d’annuler le télégramme qui le recherchait, il a été intercepté par des militaires du camp Bigogwe sur la route devant leur camp, et ils me l’ont ramené. Je leur ai expliqué que je n’avais plus besoin de lui, et je me suis pressé de lever le télégramme de recherche. Hassan NGEZE m’a dit qu’il se rendait à Kigali, quand il fut intercepté par les militaires à Bigogwe. Monsieur NGEZE m’a alors demandé de lui fournir un document attestant que je l’avais libéré, et qu’il ne devait plus être arrêté par qui que ce soit. J’ai préssenti la volonté d’utiliser abusivement un tel document, et je ne le lui ai pas donné. Il est parti, mais je ne sais pas où il s’est rendu en ce moment-là. C’est cela l’épisode qui implique Hassan Ngeze et le camp Bigogwe, qu’il a présenté de différentes autres manièress, tel que nous allons le voir dans les pages qui suivent. Il n’a jamais été arrêté autrement à Bigogwe.

Quelques jours après cet épisode, encore une fois, j’ai entendu des coups de feu, toujours dans le quartier Gacuba I où habitait NGEZE, et j’ai pensé qu’il avait eu encore des armes, et que c’était ses jeunes qui tiraient encore. Mais la Gendarmerie qui patrouillait en ville m’apprit qu’il s’agissait d’une attaque chez Hassan NGEZE. La Gendarmerie s’est occupée de l’affaire, qui ne fut jamais élucidée. Des gens disaient qu’il s’agissait certainement de tentative de règlement de compte. D’autres disaient que ce sont les jeunes de Hassan NGEZE qui tiraient comme d’habitude. Mais Hassan NGEZE a presque disparu de la ville de Gisenyi, et je ne l’ai plus revu jusqu’à notre départ en exil.

Mais entre-temps, NGEZE avait lancé une campagne de dénigrement à mon endroit, me traitant de complice de l’ennemi, car, selon lui, j’étais contre les Hutu qui voulaient défendre le peuple contre l’ennemi. Cette campagne devait continuer même en exil, à travers le journal KANGURA.

Les activités de Monsieur Hassan NGEZE contre moi pendant l’exil

Lorsque nous sommes partis en exil, Monsieur Hassan NGEZE a repris ses activités de publication de son journal KANGURA. Il était alors à Nairobi au Kenya. Dans plusieurs numéros de son journal, il a commencé à attaquer avec acharnement Anatole NSENGIYUMVA, c’est-à-dire moi-même, ainsi que le Capitaine HABIMANA Faustin et le Lieutenant BIZUMUREMYI Anastase. Il nous traitait de complices des Inkotanyi, ou carrément d’Inkotanyi nous-mêmes. Ceci était d’autant dangereux qu’il amenait des exemplaires de son journal et les distribuait aux camps de réfugiés à GOMA où nous étions. Désigner ainsi des gens comme étant des Inkotanyi, avec une population de réfugiés qui avaient souffert et qui souffraient toujours à cause de ces Inkotanyi, c’était assez malveillant et assez dangereux.

Ainsi, dans plusieurs numéros de Kangura, NGEZE a écrit des articles assez méchants contre moi et contre le Capitaine HABIMANA Faustin, ainsi que contre le Lieutenant BIZUMUREMYI Anastase. Il s’agit notamment de Kangura No 60 du 01 au 15 septembre 1994, No 62 du 01 au 15 novembre 1994, No 63 du 15 au 30 novembre 1994, No 65 de janvier 1995, et No 66 de février 1995. Certains articles étaient plus virulents que d’autres.

Dans le No 60 du 01 au 15 septembre 1994, sous le titre “UKO BYAGENZE RERO”, nous lisons: “Twe Imana yaduhaye impano yo kumenya ibizaba. Iyo mpano ntituyikoresha twenyine, kuko ibyo tumenye bizaba mu kazi kacu tubivuga bikamenywa namwe mwese. Kugeza ubu tumaze kuvuga ibintu 89 bizaba tukabivuga mbere maze bikaba. Ibyo bigatuma ibyitso cyangwa abaswa babonekaga mu butegetsi bwacu bampoza muli gereza, dore ko kugeza ubu maze gufungwa inshuro 20 muri gereza, 36 muri za Burigade. Kuva intambara yatangira muli 1990, hakozwe teregaramu 241 zaba iza Parike cyangwa iza Etat-Major. Ariko izabaye rurangiza ni izi zikurikira: Habyarimana amaze kwivuganwa n’abanzi, nashatse gutakaza ubuzima bwanjye, nzira ko mu kwezi kwa 12/1993 nari naranditse muri KANGURA No 53 ko Habyarimana azapfa mu mpera z’ukwa gatatu, cyangwa mu ntangiriro z’ukwa kane. Ibyo kuri twe nta gitangaza cyarimo, kuko bitari ibya mbere twari tuvuze ibizaba kandi bikaba. Habyarimana amaze gupfa batwise ibyitso ngo kuki twavuze igihe azapfira maze bikaba byo. Ubwo teregaramu ziracicikana ngo ngomba kwicwa, ngo uburaguzi bwanjye buhishe byinshi. None se umuntu koko azazire ubuswa bw’abategetsi batareba kure. Kuba menya ibintu nkabivuga, ahubwo nagombye kubihemberwa. Iyo nza kuba ntabivuga niho nagombaga kubizira. Abanyarwanda bagize amahirwe babona umuraguzi w’ubuntu ubabwira ntacyo batanze”.

Ce paragraphe peut se traduire comme suit en français: “CE QUI S’EST ALORS PASSÉ. Quant à nous, Dieu nous a donné la faculté de connaître l’avenir. Nous ne profitons pas de cette faculté tout seuls, car dans notre métier, quand nous parvenons à connaître ce qui va se passer dans l’avenir, nous le partageons avec vous tous. Jusqu’à présent, nous avons dévoilé 89 choses qui devaient se passer, et que nous avons connues à l’avance, et ça s’est effectivement passé. C’est cela qui a fait que les complices de l’ennemi ou les ignorants que l’on trouvait parmi nos dirigeants m’ont arrêté plusieurs fois, et effectivement, jusqu’à présent, j’ai été mis en prison 20 fois, et 36 fois détenu dans les Brigades [de gendarmerie]. Depuis le début de la guerre en 1990, 241 télégrammes ont été lancés contre moi, que ce soit par le Parquet ou par l’Etat-Major. Mais les plus importants sont les suivants: après l’assassinat du Président Habyarimana par l’ennemi, j’ai failli perdre ma vie, sous prétexte qu’en 12/1993 j’avais écrit dans KANGURA No 53 que Habyarimana allait mourir vers la fin du mois de mars ou au début du mois d’avril. Pour nous ce n’était pas un miracle, car ce n’était pas la première fois que nous annoncions des choses qui devaient arriver, et qui sont arrivées effectivement. Après la mort de Habyarimana, on nous a traités de complices de l’ennemi parce que nous avions annoncé le moment de sa mort et que cela s’est révélé être vrai. C’est alors que baucoup de télégrammes ont été lancés comme quoi je devais être tué, que ma prédiction cachait beaucoup de choses. Est-ce qu’on doit être victime de l’ignorance des autorités qui ne voient pas loin ? Le fait que je parviens à connaître des choses et que je dis tout, devrait amener les autorités à me récompenser plutôt. On devrait me le reprocher par contre, si j’avais tout gardé pour moi. Les Rwandais devraient être contents d’avoir trouvé gratuitement un devin”.

Ce paragraphe appelle de ma part les commentaires suivants:

  • Monsieur Hassan NGEZE, ici, n’avait pas encore commencé à alléguer que je l’avais arrêté la nuit du 6 au 7 avril 1994 après l’assassinat du Président Habyarimana, et qu’il serait resté en détention jusqu’au 9 avril 1994. Nous verrons d’ailleurs dans Kanguka No 65 que je ne l’ai arrêté qu’une fois en mai 1994, et que ce fut sa 36ème fois à être détenu dans un centre de détention en dehors des prisons. Aussi, il ne dit pas qu’il avait été arrêté plusieurs fois par moi-même. S’il avait été arrêté plusieurs fois par moi, il allait le dire dans ce numéro de Kangura.
  • Deuxièmement, ce n’est pas un miracle que Monsieur Hassan NGEZE ait “prédit” que le Président HABYARIMANA allait mourir fin mars ou début avril 1994. En effet, le FPR l’avait implicitement révélé; il fallait tout simplement analyser l’information. En novembre 1993, le FPR avait écrit un document appelé «ENVIRONNEMENT ACTUEL ET AVENIR DE L’ORGANISATION». Ce document était anonyme quand il est sorti, mais les partis politiques membres du Gouvernement et le FPR l’ont discuté. Le FPR a refusé de le reconnaître, mais il a aussi refusé de le condamner. Dans ses scénarios de rompre les Accords d’Arusha, le FPR disait, au paragraphe appelé “SITUATION ACTUELLE ET PERSPECTIVES À COURT TERME”,.au scénario No IV, ce qui suit:

“Scénario IV: Rupture des Accords par la chute du Gouvernement de transition à base élargie de TWAGIRAMUNGU et reprise des hostilités au détriment de HABYARIMANA

  • Mêmes stratégies par la dictature pour faire tomber ou marginaliser le gouvernement de transition à base élargie comme aux scénarios A et B;
  • Refus de marginalisation par le FPR, et initiative pour neutraliser, récupérer ce qui est récupérable du MDR et des FDC à travers un accord de gouvernement FDC-FPR;
  • Manifestations communes répétées et campagne médiatique et politique commune et massive en vue du départ de HABYARIMANA et/ou sa comparution en justice. Ce scénario suppose un rôle actif et efficace de la part de TWAGIRAMUNGU et beaucoup de concessions de sa part afin de permettre la constitution et le renforcement des alliances nécessaires;
  • Rupture des accords d’Arusha et recomposition d’un gouvernement en écartant par la force militaire et populaire HABYARIMANA et ses satellites, dans un délai ne dépassant pas neuf mois à partir de la date de signature des accords de paix;
  • Redéfinition de la transition;
  • Organisation d’élections au moment jugé le plus opportun par le FPR”.

Voilà d’où Monsieur Hassan NGEZE doit avoir tiré les informations qu’il a mis dans son journal Kangura No 53. S’il avait eu ça d’une autre source, puisqu’il se targue d’avoir fréquenté toutes les autorités, il allait le leur expliquer sérieusement et dire sa source, pour que des mesures soient prises en conséquence. Il ne l’a pas fait. Par ailleurs, les services de renseignements de l’armée rwandaise avaient encore plus d’informations contrairement à NGEZE qui prétend qu’il était le plus renseigné dans tout le pays. Je donne comme exemple les éléments fournis par l’ancien officier chargé du renseignement à l’Etat-Major de l’armée en 1994, le général Aloys NTIWIRAGABO, éléments qu’il a révélés dans un article trouvable sur le site “The Rwandan”, sous le titre “Rwanda-Attentat du 6 avril 1994 – A quand la clôture de l’enquête ?”. Les éléments contenus dans cet article sont plus importants que les allégations de Hassan NGEZE, dont il ne donne même pas la moindre source.

Je sais que NGEZE faisait tout pour acheter les informations collectées par les services de renseignement – il le reconnaît d’ailleurs – il ne serait pas étonnant qu’il ait chipé quelques documents des services de renseignement rwandais. Fallait-il que ces services mettent eux aussi dans la rue, les renseignements à leur disposition ? Il y a par ailleurs une brochure confectionnée par les ex-FAR, intitulé “CONTRIBUTION DES FAR A LA RECHERCHE DE LA VERITE SUR LE DRAME RWANDAIS”, qui contient beaucoup de renseignements sur la menace qui pesait sur le Président HABYARIMANA, plus que ce qu’avance Hassan NGEZE. Mais fallait-il que les FAR publient dans des journaux ce qu’elles savaient sur la menace contre le Chef de l’Etat ?

Je reviens sur le Journal KANGURA et l’acharnement de Hassan NGEZE contre moi et deux de mes officiers. Toujours dans ce numéro 60 de Kangura, sous la rubrique “URUGERO SIMUSIGA”, nous lisons ce qui suit: “Maze kwitegereza ko ubwo bwicanyi bushobora kutuviramo gufatwa, ubwo nari ku Gisenyi nasabye ubuyobozi bw’ingabo burimo Colonel Nsengiyumva ko yakora ibishoboka byose agahagarika ubwicanyi bw’inzirakarengane, kuko abatutsi bose baboneka muli Zaïre, bahungishijwe n’abari bashinzwe kubahiga. None se Interahamwe n’abasirikare bakuru sibo bacikishije abatutsi baboneka muli Zaïre. None se gucikisha umuntu umwe mu muryango warangiza ugatsemba abasigaye byari bimaze iki ? Sibyo byakozwe gusa se ? Ibyo byose nagerageje kubisobanurira ubuyobozi bw’ingabo ku Gisenyi mbabwira ko ubwo bwicanyi ari ugutiza FPR ingufu kubera ko twe akenshi tuba tureba kure. Ibyo nasabaga aho kubyumva, ahubwo hacuzwe umugambi wo kunyica. Ubwo Nsengiyumva abisaba Etat-Major na Minisitiri w’ingabo yemeza ko nicwa. Ubwo bemeza ko ngomba kwicirwa mu Bigogwe. Teregaramu irakorwa, ngo umbona wese andase, ngo bafite ibimenyetso ko NGEZE ari inkotanyi ngo kuko avuga ibintu bikaba. Kunyicira mu nzira binaniranye, nibwo bohereje agatsiko k’abasirikare bayobowe na Liyetona Bizumuremyi, maze gatera iwanjye kararasa, gatera amagrenade na za sitrimu, ku buryo haje gupfamo umuntu umwe w’inzirakarengane muri icyo gitero. Imana yakinze akaboko maze ibyo bitero ntibyampitana. Nibwo hakurikiyeho ibihuha ngo mpishe abatutsi, ngo abatutsi b’abayisilamu bose ni njye wabakijije. Ibyo mbona ko noneho baratwika igihugu kurushaho, nibwo niyemezaga kuzenguruka umujyi wose nsaba abaturage tuvuka mu mujyi umwe kuva mu bwicanyi baroshywemo batazi inkomoko yabwo. Ibyo nabikoraga kubera ko nabonaga ubutegetsi busa nkaho butakibaho. Ku buryo iyo bikomeza nta n’umuhutu utunze ihene wari gusigara. Icyo cyemezo cya kigabo nafashe njyenyine nicyo cyatumye nkomeza guhigwa buri munsi. Nkurizwa ijipe ngo ninjye gusobanura ukuntu nanze ko abatutsi bapfa”.

En français, ceci veut dire: “UN EXEMPLE PARLANT. Après avoir realisé que les massacres peuvent causer notre défaite, alors que je me trouvais à Gisenyi, j’ai demandé aux autorités militaires dont le Colonel Nsengiyumva de faire tout leur possible pour arrêter le massacre des innocents, parce que tous les Tutsi qui se trouvent au Zaïre ont été évacués par ceux qui étaient chargés de les pourchasser. N’est-ce pas que ce sont les Interahamwe et les militaires de haut rang qui ont aidé les Tutsi qui sont au Zaïre à fuir ? A quoi est-ce que ça sert d’aider une seule personne dans une famille à fuir, et massacrer tous ceux qui restent ? N’est-ce pas que c’est ce qui s’est passé ? J’ai essayé d’expliquer tout ça aux autorités militaires de Gisenyi, en leur faisant comprendre que ces massacres, c’est donner de la force au FPR, parce que nous, souvent nous voyons plus loin. Au lieu d’entendre ce que je disais, on a plutôt planifié de me tuer. C’est alors que Nsengiyumva l’a demandé à l’Etat-Major, et le Ministre de la Défense a confirmé que je devais être tué. Ils ont alors décidé que je devais être tué à Bigogwe. Le télégramme a été lancé, disant que quiconque qui me verra devra tirer sur moi immédiatement, qu’il y a des preuves comme quoi Ngeze est un Inkotanyi, parce que tout ce qu’il dit se réalise comme il l’a dit. Quand il a été impossible de me tuer en cours de route, on a alors envoyé un petit groupe de militaires conduits par le Lieutenant Bizumuremyi, ils ont attaqué chez-moi, ils ont tiré et lancé des grenades et des streams, de façon qu’une personne innocente est morte au cours de cette attaque. Grâce à Dieu, j’ai pu survivre à ces attaques. Puis des rumeurs ont suivi disant que je cachais des Tutsi, que c’est moi qui avait sauvé tous les Tutsi musulmans. J’ai alors réalisé qu’ils allaient brûler davantage le pays, c’est pourquoi j’ai décidé de faire un tour dans toute la ville, en demandant aux habitants de la même ville que moi de se retirer de ces tueries dans lesquelles ils ont été enrôlés sans en connaître l’origine. Je faisais tout ça parce que je réalisais que l’autorité n’existait presque plus. Parce que si cela avait continué sur la même lancée, même un Hutu ne possédant qu’une seule chèvre n’aurait pas survécu. C’est cette décision courageuse que j’ai prise tout seul, qui a fait que je sois pourchassé tous les jours. Et on me faisait monter dans une jeep, pour que j’aille expliquer pourquoi tout ce que je prédis arrive effectivement”.

Ces allégations de Hassan NGEZE sont assez farfelues. Il n’est jamais venu me voir pour me donner quelques “conseils” que ce soit. Si je l’avais arrêté comme il le dit, la nuit du 6 au 7 avril 1994, et l’avais gardé en détention jusqu’au 9 avril 1994, comment allait-il oser venir me conseiller sur l’attitude à prendre face aux violences qui étaient en cours ? Si je n’ai jamais cessé de le pourchasser, comment allait-il venir me donner des conseils ? Non, je n’ai vu Hassan NGEZE que lorsqu’il a été amené au camp le 7 mai 1994, comme je l’ai souligné ci-dessus. Il a quitté le camp le 8 mai 1994, et il n’y est plus revenu . Et je ne l’ai plus revu, jusqu’à ce qu’il m’ait retrouvé au centre de détention des Nations-Unies à Arusha, en juillet 1997. Par ailleurs, Hassan NGEZE ne peut présenter aucun seul télégramme qui donne des instructions comme quoi il devait être tué. Je le mets au défi de présenter un tel document. Aussi, moi je connais deux télégrammes qui le recherchaient comme je l’ai signalé, et pas plus de 40 télégrammes, ou plus de 240, comme il le prétend. Par ailleurs, puisque c’est le Ministre de la Défense qui m’a donné ordre de libérer NGEZE alors que je commençais à peine à l’interroger, comment est-ce que le même ministre allait confirmer la nécessité de tuer le même Monsieur Hassan NGEZE ?

Je n’ai jamais su que Hassan NGEZE aurait fait un tour en ville à Gisenyi, demandant aux membres de la population de ne pas se mêler dans les tueries. Le seul tour qu’il a effectué en ville et dont j’ai été au courant, c’est le matin du 9 avril 1994, quand il demandait, par mégaphone, à la population, de ne pas boire de l’eau que, selon lui, les Inyenzi avaient empoisonnée. Ça, tous les habitants de la ville de Gisenyi l’ont entendu, car il parlait au mégaphone monté sur son véhicule. Et j’ai fustigé cela au cours d’un meeting du Préfet avec la population. Donc, tout ce qu’il a raconté dans ce numéro de son journal, et que j’ai repris ici, n’est autre chose que de malveillantes fabrications.

Encore une fois dans Kangura No 60, sous la rubrique “IBICE BITATU MU NGABO ZACU”, NGEZE a écrit: “Ubwo Habyarimana yapfaga, mu ngabo zacu harimo ibice bitatu; igice gishinzwe kurwanirira igihugu; igice cyaguzwe n’inkotanyi; igice cya nyuma kirimo abaswa gusa batazi iyo tuva n’iyo tujya. Abo baswa rero nibo birirwaga bampiga bifuza ko nakwicwa, nkaho gupfa kwanjye ari ko gutsinda intambara. None se wasobanura ute ko mu kwezi kumwe hakorwa teregaramu zirenze 40 ku muntu nkanjye utuye mu Rwanda ?  None se uwabaza abo bari bashinzwe kwirirwa bampiga ukuntu Gisenyi-Ruhengeri byafashwe nta mirwano ibaye basobanura iki ? None se byasobanurwa bite ukuntu hari ba ofisiye bahungiye muri Zaïre mbere y’abaturage ? Ibyabaye byose byagombye kutubera isomo rikomeye. Abasirikare bose b’abaswa bakirukanwa. Abadafite disipuline nabo bakirukanwa. Maze hagakorwa undi mutwe mushya ushinzwe kubohoza igihugu cyacu. Naho ubundi hatagize igihinduka ntaho twaba tujya. Abampize bose kubera ubuswa bwabo, ntacyo nzabatwara usibye kubahanisha ikaramu yanjye, kandi iminsi izaza, niyo izerekana ubutwari bwanjye. Abatuye Gisenyi bo bambera abagabo. Abampize bose nibo twirirwa tubisikana hano mu buhungiro”.

En français, ceci veut dire: “TROIS CATÉGORIES PARMI NOS FORCES ARMÉES. Quand Habyarimana est mort, nos forces armées étaient composées de trois catégories de militaires: la première partie comprenait ceux qui se battaient pour le pays, la deuxième était celle de ceux qui avaient été achetés par les Inkotanyi, et la dernière était celle des ignorants qui ne savaient pas d’où nous venions ni où nous allions. Ce sont ces ignorants qui me pourchassaient et qui souhaitaient que je meure, comme si ma mort signifiait gagner la guerre. Comment pouvez-vous expliquer qu’au cours d’un mois seulement, plus de 40 télégrammes aient été lancés contre une personne comme moi qui habitait au Rwanda ? Et si on demandait à ceux-là qui passaient leur temps à me pourchasser comment Gisenyi et Ruhengeri ont été conquises sans combats, que répondraient-ils ? Comment peut-on expliquer que des officiers aient fui au Zaïre avant la population ? Tout ce qui s’est passé devrait nous servir de leçon utile. Tous les militaires ignorants devraient être chassés. Les indisciplinés devraient être chassés également. Et une nouvelle armée serait formée pour la libération de la patrie. Autrement si rien ne change, nous n’irions pas loin. Tous ceux qui m’ont pourchassé à cause de leur ignorance, je ne leur ferai rien, sauf que je les punirai avec ma plume (ou mes écrits), et seul le temps qui vient montrera mon courage (ou mon héroïsme). Quant aux habitants de Gisenyi, ils peuvent m’être témoins. Ceux qui me pourchassaient, je les croise maintenant tous les jours ici en exil”.

Monsieur Hassan NGEZE se fait ici un expert militaire aussi. Mais le point le plus saillant, c’est qu’il avait décidé de causer des ennuis à ceux qui l’avaient gêné dans ses actes, c’est-à-dire moi-même et les deux officiers évoqués ci-dessus. C’est ce qu’il continue à faire, depuis lors, jusqu’à présent, y compris à travers ses deux livres. Nous allons continuer à le voir, dans les lignes qui viennent. Effectivement, il utilise sa plume, pour nous rendre la vie difficile. Par des mensonges malveillants.[1]

Dans Kangura No 62, sous le titre “KANGURA YATANZE IMBABAZI”, il est écrit ce qui suit: “Ba baswa bose bilirwaga bamfunga, ba baswa bose bilirwaga bampiga ngo bagomba kunyica, ba baswa bagabaga ibitero iwanjye ubu twarabababariye kuko twasanze barakoraga ibyo batazi. Bari batarasobanukirwa nuko ibibazo by’u Rwanda biteye. Muri bo harimo abagaragaje ubuswa kurusha abandi, nka Liyetena BIZUMUREMYI, nka Kapiteni HABIMANA n’abandi babatumaga. Ubu bose twarabababariye, ibyo bakoze bazabibazwa n’iminsi. Ubu twe turimo turakora akazi kacu, nabo bazakore akazi kabo maze abaturage aribo bazaduha amanota. NGEZE HASSAN”.

Cela veut dire en français: “KANGURA A PARDONNÉ. Tous ces ignorants qui ne faisaient que m’emprisonner, tous ces ignorants qui ne faisaient que me pourchasser pour me tuer, ces ignorants qui attaquaient mon domicile, nous leur avons pardonné maintenant parce que nous nous sommes rendu compte qu’ils faisaient ce qu’ils ne savaient pas. Ils n’avaient pas encore compris la nature des problèmes du Rwanda. Parmi eux, il y en a qui ont fait montre de plus d’ignorance que les autres, dont notamment le Lieutenant BIZUMUREMYI, le Capitaine HABIMANA et ceux qui leur donnaient des missions. Nous leur avons tous pardonné pour le moment, mais le temps leur fera répondre de ce qu’ils ont fait. Maintenant nous faisons notre travail, qu’ils fassent leur travail eux aussi pour que la population nous donne les points. NGEZE HASSAN”.

Cet article montre bien la rancune que Monsieur Hassan NGEZE avait gardé contre moi-même, ainsi que contre les deux officiers qui étaient sous mon commandement. Tout simplement parce que nous savions ce qu’il faisait, parce que nous avons effectué une perquisition chez-lui et saisi le matériel militaire déjà évoqué, et que je l’ai fait arrêter et détenu un moment, pourtant pas long (il n’a passé qu’une seule nuit en détention, et libéré le jour suivant, en mai 1994). Lui qui faisait alors la pluie et le beau temps, n’a pas supporté que quelqu’un ose se mettre en travers de sa route. Et ce que NGEZE écrit actuellement dans ses deux livres montre bien qu’il a un drôle de pardon.

Dans le numéro 65 de Kangura, sous le titre “NTABWO ALI ABATEGETSI BAZACYURA ABATURAGE, AHUBWO NI ABATURAGE BAZACYURA ABATEGETSI”, nous lisons notamment, ce qui suit: “Gusa nasabaga abakunda Kangura kujya muzirikana ingorane twahuye na zo mu kuvugira Abahutu. Nyamara Inkotanyi ntizikoresha abahutu mu kutugirira nabi! None se ntimwibuka ukuntu Colonel Nsengiyumva Anatoli, afatanyije na Capitaine Habimana wategekaga batayo ya 62, bafatanyije na Lieutenant Bizumuremyi dufitiye ibimenyetso bihagije ko ari Inkotanyi ubu akaba aba mu nkambi ya Gituku kuri Goma, igitero bagabye iwange: bakahasenyagura, bagatwika imodoka yange nshya, ibyo byose ntibyanciye intege ahubwo njye iyo mpuriye nabo mu buhungiro nibaza impamvu batarataha ngo basange uwabakoreshaga, keretse niba bakitwihishemo mu yindi migambi twaba tutaramenya, numvise ko n’uwitwa Munyandinda Protais wiyitaga RASTA ku Gisenyi, watangaga amazu yo gukoreramo amanama yo kunyica ubu nawe yageze muri Kenya ahitwa KOMAROKE. Abahatuye barabe maso bamumenye hakiri kare”.

Ce paragraphe veut dire: “CE NE SONT PAS LES DIRIGEANTS QUI VONT FAIRE RENTRER LA POPULATION, C’EST LA POPULATION QUI VA FAIRE RENTRER LES DIRIGEANTS. Seulement, je voudrais demander à tous ceux qui aiment Kangura de toujours penser aux difficultés que nous avons rencontrées lorsque nous défendions les Hutu. Pourtant, n’est-ce pas que les Inkotanyi utilisent des Hutu pour nous faire du mal ? Est-ce que vous ne vous rappelez pas de comment le Colonel Nsengiyumva Anatole, en collaboration avec le Capitaine Habimana et le Lieutenant Bizumuremyi pour lequel nous avons assez de preuves qu’il est un Inkotanyi, et qui habite au camp [de réfugiés] de Gituku à Goma, ont lancé une attaque contre mon domicile qu’ils ont détruit, et brûlé ma voiture neuve, mais tout cela ne m’a pas découragé, seulement quand je les rencontre en exil, je me demande pourquoi ils ne sont pas encore rentrés au pays pour rejoindre celui pour qui ils travaillaient, sauf s’ils se cachent encore parmi nous pour d’autres desseins que nous ignorons, j’ai même appris que le nommé Munyandinda Protais alias RASTA de Gisenyi, qui mettait ses maisons à la disposition de ceux qui tenaient de réunions préparant mon assassinat est actuellement arrivé lui aussi au Kenya à KOMAROKE. Ceux qui habitent ce quartier doivent rester attentifs pour le localiser à temps”.

Monsieur Hassan NGEZE poursuit dans le même article, en disant (et ceci est très important pour la suite): Iyo nibutse ko ari njye munyamakuru muri Afurika yose umaze gufungwa inshuro nyinshi, dore ko ali 20 muri gereza na 35 muri za kasho za burigade, n’iya 36 nafunzwe na colonel Nsengiyumva mu kwezi kwa gatanu k’uyu mwaka, natekereza ukuntu mu kwezi kwa kane ubwo Habyarimana yapfaga hatangwaga teregaramu zirenze 43 zose kandi zisaba ko umbona wese andasa atazuyaje, bikagera n’aho tumenya umugambi wo kundasira mu Bigogwe kandi ibyo bigakorwa ku mugambi wa Colonel Nsengiyumva Anatoli, Général Gatsinzi n’izindi nyenzi zene wabo, nakwibuka ko ibyo byose mbikorerwa nta mwanya w’igihugu ndangamiye uretse kubona Rubanda Nyamwinshi ifite amahoro gusa, ibi byose rero birerekana ko abategetsi atari bo bazacyura abaturage, ko ahubwo ari abaturage bazacyura abategetsi. NGEZE Hassan”.

Ceci veut dire en français: “Quand je me rappelle que je suis le journaliste qui a été détenu le plus de fois dans toute l’Afrique, à savoir 20 fois en prison et 35 fois dans les cachots des brigades [de gendarmerie], plus la 36ème fois quand le colonel Nsengiyumva m’a arrêté au mois de mai de cette année, quand je me rappelle qu’au mois d’avril quand le Président Habyarimana est mort plus de 43 télégrammes ont été lancés demandant que quiconque me verrait devait tirer sur moi sans hésitation, jusqu’au moment où nous avons su qu’il y avait un plan de tirer sur moi à Bigogwe et cela avec la complicité du Colonel Nsengiyumva Anatole, Général Gatsinzi et tous leurs autres complices Inyenzi, quand je me rappelle que tout ceci était fait contre moi alors que je ne convoitais aucun poste de responsabilité dans le pays, que je voulais tout simplement voir la majorité de la population vivre en paix, tout cela montre bien que ce ne sont pas les dirigeants qui vont faire rentrer la population, que c’est plutôt la population qui va faire rentrer les dirigeants. NGEZE Hassan”.

Dans le même numéro du journal Kangura, sous la plume de Monsieur Hassan NGEZE, et sous le titre “BYIFASHE BITE MU BUHUNGIRO”, nous lisons ce qui suit: “[…] ahubwo mujye mwibuka ko mu bayobozi twahunganye halimo ibyiciro bine: *Abaswa, Abajura, Ibyitso by’Inkotanyi n’Abakozi nyabo dutezeho gutaha kwacu, ahubwo nimurebe, hatagira undi muswa wongera kutuvangira adukerereza mu migambi yacu. Murebe ko nta cyitso cyakongera kutubonekamo nka ba Colonel Nsengiyumva Anatole, Lieutenant Bizumuremyi, Capitaine Habimana n’abandi bose Kangura yababwiye. Abo bajura nabo nimubabaze umutungo batwibye, nibanga kuwutanga mubabwire ko batazawurya, ko bazawusiga”.

Ceci veut dire: “QUELLE EST LA SITUATION EN EXIL? […] vous devez plutôt vous rappeler que les dirigeants avec lesquels nous sommes partis en exil se subdivisent en quatre catégories: * Les ignorants, les voleurs, les complices des Inkotanyi, et les vrais travailleurs dont nous attendons notre retour au pays, soyez plutôt attentifs, pour qu’il n’y ait plus un éventuel ignorant qui puisse semer la confusion et ainsi nous retarder dans nos plans. Veillez à ce qu’aucun autre complice ne puisse se glisser parmi nous, des gens comme le Colonel Nsengiyumva Anatole, le Lieutenant Bizumuremyi, le Capitaine Habimana et tous les autres dont Kangura n’a cessé de vous parler. Réclamez aussi aux voleurs les biens qu’ils nous ont volés, et s’ils ne veulent pas nous les rendre, dites-leur qu’ils n’en profiteront pas, qu’ils vont tout laisser”.

Dans tous ces paragraphes du numéro 65 du journal Kangura, Monsieur Ngeze continue à faire montre de la rancune qu’il a gardée contre moi-même, ainsi que contre le Lieutenant Bizumuremyi et le Capitaine Habimana. J’ai expliqué plus haut les raisons de ce comportement. Puis il a tout fait pour attirer le courroux de la population contre les trois officiers. Mais cela n’a rien donné, nombreux étant ceux qui savaient que Monsieur Hassan NGEZE racontait des mensonges. C’est toujours comme ça qu’il a traité tous ceux qui se mettaient en travers de son chemin.

J’attire particulièrement l’attention sur le passage où Hassan NGEZE parle du nombre de fois qu’il a été détenu. Il parle de 20 fois dans les prisons, et 35 fois dans les cachots des brigades [de gendarmerie]. Il ajoute “Et la 36ème fois quand le Colonel Nsengiyumva m’a arrêté au mois de mai de cette année”. C’est ici qu’il dit la vérité. Je ne l’ai arrêté qu’une fois, et c’est en mai 1994. Je ne l’ai pas arrêté la nuit du 6 au 7 avril 1994 comme il le prétend, et il n’est pas resté en détention jusqu’au 9 avril 1994. Si je l’avais arrêté plus d’une fois, il l’aurait dit dans ce paragraphe. Je reviendrai sur ce point important pour comprendre le mensonge de Monsieur Hassan NGEZE.

Monsieur Hassan NGEZE a également parlé de moi et de mes deux autres officiers, dans le numéro 66 de son journal Kangura, de février 1995. Ainsi, nous voyons à la page 9 de ce numéro, le titre qui se lit comme suit: “ILISITE YAGATEGANYO YAGATSIKO KA FPR KAYOGOJE IGIHUGU KUVA INTAMBARA YATANGIRA KUGEZA UBU. IYI LISITE NUBWO IGIKOMEZA YABAYE ISHIKIRIJWE URUKIKO MPUZAMAHANGA NGO ABAYIRIHO BAZASOBANURE UKO BAMAZE ABAHUTU BINZIRAKARENGANE”. Ceci veut dire en français: “LISTE PROVISOIRE D’UN GROUPE DU FPR QUI A DEVASTE LE PAYS DEPUIS LE DÉBUT DE LA GUERRE JUSQU’À PRÉSENT. MÊME SI CETTE LISTE N’EST PAS EXHAUSTIVE ET QU’ELLE CONTINUE, ELLE A ÉTÉ QUAND MÊME REMISE AU TRIBUNAL INTERNATIONAL POUR QUE CEUX QUI FIGURENT DESSUS S’EXPLIQUENT SUR COMMENT ILS ONT EXTERMINÉ DES HUTU INNOCENTS”.

Avant de donner la liste, Hassan NGEZE donne quelques explications préalables, et nous lisons, notamment: “Dushimishijwe no kubagezaho ilisiti igaragaza umubare n’amazina y’abantu FPR yakoreshaga mu kwica inzirakarengane. Muri abo bagize iyo lisiti harimo abakorera FPR ku ruhande rwayo rwa gisirikare, hakabamo abayikorera mu rwego rwa gisivili, hakabamo n’abo yabaga yaragize ibyitso baba mu ngabo z’u Rwanda cyangwa mu zindi nzego zabaga imbere mu gihugu. Nta gitangaje kuba bamwe muri iyo lisiti hari abakorera inkotanyi ariko batarazisanga imbere mu gihugu. Ni ukuba maso rero iyo lisiti yashyikirijwe umunyamabanga mukuru wa ONU n’andi mashyirahamwe aharanira uburenganzira bw’ikiremwamuntu. Ilisiti iracyakomeza kuko hari n’abandi ariko kubera impamvu za politiki ababishinzwe badusabye kubigira ibanga kuko hari bamwe bakoranaga n’inkotanyi kera nyuma bakagaruka ku ruhande rwacu nabo tukaba dufite ibimenyetso by’ubwicanyi bakoze, abakurikirira hafi bibuka uwigeze kuvuga ngo Imana yaramuhemukiye avukira mu rukiga, ngo uwamusaba umusanzu uwo ariwo wose wo guhirika abakiga mu nzira zose ngo yawutanga, none yagize ibyago Umukiga asimbura undi mukiga ku buyobozi bw’igihugu. Ubwo namwe muramuzi, ubu turi hamwe mu buhungiro usibye ko ntawamenya ibyo ahatse. Ako gatsiko ka FPR mu gukora ubwicanyi, kabukoreshaga ubuhanga bunyuranye. Nk’iyo kashakaga kwica umuntu, kashakaga uwo gakoresha yewe n’aho baba abahutu kashoboraga gukoresha ibyitso byabo by’abahutu. Mu rwego rwo kwica, FPR yabanje kwica abantu nka ba Gatabazi, ibona ntacyo bitwaye, irongera yica Bucyana, ibona ntacyo bitwaye, ubwo ni nako yicaga mu nzego zinyuranye. Kubera ko yabonye abo bose bapfuye ntihagire intugunda zivuka kugeza ubwo naba Gapyisi bicwaga na Twagiramungu yatumwe na FPR ntihagire icyo bitanga, FPR yaje kwibeshya ko niyica na Habyarimana ariko bizagenda ko abantu baruca bakarumira, iza guhura n’ingorane maze Habyarimana apfuye bituma hameneka amaraso menshi y’inzirakarengane, n’abandi barahunga kubera ubugambanyi bw’abo bose”.

Ceci veut dire en français: “Nous sommes heureux de vous donner une liste qui montre le nombre et les noms de personnes que le FPR utilisait pour tuer des innocents. Parmi ceux qui figurent sur cette liste, il y en a qui travaillaient pour le FPR dans le domaine militaire, il y en a ceux qui travaillaient pour lui dans le domaine civil, puis il y a d’autres dont il avait fait ses complices, que ce soit au sein des FAR (Forces Armées Rwandaises) ou dans d’autres domaines à l’intérieur du pays. Ne soyez pas étonnés qu’il y a certains qui figurent sur la liste et qui travaillent pour le FPR, mais ne l’ont pas encore rejoint au pays. Restez donc attentifs car cette liste a été remise au Secrétaire Général de l’ONU et à d’autres organisations de défense des droits de l’homme. La liste n’est pas exhaustive, car il y a d’autres noms, mais pour des raisons politiques, les responsables concernés nous ont demandé de garder cela secret, car il y en a ceux qui travaillaient avec le FPR avant et qui nous ont rejoint par la suite, alors que nous avons les preuves des tueries qu’ils ont commises, ceux qui suivent les choses de près se rappellent de quelqu’un qui a dit une fois qu’il reproche à Dieu de l’avoir fait naître dans le Rukiga, que celui qui lui demanderait son concours pour renverser les bakiga, de quelque manière que ce soit, il serait près à le donner, mais malheureusement pour lui, un Umukiga a remplacé un autre Mukiga à la direction du pays. Vous le connaissez vous-mêmes, il est actuellement avec nous en exil, sauf qu’on ne peut pas savoir ce qu’il pense. Quand ce groupe du FPR voulait tuer, il le faisait de manière sophistiquée. Quand il voulait tuer quelqu’un par exemple, même si les victimes étaient des Hutu, il [le groupe] pouvait utiliser ses complices Hutu. Dans le cadre des assassinats, le FPR a d’abord tué des gens comme Gatabazi, il a vu qu’il n’y a pas de réaction, il a tué ensuite Bucyana, il a vu qu’il n’y a pas de réaction, et il continuait à commettre d’autres assassinats à différents niveaux. Puisqu’il s’est rendu compte que l’assassinat de toutes ces personnes n’a entraîné aucun trouble dans le pays jusqu’au moment où des gens comme Gapyisi ont été tués par Twagiramungu avec la complicité du FPR et qu’il n’y a pas eu de réaction, le FPR s’est leurré en pensant que s’il assassine Habyarimana ce sera la même chose, que les gens vont rester calmes, mais il a rencontré des difficultés car lorsque Habyarimana a été tué, beaucoup de sang d’innocents a coulé, beaucoup d’autres sont devenus des réfugiés, et tout ceci à cause de la trahison de toutes ces gens”.

Monsieur Hassan NGEZE donne alors la liste en question, sous le titre “DORE RERO ILISITI Y’ABAFASHIJE FPR”, qui veut dire “VOICI DONC LA LISTE DE CEUX QUI ONT AIDE LE FPR”. Je ne vais pas reprendre toute la liste, qui compte 235 noms. Je donne juste quelques noms. Je souligne tout simplement que le No 45 est “Colonel NSENGIYUMVA Anatole, Camp Gisenyi”, le No 46 c’est “Capitaine HABIMANA, 62e bataillon”, tandis qu’au No 47 nous lisons “Lieutenant BIZUMUREMYI, Camp Gisenyi”. Et voici quelques autres noms, tel que repris sur la liste:

  1. Gen KAGAME Paul, militaire dans l’armée ougandaise;
  2. Colonel KANYARENGWE Alexis, chairman du FPR;
  3. TWAGIRAMUNGU Faustin, commerçant, assassin de Gapyisi;
  4. BIZIMUNGU Pasteur, responsable de l’information  au FPR;
  5. KIMENYI Alexandre, professeur aux USA;
  6. Gen RUSATIRA Léonidas, commandant ESM Kigali;
  7. Gen GATSINZI Marcel, militaire dans l’armée rwandaise;
  8. RUGENERA Marc, Ministre des Finances;
  9. MAZIMPAKA Patrick, commissaire au FPR;
  10. SENDASHONGA Seth, membre du FPR;
  11. RUTAREMARA Tite, membre du FPR;

[….]

  1. Colonel KARENZI Karake, militaire dans l’armée ougandaise;
  2. Colonel MUGAMBAGE Frank, militaire de l’armée ougandaise;
  3. BIHOZAGARA Jacques, commissaire au FPR;
  4. RUDASINGWA Théogène, membre du FPR;
  5. ZILIMWABAGABO Charles, membre du FPR infiltré;

[…]

  1. Col NSENGIYUMVA Anatole, camp Gisenyi;
  2. Capitaine HABIMANA, 62ebataillon;
  3. Lieutenant BIZUMUREMYI, Camp Gisenyi;

[…]

  1. Abbé KASHYENGO, Diocèse de Nyundo;
  2. Abbé NSENGUMUREMYI JMV, Diocèse de Nyundo;

[…]

  1. KIBIBI Jeanne, agent FPR infiltrée;

[…]

  1. GASISI, Zone Nyiragongo, Zaïre;

[…]

  1. KAYIREBWA Cécile, Propagandiste FPR;
  2. MUKAMABANO Madeleine, Agent FPR sur RFI;
  3. KAMILINDI Thomas, Journaliste Radio Rwanda;

[…]

  1. KABEJA Thomas, directeur de cabinet MINAGRI;
  2. Frère KAMUHANDA J.B., Directeur Ecole Rwamagana;
  3. Abbé MASUMBUKO Albert, Curé de Rwamagana;
  4. MUJAWAMARIYA Monique, agent du FPR infiltré;
  5. MATATA Joseph, agent du FPR infiltré;
  6. Abbé INCIMATATA, Curé de Kabarondo;

[…]

  1. Major KAKA, militaire de l’armée ougandaise;
  2. Major BUTERA, militaire de l’armée ougandaise;

[…]

  1. MUTALIKANWA, avocat;
  2. MUTAGWERA Frédéric, avocat;
  3. NSANZUWERA François, Procureur de la République, Kigali;

[…]

  1. KARENZI Pierre Claver, Prof à l’UNR;
  2. NSENGIMANA Joseph, actuel MINISUPRES, ancien Prof UNR;
  3. RWANGABO Pierre Claver, ancien conseiller Primature;

[…]

  1. KANONKO et ses fils, Kicukiro
  2. BUTURUMBA de Kicukiro;
  3. BIDELI Fidèle de Kicukiro, fils Muzungu Thomas, Kicukiro;
  4. NYIRIMANZI bahimbye MANZI, akaba ari we wishe abasenyeri i Kabwayi, ubu akaba yaragororewe guhagararira u Rwanda muri Kenya, aho yahawe ubutumwa bwo kwica abahutu bahahungiye, gusa akaba ari uko guverinoma ya Kenya imuzi neza, izi ubugome yatojwe na Museveni, bikaba bisaba ko n’abanyarwanda baba muri Kenya (abahutu) bagomba guhora bazirikana ko uwo Manzi yoherejwe mu butumwa bwo kubicisha, kubirukanisha, no kubabuza amahoro”.[2]

Ce sont là quelques-uns des noms parmi ceux qui figurent sur la liste publiée par Hassan NGEZE. Et il termine l’article en disant: “Iyi lisite yashyizweho umukono byagateganyo nuhagarariye ibiro gikirisitu byo mu Burayi bw’Iburasirazuba aba ari nabyo biyishyikiriza urukiko mpuzamahanga byagateganyo”.

Ce qui veut dire: “Cette liste a été provisoirement signée par le représentant du Bureau Chrétien en Europe de l’Est, et c’est lui qui l’a fait parvenir provisoirement au Tribunal International”.

Je n’ai pas besoin de faire beaucoup de commentaires pour montrer que toute cette histoire de Hassan NGEZE était farfelue. Si beaucoup de personnes qui figurent sur sa liste étaient effectivement des membres du FPR, beaucoup d’autres ne l’étaient pas. Bien sûr que je ne connaissais pas tous ceux qui figurent sur la liste. Mais je n’ai jamais entendu autrement parler d’une liste qu’un Bureau Chrétien en Europe de l’Est aurait fait parvenir “provisoirement” au Tribunal International. Je ne connais par ailleurs pas ce dit Bureau Chrétien en Europe de l’Est.

Je n’ai jamais fait parti du FPR, mes officiers non plus. Ça, tout le monde le sait. Tout ceci montre bien le cadre dans lequel Monsieur Hassan NGEZE écrivait, et écrit toujours, pour se venger de certaines personnes, pour divers motifs. Ça devrait également montrer avec quel sérieux on doit prendre les écrits de Monsieur Hassan NGEZE, y compris ses livres.

Monsieur Hassan NGEZE a tout fait pour me faire condamner

En 1995, je suis allé chercher asile au Cameroun, où je fus arrêté en mars 1996. Je fus transféré à Arusha le 23 janvier 1997. NGEZE était alors libre et vivait à Nairobi. Mais il fut à son tour arrêté en juillet 1997, et fut transféré à Arusha où il m’a retrouvé. Quand il y est arrivé, il ne voulait même pas me parler. Il disait aux autres détenus que j’étais son ennemi No1, et qu’il allait tout faire pour me faire condamner à la prison à vie, et qu’il en était capable. Je ne prenais pas cela au sérieux. Il disait également qu’il avait communiqué à l’association AFRICAN RIGHTS, des accusations graves contre moi. Jusque-là, je ne connaissais pas AFRICAN RIGHTS, et je n’avais aucune idée de ce que NGEZE lui avait communiqué. Plus tard, j’ai pu savoir qu’il s’agissait d’une association très proche du FPR. Quant au document écrit par NGEZE et adressé à cette association, j’ai pu l’avoir plus tard et je l’ai lu. Dans ce document, NGEZE commence par expliquer la provenance des fameux “Dix Commandements des Hutu”, pour dire que ce n’était pas de son invention. Puis il parle des partis politiques et de beaucoup d’autres choses. Et vers la fin, il parle des massacres qui ont été commis à Gisenyi, consécutivement à l’assassinat du Président HABYARIMANA. C’est alors qu’il parle de moi. La partie pertinente de ce document se lit comme suit:

 

LES TUERIES QUI ONT EU LIEU AU RWANDA EN AVRIL 1994

ET SES CONSEQUENCES SUR LA DIRECTION DE “KANGURA”

Nous avons écrit dans “Kangura” No 53 de décembre 1993 que le Président HABYARIMANA risquait de mourir vers fin mars 1994.

Conséquences de la mort du Président HABYARIMANA sur “Kangura”

En avril 1994 après la mort du Président HABYARIMANA, le Commandant de l’Armée Rwandaise à Gisenyi, le Colonel Anatole NSENGIYUMVA, a organisé une réunion avec ses adjoints comprenant notamment, le Capitaine HABIMANA, qui commandait le Bataillon 62 stationné à Gisenyi, ainsi que le Lieutenant BIZUMUREMYI. Dans cette réunion, il a été retenu que je devais être attaqué et tué chez-moi avec tous ceux qui se trouveraient dans mon domicile. Mais auparavant, j’ai été convoqué au camp militaire où j’ai été enfermé jusqu’au soir, lorsque le Lieutenant m’a demandé de lui expliquer pourquoi les choses que je prédis arrivent toujours. Je lui ai fait comprendre que cela était dû aux signes avant-coureurs qu’il nous était possible de détecter de part notre métier. Il a ensuite demandé à son supérieur ce qu’il fallait faire de moi, et il a décidé que l’on devait me laisser retourner chez-moi où le nécessaire allait être fait lors de l’attaque contre mon domicile.

Au début du mois de mai, le Sous-Lieutenant DUSABEYEZU, fils d’un Adjudant-Chef qui travaillait à la Présidence de la République, qui se trouvait alors au camp militaire de Gisenyi mais qui a maintenant rejoint les rangs du FPR, a attaqué mon domicile accompagné de cinq autres militaires. C’était vers 19 heures. Il a dit qu’il était envoyé par le Colonel Anatole NSENGIYUMVA pour qu’il vienne vérifier si je ne cachais pas des Tutsi chez-moi, dans quel cas il devait alors brûler toute la concession. Il lui a alors été demandé de mettre par écrit toutes ces déclarations et d’y apposer sa signature. Ce qui fut fait aussitôt. Ensuite, il a mis la maison sens dessus, sens dessous pour rechercher ces Tutsi dont il n’a pas trouvé la moindre trace.

Une semaine plus tard, vers 1 heure du matin, des militaires conduits par le Capitaine HABIMANA et le Lieutenant BIZUMUREMYI dont j’ai déjà parlé sont venus chez-moi. Dès leur arrivée, ils ont tiré beaucoup de coups et brûlé ma Peugeot 305. Dans cette opération, une personne qui n’était pas impliquée dans cette histoire a trouvé la mort. Tous les habitants de la ville de Gisenyi peuvent témoigner de ces attaques contre mon domicile.

Après l’échec de ces attaques, plus de 43 télégrammes ont été lancés demandant à toute personne qui m’apercevrait de tirer immédiatement sur moi. Au courant de ce mois, j’ai été attrapé sur la route Ruhengeri-Gisenyi dans un lieu nommé Bigogwe. Le militaire qui m’a arrêté m’a directement montré le télégramme lui intimant l’ordre de m’abattre sur-le-champ, mais puisque nous étions nombreux, il a préféré m’emmener au camp militaire de Bigogwe. La même nuit, deux véhicules nous ont conduits au camp militaire de Gisenyi, et le lendemain soir, l’on m’a fait monter à bord d’une jeep, sous la garde d’un lieutenant de la Police Militaire et de six autres militaires qui avaient reçu la consigne de m’abattre sur la route de Kigali après avoir avisé le Chef d’Etat-Major de l’Armée à Kigali même.

Nous sommes arrivés à Kigali pendant la nuit et j’ai directement été conduit auprès du Chef d’Etat-Major de l’Armée, le Général BIZIMUNGU. Celui-ci m’a laissé lui expliquer l’origine de tous mes problèmes et il a conclu que tout cela avait été causé par le Colonel Anatole NSENGIYUMVA qui envoyait d’incessants télégrammes demandant que je sois abattu tout simplement parce que [je] prédisais des faits sur base des signes avant-coureurs que j’observais et qui étaient vérifiables.

Par la suite, Radio Rwanda m’a interviewé à propos de ce que j’avais écrit pendant la guerre, et sur la façon dont je pensais que la guerre allait se terminer. Compte tenu de l’ignorance profonde qui caractérisait tous ceux-là qui me pourchassaient et de l’embargo sur les armes qui venait d’être décidé contre le Gouvernement Rwandais, j’ai répondu que la guerre allait se terminer au mois de juillet 1994, mais qu’à Kigali elle allait prendre fin en août de la même année. Et c’est comme cela que ça s’est passé effectivement.

Voilà donc, Messieurs les Dirigeants de African Rights, quelques-uns des éléments que nous avons pu vous faire parvenir pour le moment, ceux-ci n’étant qu’une mince partie par rapport à tous ceux dont nous disposons en tant que journalistes. Nous vous prions de bien vouloir diffuser le contenu de la présente auprès de vos lecteurs, puisque vous avez souvent écrit sur nous des propos qui n’avaient rien à voir avec la réalité, notamment en nous attribuant des fautes qui avaient été commises par d’autres, en penchant du côté du FPR, et en évitant de diffuser des écrits publiés par les journaux qui ne sont pas de la tendance FPR.

Nous vous attendons donc et sommes prêts à vous fournir de plus amples informations. Nous souhaitons vivement aussi que le Tribunal International soit installé le plus rapidement possible, car il va constater notre innocence, prouver ainsi que vous êtes purement et simplement tombés dans le piège du FPR qui vous oblige de faire sa volonté uniquement en vous empêchant d’écouter aussi la partie adverse.

Dans le même ordre d’idées, nous sommes également disposés à fournir, honnêtement et à coeur ouvert, toutes informations sur le Rwanda à toute personne qui le souhaite. Nous lui répondrons, bien entendu, en notre qualité de journalistes, et pas en tant qu’historiens ou politiciens que nous n’avons pas la prétention d’être.

S’agissant de la question de savoir si le journal “Kangura” va continuer à paraître, il sied de signaler que la réponse reste affirmative. Même si les responsables actuels trépassaient d’une manière ou d’une autre, les amis du Journal poursuivraient sa rédaction. Aujourd’hui, “Kangura” est édité en Belgique, mais il peut être transféré dans tout autre pays garantissant la pleine liberté de presse.

Le Directeur du Journal “Kangura”

Hassan NGEZE (Sé)

Copie pour information à

  • Monsieur le Secrétaire Général de l’ONU, NEW YORK
  • Monsieur le Président de la République
  • Monsieur/Madame le Ministre de l’Information de l’Etat membre de l’ONU
  • Monsieur le Procureur Général près le Tribunal International pour le Rwanda
  • Organisations de Défense des Droits de l’Homme (Toutes)
  • Associations des Journalistes (Toutes) Radio – TV du Monde
  • Agence France Presse:

International House

P.O. Box 10671 Nairobi

 

Monsieur Hassan NGEZE prétend notamment, dans ce document, daté du 2 février 1995, que j’ai voulu le tuer, parce qu’il sauvait des Tutsi, en les cachant et en les évacuant au Zaïre (République Démocratique du Congo actuellement). Ceci était un vrai mensonge, et visait plutôt à masquer la réalité des faits. J’y reviens dans ce document.

Je voudrais néanmoins attirer l’attention des lecteurs sur le passage où NGEZE parle de son arrestation. Il raconte des choses tout à fait différentes de ce qu’il a écrit dans son journal Kangura, et que nous venons de lire ci-dessus. Il dit notamment qu’il a été convoqué au camp militaire, et après interrogatoire, il a été relâché le même jour, pour rentrer chez-lui. Tout ceci montre bien qu’il n’a fait que du montage, pour se mettre du bon côté, et mettre sur ma tête tous les événements qui se sont passés à Gisenyi. En fait, Hassan NGEZE mélange toujours le vrai avec le faux, et essaie de semer la confusion. Mais le faux prédomine sur le vrai. Il a pris soin de réserver une copie du document au Procureur du TPIR, en février 1995 déjà, ce qui peut expliquer en partie pourquoi je fus parmi les premières personnes à avoir été accusées par le TPIR.

Qu’en fut-il une fois arrivé à Arusha (UNDF) ?

Un moment donné, alors que nous étions à l’UNDF à Arusha, juste après l’épisode de sa tentative alléguée de suicide, NGEZE est venu nous trouver où nous étions assemblés, en train de prier[3]. Il nous a demandé de lui accorder un petit instant, pour qu’il nous dise quelque chose de très important. Nous l’avons écouté. Il nous révéla que lorsqu’il a été arrêté à Nairobi et amené à Arusha, il était très heureux, car il croyait qu’il pourrait corrompre les gardiens de prison, qui lui donneraient une arme pour qu’il tire sur moi – Anatole NSENGIYUMVA – pour le différend qui nous opposait. J’étais sidéré. Mais il s’est empressé d’ajouter qu’il avait réfléchi, et s’est rendu compte que son dessein n’était pas correct, que peut-être Anatole Nsengiyumva avait fait son devoir, sans méchanceté. Il nous affirma qu’il avait décidé de demander pardon et de se réconcilier avec moi. Il me demanda de lui donner la main pour nous réconcilier. Je l’ai fait avec joie, et tous les camarades ont apprécié. Ils ont applaudi. Je croyais que c’était fini. C’était ne pas bien connaître Monsieur Hassan NGEZE. En fait, il voulait tout simplement endormir ma méfiance, pour ses intérêts personnels. Il voulait m’amener à collaborer avec lui, pour l’aider à préparer son procès. Nous le verrons plus bas dans ce document.

En date du 4 mai 1999, Hassan NGEZE a écrit une lettre à tous les officiers des ex-FAR qui étaient détenus à Arusha. Il nous demandait de collaborer avec lui pour que nous puissions adopter la même stratégie devant la Cour. Il faisait du chantage pour chacun de nous, pour nous obliger d’accepter son offre. Pour ce qui me concerne, il répéta les allégations selon lesquelles je l’avais arrêté et détenu au camp militaire, de la nuit du 6 au 7 avril 1994, jusqu’au 9 avril 1994. Il ajouta certaines autres choses, impliquant également des Interahamwe, dont notamment les nommés Thomas MUGIRANEZA, TWAGIRAYESU alias MABUYE, Damas KALIKUMUTIMA, Bernard MUNYAGISHARI, et un certain GAHUTU. Il affirma que ces Interahamwe figuraient également dans le dossier de Monsieur Omar SERUSHAGO.

Depuis lors, Monsieur Hassan NGEZE n’a cessé de me contacter, me demandant de témoigner pour lui, et dire à la Cour que je l’avais arrêté la nuit du 6 au 7 avril 1994, juste après la mort du Président HABYARIMANA, et qu’il était resté en détention jusqu’au 9 avril 1994. Il ajoutait que ceci nous aiderait tous les deux, car les faux témoins qui prétendaient que Monsieur Hassan NGEZE avait été vu en ma compagnie en train de distribuer des armes, ou en train de tenir des meetings, seraient surpris par nos arguments. Je n’ai pas accepté son offre, car je ne voulais pas m’embarquer dans des mensonges devant la Cour. En plus, je n’avais pas arrêté Monsieur Hassan NGEZE la nuit du 6 au 7 avril 1994. Il n’a pas mis les pieds au camp militaire du 6 au 9 avril 1994. Il voulait m’amener à mentir à la Cour, et je ne pouvais pas embarquer dans cette stratégie. Les preuves sont nombreuses de ce que je dis ici.

Quand il réalisa que j’étais fermement opposé à ses approches, NGEZE passa à la menace et au chantage. Mais quand il réalisa que j’étais intraitable, il reprit sa stratégie de m’approcher et me parler avec douceur. Ainsi, le 17 juin 2001, entre 17h00 et 18h00, il vint me voir pour me parler. Il me répéta que si je dis que je l’avais arrêté la nuit du 6 au 7 avril 1994, et qu’il était resté en détention jusqu’au 9 avril 1994, cela allait nous aider tous les deux, car il y avait des choses dont on nous accusait ensemble pendant cette période. Encore une fois, j’ai opposé une fin de non-recevoir. Mais il ne s’est pas découragé.

Le lendemain 18 juin 2001, NGEZE revint me voir, mais cette fois en me menaçant encore une fois. Il me dit que je dois savoir qu’une fois je lui ai donné des grenades, mais que si j’accepte de l’aider, il n’allait pas le dire aux juges. Ceci était une autre fabrication de sa part mais qui ne m’a pas perturbé. A la même occasion, il me dit qu’il avait beaucoup de témoins au Rwanda, parmi lesquels des témoins du Procureur, qui viendront le charger, mais qui, une fois arrivés devant la Cour, le défendront plutôt à la grande surprise de l’Accusation. Il ajouta qu’un de mes chauffeurs viendra le défendre devant la Cour, et affirmera que j’avais arrêté NGEZE la nuit du 6 au 7 avril 1994. Il me demanda de ne pas contredire mon chauffeur, quand il fera ce témoignage. Je suis resté imperturbable, et je ne lui ai pas donné de réponse.

NGEZE me dit alors que je dois savoir que mes militaires avaient attaqué son domicile, mais qu’il n’en dira rien, si j’accepte de l’aider dans sa stratégie. J’ai rejeté sa proposition, et il est parti très fâché. Ceci se passait vers 18h00. Quand nous étions ensemble, certains de nos collègues qui nous voyaient ont été intrigués, car il n’était pas courant de me voir parlant avec Monsieur Hassan NGEZE. Il m’ont demandé ce qui s’était alors passé, et je leur ai raconté toute l’histoire. Ils peuvent donc témoigner sur ce point bien précis.

Quand toutes les manoeuvres ont échoué, Hassan NGEZE a essayé de me corrompre, il a cherché deux émissaires parmi nos collègues, qui sont venus me donner son message. Il me proposait une somme de 1.500 dollars, si j’acceptais de l’aider. J’ai dit au premier émissaire de lui dire “non, merci”. Il m’a envoyé un autre émissaire, un sage parmi les sages, croyant que lui allait me convaincre. Ma position est restée la même. J’ai fait dire à NGEZE que je n’avais pas besoin de son argent. C’est alors qu’il est passé au niveau supérieur.

Hassan NGEZE ouvre les hostilités

Dans une lettre datée du 26 octobre 2001, Hassan NGEZE a écrit au Tribunal, lui demandant de lui donner les traductions de lettres qu’il avait écrites à Anatole NSENGIYUMVA. Il me donna une copie de cette lettre, ainsi qu’à d’autres collègues de détention. Je me rendis compte que je n’avais jamais reçu ces dites lettres, qui étaient au nombre de cinq, malgré qu’il était supposé me les avoir adressées lorsque nous étions encore au Rwanda. Il s’agissait en fait de simples fabrications de sa part, pour faire croire qu’il m’avait écrit pour se plaindre du fait que je l’avais arrêté dans la nuit du 6 au 7 avril 1994, et maintenu en détention jusqu’au 9 avril 1994. Il parlait également de mon implication alléguée dans les tueries et d’autres crimes. Il évoquait aussi un plan allégué visant à l’assassiner. Hassan NGEZE, sans rire, avait inventé ça pour les besoins de son dossier.

Je vais reprendre toutes ces lettres de montage, pour montrer au lecteur combien Monsieur Hassan NGEZE est un expert en montage. La première lettre est supposée dater du 16 mars 1994, donc bien avant la mort du Président Habyarimana, et nous y lisons ce qui suit:

Hassan Ngeze                                                                                    Gisenyi, le 16 mars 1994

Directeur du Journal Kangura

B.P.19 Gisenyi

Rwanda

A Monsieur Nsengiyumva Anatole, Commandant

des Opérations militaires de la région de Gisenyi

Objet: Complot formé par certains militaires en vue d’assassiner Ngeze

Monsieur le Colonel Nsengiyumva,

Après la lettre que je vous ai adressée ce matin alors que je me trouvais encore à Kigali et que je vous ai envoyée par le biais du Commandement de l’armée à Kigali, je trouve qu’il est nécessaire, maintenant que je vais passer la nuit ici à Gisenyi, de vous envoyer une autre lettre pour que vous puissiez mieux comprendre les faits que vous me reprochez et qui sont à la base du tort que vous voulez me causer.

Au cours de conversation avec le Chef d’état-major de l’armée, le Général Déogratias Nsabimana, ce dernier m’a dit que dans tous les rapports que vous faites sur moi, vous affirmer détenir des preuves indiquant que je suis un Inyenzi.

Et il semble que la raison en est que vous ne comprenez pas mon attitude notamment en ce qui concerne mes écrits ou mes relations avec les Tutsi. Cela vous a poussé à demander au Commandant de l’Armée l’autorisation de vous débarrasser de moi, autrement dit, de me tuer.

Parmi les preuves que vous fournissez, il y aurait le fait que dans certains télégrammes du FPR dont vous avez eu connaissance, on aurait écrit ceci: “Nous sommes en contact avec le journaliste de la deuxième région “Gisenyi”.

Le fait que les machines télégraphiques et les techniciens qui s’en occupent se trouvent à Gisenyi vous a permis de convaincre le commandant de l’Armée de la nécessité de mon élimination sous prétexte que, selon vos observations et vos informations, je serai un ennemi du pays.

Vous ajoutez que vous ne comprenez pas comment je peux avoir des relations avec les Tutsi, surtout ceux soupçonnés d’être des complices des Inkotanyi. Vous dites également que je couvre et soutiens les Inyenzi à qui l’Islam sert de couverture, surtout par les discours que je tiens dans les mosquées demandant aux musulmans d’avoir les mêmes opinions, d’être unis, et de désavouer quiconque tenterait de semer le désordre parmi eux.

Il semblerait que vous dites également que vous ne comprenez pas comment quelqu’un qui n’est ni un messager ni un ange de Dieu peut prédire des événements qui se produisent réellement par la suite, à moins qu’il n’ait collaboré avec ceux qui les ont préparés. Vous citez comme exemple le fait que j’ai écrit sur le problème de la guerre au Rwanda avant qu’elle ne survienne et qu’elle a éclaté par la suite. Vous donnez aussi l’exemple du communiqué que j’ai rédigé avertissant le Président de la République de ne pas assister aux obsèques de l’ancien Président de la Côte d’Ivoire. Effectivement, suite à ce communiqué, le Président de la République n’y a pas assisté.

Enfin, vous dites que vous ne comprenez pas comment je parle toujours des attaques du FPR avant qu’elles ne surviennent; il semblerait que vous ne comprenez pas comment j’obtiens ces informations et que c’est pour cette raison que vous dites que je suis un Inyenzi.

Maintnenant, si vous me le permettez, je voudrais m’expliquer.

  1. Je ne vois rien de mal du fait que j’ai de bonnes relations avec les Tutsi musulmans soupçonnés d’être des Inkotanyi, car je n’ai reçu aucun ordre écrit ou verbal m’interdisant d’être l’ami de quelqu’un soupçonné d’être un Inkotanyi.
  2. Je ne suis pas magistrat et aucun magistrat ne m’a jamais interdit cela. De plus, aucun service de sécurité ne m’a donné une liste des personnes avec lesquelles je dois avoir des relations amicales et d’autres avec lesquelles je ne dois entretenir aucune relation. Je suis un musulman qui respecte sa religion et celle-ci m’enseigne à avoir la compassion et l’amour et à vivre en bonne entente avec tous. Si j’entretiens des relations amicales avec quelqu’un dont vous détenez des preuves qu’il est un ennemi de la nation, publiez une loi qui m’interdit de le fréquenter. J’ai été emprisonné à de nombreuses reprises, cela vous le savez puisque vous en avez été souvent la cause. Lors de tous mes séjours en prison, je me suis trouvé en compagnie d’un grand nombre de personnes innocentes, qui n’étaient là que parce que telle ou telle personne les haïssait. C’est la raison pour laquelle je fréquente qui je veux et cela est conforme à l’éducation que j’ai reçue.
  3. Je ne m’étendrais pas outre mesure sur le fait que j’écris sur des événements qui finissent par se produire alors que je ne suis ni un messager ni un prophète de Dieu. En effet, je pense que vous êtes suffisamment intelligent pour comprendre les tenants et les aboutissants du métier de journaliste. Ayant vous-même été un agent de renseignement, vous devriez savoir que personne ne doit être victime de sa perspicacité quand celle-ci est utilisée à bon escient; au contraire, on devrait récompenser cette personne au lieu de la punir.
  4. Mon devoir est d’apporter à mes lecteurs des informations que je juge utiles et surtout de les réconforter dans les difficultés qu’ils traversent. S’il y a des points dans mes écrits qui vous paraissent incompréhensibles ou vous offensent, saisissez les instances judiciaires et que justice soit faite.

Vous écrivez au Commandement de l’armée qu’on devrait me demander d’où j’ai tiré l’information selon laquelle le Président Habyarimana serait assassiné. Cela vous fait dire que je collabore avec l’ennemi, que je sème la panique au sein de la population lorsque je dis que le Chef de l’Etat sera assassiné. Si vous voulez mon opinion sur cette information que j’ai annoncée au mois de décembre de l’année dernière et qui a été publiée dans Kangura No 53 de décembre 1993, moi en tant que journaliste indépendant, je la confirme jusqu’à présent, qu’il y a un plan d’assassiner les chefs d’Etat suivants: Habyarimana du Rwanda, Arap Moi du Kenya et Mobutu du Zaïre.

Mais celui qui doit mourir absolument avant la fin du moi de mars, c’est Habyarimana du Rwanda. J’ai parlé de cette question d’assassinat de Habyarimana avec lui-même, mais il a refusé d’accepter ça, tout en disant qu’il s’agit de rumeurs non fondées.

J’ai même parlé avec le Commandant de la MINUAR au Rwanda le général Roméo Dallaire, et il m’a dit que mes appréhensions sont injustifiées, car, dit-il, tant que la MINUAR est au Rwanda, de telles actions sont impossibles, et selon Dallaire, je suis un “paranoïaque”. Si vous n’êtes pas satisfait de mes explications, je vous demanderais de m’appeler pour que je vous explique davantage, au lieu de me tuer pour rien. Vous pouvez même faire recours à celui que vous avez remplacé, Monsieur Bahufite, qui est actuellement le commandant militaire de la région de Byumba, il vous dirait tout ce qui me concerne, pendant tout le temps qu’il a passé ici à Gisenyi.

Moi en tant que journaliste indépendant et musulman, je ne suis pas un traître, que celui qui dit le contraire et qui a des preuves pour ça peut le dire aux autorités officielles, pour que la justice suive son cours.

Je vous remercie de votre attention.

Copie pour information:

  1. Le Président de la République, Kigali;
  2. Le Ministre de la Défense nationale, Kigali;
  3. Le Ministre de la Justice, Kigali;
  4. Le Ministre de l’Information, Kigali;
  5. Le Chef d’Etat-Major de l’armée, Kigali;
  6. La presse écrite (toute)”

Cette lettre, comme toutes les autres de cette série, je ne l’ai jamais reçue alors qu’elle était supposée m’être destinée. Je n’ai jamais entendu personne parler de cette lettre. Vous remarquerez que Monsieur Hassan NGEZE ne mentionne pas ces lettres dans son journal Kangura, dans les numéros écrites à Nairobi, ou en Belgique comme il fut allégué. Et il n’allait pas manquer de les évoquer. Il allait même mettre des copies dans son journal.

Au mois de mars 1994, je n’avais pas encore eu de problème avec Hassan NGEZE, et personne ne m’avait dit qu’il s’était livré à quelque activité répréhensible que ce soit, du moins pendant la période où je me trouvais à Gisenyi, jusqu’en mars 1994. Ce qu’il raconte dans cette lettre du 16 mars 1994 est donc de la pure fabrication, pour préparer sa défense. Il ne m’avait jamais parlé de cela, dans toutes ses démarches, lorsqu’il essayait de me convaincre de l’aider dans son procès. Donc, ces lettres ont peut-être été fabriquées quand Ngeze était déjà à Arusha.

Cette lettre à laquelle il se référait, en disant qu’il me l’avait envoyée via le Commandement de l’Armée, quand il était encore à Kigali, je ne l’ai pas reçue. Et il est supposé me l’avoir envoyée le 15 mars 1994. Aucune trace de ce document. Et personne ne m’en a parlé.

La lettre supposée avoir été écrite le 16 mars a été suivie par une autre dont la date ne figure pas sur la copie en ma possession mais qui est un document du TPIR portant le No K0220946, et qui se réfère à celle-ci du 16 mars 1994. Mais dans le corps de la lettre, NGEZE dit qu’iI la rédige le 8 juin 1994, comme nous allons le voir ci-dessous. La copie que j’ai est en Kinyarwanda et en anglais, et je traduis en Français. Nous lisons ceci:

Colonel NSENGIYUMVA Anatole

Commandant du Camp Militaire

Secteur opérationnel de Gisenyi

Monsieur,

Objet: Plan de me tuer

Comme je l’ai mentionné dans la lettre vous envoyée en date du 16 mars 1994, avec copies pour informations aux autorités de différents niveaux comme cela figure dans la lettre, il est clair que le plan en question continue et qu’il a été bien préparé. En réalité, quand je regarde cela de très près, je réalise que ceux qui ont préparé ce plan l’ont fait depuis longtemps, ils attendent seulement l’opportunité de le mettre en exécution.

TROISIEME PARTIE DE CE PLAN

Aujourd’hui matin le 8 juin 1994, comme c’est le cas ailleurs dans le pays, dans la ville de Gisenyi il y a eu une opération de perquisition qui a été conduite conformément à la loi. C’est le capitaine HABIMANA qui est venu chez-moi avec des militaires qu’il conduisait. La perquisition a été faite paisiblement comme cela est prévu par la loi. Celui qui supervisait la perquisition [est allé] opérer ailleurs. Deux heures seulement après le départ du CAPITAINE, est venu un Sous-Lieutenant dont je ne connais pas le nom, conduisant 8 militaires qui disaient qu’ils étaient envoyés par le Capitaine pour m’arrêter, pour aller expliquer pourquoi KANGURA écrit des choses qui finissent par arriver.[4]

Je leur ai demandé d’écrire un mandat d’amener et de dire où ils m’emmènent parce que je n’avais pas confiance en eux. Ce Sous-lieutenant est directement parti, en laissant les militaires sur place. Après un instant, il est revenue avec 9 autres militaires, portant des armes lourdes, dont trois roquettes qu’on utilise au combat, une lance-roquettes et d’autres munitions de gros calibres, dont des streams. J’ai réalisé que la situation devenait compliquée.

Ils m’ont alors emmené à la brigade, en disant que mon cas est connu par le Capitaine BIGANIRO[5], commandant du groupement [de gendarmerie] de Gisenyi, et par le Major UWIMANA du camp militaire de Gisenyi. Mais en fait ils m’avaient kidnappé, et j’ai été sauvé par la population qui reste toujours vigilante. Après un court instant, le Major UWIMANA, est venu à la brigade, et il a nié connaître ces militaires qui étaient venus m’arrêter. D’ailleurs, ils avaient refusé de me faire entrer dans la brigade, préférant me garder dehors, dans le jardin. L’Adjudant-Chef, chef de la Brigade vint à arriver, et il trouva anormal la façon dont j’avais été amené là-bas. Il appella le Major BIGANIRO au téléphone, et ce dernier dit qu’il ignorait tout de cet incident. Suite à la confusion, il décida de me libérer, ignorant les raisons de mon arrestation de cette manière.

En plus, la force qui a été déployée chez-moi pouvait mieux être utilisée au front. Par exemple, ces roquettes qui avaient été amenées pour m’attaquer , on en avait tellement besoin au front pour gagner la guerre. Dès maintenant, j’ai des preuves irréfutables d’un plan visant à me tuer, et la façon dont ce plan a été préparé, mais j’ai senti que personne d’autre ne peut mettre fin à ce plan, à part vous en tant que Commandant militaire dans la région de Gisenyi.

Je vous remercie.

NGEZE Hassan (Signature)

Copie pour information:

  1. Monsieur le Ministre de la Défense, Gitarama;
  2. Madame le Ministre de la Justice, Gitarama;
  3. Monsieur le Ministre de l’Intérieur et du Développement communal, Gitarama;
  4. Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance, Gisenyi;
  5. Monsieur le Procureur de la République, Gisenyi;
  6. Radio Rwanda, Radio RTLM;
  7. Messieurs les Bourgmestres des Communes du Rwanda (Tous).

Je n’ai jamais reçu cette lettre qui était supposée m’être adressée. Je pense que personne d’autre parmi les destinataires ne l’a reçue, car personne ne m’en a parlé.

La situation dénoncée par Hassan NGEZE dans cette lettre n’a jamais existée. C’est de la pure fabrication. Je donne comme témoin tous les militaires qui étaient à Gisenyi, ainsi que toutes les autorités. Ceux qui sont encore en vie pourraient témoigner.

Monsieur Hassan NGEZE prétend que cette lettre a été écrite le 8 juin 1994. Pourtant, il l’adressait notamment à des membres du Gouvernement, à Gitarama. Or, le Gouvernement avait fui Gitarama et se trouvait à Gisenyi à cette date du 8 juin 1994. NGEZE le savait bien. Ceci est une autre preuve que cette lettre a été rédigée longtemps après, quand Ngeze faisait son montage, dans le cadre de son dossier. D’ailleurs, il ne la mentionne nulle part dans les numéros de son journal Kangura de fin 1994 et début 1995, tel que nous en avons vu quelques-uns ci-dessus.

Une autre lettre est supposée avoir été rédigée le 10 avril 1994, et m’aurait été adressée. Elle se lit comme suit:

Ngeze Hassan                                                                                    Le 10 avril 1994

Directeur du Journal Kangura

B.P. 19 Gisenyi

Rwanda

Au Colonel Anatole NSENGIYUMVA

Commandant des Forces Armées Rwandaises,

OPS Gisenyi

Objet: Ma détention de la nuit du 6 jusqu’à hier le 9 au soir

au camp dont vous assurez le commandement

Monsieur le Colonel,

Je juge nécessaire de vous écrire au sujet des inquiétudes concernant mon arrestation, après ma détention dans le camp de Gisenyi dont vous êtes le commandant. Après que des militaires m’aient arrêté chez-moi sur vos ordres, je suis arrivé au camp le 6 avril 1994 dans la nuit, et j’ai été relâché hier le 9 avril, au soir.

Le 6 avril aux environs de 22 heures, cinq militaires du camp que vous dirigez, dont le Sous-Lieutenant Eustache Dusabeyezu sont arrivés chez-moi furieux, en disant que vous leur aviez donné les ordres de me ramener mort ou vif. Lorsque je leur ai demandé de me montrer les papiers relatives à mon arrestation, ils m’ont déclaré qu’on n’a pas le temps d’établir des documents en temps de guerre.

Ils m’ont alors amené dans le camp que vous dirigez. Quand on m’a fait entrer dans votre bureau, vous m’avez annoncé que je devais rester au cachot jusqu’à ce que mon cas soit examiné. Le lendemain, des membres de ma famille ont voulu m’apporter de la nourriture. Mais PENDANT CES TROIS JOURS DE DÉTENTION, les militaires du camp leur ont déclaré que J’AVAIS ÉTÉ TRANSFÉRÉ À KIGALI POUR Y ÊTRE DÉTENU ET QUE POUR CETTE RAISON, je n’étais pas autorisé à recevoir des visites ou de la nourriture de l’extérieur. J’ai ainsi passé trois jours sans manger, sans boire et sans recevoir la nourriture apportée par les membres de ma famille, qu’on trompait en leur disant que j’étais en détention à Kigali. J’ai attendu que l’on m’interroge à la suite de mon arrestation.

En me fondant sur les propos tenus par le lieutenant qui m’a interrogé selon lesquels vous lui auriez déclaré que si je ne fais pas attention je risquais d’être tué parce que j’étais soupçonné de collaborer avec les Inkotanyi, je juge bon de me permettre si possible, de m’expliquer sur toutes vos accusations à mon égard. En effet, au lieu d’être tué sans savoir pourquoi, je préfère que vous m’expliquiez ce dont vous m’accusez.

Les militaires qui sont sous votre commandement déclarent que vous leur avez appris que j’étais un Inyenzi parce que tout ce dont je parle se réalise et qu’il était incompréhensible que les événements prédits dans mon journal se produisent effectivement par la suite. Je pense que si vous faites preuve de bon sens, vous ne devriez pas me mettre en détention parce que j’ai écrit des articles prémonitoires. En effet, le journaliste a pour tâche d’informer le public des dangers qui le guettent et de ce qu’iI peut réaliser de bon. Je vous prie instamment de me donner l’occasion de m’expliquer même si le plan de me tuer est déjà établi.

Par la présente, je vous informe également que j’ai été battu et que mes effets m’ont été volés durant mon séjour au cachot du camp que vous dirigez. Lorsque j’ai été relâché hier au soir, j’ai demandé aux militaires de me rendre mes affaires et ils ont refusé. Etant donné que j’ignore le sort qui m’est réservé, je vous demande de me faire état de votre réaction au sujet de la teneur de cette lettre. Même si vous avez déjà décidé que je dois être exécuté, je souhaite simplement avoir l’occasion de m’exprimer avant d’être tué parce qu’il me semble injuste d’être tué à cause de ma faculté de prédire l’avenir.

Copie pour information:

  1. Monsieur le Ministre de la Défense, Kigali;
  2. Madame le Ministre de la Justice, Kigali;
  3. Monsieur le Ministre de l’Intérieur et du Développement communal, Kigali;
  4. Monsieur le Président du Tribunal de première instance de Gisenyi;
  5. Monsieur le Procureur de la République, Gisenyi;
  6. Radio Rwanda, Radio RTLM;
  7. Messieurs les Bourgmestres des communes (Tous).

Cette lettre montre bien que Hassan NGEZE voulait tout simplement justifier ce qu’il m’avait demandé de dire au Tribunal et que j’ai refusé, parce que c’était faux. En effet, comme je l’ai répété, l’intéressé n’a pas été arrêté la nuit du 6 au 7 avril 1994, et il n’a pas mis les pieds au camp militaire de Gisenyi avant le 7 mai 1994. Et si vous lisez les autres documents que j’ai repris ci-dessus, vous verrez qu’il y a beaucoup de contradictions avec cette lettre. Je dois souligner par ailleurs que le Sous-Lieutenant Eustache DUSABEYEZU n’a jamais été affecté au camp militaire de Gisenyi. Il était un étudiant à l’Institut Saint Fidèle, et c’est là-bas qu’il vivait, qu’il logeait, et qu’il était trouvable. Il n’a donc jamais été sous mes ordres, comme il n’a jamais reçu de mission de moi. Mais NGEZE, comme il le voyait à Gisenyi, il a voulu l’incorporer dans les scénarios qu’il inventait, pour justifier ses montages. Tout est faux.

Inutile de préciser que je n’ai jamais reçu cette lettre de Ngeze, alors qu’elle était supposée m’être destinée. C’est le cas aussi de la lettre que je reprends ci-dessous.

Conseiller du Parti CDR

Directeur du Journal Kangura

Le 16.05.1994 – Gisenyi

Objet: Explications sur mon assassinat qui serait en préparation

Colonel Anatole NSENGIYUMVA

Commandant des Forces Armées Rwandaises

OPS Gisenyi

Mon Colonel,

Suite à ma lettre du 10.05.1994 dénonçant les astuces utilisées par le FPR pour assassiner ou faire assassiner tous ceux qui le combattent, j’estime nécessaire de vous fournir des explications supplémentaires sur les questions que vous continuez à vous poser.

Le fonctionnement de KANGURA ne devrait pas en fait vous étonner. En effet, vous vous souviendrez qu’avant la guerre lors de la parution de Kangura No 1 vous êtes venu, en personne, à Gisenyi en compagnie d’un autre officier supérieur et vous m’avez trouvé au bureau de GISENYI-INFORMATION[6]. A cette occasion je vous ai fait part des pièges que l’ennemi tendait pendant cette période. Je l’ai d’ailleurs démontré dans le rapport de l’enquête que j’ai publiée le 26.05.1990 et dont la copie a été réservée au Président de la République, à l’Etat-Major de l’Armée rwandaise et à la Gendarmerie. Tout cela témoigne de mon courage et de mon dévouement dans la lutte contre l’ennemi FPR.

Kangura reste fidèle à la ligne éditoriale adoptée depuis sa création, qui n’est nulle autre que celle du combat contre l’ennemi. Vous vous demandez pourquoi les prédictions de KANGURA finissent par se réaliser et pourquoi le Président de la République est mort après que nous l’avons prédit. Pour ceux qui connaissent le fonctionnement de KANGURA, cela ne pose aucun problème. En effet, tout journaliste compétent disposant de tout équipement nécessaire et d’un réseau de contacts bien informés, doit absolument savoir ce qui va se passer. Nous ne sommes pas les seuls au monde à prédire, dans la presse, les choses à venir. Un journal digne de ce nom est comparable à une agence de renseignement. Nous souhaiterions que, si nous sommes toujours en vie, vous puissiez confier à la direction de KANGURA, certaines tâches d’analyse ou de renseignement de telle sorte que nous vous transmettions quotidiennement les résultats de nos enquêtes sur cette guerre que l’ennemi nous a imposée.

Au cas où vous auriez besoin de plus amples explications, n’hésitez pas à me convoquer à tout moment. Je voudrais vous rappeler que depuis que ce problème existe, vous ne m’avez jamais demandé de vous exposer les méthodes que KANGURA utilise pour se renseigner et mener l’enquête. Concernant ma mort, je vous saurais gré si vous pouviez faire quelque chose pour l’empêcher. Si vous n’y parvenez pas, je tiens à vous dire que le FPR pourra utiliser divers [sic] sortes de pièges et faire en sorte que les Hutu qui l’ont combattu ouvertement, s’entre-déchirent. Ainsi le FPR aura-t-il trouvé un moyen de se débarrasser de tous ceux qui l’ont combattu.

Le FPR dispose d’innombrables pièges qui se présentent surtout sous formes de déclarations qu’il fait passer à travers votre système de communication. Faites preuve de vigilance lorsque vous écoutez ces déclarations.

Pour terminer, je vous prie d’agir selon votre pouvoir et votre clairvoyance.

Hassan NGEZE

C.I.

– Monsieur le Ministre rwandais de la Défense, GITARAMA;

– Madame le Ministre de la Justice, GITARAMA;

– Monsieur le Ministre de l’Intérieur et du Développement communal, GITARAMA;

– Monsieur le Président du Tribunal de première instance, GISENYI;

– Monsieur le Procureur de la République, GISENYI;

– Radio-Rwanda, Radio RTLM;

– Monsieur le Bourgmestre de la commune (Tous) – GISENYI

Comme les autres lettres reprises ci-dessus, celle-ci ne m’est jamais parvenue, alors que j’étais supposé être le principal destinataire. Elle entre donc dans le cadre du montage fait par Monsieur Hassan NGEZE, pour les besoins de sa défense. Dans tous ses écrits, il mélange le vrai et le faux. Il est vrai par exemple, que le Lieutenant-colonel RWABALINDA et moi-même, sommes allés à Gisenyi vers mai 1990 et l’avons rencontré. Je l’ai expliqué ci-dessus. Mais nous ne l’avons pas trouvé à GISENYI-INFORMATION (là où il travaillait, au centre commercial de Gisenyi). Nous avons laissé un message, et il est venu nous trouver au bar TAM-TAM, près du Lac Kivu. Je me souviens qu’il se déplaçait avec une petite moto. Il n’était pas encore devenu riche. C’est là que nous avons eu notre conversation avec lui. Et il n’avait pas encore fondé son propre journal. Pourquoi doit-il inventer des choses, même pour une petite affaire comme ça ?

Monsieur Hassan NGEZE fait mention d’une autre lettre censée avoir été rédigée le 10 mai 1994. Je n’ai pas pu l’avoir celle-là, mais je suppose qu’elle est du même genre que les quatre autres que nous avons parcourues ci-dessus.

Après avoir lu ces lettres, ainsi que les articles de KANGURA que nous avons vus ci-dessus, il est clair que Hassan NGEZE n’a fait que du montage. Il a fait du montage, d’abord pour sa défense, puis pour causer des ennuis à Anatole NSENGIYUMVA, Capitaine HABIMANA, ainsi que le Lieutenant BIZUMUREMYI. Maintenant, le capitaine HABIMANA et le Lieutenant BIZUMUREMYI ont été assassinés par le FPR. Hassan NGEZE veut causer des ennuis à Anatole NSENGIYUMVA. Voilà tout.

Hassan NGEZE passe à la vitesse supérieure

Je laisse de côté le fait que Monsieur Hassan NGEZE s’est mis à fabriquer des témoins qui devaient venir me charger devant le Tribunal à Arusha. C’est une longue histoire. Il a commencé par le nommé Omar SERUSHAGO, puis les témoins OAB, OAF, DO et ABQ. Mais il a voulu leur faire dire des choses invraisemblables, tellement qu’ils sont tous devenus non crédibles, sauf DO qui a été crédible en partie, pour trois juges en Appel. Je n’insisterai pas sur ce point. Des preuves de son intervention dans ce domaine existent.

Vers fin 2001, Hassan NGEZE a écrit une lettre à Omar SERUSHAGO qui était détenu lui aussi à Arusha, mais dans un “Safe House” annexe du Centre de détention de l’ONU en ce moment-là. La lettre est parvenue à Serushago, mais ce dernier l’a remise aux autorités du Centre de détention. NGEZE a essayé de l’ignorer et dire que ce n’était pas lui qui l’avait écrite, mais les choses étaient claires comme de l’eau de roche. Il a été établi que c’était bien lui qui l’avait écrite.

Dans cette lettre, NGEZE demandait insidieusement à SERUSHAGO, notamment, qu’il devait m’accuser, et il lui rappelait ce qu’il devait dire. Il en ressort en fait qu’ils en avaient déjà parlé quand ils étaient ensemble à Nairobi, il ne s’agissait que de le lui rappeler et de lui rafraichir la mémoire.[7]

Le 26 septembre 2002, les avocats de Hassan NGEZE ont soumis une motion ex-parte, demandant au Tribunal de m’appeler, ainsi que quelques autres camarades, pour témoigner pour Hassan NGEZE. Tout le monde a refusé d’aller appuyer les mensonges de Hassan NGEZE, car nous savions bien ce qu’il voulait que nous disions. Il ne le cachait pas.

En date du 04 janvier 2005, Hassan NGEZE a écrit une lettre intitulée ”Prisoner Hassan Ngeze concerns addressed to the Commanding Officer and the Tribunal authorities”.[8] Dans cette lettre, il s’attaquait principalement au Colonel Anatole Nsengiyumva, mais aussi à certains de mes camarades officiers des ex-FAR en détention à Arusha. Il affirmait que nous l’avions menacé, et que nous avons voulu le tuer. Pour ce qui me concerne personnellement, il a dit que j’avais tué 32 personnes qui étaient détenues avec lui au camp militaire de Gisenyi, la nuit du 6 au 7 avril 1994. C’était la première fois qu’il avançait une telle énormité. Pourtant, il n’avait mis les pieds au camp militaire de Gisenyi que le 07 mai 1994, comme je l’ai souligné ci-dessus. Et aucune personne civile n’a été détenue au camp militaire de Gisenyi, ni pendant cette période, ni après, ni même avant, pendant ma période de commandement de ce camp. Je donne comme témoins, tous les militaires qui vivaient dans ce camp, où qu’ils soient, même au Rwanda. Il n’y a que Hassan Ngeze qui y a passé quelques heures, comme je l’ai évoqué ci-dessus.

Dans la même lettre, il accuse le Général KABILIGI, d’avoir voulu le tuer à Goma, sans succès, et que cette opération avait été confiée au Major NTABAKUZE, mais qu’elle échoua. Il a ajouté que nous sommes retournés au Rwanda pour tuer les survivants du génocide. Il a dit beaucoup d’autres choses inventées de toutes pièces. Tout ceci parce que nous avions refusé de nous mêler dans ses mensonges.[9]

Un peu plus tard, il a écrit une lettre qu’il adressa aux juges de la Chambre de première instance dans le procès dit “Militaires I”, c’est-à-dire la Chambre qui me jugeait. Il a dit aux juges que j’étais un grand tueur, que j’ai tué des gens à Gisenyi, y compris ceux qui étaient détenus avec lui au camp militaire, la nuit du 6 au 7 avril 1994. Il demandait que les juges puissent me réserver une peine exemplaire, car c’était ce que la population de Gisenyi attendait, selon Ngeze.

Il a fait parvenir la même lettre aux Juges de la Chambre d’Appel. Tout ceci montre bien que Monsieur Hassan NGEZE est quelqu’un qui ne recule devant rien, quand il veut atteindre un certain objectif. Il y a va par tous les moyens, y compris le mensonge le plus saugrenu.

Plus tard, il a demandé à son avocat de déposer une requête devant la Chambre, pour dire que son client était traumatisé, du fait de voir chaque jour le Colonel Anatole Nsengiyumva. L’avocat demandait que son client puisse être envoyé devant des services médicaux spécialisés pour l’examiner et le traiter en conséquence. Il a demandé le même traitement, car, disait-il, il était traumatisé par le fait que nous avions refusé de témoigner pour lui, et que les Juges ne lui donnaient pas un procès équitable. Les juges ont rejeté cette requête fantaisiste, car ils savaient bien dans quelle intention elle était faite.

Tout ce que je viens d’expliquer ci-dessus n’est pas exhaustif quant au comportement de Monsieur Hassan NGEZE, et ses relations avec moi. Mais ça permettra au moins de comprendre ce qu’il a écrit dans ses deux livres, et dans quel cadre. D’ores et déjà, tout ce qu’il écrit sur moi dans ses livres est faux, et entre dans le cadre de sa rancune qu’il garde à mon endroit. Seulement, je me demande comment il peut s’acharner contre moi de cette manière, lorsque ce n’est pas moi qui l’aurais arrêté et mis en prison le plus de fois, car le court moment où je l’ai gardé en détention, de manière bien justifiée, n’a pas de commune mesure avec les 20 fois qu’il avait été en prison, ainsi que les 35 fois qu’il avait séjourné dans les cachots de la gendarmerie.[10]

Avant de passer aux commentaires sur les livres de Hassan Ngeze, je dois préciser qu’avec ce harcèlement qu’il exerçait sur moi, tout en essayant d’influencer négativement les juges du TPIR, aussi bien en Première Instance qu’en Appel, sans oublier toutes les autres autorités du Tribunal, j’ai gardé mon calme et j’ai évité la confrontation. Je remercie d’ailleurs les amis qui m’encourageaient tout le temps à toujours garder de la hauteur par rapport aux bassesses de celui qui se surnommait lui-même “LE DIABLE – SHITANI”, et que les autres appelaient “LE FOU”, à savoir Hassan Ngeze. J’ai réussi à éviter la polémique et la confrontation. Néanmoins, quant les choses se sont négativement amplifiées, j’ai dû réagir, en me confiant au Président du TPIR et de la Chambre de Première Instance qui me jugeait, ainsi qu’aux Juges de cette Chambre. Je n’ai pas dû faire la même chose pour la Chambre d’Appel. Je reprends ci-dessous la lettre que j’ai alors écrite en ce moment-là, et qui explique en fait la vraie situation qui a prévalu entre Hassan Ngeze et moi-même. Elle montre que les allégations de Hassan NGEZE ne sont que de simples fabrications.

Arusha, le 18.09.2005

Monsieur Erik MOSE, Président du TPIR, et Président de la Chambre de Première Instance I

Honorable Juges de la Chambre de Première Instance I

Info: Monsieur le Procureur du TPIR

Objet: Dénoncer les manoeuvres de Monsieur Hassan NGEZE

Monsieur le Président,

Honorables Juges,

  1. J’ai l’honneur de recourir auprès de votre haute autorité, pour dénoncer les manoeuvres malhonnêtes de Monsieur Hassan NGEZE, manoeuvres que je trouve assez préjudiciables à ma cause, et surtout, susceptibles d’induire les Juges en erreur, au détriment d’une justice équitable. Je trouve utile de procéder de cette façon, pour le bien de la Justice, et pour éviter de vivre la même expérience que celle que j’ai vécue avec les dénonciations mensongères de Monsieur Omar SERUSHAGO.
  1. Depuis la période des malheureux événements d’avril à juillet 1994, et même avant, mes relations avec Monsieur Hassan NGEZE n’ont jamais été bonnes, car je ne pouvais pas supporter certains de ses comportements. Contrairement à ce que certains veulent faire croire, je n’ai jamais été en bons termes avec Hassan NGEZE, et j’aurai l’occasion d’en donner plus de détails.
  1. Pendant les malheureux événements, Hassan NGEZE a été un de ceux qui ont miné mon action d’aider les autres à ramener le calme. Il me traitait de complice de l’ennemi, et faisait circuler cela dans la population. Il n’a jamais cessé de le faire, même pendant la période d’exil. Cette fois-là, il utilisait son journal KANGURA, car il se savait désormais intouchable. J’ai enduré tout cela, et je croyais que ça allait finir un jour. Mais au lieu de mettre fin à ses manoeuvres malhonnêtes, Monsieur Hassan NGEZE a redoublé d’ardeur pour s’acharner contre moi.
  1. Un moment donné en avril 1994, sur autorisation du Procureur de la République à Gisenyi, j’ai fait perquisitionner la maison de Hassan NGEZE, à cause des tiraillements qu’il effectuait pendant la nuit, avec ses nombreux “gardes du corps”, qui avaient défié la Gendarmerie jusque-là. Des armes à feu ont été alors découvertes et saisies, ainsi qu’un poste radio émetteur-récepteur, de marque KENWOOD. A cette occasion, Monsieur Hassan NGEZE n’a pas pu être arrêté, de même que ses nombreux gardes du corps se sont échappés.
  1. A cause de cette situation et de certains autres comportements, et sur accord de l’Etat-Major de l’Armée, j’ai fait rechercher Hassan NGEZE qui fut arrêté et amené au camp militaire de Gisenyi pour interrogatoire. C’était au mois de Mai 1994, et il n’a passé qu’une seule nuit en détention. J’aurai l’occasion d’expliquer tout cela. Je donnerai les raisons de cette arrestation, je dirai comment il a été libéré, et je démontrerai que ce fut la seule fois qu’il fut arrêté par mes services et amené au camp militaire, contrairement à ses allégations.
  1. C’est à partir de tout cela que Monsieur Hassan NGEZE a inventé toute une histoire, comme quoi j’ai voulu le tuer parce qu’il gardait des Tutsi chez-lui. C’est à partir de ça qu’il a prétendu que plusieurs tentatives d’assassinat ont été faites contre lui, et qu’il échappait par hasard. Tout cela n’est que mensonges.
  1. Monsieur Hassan NGEZE a pris prétexte de cette situation, pour alléguer qu’il a été arrêté la nuit du 6 au 7 avril 1994, et qu’il est resté en détention au camp militaire jusqu’au 09 avril 1994. Il allègue qu’il a été arrêté et détenu au camp militaire de Gisenyi, sous mon commandement, plusieurs autres fois après cela. Il a même construit sa défense sur cette allégation, et il a voulu que je l’aide à convaincre les Juges de la justesse de ces allégations. Il voulait donc que je mente moi aussi, et dise aux Juges qu’il était en détention au Camp militaire , de la nuit du 6 au 7 avril 1994, au 9 avril 1994. Il m’a demandé un affidavit ou un témoignage écrit sur cela. Beaucoup de détenus sont au courant de cette histoire.
  1. Je lui ai alors dit que je ne pouvais pas m’impliquer dans ses mensonges, et induire les Juges en erreur. Il était très fâché contre moi. Il a essayé d’utiliser du chantage, en inventant des histoires pour dire qu’il allait me dénoncer sur n’importe quoi; cela n’a pas marché non plus.
  1. Il a pourtant persisté dans cette voie, et lors de son procès, il a dit aux Juges qu’il était en détention au Camp Militaire de Gisenyi, depuis la nuit du 6 au 7 avril 1994, jusqu’au 9 avril 1994. Je tiens à préciser que ceci est un gros mensonge. Cela n’a jamais été le cas. S’il est vrai que j’ai arrêté Hassan NGEZE un moment donné, ça s’est passé au mois de mai 1994, et non pas la nuit du 6 au 7 avril 1994. Et je ne l’ai arrêté qu’une seule fois. Je vous montrerai, le moment venu, que même Hassan NGEZE le reconnaît dans un de ses nombreux écrits, mais il ne se rappelle pas l’avoir écrit, tellement il écrit trop de choses.
  1. Je voudrais que ceci soit assez clair pour le bien de la Justice. Je ne voudrais pas qu’un jour, je sois accusé de ne pas avoir aidé la Justice, pour des choses dont j’étais pourtant au courant. Il est vrai que j’ai longtemps hésité, car je ne voulais pas être taxé de chercher à m’immiscer dans le procès d’un autre accusé. J’ai donc usé de trop de patience. Mais devant les conséquences néfastes et prévisibles de telles manoeuvres, j’ai trouvé qu’il était nécessaire et utile de réagir et dénoncer tout ça.
  1. Monsieur Hassan NGEZE n’a pas seulement inventé l’histoire de son arrestation la nuit du 6 au 7 avril 1994, et de sa détention au camp militaire jusqu’au 9 avril 1994. Il a également affirmé que les militaires du Camp Militaire de Gisenyi ont attaqué son domicile, pour le tuer et tuer les Tutsi qui y auraient trouvé refuge. Ceci n’a jamais été le cas. Je n’ai même jamais appris qu’il gardait des Tutsi chez-lui.
  1. Un autre point qui mérite d’être dénoncé, c’est que Monsieur Hassan NGEZE a fabriqué des témoins pour appuyer ses mensonges. Ceci, presque tous les détenus de l’UNDF le savent bien. Hassan NGEZE lui-même le dit publiquement. Il se targue même d’avoir filé des témoins au Procureur, à l’insu de ce dernier. C’est notamment le cas des témoins OAB, OAF, et ABQ. C’est d’ailleurs pourquoi Hassan NGEZE a vite récupéré les transcriptions de leurs dépositions au Tribunal, dans l’affaire “Militaires I”, pour les utiliser en appel. Il se vantait d’avoir ainsi réalisé un coup contre le Procureur. J’aurai l’occasion d’en donner les détails.
  1. Mais beaucoup d’autres témoins dans mon affaire, ont été formés par Hassan NGEZE, par le truchement de ses agents disséminés un peu partout, au Rwanda et à l’étranger. Il les a formés pour qu’ils chargent spécialement Anatole NSENGIYUMVA et le Lieutenant BIZUMUREMYI. J’aurai le temps de l’expliquer.
  1. Monsieur le Président, Honorables Juges, parce que je sais tout cela sur Monsieur Hassan NGEZE, ce dernier a entrepris une campagne de dénigrement à mon encontre, et a tout fait pour me faire condamner par le TPIR. Il l’avait dit depuis 1994 déjà, quand il a écrit dans son Journal KANGURA, qu’il allait se venger contre moi, en utilisant sa plume. J’expliquerai tout ceci, le moment venu. Il a inventé beaucoup d’autres choses, contre le lieutenant BIZUMUREMYI et contre moi-même.
  1. En fait, la part de Monsieur Hassan NGEZE est assez grande, dans les accusations portées contre moi. Je donnerai les détails, lors de mon témoignage devant la Cour.
  1. Si j’ai tenu à porter tout cela à votre connaissance, c’est que je trouve malhonnête de la part de Monsieur NGEZE, de chercher à induire les Juges en erreur, en m’impliquant mensongèrement dans des histoires, et en impliquant d’autres personnes innocentes comme le lieutenant BIZUMUREMYI, tout simplement parce que je l’ai affronté pendant les malheureux événements, et que le lieutenant BIZUMUREMYI a fait son devoir. Je crois qu’il ne serait pas juste de ma part, de taire une telle situation, car je n’aurais pas ainsi aidé la justice.
  1. Ainsi, pour me résumer, j’aimerais insister sur les points essentiels suivants:
  • Monsieur Hassan NGEZE n’a pas été arrêté par les militaires la nuit du 6 au 7 avril 1994, et il n’a pas été détenu au camp militaire de Gisenyi, jusqu’au 9 avril 1994. Il est vrai qu’il a été arrêté au mois de mai 1994, et n’a passé qu’une seule nuit en détention, avant d’être relâché, dans des circonstances que j’expliquerai le moment opportun. Et je montrerai les preuves de ce que je suis en train de dire. Ce fut la seule fois que je l’ai arrêté.
  • Les militaires sous mon commandement n’ont jamais attaqué la résidence de Monsieur Hassan NGEZE, pour le tuer ou pour tuer qui que ce soit d’autre. Par contre, sa résidence a été perquisitionnée, et des armes ont été découvertes, ainsi qu’un poste radio émetteur-récepteur de marque KENWOOD. C’est en fait cela qui fait que NGEZE se débat contre moi, et contre le lieutenant BIZUMUREMYI. C’est cela qui l’amène à fabriquer histoires et documents, ainsi que des témoins pour corroborer ses allégations. En fait, le lieutenant BIZUMUREMYI a été impliqué dans la perquisition et l’interrogatoire de Monsieur Hassan NGEZE. Voilà tout.
  • Monsieur Hassan NGEZE a fabriqué beaucoup de témoins pour venir me charger et charger le lieutenant BIZUMUREMYI. D’autres ont été fabriqués pour corroborer ses allégations, comme souligné ci-dessus. C’est dans ce cadre que ces témoins allèguent que NGEZE avait été arrêté dans la nuit du 6 au 7 avril 1994, et qu’il est resté en détention au camp militaire de Gisenyi, jusqu’au 9 avril 1994. Certains vont jusqu’à dire qu’il a été arrêté plusieurs autres fois après, et détenu au camp, avec beaucoup d’histoires rocambolesques pour embellir ses histoires. Vous l’avez certainement vu dans divers documents qu’il ne cesse de rédiger.
  • D’autres encore, allèguent que sa maison a été attaquée par les militaires du camp militaire de Gisenyi. Tout ceci n’est que mensonges. Je donnerai les détails le moment venu.
  1. Monsieur le Président, Honorables Juges, je sais que la campagne menée par Monsieur Hassan NGEZE contre moi, continue. Je sais qu’il continue d’inventer d’autres accusations. Je sais qu’il essaie d’obtenir d’autres déclarations de témoins qui me chargent mensongèrement. Par ailleurs, beaucoup de documents falsifiés ont été écrits par NGEZE, soit pour véhiculer des accusations fabriquées contre moi, ou alors pour servir de prétendues preuves. Je donnerais comme exemple, les fameuses lettres prétendument m’adressées pour dénoncer un plan allégué visant à l’assassiner, mais que je n’ai jamais reçues. Ces lettres ont été certainement inventées quand NGEZE était à Nairobi, ou même à l’UNDF. Je n’en ai été au courant que très récemment, quand il en a fait allusion dans un de ses nombreux documents qu’il ne cesse d’écrire.
  1. Pour pouvoir expliquer certaines situations aux Juges lors de mon témoignage, je demande à mes conseils qui me lisent en copie, de demander officiellement tous les documents écrits par Monsieur Hassan NGEZE et adressés au Tribunal, et où il m’implique dans l’un ou l’autre incident. Ceci est à mon avis très important, car ça va aider les Juges à comprendre certaines choses.
  1. Je fais ceci pour le bien de la Justice, car je crois qu’il est nécessaire que toute la vérité soit connue. Je suis convaincu qu’il n’est pas du tout honnête de construire sa défense sur de simples mensonges, tout en impliquant des gens innocents dans des crimes qu’ils n’ont jamais commis, et penser que l’on va s’en sortir, tout simplement parce qu’on est plus malin. Par ailleurs, je ne voudrais pas être victime de magouilles malveillantes de Monsieur Hassan NGEZE.
  1. J’ai également jugé utile de dénoncer tout ceci, car je sais combien les allégations mensongères de Monsieur Omar SERUSHAGO m’ont été très préjudiciables, car quand il a plaidé coupable en m’impliquant dans ses crimes, je n’avais pas pu me défendre. C’est sa version qui est restée dans la mémoire de ceux qui s’intéressent à mon procès. Je ne veux pas que Monsieur Hassan NGEZE continue à conditionner négativement l’opinion, alors qu’il ne raconte que des mensonges.
  1. Je dénonce donc les manoeuvres malhonnêtes de Monsieur Hassan NGEZE, qui ne visent qu’à nuire et faire condamner des gens innocents. J’aurai certainement l’occasion de donner plus de détails sur la teneur de la présente. Et si cela devait s’avérer nécessaire, je demanderais au Tribunal de mener ses propres enquêtes sur ce que je suis en train de dénoncer; il se rendra compte que j’ai tout à fait raison. Ainsi, j’aurai contribué à faire triompher la Justice et la Vérité sur le mensonge.
  1. Veuillez agréer, Monsieur le Président, Honorables Juges, l’expression de ma haute considération.

Anatole NSENGIYUMVA

Détenu à l’UNDF

(Sé)

Copie:

  • Conseils de la Défense d’Anatole NSENGIYUMVA
  • Conseils de la Défense de Théoneste BAGOSORA
  • Conseils de la Défense de Gratien KABILIGI
  • Conseils de la Défense d’Aloys NTABAKUZE
  • Coaccusés dans le procès “Militaires I

D’autres écrits de Hassan NGEZE, qui me harcèlent toujours, sont repris en annexe. Ils comprennent notamment:

  • Lettre du 26 octobre 2001 adressée à M. Stephen Rapp du Bureau du Procureur du TPIR, réclamant la traduction de lettres supposées avoir été adressées à Anatole Nsengiyumva, mais que je n’avais jamais reçues.
  • “Lettre urgente du 4 janvier 2005”, adressée au Commandant de l’UNDF et aux autorités du TPIR.
  • Lettre de Hassan Ngeze à M. Serushago Omar, d’août 2001
  • Déclaration de Serushago Omar du 17 août 2001, relative à la lettre lui adressée par Hassan Ngeze.
  • Lettre du Général Kabiligi, Colonel Bagosora, Lt Colonel Nsengiyumva et Major Ntabakuze, adressée au Président du TPIR et dénonçant le comportement irrégulier et préjudiciable de Hassan Ngeze, datée du 14 août 2003
  • Lettre du 13 juin 2006 de Hassan Ngeze qui est une demande de pardon adressée au Président Paul Kagame via le Représentant spécial du Gouvernement rwandais auprès du TPIR, M. Aloys MUTABINGWA.

Je peux maintenant passer aux commentaires sur certains passages des livres de Monsieur Hassan NGEZE. Je ne parlerai que de certaines parties que je maîtrise le mieux, tellement il écrit des choses, qu’il n’est pas facile de le suivre et de commenter sur tout.

 

DES RAMASSIS DE MENSONGES, DE FABULATIONS ET DE RUMEURS

“Ngeze utilise, travestit et fabrique des informations, les organisant à d’autres fins. Dans son témoignage, aussi bien que dans sa conduite au cours de la procédure, Ngeze a démontré un mépris absolu pour la vérité, et pour la solennité de son engagement à dire la vérité”.[11]

Ce qui est écrit dans ce paragraphe 878 du Jugement par la Chambre de première instance du TPIR dans l’affaire ICTR-99-52-T pourra aider à bien comprendre ce que je dirai sur les livres de Hassan NGEZE, du moins pour les passages que j’aborderai. J’aurais aimé ne pas verser dans ces histoires, mais devant ce qu’écrit Monsieur Hassan NGEZE, devant les différents appels que j’ai reçus me demandant si ce qui est écrit dans ces livres est réellement vrai, devant le fait que Hassan NGEZE a voulu travestir l’histoire pour ses intérêts personnels, et face à la confusion qu’il a créée dans l’esprit de nombreuses personnes, j’ai trouvé nécessaire de réagir, pour rectifier certaines choses, là où j’ai des éléments pour le faire. Il ne s’agit pas de me défendre des mesquines attaques qu’il a dirigées contre moi, il ne s’agit pas de me mettre du bon côté, ni de défendre telle ou telle autre personne injutement vilipendée, il ne s’agit pas de verser dans la polémique que j’aurais bien aimé éviter, mais il s’agit de dire la vérité.

Le seul mérite de ces livres de Monsieur Hassan NGEZE, est d’amener ceux qui savent, à dire aux autres ce qui est vrai. C’est pourquoi j’espère que d’autres feront la même chose, dans le domaine qu’ils maîtrisent le mieux. Car les Rwandais et le monde ont besoin de savoir.

 

DEUXIEME PARTIE: IGICUMBI CY’IKINYOMA

Igicumbi cy’ikinyoma” ou “Le havre du mensonge” comme cela a été traduit en français par l’auteur, convient bien à ce premier livre de Monsieur Hassan NGEZE. Car beaucoup de mensonges le disputent en malveillance à la fabulation et aux rumeurs.

A la page 31 de son livre, Hassan NGEZE se targue d’avoir été la personne qui avait le plus d’informations que tout le monde au Rwanda. Il fait comprendre que même ceux qui croyaient être dépositaires des secrets de l’Etat étaient moins informés que lui; pour cela, il se sentait fort et important.

Personnellement, je trouve que ceci est très ridicule. Comment pouvait-il savoir ce que les autres avaient comme renseignements ? Même s’il était capable de voler certains documents des services de l’Etat, ce qui est tout à fait vrai, il n’avait quand même pas tout volé[12]. Même s’il parvenait à corrompre certains agents pour qu’il lui donnent des documents, il n’avait pas corrompu tout le monde, et ceux qu’il contactait ne lui donnaient pas tout. Il se croyait savoir beaucoup de choses, mais il ne pouvait pas savoir ce que les autres savaient. Comme je l’ai évoqué ci-dessus, il n’y a qu’à regarder les quelques éléments exposés par l’ancien officier responsible des rensignements à l’Etat-Major de l’Armée Rwandaise en 1994, le Général Aloys NTIWIRAGABO, sur le site “The Rwandan” sous le titre “Rwanda – Attentat du 6 avril 1994; A quand la clôture de l’enquête ?”, du 29 juillet 2016. Et ce n’est qu’une infime partie des renseignements à la disposition du service G2. Que savait Hassan NGEZE ? Que le Président HABYARIMANA allait être assassiné ? Qui ne le savait pas ? Le FPR ne l’avait-il pas implicitement dit dans son document que j’ai évoqué ci-dessus ? De multiples rapports ne le signalaient-ils pas tout le temps, les détails donnés par le Général NTIWIRAGABO n’étant qu’un exemple ? Non, ce que dit Hassan NGEZE sur ce point bien précis n’est qu’une façon de se mettre en évidence, pour faire croire à ceux qui ne sont pas informés, qu’il était formidable dans le recueil du renseignement. Il n’en était rien. La différence, c’est que les services chargés du renseignement ne pouvaient aucunement mettre dans les journaux ce qu’ils savaient. Quant à dire que NGEZE était la personne la plus renseignée du Rwanda, c’est de l’égotisme outré. D’ailleurs, ce qu’il publiait, c’est ce qu’il volait ou achetait aux services en charge du renseignement, ou dans différents autres services de l’Etat, en corrompant certains agents. Ça, je le lui concède. Mais de là à dire qu’il était le plus renseigné au Rwanda, c’est tout à fait grotesque.

Monsieur Hassan Ngeze se targue d’avoir été le favori de certaines personnes haut placées, qui l’aimaient parce qu’il leur faisait de bonnes analyses. Il donne l’exemple de Monsieur Valens KAJEGUHAKWA. Ceci est certainement vrai pour Monsieur KAJEGUHAKWA effectivement, mais non pas parce que Hassan Ngeze faisait des analyses pour lui, mais plutôt parce qu’il lui amenait des informations qu’il glanait à gauche et à droite, dans le cadre du programme de Kajeguhakwa de détruire le régime Habyarimana. En effet, dans son livre “Rwanda, De la terre de paix à la terre de sang et après ?”, p.219, Monsieur Valens Kajeguhakwa avoue que, en 1990, il se considérait comme un combattant infiltré dans la forteresse de l’ennemi. Il affirme aussi avoir rencontré, en mars 1990, à Francfort en Allemagne, Paul Kagame et le Docteur Peter Bayingana (tous les deux hauts responsables du FPR). Quelques mois auparavant, il avait rencontré et fait connaissance avec le général Fred Rwigyema, alors président du FPR. A la page 222 et 223, Kajeguhakwa affirme que deux autres personnes ont été mêlées dans son plan, durant la décennie 1980-1990. Il s’agit de Monsieur Vincent Rwabukwisi et Monsieur Rugelinyange, qui écrivaient dans Kanguka. Et il avoue qu’il a créé le journal KANGUKA, pour « unifier clandestinement l’action des patriotes de l’extérieur avec celles des prêtres progressistes, les jeunes intellectuels du Nord, du Centre et du Sud du pays ». Donc, le journal KANGUKA travaillait pour le FPR, et cela était connu. Plus loin, il avoue qu’à partir de 1984, il disposait d’un réseau d’informateurs militaires au niveau des Etats-majors notamment, ainsi que des civils dans les ministères, les préfectures et les communes. Il affirme que ses informateurs étaient payés par le réseau de ses stations-service, pour extorquer des informations de toute sorte dans différents secteurs de la vie nationale, et après faire pression et chantage, pour provoquer une désaffection vis-à-vis du régime. Voilà le domaine dans lequel a travaillé Hassan Ngeze qui était un agent de Kajeguhakwa, et qui écrivait dans KANGUKA, journal fondé par Valens Kajeguhakwa lui-même.

Premier exemple

De la page 31 à 32, Ngeze prétend qu’il faisait des analyses pour Monseigneur Vincent Nsengiyumva, qui appréciait beaucoup. Je n’en sais vraiment rien, mais je doute très fort. Pourquoi est-ce que l’archevêque allait recourir aux analyses de Hassan Ngeze, lorsque nous savons que l’Eglise catholique avait beaucoup d’intellectuels qui pouvaient faire ce travail ? Je doute fort sur ces allégations.

Ngeze prétend qu’il faisait des analyses pour le Président Habyarimana. Ceci est faux. Tout le monde comprend que si Ngeze était quelqu’un qui faisait des analyses pour le Président Habyarimana, il n’allait pas séjourner 20 fois en prison, et 35 fois dans les cachots des brigades de gendarmerie.

Il fait entendre que des diplomates étrangers en poste à Kigali le recevaient dans leurs bureux ou dans leurs résidences et appréciaient ses analyses. C’est possible qu’il ait été reçu par certains diplomates étrangers. Mais ce n’est pas pour entendre ses analyses. C’est tout simplement que des gens comme Ngeze pouvaient faire de bons informateurs. Sinon, pour des analyses de situations, ce n’est pas à Ngeze qu’ils allaient recourir.

Hassan Ngeze est un grand affabulateur. De la page 32 à 36 de son livre, il raconte comment un ambassadeur étranger en poste à Kigali l’a envoyé à Bujumbura, pour aller prévenir le Président Ndadaye qu’il allait être assassiné par le Colonel BIKOMAGU dans 15 jours. Le Président Habyarimana l’aurait alors recommandé au Président Ndadaye pour qu’il le reçoive sans tarder. Et le Président Ndadaye l’aurait reçu, mais a rejeté les informations que Ngeze lui amenait, ce qui fait qu’il a été assassiné comme Ngeze l’avait pourtant prédit.

Ceci est quand même aberrant ! Si ledit ambassadeur avait des informations d’une telle gravité, ce n’est pas Ngeze qu’il allait envoyer à Bujumbura prévenir le Président Ndadaye. Il y a des canaux diplomatiques par lesquels il allait passer, notamment en avertissant d’autres diplomates de son pays en poste à Bujumbura, pour qu’ils avertissent à leur tour le Président Ndadaye. Ou alors, l’ambassadeur allait envoyer quelqu’un de son ambassade pour aller s’occuper de cette affaire. Le Président Habyarimana pouvait directement téléphoner au Président Ndadaye. Ou demander à son ambassadeur à Bujumbura de faire le nécessaire pour que son homologue burundais soit averti du danger qui pesait sur lui. Ce n’est pas un certain Ngeze qu’il allait recommander au Président Ndadaye. Je connais bien l’idée que le Président Habyarimana avait de Monsieur Hassan Ngeze. En tant que journaliste, Ngeze a certainement rencontré le Président Ndadaye, comme ce dernier rencontrait beaucoup d’autres journalistes. Nous le voyons sur les photos qui figurent dans le livre de Ngeze. Mais dire que c’était dans le cadre d’une mission lui assignée par un ambassadeur en poste à Kigali et par le Président Habyarimana, ce n’est pas croyable.

Vous remarquerez que Ngeze commence son histoire en affirmant qu’il avait reçu les informations d’un ambassadeur qui l’a envoyé à Bujumbura, et il termine en affirmant que c’est lui-même qui avait prédit l’assassinat du Président Ndadaye. Je laisse au lecteur le soin d’apprécier.

Deuxième exemple

A la page 36, Hassan Ngeze allègue qu’il a suivi de très près la préparation de l’assassinat du Président Habyarimana, y compris les différentes modifications du plan d’assassinat chaque fois qu’elles intervenaient, et qu’il en informait régulièrement le Président Habyarimana qu’il aurait rencontré plus de 12 fois, depuis le mois de septembre 1993 jusqu’au moment où le Président a été assassiné. Ngeze prétend qu’il a été au courant de l’arrivée des missiles qui ont abattu l’avion présidentiel, et a directement averti le Président. Ngeze fait sentir qu’il avait tout dit au Président, mais que rien n’a été fait pour éviter son assassinat. Il n’oublie pas d’ajouter qu’il était la personne la plus renseignée sur ce dossier d’assassinat du Président Habyarimana.

Ça c’est typiquement du Hassan Ngeze. A partir d’un événement ou d’une histoire, il essaie de se transformer en acteur principal, et il se donne des rôles, à partir de ce qui s’est passé. D’abord, de septembre 1993 à avril 1994, Ngeze n’a pas rencontré le Président Habyarimana en aparté. Ngeze est quelqu’un qui ne fréquentait pas la résidence ou les bureux du Président Habyarimana. Si vous lui demandez qui l’aurait vu quand il allait voir le Président Habyarimana, il vous dira des noms de personnes qui sont toutes décédées. Il ne dira aucun nom d’un membre de la famille encore en vie. Il ne vous dira pas que tel ou tel autre fonctionnaire de la Présidence de la République encore en vie, l’a vu. Jamais. Je le mets donc au défi de préciser qui l’aurait vu toutes ces fois qu’il serait allé voir le Président Habyarimana.

Comment est-ce que Hassan Ngeze peut-il oser dire qu’il était la seule personne qui avait les renseignements exacts sur le plan d’assassinat du Président Habyarimana ? Comment peut-il savoir ce que les autres savaient ? Et si c’est le cas, c’est alors qu’il n’avait pas de pouvoir de persuasion, pour faire comprendre que ses renseignements étaient exacts, et amener les autorités à prendre les mesures qui s’imposaient. Non, ce que dit Hassan Ngeze sur ce point, comme sur beaucoup d’autres, c’est de la fabulation.

Troisième exemple

Hassan Ngeze affirme que des Blancs qui avaient aidé le FPR à prendre le pouvoir lui ont donné la mission d’aller voir le Gouvernement Kambanda en exil, et lui dire trois choses;

  • Qu’il a perdu la guerre définitivement, et qu’il ne peut plus reprendre le pouvoir, que ce qui va suivre est d’être traduit en justice pour répondre des tueries commises.
  • Remettre au nouveau Gouvernement en place à Kigali l’argent de la Banque Nationale emmené en exil, contre des dollars qui seraient fournis au Gouvernement Kambanda, et déposés dans une banque de son choix, notamment au Kenya.
  • Si cela n’est pas fait, l’argent emmené perdra sa valeur et deviendra de simples feuilles de papier, et le nouveau gouvernement de Kigali aura de nouveaux billets.

Hassan Ngeze prétend qu’il est allé le dire à l’ancien Gouverneur de la Banque Nationale, Monsieur Denys NTIRUGILIMBABAZI, au Premier Ministre Jean KAMBANDA, au Président SINDIKUBWABO, et à l’ancien Ministre des Finances Emmanuel NDINDABAHIZI. Tous auraient refusé de s’exécuter, et l’argent a été démonétisé, tandis que le nouveau gouvernement à Kigali a eu sa nouvelle monnaie. Ngeze veut dire par là qu’il a joué son rôle, mais que l’ancien Gouvernement n’a pas compris ni pris en considération ce qui lui était demandé, privant ainsi la population des réfugiés des dollars qui allaient lui être donnés.

Mais, qui peut croire en ces balivernes ? Comment est-ce que des “Blancs qui avaient aidé le FPR à prendre le pouvoir” allaient commissionner Hassan Ngeze auprès du Gouvernement de Kambanda en exil, comme si personne de plus crédible ne pouvait faire cela ? Qui étaient ces Blancs ? Hassan Ngeze ne vous dira aucun nom. Qui était donc Ngeze pour recevoir cette mission ? Je sais que le Général Dallaire venait voir certaines personnalités au Zaïre. Pourquoi n’aurait-il pas reçu cette mission, plutôt que de la confier à Ngeze ? Ce n’est pas vrai. Est-ce que des gens comme NDINDABAHIZI, KAMBANDA et NTIRUGILIMBABAZI confirment ces allégations? Je trouve ça invraisemblable.

Quatrième exemple

De la page 38 à 39, Hassan Ngeze reparle des Blancs qui aidaient le FPR, qui, en 1996, l’auraient envoyé en mission au Zaïre, pour rencontrer les responsables des réfugiés et les responsables militaires des ex-FAR. La mission consistait, selon Ngeze, à dire à ces responsables que le FPR allait attaquer les camps des réfugiés, et que l’attaque irait aussi jusqu’à Kinshasa, pour renverser le Président Mobutu. Les responsables devaient donc renvoyer au Rwanda les femmes et les enfants réfugiés, tandis que les hommes et les jeunes gens devaient se réfugier dans les forêts du Congo (alors Zaïre), car s’ils rentraient, ils seraient exterminés par le FPR, tandis que les femmes et les enfants n’allaient subir aucune exaction. Lesdits Blancs auraient également précisé que le FPR avait déjà envoyé ses infiltrés dans les camps des réfugiés, et qu’ils y vivaient avec les réfugiés, bien sûr à l’insu de ces derniers.

Ngeze se serait rendu au Zaïre par avion fourni par les Blancs qui lui avaient donné la mission. Arrivé au Zaïre, il aurait rencontré le Général Bizimungu et le Général Kabiligi et leur a donné le message. Mais rien n’a été fait dans le sens souhaité par ceux qui avaient envoyé Ngeze. Deux jours après son retour à Nairobi, les camps ont été attaqués, avec la suite que tout le monde connaît. Quand Ngeze l’a appris, il serait allé le dire au Président Daniel Arap Moï du Kenya. Le Président MOI aurait donné à Ngeze un avion pour ravitailler les réfugiés dans les forêts du Congo, en leur apportant vivres et médicaments. Puis Ngeze et d’autres auraient commencé des opérations d’évacuation de certains réfugiés vers le Kenya, par avion, car le Président MOI avait donné les directives pour faciliter l’entrée de ces réfugiés Hutu au Kenya. C’est ça ce qu’avance Hassan Ngeze.

Eh bien, ceci est un gros mensonge. D’abord, je ne vois pas pourquoi ces Blancs qui aidaient le FPR allaient chercher à prévenir les réfugiés civils et les ex-FAR de l’imminence de l’attaque, s’ils étaient réellement avec le FPR. Deuxièmement, les généraux Kabiligi et Bizimungu n’étaient pas présents à l’Est du Congo au moment où Ngeze est supposé les avoir rencontrés et leur avoir passé le message. En effet, le Général Kabiligi était au Kenya, et il n’est rentré que la veille des attaques contre les camps des réfugiés par le FPR[13]. A ce moment-là, Ngeze était supposé être retourné à Nairobi. Donc, il n’a pas pu voir le général Kabiligi. Quant au Général Bizimungu, il était à Kinshasa depuis une semaine, et quand les attaques contre les camps ont été déclenchées, le Général Bizimungu était toujours à Kinshasa. Ceux qui étaient avec lui à Kinshasa le savent et peuvent témoigner. Il y en a qui sont rentrés au Rwanda, et qui sont maintenant des personnalités du régime. Je préfère taire les noms. Donc Ngeze a menti sur ce point aussi, et je ne vois pas pourquoi il fait cela sans honte.

Pour ce qui concerne les autres points, je sais par exemple que feu Monseigneur Musabyimana était l’acteur principal qui louait l’avion qui aidait certains réfugiés qui le pouvaient, à se rendre au Kenya. Mais il collaborait avec Hassan Ngeze sur ce projet, et les passagers payaient évidemment pour le voyage jusqu’au Kenya. C’était bien sûr une action très louable, car il y a beaucoup qui ont cherché à quitter le Zaïre, même en payant beaucoup d’argent, mais qui ne l’ont pas pu. Quant au ravitaillement des réfugiés en vivres et en médicaments, avec le même avion, c’est faux. Cela n’a jamais été le cas.

Monsieur Hassan Ngeze ne précise pas s’il travaillait main dans la main avec ces “Blancs qui aidaient le FPR”, et si non, dans quel cadre ils pouvaient lui faire confiance jusqu’à lui confier des missions. Ceci est quand même paradoxal.

Cinquième exemple

A la page 39, Hassan Ngeze raconte comment il aurait encore été envoyé d’urgence par avion à GBADOLITE chez le Président Mobutu, pour dire à ce dernier que la guerre qui venait d’être déclenchée contre son pays n’allait pas s’arrêter avant de le renverser, et que la guerre ira jusqu’à Kinshasa. A son arrivée à Gbadolite, Ngeze aurait trouvé que Mobutu l’attendait, ce qui veut dire que le Président Mobutu avait été informé à l’avance de l’arrivée de l’émissaire Ngeze. Selon Ngeze, le Président Mobutu lui aurait dit comment le Président Habyarimana serait venu le voir le 05 avril 1994, avant d’aller dans la réunion de Dar-es-Salaam le 06 avril 1994. Ngeze à son tour, aurait expliqué comment il avait été informé du plan d’assassiner le Président Habyarimana.

Monsieur Hassan Ngeze ne dit pas qui l’aurait envoyé en mission à Gbadolite. Il ne dit pas s’il s’agissait encore des fameux “Blancs qui aidaient le FPR”, ou s’il s’agissait de quelqu’un d’autre.

Mais, sincèrement, pourquoi est-ce que c’est Hassan Ngeze qui devait accomplir cette mission ? A quoi devait-elle servir ? Il ne dit pas quelle fut la réaction du Président Mobutu quand il lui a appris la teneur de sa mission. L’on remarquera que Hassan Ngeze ne dit nulle part les noms de ses interlocuteurs, que ce soit ceux qui l’ont envoyé dans les camps prévenir les responsables civils et militaires de l’attaque imminente des camps, que ce soit l’ambassadeur qui l’aurait envoyé prévenir le Président Ndadaye de son assassinat prochain, ou alors ceux-là qui l’auraient envoyé informer le Président Mobutu de l’objectif de l’attaque contre le Zaïre. En fait, il est très malin, et sait très bien que s’il donne des noms de ces personnes, alors qu’il sait très bien que ce n’est pas la vérité qu’il donne aux lecteurs, il pourrait y avoir vérifications et les personnes mentionnées pourraient réagir et se plaindre pour ce mensonge qui les implique dans des histoires. Ngeze ne donne que les noms des Rwandais, surtout ceux qui sont morts, ou ceux qui sont en prison, ou alors ceux qui ont des difficultés de réagir. Voilà tout.

Dans tous les cas, je suis d’avis que cette prétendue mission à Gbadolite n’a jamais eu lieu. Qui allait dire à Mobutu que la guerre visait à le renverser, et on devait le lui dire par l’intermédiaire de Ngeze, pourquoi ?

Sixième exemple

A la page 41, Ngeze affirme qu’avant la guerre déclenchée par le FPR, il souhaitait que la Communauté internationale prenne des sanctions contre le Rwanda, pour que le Président Habyarimana accepte que les réfugiés rentrent au Rwanda sans condition, car il les avait empêchés de rentrer. Mais la voix de Hassan Ngeze n’aurait pas été entendue. Il ajoute qu’il a été nécessaire de tuer Habyarimana, pour que les réfugiés puissent rentrer après la mort de celui qui les avait empéchés de rentrer.

Mais, est-ce que Ngeze sait au moins que des pourparlers avaient été initiés entre le Rwanda, le HCR et l’Ouganda, pour que tous les réfugiés qui le voulaient puissent rentrer au Rwanda ? Est-ce qu’il sait qu’une délégation des réfugiés devait se rendre au Rwanda le 28 septembre 1990, aux frais du gouvernement rwandais, en vue de visiter le pays, éventuellement donner des avis sur les infrastructures d’accueil, et enfin informer les autres sur les réalités du pays, pour qu’ils puissent rentrer en connaissance de cause ? Et ce processus allait se poursuivre avec les autres pays abritant les réfugiés rwandais en ce moment-là. N’est-ce pas que c’est le FPR qui a fait capoter tout ça, car le retour pacifique enlevait des arguments au FPR qui voulait prendre tout le pouvoir par les armes ? Tout ça, Ngeze devrait le savoir. Mais il tient un autre langage certainement pour d’autres buts.

De la page 65 à la page 66, Hassan Ngeze écrit des choses graves pour moi, mais qui contredisent en quelque sorte ce qu’il a dit ailleurs, et que j’ai repris dans les lignes qui précèdent. Pour mieux comprendre, je reprends exactement ce qu’il écrit, sous le titre Ce qui est arrivé à Ngeze pendant la période du génocide”. Il dit ce qui suit:

Je trouve nécessaire de porter à votre connaissance la longue marche que j’ai effectuée pendant la période du génocide. Juste après l’attentat contre l’avion du Président, l’Etat-Major de l’Armée a directement lancé un communiqué disant que le journaliste Hassan Ngeze qui avait écrit que le Président sera assassiné doit être recherché et tué. Ce communiqué militaire a été immédiatement diffusé dans tout le pays, puis on a ajouté le nom de Rwabukwisi Vincent qui écrivait dans Kanguka, car Hassan Ngeze lui, écrivait dans Kangura. Beaucoup de gens avaient des difficultés à distinguer les deux journaux et les deux journalistes.

Le communiqué de l’Etat-Major de l’Armée est sorti le 06 avril 1994. En ce moment-là, j’étais dans une veillée funèbre chez mon grand-père que nous avions enterré la veille en date du 5 [avril 1994]. Quelque chose que je n’ai pas pu m’expliquer encore jusqu’aujourd’hui, c’est que, un jour avant sa mort, mon grand-père Kananira Marc m’a parlé, il m’a dit que son heure de mourir est arrivée, que beaucoup parmi ceux qui vont l’enterrer vont le suivre [dans la mort] immédiatement, qu’il ne sera pas le seul à causer du chagrin aux gens, mais que plutôt beaucoup de familles vont connaître des moments de deuil.

Ce vieux qui était chrétien a été enterré le 5 avril [1994] après m’avoir dit tout ça. Le 06 [avril 1994] après l’attentat contre l’avion, là où j’étais dans le deuil la nuit, j’ai vu arriver des militaires du camp militaire de Gisenyi, et ils m’ont dit que celui qui était alors le commandant militaire à Gisenyi leur avait demandé de m’arrêter et de m’emmener.

Entre-temps, à Kigali aussi, on était allé rechercher le nommé Rwabukwisi Vincent, qui écrivait dans le journal Kanguka. Alors à Gisenyi, une heure seulement après la nouvelle de [la mort ]de Habyarimana, les Tutsi et tous ceux qui n’étaient pas d’accord avec le régime ont commencé à être tués. Quand on m’a fait arriver au camp militaire, j’ai rencontré le colonel Nsengiyumva Anatole dans son bureau, vers 22h00, et il m’a dit que les ordres de m’arrêter ont été donnés par l’Etat-Major de l’Armée.

On m’a alors fait entrer dans un cachot situé en face du bureau du commandant du camp, où j’ai trouvé beaucoup d’autres personnes qui avaient été arrêtées, ensemble nous étions 32 [personnes]. Ceux que j’ai retrouvés là-bas étaient des Tutsi que je connaissais car ils étaient originaires de ma ville natale [de Gisenyi], à part qu’il y en avait qui étaient des Tutsi zaïrois. J’ai été détenu du 6  jusque dans la nuit du 9 avril après minuit, c’est pourquoi je dis que j’ai été libéré le 10 [avril 1994]”.

J’ai tenu à reprendre toutes ces allégations, pour permettre aux lecteurs de voir eux-mêmes comment Ngeze est un fieffé menteur. J’ai donné assez d’explications sur le sujet traité dans ces passages. J’ai dit que Ngeze n’a pas été arrêté la nuit du 6 au 7 avril 1994, et n’est pas resté en détention jusqu’au 9 avril 1994. Il a été arrêté en date du 7 mai 1994, n’a passé qu’une seule nuit en détention, et a été libéré l’avant-midi du 8 avril 1994, dans les circonstances que j’ai expliquées ci-dessus.

La nuit du 6 au 7 avril 1994 a été très calme à Gisenyi, et personne n’a été arrêté et emmené au camp militaire. Même les jours qui ont suivi, aucun civil n’a été emmené au camp militaire pour y être détenu. Il a été prouvé devant le TPIR, qu’à Gisenyi, même les témoins de l’accusation ont affirmé qu’ils ont appris la mort du Président Habyarimana le matin du 7 avril 1994, et que les violences n’ont commencé que le 7 avril 1994 pendant la journée. Même les rescapés qui étaient menacés l’ont expliqué ainsi. Et c’est ça la vérité.

Le lecteur se souvient que dans la lettre envoyée par Hassan Ngeze à l’organisation “African Rights” en date du 02 février 1995, il a écrit ce qui suit, pour parler de ce qui lui est arrivé directement après la mort du Président Habyarimana:

“En avril 1994 après la mort du Président HABYARIMANA, le commandant de l’Armée Rwandaise à Gisenyi, le Colonel Anatole NSENGIYUMVA, a organisé une réunion avec ses adjoints comprenant notamment, le Capitaine HABIMANA, qui commandait le Bataillon 62 stationné à Gisenyi, ainsi que le Lieutenant BIZUMUREMYI. Dans cette réunion, il a été retenu que je devais être attaqué et tué chez moi avec tous ceux qui se trouveraient dans mon domicile. Mais auparavant, j’ai été convoqué au camp militaire où j’ai été enfermé jusqu’au soir, lorsque le Lieutenant m’a demandé de lui expliquer pourquoi les choses que je prédis arrivent toujours. Je lui ai fait comprendre que cela était dû aux signes avant-coureurs qu’il nous était possible de détecter de par notre métier. Il a ensuite demandé à son supérieur ce qu’il fallait faire de moi, et il a décidé que l’on devait me laisser retourner chez-moi où le nécessaire allait être fait lors de l’attaque contre mon domicile”.

Dans cette lettre, Ngeze ne dit pas qu’il aurait été arrêté dans la nuit du 6 avril 1994, et ne dit pas qu’il serait resté en détention jusqu’au 9 avril 1994. Mais toujours est-il que même ce qui est dit dans la lettre à African Rights est un mensonge.

Dans le numéro 65 du Journal KANGURA de Hassan Ngeze, ce dernier a écrit sur le même sujet, ce qui suit:

Quand je me rappelle que je suis le journaliste qui a été détenu le plus de fois dans toute l’Afrique, à savoir 20 fois en prison et 35 fois dans les cachots des brigades [de gendarmerie], plus la 36ème fois quand le colonel Nsengiyumva m’a arrêté au mois de mai de cette année, quand je me rappelle qu’au mois d’avril quand le Président Habyarimana est mort plus de 43 télégrammes ont été lancés demandant que quiconque me verrait devait tirer sur moi sans hésitation, jusqu’au moment où nous avons su qu’il y avait un plan de tirer sur moi à Bigogwe et cela avec la complicité du Colonel Nsengiyumva Anatole, Général Gatsinzi et tous leurs autres complices Inyenzi, quand je me rappelle que tout ceci était fait contre moi alors que je ne convoitais aucun poste de responsabilité dans le pays, que je voulais tout simplement voir la majorité de la population vivre en paix, tout cela montre bien que ce ne sont pas les dirigeants qui vont faire rentrer la population, que c’est plutôt la population qui va faire rentrer les dirigeants”.

Ici, Monsieur Hassan Ngeze reconnaît que je ne l’ai arrêté qu’une seule fois, et que c’était au mois de mai 1994. Et c’est ça la vérité. J’ai donné beaucoup d’autres explications sur ce point dans les pages qui précèdent.

Concernant la mort de son grand-père, nous avons vu que Hassan Ngeze a voulu faire croire qu’il a été tué par les militaires lors d’une attaque alléguée, dirigée contre le domicile de Hassan Ngeze. Il l’a dit dans sa lettre du 04 mai 1999, en ces termes:

“Ça n’a pas fait longtemps, et mon domicile a été attaqué par des militaires du camp militaire de Gisenyi conduits par le Capitaine Habimana dont j’ai déjà parlé, qui commandait le 62ème bataillon qui était positionné sur le Mont Rubavu.

Ils ont alors détruit mon domicile et à cet instant même, le vieux qui était le père de ma mère, c’est-à-dire mon grand-père, a été tué dans ces combats. Nous avons pu nous cacher et faire face à ces militaires, surtout que tous les voisins avaient accouru à mon secours. Le matin très tôt, ces militaires ont tué un Tutsi qui habitait près de chez-moi et ils sont rentrés.

Et dans la matinée, un Major qui commandait la Gendarmerie et qui s’appelle Biganiro, qui est mort pour le moment, est venu me voir et m’a dit en me narguant que j’avais été attaqué par mes amis Inyenzi qui venaient du Zaïre. Je lui ai répondu que j’allais publier à la radio que j’avais été attaqué par des militaires des FAR, puis il m’a dit que cela pourrait causer de l’insécurité dans Gisenyi. Il m’a fait comprendre que si j’aimais ma vie, je devais dire que je n’avais pas été attaqué par des militaires rwandais, que j’avais été plutôt attaqué par des militaires Inyenzi.

Alors j’ai fait enterrer le vieux [mon grand-père] qui avait été tué par des militaires de l’armée rwandaise, puis le Major-là Uwimana, originaire du Bugoyi, m’a dit que je devais tout faire pour m’en aller à Kigali, parce que, disait-il, les militaires qui avaient attaqué mon domicile sont rentrés en croyant que j’étais bien mort, mais qu’ils venaient d’apprendre que j’étais encore en vie, et qu’ils avaient décidé de me tuer pendant la journée. Et pendant cette période, des télégrammes étaient lancés chaque jour, demandant de me rechercher et de me tuer sans hésiter.”

Dans la même lettre du 04 mai 1999, Hassan Ngeze a dit ce qui suit, concernant ce qui lui est arrivé directement après l’attentat contre l’avion présidential:

“Quand l’avion de Habyarimana venait d’être descendu par des ennemis, quand j’étais assis chez-moi à la maison à Gisenyi, pendant que je venais d’être informé de cette nouvelle au téléphone par des amis, je suis resté chez-moi en pensant aux problèmes graves auxquels notre pays allait faire face. Vers 22 heures, un véhicule militaire a fait irruption chez-moi avec à son bord quatre jeunes Interahamwe à savoir Thomas Mugiraneza, Twagirayesu alias Mabuye, Damas Kalikumutima, Munyagishari Bernard – tous ces Interahamwe sont mentionnés dans le procès d’Omar Serushago – et un autre qui s’appelle Gahutu. Ils étaient en compagnie de jeunes lieutenants du camp militaire de Gisenyi dont un de la PM [police militaire] et un autre qui était handicapé mais qui était étudiant à [l’Institut] Saint Fidèle à Gisenyi mais qui était sous les ordres du commandement de l’Armée à Gisenyi.

Ainsi ils sont entrés dans ma maison et c’était déjà vers 21h30, alors ils m’ont demandé de m’habiller pour que nous allions ensemble voir le Colonel Nsengiyumva qui leur avait demandé de m’amener. Je leur ai demandé de me présenter les documents qui justifiaient cette invitation et ils m’ont répondu que cela n’était pas nécessaire, et que si je ne voulais pas partir avec eux, que j’allais partir dans de mauvaises conditions. Alors j’ai accepté leurs instructions teintées de terrorisme, et nous sommes partis jusqu’au camp militare de Gisenyi où Anatole était commandant, nous avons trouvé Anatole au bureau et ils m’ont laissé dans le véhicule en me disant que je devais attendre dans le véhicule jusqu’à ce qu’ils m’appellent. Après toute une heure de temps assis dans le véhicule, un lieutenant m’a appelé et je suis allé au bureau, alors Anatole m’a posé la question en ces mots: “Ngeze, est-ce vrai que tu as écrit que Habyarimana allait mourir au cours de ces dates-ci ?”. Je lui ai répondu oui mon colonel et il a secoué la tête.

Je lui ai demandé pourquoi il m’avait appelé et il m’a répondu que je devais attendre un peu, alors ce qui s’est passé à cet instant-là entre ces jeunes Interahamwe et ces lieutenants ainsi que les directives qui ont été données en ce moment je trouve que je dois le garder secret. Seulement c’est que j’ai été libéré cette nuit-même sans savoir pourquoi j’avais été appelé à part que le colonel Anatole leur a dit, alors que j’entendais personellement, qu’il attendait les directives devant venir de l’Etat-Major de l’Armée, mais je n’ai pas pu savoir de quelles directives il s’agissait. Il n’était pas encore tout à fait au courant des circonstances exactes de l’accident et de tous ceux qui avaient succombé dans l’accident.

Alors j’ai été ramené chez-moi à peu près vers 23h00, et quand je suis arrivé chez-moi, j’ai immédiatement appelé au téléphone le général Bizimungu qui commandait l’Armée à Ruhengeri, il m’a expliqué que je devais venir le voir très tôt matin à Ruhengeri pour que nous parlions de ces problèmes, pour qu’il me donne des conseils sur comment je dois me comporter devant cette situation. Alors j’y suis allé très tôt matin et je lui ai expliqué comment j’avais été emmené au camp militaire, comment j’en étais reparti sans savoir pourquoi j’avais été appelé, mais je lui ai exprimé l’inquiétude que je ressentais à ce propos, et il m’a dit qu’il va essayer de voir comment il peut suivre cette question pour que les mauvais desseins qui avaient commencé à être planifiés, soient neutralisés, le reste de ce que nous avons dit à cette occasion (je dois le garder secret pour le moment).

Alors je suis retourné à Gisenyi chez-moi à la maison, et quand j’y suis arrivé, on m’a dit que des militaires conduits par un lieutenant du camp militaire de Gisenyi appelé Bizumuremyi est venu chez-moi [le lieutenant] pour me prendre afin que j’aille être coffré et il a dit qu’il a été envoyé par Anatole qui était son supérieur. Alors j’ai trouvé que je ne pouvais faire rien d’autre, j’ai essayé de chercher des amis et je les ai informé des problèmes que je rencontre à savoir comment j’allais être tué par l’Armée rwandaise qui était censée me protéger.

Alors cela n’a pas pris longtemps et des télégrammes ont commencé à circuler partout dans le pays demandant que quiconque me verrait, puisse me tuer immédiatement et en informer ensuite les autorités, mais après que cette question soit résolue. Après avoir reçu la copie de ce télégramme, j’ai fait recours à des amis et je leur ai demandé comment je pouvais me comporter devant cette situation, et tous m’ont répondu que le mieux est de fuir et de me rendre à l’étranger. Je demandais en fait pourquoi je devais être tué et on me disait que c’est parce que je cachais des Tutsi alors qu’ils étaient recherchés partout. Quand je leur demandais qui étaient ces Tutsi, on me répondait que je cachais des Tutsi musulmans de la ville de Gisenyi.

Ça n’a pas pris longtemps et j’ai été arrêté et conduit au camp militaire de Gisenyi où Anatole était le commandant, et on m’a gardé dehors toute la journée, et le soir, j’ai été enfermé au camp militaire et ma famille a été empêchée de m’amener à manger. J’ai souffert de la faim et c’est le lendemain que j’ai commencé à être interrogé par le même lieutenant qui s’appelle Bizumuremyi qui me disait que tout cela c’est le colonel Anatole qui lui en avait donné les ordres. Alors j’ai pu approcher un Major originaire du Bugoyi qui travaillait au camp militaire de Gisenyi, et qui s’appelle Major Uwimana.

Il m’a alors expliqué qu’en fait, ces interrogatoires ne sont que de simples formalités, que plutôt il y a eu une réunion au camp militaire de Gisenyi où il a été décidé que je devais être tué le plus rapidement possible. Je lui ai alors demandé quelle devrait être mon attitude et il m’a répondu qu’il ne le voyait pas lui-même, car même si je devais prendre fuite et me réfugier à l’étranger, que, tenant compte de la détermination de ceux qui voulaient me tuer, toute ma famille serait exterminée, et je confirmerais ainsi les accusations pour lesquelles on veut me tuer, à savoir cacher les Tutsi. J’ai ensuite été relâché le troisième jour, sans avoir mangé ne fût-ce qu’une seule fois”.

Tout ceci montre à suffisance que Hassan Ngeze n’a fait que du montage, essayant chaque fois d’améliorer les scénarios, pour que ce soit plus ou moins crédible. Mais il n’a même pas peur de mentir, pourvu qu’il fasse du mal aux autres, et que son objectif soit atteint. Dans ce scénario-ci, il parle des Interahamwe qui seraient venus l’arrêter en compagnie de jeunes officiers. C’est ridicule, et il ne le répète nulle part dans ses autres documents. Ailleurs, il dit que c’est le Sous-lieutenant Dusabeyezu accompagné de cinq militaires qui sont venus l’arrêter. Ailleurs encore, il dit que c’est le Lieutenant Bizumuremyi et d’autres militaires qui sont venus l’arrêter. Et tout cela concerne le même episode allégué.

Hassan Ngeze allègue qu’il connaissait certains parmi les Tutsi qui étaient détenus avec lui au camp militaire la nuit du 6 au 7 avril 1994, car ils étaient originaires de la ville de Gisenyi, sa ville natale. Certains autres étaient des Tutsi zaïrois. Il n’ose pas donner ne fût-ce qu’un seul nom. Je fais ceci bien sûr pour question de raisonnement, car tout ce qu’il dit ici est faux, et n’a jamais eu lieu. Je viens de le démontrer.

Concernant le prétendu communiqué de l’Etat-Major de l’Armée qui donnait ordre de rechercher Hassan Ngeze et de le tuer, ainsi que le nommé Rwabukwisi Vincent, c’est de la pure fabrication, il n’a jamais existé, et je mets Hassan Ngeze au défi de le montrer, même s’il est passé maître dans l’art de la falsification, ou de dire qui d’autre l’aurait vu.

De la page 64 à 65, sous le titre “Qu’est-ce qui se passait chez-moi”, Hassan Ngeze parle notamment de comment il a formé des gens pour l’aider à transporter des Tutsi au Zaïre (actuelle RDC), en les mettant dans des fûts. Il est possible que Hassan Ngeze ait sauvé des Tutsi, mais les témoins qu’il avait amenés pour confirmer cela n’ont pas pu résister au contre-interrogatoire, et ils ont changé de version, disant qu’ils ne mettaient pas les Tutsi dans des fûts, mais qu’ils les mettaient au milieu des fûts, sans qu’ils soient à l’intérieur des fûts. Seul Ngeze a persisté à affirmer qu’ils les mettaient dans des fûts. Parmi les témoins qu’il avait préparés pour affirmer cela, il y a les témoins OAB et OAF qui, finalement, sont venus me charger. Ils sont devenus non crédibles dans mon affaire.

S’il a sauvé des Tutsi, c’est une très bonne chose, mais tout le monde est en droit de se demander pourquoi il doit dire des choses plutôt invraisemblables.

De la page 65 à la page 66, Ngeze raconte un épisode lorsqu’à Kigali, pendant les événements d’avril 1994, il est allé à MAGERWA[14], en compagnie de quelques militaires qui étaient ses amis, pour aller piller des vivres au profit des Tutsi qu’il avait sauvés et placés en certains endroits, comme le Centre Saint Paul et ailleurs. Il affirme qu’arrivés à MAGERWA, ils y ont rencontré des militaires Inkotanyi qui, eux aussi, venaient piller. Il en a reconnu deux. Il n’y aurait pas eu échange de coups de feu, et chacun a pillé de son côté, et Ngeze et ceux qui l’accompagnaient ont pu apporter de quoi manger aux Tutsi qu’il avait réussi à sauver.

Ceci est vraiment trop beau pour être vrai. D’abord, qui étaient ces militaires, amis de Hassan Ngeze, qui, au lieu de rester à leurs postes pendant cette période de guerre et de combats, ont préféré accompagner Ngeze pour aller piller à MAGERWA ? Le lecteur se souvient que Hassan Ngeze avait des jeunes qui le gardaient et qui l’accompagnaient partout. Même si j’avais réussi un moment donné à saisir leurs armes, rien ne dit que toutes avaient été saisies. Et peut-être qu’à Kigali, dans sa résidence de Biryogo, Ngeze avait d’autres armes et d’autres jeunes. Moi j’affirme que ce sont ces jeunes qui l’ont accompagné aux MAGERWA, pour piller tout simplement, et non pas pour chercher des vivres au profit de déplacés Tutsi. Il est de notoriété publique que beaucoup de gens, surtout des jeunes, ont pillé les stocks de MAGERWA. Il y en a même qui y ont laissé leur vie, tués par des Inkotanyi qui n’étaient pas loin. Que Ngeze ait rencontré des Inkotanyi à MAGERWA, qu’il n’y ait pas eu échange de coups de feu, et que tous aient tout simplement pillé et qu’ils soient partis tranquillement chacun de son côté, je pense que personne ne peut y croire.

Il est par ailleurs de notoriété publique que Hassan Ngeze et ses jeunes ont pillé les articles qui se trouvaient aux “Etablissements Rwandais” à Kigali près du Rond Point central, dont des ordinateurs. Je ne peux bien sûr pas le confirmer, car je n’ai pas vu ça de mes propres yeux. Mais ça se raconte. Dans tous les cas, l’anecdote relative aux MAGERWA pour chercher des vivres pour les Tutsi déplacés, est pour moi, non crédible. C’était pour piller tout simplement, comme beaucoup d’autres l’ont fait. Si Ngeze y est allé avec des militaires, c’était des déserteurs. Sinon, il est parti avec ses jeunes.

De la page 66 à 68 de son livre, sous le titre “L’évacuation des Tutsi de Kigali vers Gisenyi pour qu’ils se rendent au Congo”, Hassan Ngeze écrit ce qui suit:

“Il y a un vieux qui s’appelle Habibu Musariyama qui possédait une boulangerie à Gisenyi, qui m’a demandé de rechercher des gens qui étaient ses proches et qui avaient été rescapés des tueries par les Interahamwe, et de les emmener à Gisenyi. Nous avons mené une action importante de recherche de tous ces Tutsi, nous les avons mis en véhicules et nous les avons conduits à Gisenyi”. (Ici, il affiche une photo d’une dame avec ses trois enfants, un garçon et deux filles).

Et il continue en disant:

“Cette dame que vous voyez s’appelle Zayana Kassim, elle habitait à Kigali à Kivugiza. Elle travaillait à Radio Rwanda, branche Swahili. Après que les Interahamwe aient tué son mari, elle s’est empressée de se rendre chez-moi, elle et d’autres survivants. Ces enfants que vous voyez, un avait un mois, l’autre une année et environ trois mois, et l’autre moins de trois ans. Cette dame est l’une de ceux qui ont fait le voyage avec moi de Kigali à Gisenyi, et nous avons été arrêtés à Bigogwe, et nous avons été détenus dans le camp militaire de l’endroit. Le motif était, paraît-il, que j’aidais des Tutsi Inkotanyi à fuir. C’est là-bas que nous devions être tués, comme je l’ai dit ci-dessus. Mais vous voyez maintenant qu’elle et ses enfants sont toujours vivants, les enfants ont grandi, et c’est ce qui fait que je me sens très courageux, même si je rencontre beaucoup de problèmes graves. Mais quand je me rappelle de ces moments-là, je me sens très fort. Celui qui voudrait la voir, il la trouverait au Rwanda où elle donnerait toutes les explications sur ce qui est écrit dans ce livre, surtout en ce qui la concerne, elle et tous ceux qui ont été sauvés avec elle, et surtout ce voyage difficile où les ordres avaient été donnés que je devais être tués avec ceux qui étaient avec moi”.

Il continue:

“Quand l’Etat-Major de l’Armée a su qu’environ 40 Tutsi se dirigeaient vers Gisenyi à bord de trois véhicules convoyés par Ngeze Hassan, il a immédiatement lancé d’autres messages ordonnant que quiconque va voir Hassan Ngeze doit le tuer sur le champ avec tous ceux qui sont avec lui. Nous avons alors quitté Kigali avec beaucoup de difficultés, quand nous sommes arrivés en un endroit appelé Bigogwe dans Gisenyi, là il y a un camp militaire, on nous a arrêtés et on nous a emmenés au camp militaire. C’est alors qu’on m’a sérieusement interrogé sur comment je faisais fuir des Inkotanyi. J’ai alors demandé au commandant du camp militaire comment des bébés d’environ deux ans que je transportais avec leurs mamans pouvaient être des ennemis du pays. Il a regardé toutes ces gens, et je lui ai dit qu’il peut m’arrêter si c’est moi qui suit recherché, et laisser libres les autres, car de toutes façon leurs proches avaient été tués à Kigali.

On a accompagné mes véhicules et nous sommes allés à Gisenyi, nous avons remis toutes les personnes à leurs familles, les autres ont traversé la frontière mais nous avons déboursé beaucoup d’argent pour ça, tandis que moi j’ai été reconduit à Kigali où je devais donner des explications sur comment je faisais fuir des Tutsi. Quand on m’a fait arriver à Kigali, j’ai été remis à l’Etat-Major de l’Armée dans ses bureaux qui se trouvaient alors à l’Hôtel des Diplomates, on m’a posé beaucoup de questions sur comment j’étais en train de faire fuir des Tutsi. On m’a posé beaucoup de questions sur divers sujets concernant ce que j’écrivais, qui se réalisait par la suite”.

Ce qu’a écrit Hassan Ngeze dans ces passages est tout à fait différent de ce qu’il avait dit dans les différents autres documents que nous avons rencontrés ci-dessus, et qui ont été écrits par lui-même. Je donne ne fût-ce que deux exemples:

Dans sa lettre à l’Organisation “African Rights”, tel que nous l’avons vue ci-dessus, Hassan Ngeze, parlant du même épisode de Bigogwe et des Tutsi qu’il évacuait de Kigali, a écrit comme suit:

  • Au début du mois de mai, le Sous-Lieutenant DUSABEYEZU, fils d’un Adjudant-Chef qui travaillait à la Présidence de la République, qui se trouvait alors au camp militaire de Gisenyi mais qui a maintenant rejoint les rangs du FPR, a attaqué mon domicile accompagné de cinq autres militaires. C’était vers 19 heures. Il a dit qu’il était envoyé par le Colonel Anatole NSENGIYUMVA pour qu’il vienne vérifier si je ne cachais pas des Tutsi chez-moi, dans quel cas il devait alors brûler toute la concession. Il lui a alors été demandé de mettre par écrit toutes ces déclarations et d’y apposer sa signature. Ce qui fut fait aussitôt. Ensuite, il a mis la maison sens dessus, sens dessous pour rechercher ces Tutsi dont il n’a pas trouvé la moindre trace.
  • Une semaine plus tard, vers 1 heure du matin, des militaires conduits par le Capitaine HABIMANA et le Lieutenant BIZUMUREMYI dont j’ai déjà parlé sont venus chez-moi. Dès leur arrivée, ils ont tiré beaucoup de coups et brûlé ma Peugeot 305. Dans cette opération, une personne qui n’était pas impliquée dans cette histoire a trouvé la mort. Tous les habitants de la ville de Gisenyi peuvent témoigner de ces attaques contre mon domicile.
  • Après l’échec de ces attaques, plus de 43 télégrammes ont été lancés demandant à toute personne qui m’apercevrait de tirer immédiatement sur moi. Au courant de ce mois, j’ai été attrapé sur la route Ruhengeri-Gisenyi dans un lieu nommé Bigogwe. Le militaire qui m’a arrêté m’a directement montré le télégramme lui intimant l’ordre de m’abattre sur-le-champ, mais puisque nous étions nombreux, il a préféré m’emmener au camp militaire de Bigogwe. La même nuit, deux véhicules nous ont conduits au camp militaire de Gisenyi, et le lendemain soir, l’on m’a fait monter à bord d’une jeep, sous la garde d’un lieutenant de la Police Militaire et de six autres militaires qui avaient reçu la consigne de m’abattre sur la route de Kigali après avoir avisé le Chef d’Etat-Major de l’Armée à Kigali même.
  • Nous sommes arrivés à Kigali pendant la nuit et j’ai directement été conduit auprès du Chef d’Etat-Major de l’Armée, le Général BIZIMUNGU. Celui-ci m’a laissé lui expliquer l’origine de tous mes problèmes et il a conclu que tout cela avait été causé par le Colonel Anatole NSENGIYUMVA qui envoyait d’incessants télégrammes demandant que je sois abattu tout simplement parce que [je] prédisais des faits sur base des signes avant-coureurs que j’observais et qui étaient vérifiables.
  • Par la suite, Radio Rwanda m’a interviewé à propos de ce que j’avais écrit pendant la guerre, et sur la façon dont je pensais que la guerre allait se terminer. Compte tenu de l’ignorance profonde qui caractérisait tous ceux-là qui me pourchassaient et de l’embargo sur les armes qui venait d’être décidé contre le Gouvernement Rwandais, j’ai répondu que la guerre allait se terminer au mois de juillet 1994, mais qu’à Kigali elle allait prendre fin en août de la même année. Et c’est comme cela que ça s’est passé effectivement”.

Dans sa lettre du 04 mai 1999, Hassan Ngeze a plutôt écrit ce qui suit:

  • “Le lendemain matin, le colonel Nsengiyumva a amené des militaires PM [police militaire] et leur a donné une jeep pour m’emmener à Kigali où on avait prévu de me tuer. Quand nous sommes arrivés à Kigali, on m’a mis au cachot. Peu de temps après, une bombe est tombée près du cachot et le général Bizimungu est immédiatement arrivé sur les lieux. Les militaires PM lui ont expliqué qu’ils me ramènent de Gisenyi, et qu’on leur a demandé de m’emmener à l’Etat-Major de l’Armée à Kigali.
  • J’ai immédiatement été appelé par le général Bizimungu, et nous sommes allés à l’Hôtel des Diplomates, nous avons partagé [un verre] et il m’a expliqué que celui qui est très determiné à me faire tuer est J’ai ensuite tenu une réunion avec lui ainsi que Gatsinzi et le Major Baransalitse là-bas même à l’Hôtel des Diplomates, et ils m’ont expliqué que c’était un miracle que je sois encore en vie, que le télégramme était sorti à l’aube demandant que je sois tué sans hésiter.
  • Alors après m’être expliqué, on m’a laissé partir et je suis allé chez-moi à Biryogo. Entretemps, un certain Kabiligi est rentré de ses opérations, et quand on lui a expliqué comment j’avais été ramené de Gisenyi, mais que Bizimungu m’a relâché, il [Kabiligi] a dit que CET IMBÉCILE VRAIMENT ALORS QU’IL EST UN INYENZI COMME NOUS AVONS DES PREUVES POUR CELA ! Alors après quelques jours, j’ai préféré rentrer chez-nous à Gisenyi. Et dans le véhicule que je conduisais, je transportais la famille d’un vieux qui était mon ami, qui possède une boulangerie à Gisenyi, qui s’appelle Musaliyama, parce que ses enfants sont également des métis d’Arabe et de Noir [abasaliyama]. Que ce n’était pas des Tutsi.
  • Je suis parti et quand je suis arrivé à Ruhengeri, j’ai rencontré un certain Bivugabagabo, qui m’a ordonné de me rendre directement au camp militaire de Mukamira. Quand j’y suis arrivé, il m’y a retrouvé et il m’a demandé ce qui m’oppose à Anatole. Je lui ai expliqué comment se présentent les choses, et je lui ai demandé de s’informer auprès de Bizimungu à Kigali pour vérifier si ce n’est pas de là que je viens, puis après avoir reçu des explications complètes que j’ai réellement rencontré le haut commandement de l’Armée. J’ai été alors relâché et j’ai continué mon voyage vers Gisenyi. Quand je suis arrivé à Bigogwe, là aussi j’ai été arrêté parce qu’ils avaient ces télégrammes qui demandaient que je sois tué sans hésiter. Alors il a trouvé que me tuer ne lui servirait à rien, il m’a laissé partir et a dit qu’il valait mieux que je sois tué par quelqu’un d’autre que lui. Entre-temps, j’ai écrit beaucoup de documents, donnant des explications aux autorités du gouvernement Alors certains documents que j’ai écrits en criant au secours, je les ai confiés à Ngirumpatse Mathieu qui était en compagnie de Nzirorera dans un véhicule, et ils se rendaient à Gitarama. Ils ont accepté de prendre ce courrier pour moi et jusqu’à présent, je les respecte pour ça. Mais entre-temps ce Bivugabagabo avait les télégrammes qui me recherchaient et qui demandaient également que je sois tué, et après lui avoir expliqué comment se présente le problème et comment j’avais rencontré le général Bizimungu, il m’a demandé où j’emmenais ces Tutsi que j’avais avec moi, et je lui ai dit que ce n’était pas des Tutsi, mais que c’était des Arabes vivant dans la ville de Gisenyi.
  • Alors il nous a tous fait descendre du véhicule et il a procédé à un petit interrogatoire, mais j’ai été interrogé par un Major qui, paraît-il, était le S3 dans ce camp militaire. Alors que j’étais dans l’interrogatoire, les militaires du camp militaire de Bigogwe ont utilisé mon véhicule pour transporter les cadavres des Tutsi qui avaient été tués dans ce camp militaire.
  • Après le transport des cadavres, ils ont demandé aux personnes que je transportais s’elles n’étaient pas des Tutsi, et elles ont affirmé qu’elles étaient Arabes. C’est alors que Nzungize a préféré me dire qu’il ne voulait pas que mon sang soit sur son compte, qu’il préfère m’envoyer à Gisenyi, là où on a des preuves suffisantes qui peuvent justifier mon assassinat, puisque c’est eux [à Gisenyi] qui connaissent mieux ces Tutsi que j’avais cachés.
  • Il a alors demandé aux militaires à qui il venait de me confier, de me remettre à Anatole à Gisenyi pendant cette nuit, mais il a dit que je dois d’abord aller montrer où vivent ces Arabes que je transportais, pour voir s’il ne s’agissait pas de Tutsi. Nous sommes partis avec notre véhicule plein de sang provenant de ces corps de personnes tuées au camp militaire de Bigogwe, et nous sommes arrivés dans la ville de Gisenyi où je suis allé montrer le domicile de ces Arabes que je transportais, puis on leur a demandé les pièces d’identité et on a trouvé qu’ils n’étaient pas des Tutsi. Alors mon véhicule qui nous ramenait de Kigali, je l’ai laissé chez ces Arabes, et les militaires m’ont mis dans leur jeep sans que je n’arrive chez-moi.
  • Nous les avons alors laissés là-bas tandis que j’ai été emmené au camp militaire où j’ai encore une fois été détenu sans interrogatoire, en attendant d’être tué. J’étais détenu avec les bras liés derrière le dos, et j’ai été ligoté par le lieutenant Bizumuremyi. J’ai passé deux jours ligoté, sans manger. C’est alors que le nommé Nzirorera en compagnie du regretté Musabe Pasteur, sont arrivés au camp militaire de Gisenyi pour chercher du carburant pour leurs véhicules. Là au camp militaire où j’étais détenu, j’ai essayé de leur demander de dire à Anatole de me libérer, mais il a refusé. Je leur ai demandé de lui dire au moins de me détenir, mais sans que je sois ligoté, mais cela aussi n’a rien donné”.

Il est clair que toutes ces versions sont différentes, et montrent bien qu’il s’est agi de montages de la part de Monsieur Hassan Ngeze. Dans une version par exemple, il parle de trois véhicules qui transportaient 40 Tutsi qu’il évacuait de Kigali vers Goma, dans une autre, et pour le même épisode, il dit qu’il avait dans son véhicule seulement les enfants de MUSALIYAMA, qui étaient des métisses, et dans la lettre en annexe 2, il parle de 10 Tutsi qu’il voulait évacuer au Zaïre. Dans une version, il dit qu’arrivé à Kigali, il a été arrêté et interrogé par l’Etat-Major de l’Armée; dans une autre, il dit plutôt qu’il est allé partager un verre avec le Chef d’Etat-Major à l’Hôtel des Diplomates. Etc, etc… Le lecteur pourra lui-même apprécier.

A la page 69, Ngeze se vante qu’après la guerre, il était la personne au Rwanda, qui a sauvé plus de Tutsi que tout le monde, à savoir plus de 1000 Tutsi. Et il affirme que tous sont encore vivants.

Mais comment peut-il savoir ce que tout le monde a fait en matière de sauvetage des Tutsi, pour affirmer que c’est lui qui a sauvé le plus de monde ? Ceci pose question. Ngeze affirme également, que toutes les images qui passaient sur les télévisions du monde, c’est lui qui les envoyait sur CNN, Reuters, BBC, et ailleurs, dans le cadre de sensibiliser l’opinion internationale pour amener la Communauté internationale à intervenir au Rwanda. Il dit aussi qu’il a pu faire tout ça, parce qu’il avait l’équipement et l’expertise nécessaires.

Je ne peux pas lui disputer cela, il a pu faire des choses dans ce domaine, mais encore une fois, comment peut-il affirmer que c’est lui qui envoyait toutes les images qui passaient sur toutes les télévisions du monde, alors qu’il y avait des journalistes étrangers qui suivaient les événements, même du côté FPR, et qu’il y avait des satellites qui prenaient des photos ? Ça c’est du pur Ngeze !

A la page 73, Hassan Ngeze reparle des attaques présumées conduites par des militaires contre son domicile à Gisenyi, parce que, selon lui, il sauvait régulièrement des Tutsi. Je réitère mes affirmations qu’une seule perquisition a été conduite au domicile de Hassan Ngeze, pour y saisir des armes qu’il avait obtenues je ne sais d’où, et elles ont été effectivement saisies. Nous avons saisi huit fusils d’assaut. A la même occasion, un poste émetteur-récepteur y a été saisi. J’ai expliqué tout ceci dans les pages qui précèdent. Voilà ce que Hassan Ngeze veut cacher, en s’en prenant en permanence aux militaires du camp militaire de Gisenyi, et à moi-même particulièrement.

A la page 82, Hassan Ngeze raconte des choses que, à mon avis, il ne maîtrise pas du tout. Par exemple, il affirme que les militaires qui étaient sous le commandement de HABYARIMANA Juvénal ont massacré des Tutsi pendant la période de la Première République du Président KAYIBANDA. Est-ce que Ngeze peut dire aux lecteurs les circonstances et le moment où ces militaires sous le commandement de Habyarimana auraient commis ces massacres ? Il ne suffit pas d’affirmer, il faut aussi expliquer quand cela est nécessaire. Moi je ne suis pas au courant de ces massacres allégués.

Il affirme aussi que ce sont les Belges et les Français qui ont demandé au Président Habyarimana de faire un Coup d’Etat pour renverser le Président Kayibanda qui était fatigué. Mais, est-ce que Hassan Ngeze aurait des preuves de ses affirmations sur ce point ? Que s’est-il réellement passé, et quelle fut la part des Français et des Belges. Ne sont-ce pas là des rumeurs que Ngeze reprend sans preuves ? Malheureusement, il en est plein dans ses livres.

L’assassinat du Colonel MAYUYA

De la page 83 à 84, Hassan Ngeze parle de l’assassinat du Colonel MAYUYA Stanislas, et raconte des rumeurs qu’il présente au public comme la vérité. Il charge le Colonel SERUBUGA Laurent, ainsi que les beaux-frères de feu le Président Habyarimana comme étant ceux qui ont conspiré pour assassiner le Colonel Mayuya. Il allègue que le Colonel SERUBUGA avait appris que son poste allait lui être enlevé, et, implicitement, donné au Colonel Mayuya. Hassan Ngeze n’oublie pas d’impliquer le Lt Colonel Nsengiyumva Anatole, c’est-à-dire moi-même, dans cet assassinat. Il affirme que c’est moi qui ai recruté l’assassin, le sergent BIROLI. Puis il dit que BIROLI a été empoisonné pour qu’il ne révèle pas les noms de ses commanditaires. Il parle également de l’arrestation et la mise en détention du Colonel NDIBWAMI Déogratias et d’autres, consécutivement au dossier Mayuya.

Tout ce que dit Hassan Ngeze ici n’est que simples rumeurs. Oui, le Colonel Mayuya a été assassiné en date du 18 avril 1988, oui, il a été assassiné par un sergent qui s’appelait BIROLI, originaire de l’ancienne commune RUKONDO, dans l’ancienne préfecture de Gikongoro. Mais aucune preuve de l’implication du Colonel Laurent SERUBUGA, ni des beaux-frères de feu le Président Habyarimana n’a été trouvée.

Je ne connaissais pas le sergent Biroli avant l’assassinat du Colonel Mayuya. Je n’avais même jamais entendu parler de lui. C’est la première fois que j’entends quelqu’un vouloir m’impliquer dans l’assassinat du Colonel Mayuya. A part Hassan Ngeze, personne d’autre n’a jamais fait ne fût-ce qu’une lointaine allusion à mon implication. Par contre, le Président HABYARIMANA, quand il a appris la mort du colonel Mayuya, m’a directement désigné pour le remplacer au Commandement du Camp Kanombe et du Bataillon para-commando. Je l’ai fait, j’ai couru à Kanombe pour reprendre la situation en main et prendre toutes les mesures de sécurité nécessaires pendant de telles circonstances. Une commission a été mise en place pour enquêter sur l’assassinat du Colonel Mayuya, elle n’a obtenu aucun résultat. Une deuxième l’a remplacée. Pas de résultat non plus. Une troisième dont je faisais partie a été constituée, et elle était présidée par le Procureur général Alphonse Marie Nkubito, et comprenait le Colonel gendarme Pontien HAKIZIMANA et Monsieur NZARAMBA. Nous avons exploré plusieurs pistes, et nous n’avons pas pu découvrir la vérité sur l’assassinat.

Entre-temps, l’assassin Biroli est mort en prison dans des circonstances inexpliquées. Une autre enquête a été menée à ce sujet, mais n’a rien donné de consistant.

Le Colonel NDIBWAMI Déogratias, le Colonel BEM NKULIYEKUBONA Anselme, le Major HAVUGWINTORE Mathias, et quelques civils, ont été arrêtés relativement à ce dossier d’assassinat du Colonel Mayuya. Mais leur dossier n’était pas consistant. Ils ont été par la suite libérés. Nous avions d’ailleurs demandé leur libération longtemps avant, mais cela n’a pas été possible. Dans un autre document, je dirai tout ce que je sais sur le dossier MAYUYA. Toujours est-il que Hassan Ngeze ne raconte que des rumeurs, qui avaient d’ailleurs commencé à circuler même avant l’assassinat du Colonel Mayuya. Obnubilé par la volonté tenace de me faire du mal, Hassan Ngeze induit l’opinion en erreur en racontant des mensonges, notamment en voulant m’impliquer dans l’assassinat du Colonel Mayuya, un officier que j’admirais tant, et avec lequel j’avais de très bonnes relations. Quant au Colonel Serubuga et les beaux-frères de feu le Président Habyarimana, tout le monde sait que leur diabolisation avait commencé depuis longtemps, et a continué pendant toute la période du multipartisme et de la guerre. Hassan Ngeze élude tout cela, et dit ce qui l’intéresse, y compris les mensonges et les rumeurs.

La mort des anciens politiciens de Gitarama

De la page 84 à 85, Ngeze parle de la mort des anciens politiciens de Gitarama, qu’il impute à Monsieur Protais Zigiranyirazo. Et il affirme qu’il était en prison à Ruhengeri en même temps que Monsieur Justin Mugenzi.

Ce que raconte Hassan Ngeze est faux. Oui, les politiciens sont morts, mais Hassan Ngeze ne les a même pas vus. Il n’était pas en prison avec eux, il n’était pas avec Justin Mugenzi. Je n’ai pas l’intention de prendre la défense de Monsieur Protais Zigiranyirazo, mais Hassan Ngeze raconte ce qu’il n’a pas vu, et invente des histoires. Je reviendrai sur ce point, dans mon commentaire sur le deuxième livre “Ukuli kwahishuwe”.

A la page 101, Hassan Ngeze affirme que feu le Colonel SAGATWA Elie était un Tutsi, fils de Monsieur Ephrem SETAKO, un Chef Tutsi qui a dirigé la région du Bushiru[15]. Eh bien, je ne sais pas si Hassan Ngeze aurait fait des recherches et qu’il aurait trouvé des preuves de ce qu’il affirme. Ce que moi je sais, c’est que le Colonel Elie Sagatwa était le fils de Fidèle SEMAPFA, Hutu, et Fidèle Semapfa était le frère de Gervais MAGERA, beau-père de feu le Président Habyarimana. Mais Ngeze aime bien propager des rumeurs, qu’il prend pour la vérité qu’il veut faire avaler à la population, dans des buts non avoués. Sinon, peut-il nous dire d’où il tire ces affirmations sur la filiation de feu le Colonel Elie SAGATWA ?

A la même page, Hassan Ngeze prétend qu’aucun officier Tutsi n’a commandé un camp militaire du temps de Habyarimana, qu’aucun officier Tutsi n’a figuré au sein du Commandement des forces armées.

Je sais pourtant que le Colonel Epimaque RUHASHYA a commandé des camps militaires, dont celui de Ruhengeri où il était en 1971, celui de l’ESO à Butare où il était notamment en 1973, et j’étais sous son commandement, ainsi que l’important camp militaire de Kigali – le camp Kigali – où se trouvaient notamment l’Etat-Major de l’Armée, l’Ecole Supérieure Militaire, une grande partie et le Commandement de la base logistique de l’ Armée, le Bataillon de reconnaissance, et d’autres unités encore. Je ne cite que cela. Le même Colonel Ruhashya a été inspecteur des forces armées rwandaises, et il a occupé d’autres importantes fonctions au cabinet du Ministère de la Défense. Ce n’est qu’un exemple. Donc, Monsieur Hassan Ngeze devrait dire ce qu’il maîtrise le mieux, et non pas égarer ses lecteurs, en leur racontant n’importe quoi. S’il avait dit que les officiers supérieurs Tutsi n’étaient pas nombreux, là il aurait eu raison. Mais ce qu’il dit ici est tout à fait faux.

A la page 103, Ngeze affirme que c’est le Président Habyarimana qui a donné ses insignes de grade de major à Paul KAGAME dans une cérémonie en Ouganda, en même temps qu’il les a donnés au général RWIGEMA. Et il dit qu’il était personnellement présent, qu’il a vu cela de ses propres yeux. Ngeze ajoute que le Président Habyarimana est ainsi tombé dans le piège lui tendu par le Président MUSEVENI, car en procédant ainsi, il a fait de RWIGEMA et KAGAME des Rwandais comme les autres.

Voilà justement le mensonge de Ngeze, comme d’habitude. Ngeze n’était pas dans la cérémonie en question, et il n’était pas dans la délégation qui avait accompagné le Président Habyarimana à Kampala. Il ne sait certainement pas la date à laquelle ces cérémonies ont eu lieu, ni dans quel endroit, ni comment cela s’est déroulé. Je dis qu’il ment, qu’il n’était pas présent, car moi j’y étais. Ngeze n’était pas là à Kampala. Pas du tout. Pourquoi doit-il mentir sur ce point aussi ?

Oui, il a été demandé au Président Habyarimana de donner à RWIGEMA ses insignes de grade de Général-Major, comme il fut demandé à d’autres dignitaires alors présents dans la cérémonie, des Ougandais comme des étrangers, de donner leurs insignes de grades aux différents promus. Je ne sais pas pourquoi l’on dit maintenant que cela était un piège contre le Président Habyarimana, mais ceci a été soulevé, non pas directement après la période des cérémonies, mais lorsque le multipartisme a été réinstauré au Rwanda. Alors, les détracteurs du Président Habyarimana ont monté cet épisode en épingle, avec beaucoup de commentaires désobligeants. En tout cas, ce n’est pas le Président Habyarimana qui a donné ses insignes de grade à Kagame, et en ce moment-là, ce dernier ne figurait pas parmi ceux qui devaient recevoir leurs insignes de grades des mains des dignitaires qui avaient été invités dans la cérémonie. Ceci concernait surtout les officiers qui recevaient leurs grades de Général, ou de Colonel et Lieutenant-Colonel. Les autres ont aussi reçu leurs insignes, mais les Majors ou autres Capitaines, Lieutenants ou Sous-lieutenants ne les ont pas reçus des mains des hauts dignitaires. Je donnerai d’autres détails plus tard, car moi j’étais présent dans la tribune d’honneur, mais pas Hassan Ngeze.

A la page 123, Ngeze prétend qu’il a vu tous les télégrammes de l’EM des FAR et du FPR, envoyés ou reçus, pendant toute la période allant du 06 avril au 15 juillet 1994. Ceci est un mensonge saugrenu. Ce n’était pas possible. Même des services commis à un travail d’interception ne pouvaient pas intercepter tous ces messages des deux côtés. Je le mets au défi de présenter ne fût-ce qu’un dixième de ces messages. Hassan Ngeze comme nous le connaissons, n’allait pas garder ces messages, sans les publier, ou du moins en publier quelques-uns. Ou alors, dire le contenu de quelques-uns d’entre eux. Ce qu’il raconte ici est donc du pur mensonge.

A la page 138, Ngeze rappelle que c’est lui qui prenait toutes les vidéos qui sont passées sur CNN, BBC, et sur d’autres télévisions du monde. Mais, ceci est une exagération. Au TPIR, nous avons reçu comme exhibits de nombreuses vidéos de la période d’avril-juillet 1994, qui sont passées sur différentes télévisions du monde et ce n’était pas des vidéos de Hassan Ngeze. Mais, qu’il indique au moins les vidéos qu’il a prises, et que le monde aurait vues. Ngeze aime trop se gonfler, et il dit tout cela sans honte et sans rire.

A la page 234, Hassan Ngeze semble dire implicitement qu’il possède des télégrammes que le Général GATSINZI envoyait aux Inkotanyi pendant la période des hostilités d’avril-juillet `1994. Je ne veux pas dire que le Général Gatsinzi ne l’a pas fait, car je n’en sais rien. Je ne veux pas non plus prendre sa défense. Je veux tout simplement dire que si Ngeze possède de tels télégrammes, qu’il les publie pour que tout le monde soit informé. Sinon, il crée une fausse opinion, et les gens sont tout simplement leurrés. C’est comme ça que naissent des rumeurs, et qu’on crée une fausse histoire des événements.

A partir de la page 283, Hassan Ngeze se livre à une apologie aveugle et ridicule du Président Kagame et du régime FPR. Mais de la page 284 à 286, il étonne par son analyse de la situation des réfugiés, allant jusqu’à affirmer que les gens comme feu le Colonel Patrick KAREGEYA et le Lt Général KAYUMBA NYAMWASA doivent rentrer au pays et faire face à la justice. S’ils refusent catégoriquement de rentrer, ils doivent être assassinés, parce que ce sont des ennemis du pays qu’ils ont fui, surtout qu’ils étaient dépositaires de lourds secrets d’Etat qu’ils peuvent utiliser de façon nuisible pour le pays. Pour Hassan Ngeze, le pays doit faire tout son possible pour neutraliser de tels individus, y compris en les assassinant au nom de l’Etat.

Hassan Ngeze n’a pas froid aux yeux en disant ceci. Mais je me demande s’il était vraiment sincère en le disant. Et je me demande si c’est cela ce qu’il a souvent appelé ses “très bonnes analyses” que les gens aimaient de lui. De quels droits dispose-t-il de condamner ainsi des gens dont il n’a pas les dossiers ? Est-ce qu’il sait réellement pourquoi ces deux personnes ont fui leur pays ? Et si quelqu’un d’autre disait la même chose à propos de Hassan Ngeze, est-ce qu’il serait vraiment heureux ? Je crois que toute personne, criminelle ou non, a droit à la justice, avant de subir tout autre châtiment. Quel que soit le crime commis. A ma connaissance, Patrick KAREGEYA et Faustin KAYUMBA NYAMWASA ont été jugés dans leur pays, mais n’ont pas été condamnés à mort. De quel droit dispose donc Hassan Ngeze lui, de condamner à mort ces deux personnes, ou d’autres qui se trouveraient dans la même situation ? Lui aussi dénonce les crimes du FPR et critique le Président Paul Kagame, et pense que ceux qui ont fait la même chose doivent être tués. Ceci est une contradiction propre à Hassan Ngeze.

A la page 301, Hassan Ngeze affirme qu’il informait la MINUAR et même l’ONU à New York. Ses rapports étaient envoyés à un rythme quotidien. Peut-être que ceci est vrai. Ça nous ferait comprendre certaines choses et certaines situations, car si ces rapports étaient du genre de ce que nous sommes en train de lire dans ces livres de Monsieur Hassan Ngeze, les dégâts ont été vraiment importants. J’ose espérer qu’il est en train d’exagérer tout simplement.

A la page 350, Hassan Ngeze réaffirme qu’il est absolument un des deux seules personnes qui ont le plus d’informations sur le Rwanda. Mais, qui est donc la deuxième personne à part lui-même ? Comment sait-il ce que toutes les autres personnes ont comme informations sur le Rwanda ? Comment a-t-il fait pour arriver à cette conclusion ? En tout cas, il ne faut pas essayer de chercher de l’humilité dans la nature de Monsieur Hassan Ngeze.

TROISIEME PARTIE: UKULI KWAHISHUWE

Tout comme je viens de parcourir le premier livre – Igicumbi cy’Ikinyoma – je vais le faire pour le deuxième – Ukuli Kwahishuwe. Je procèderai de la même manière, en parlant de certaines parties que je crois mieux maîtriser, évitant de prétendre connaître tout de ce qu’écrit Hassan Ngeze. D’autres lecteurs qui le voudront, pourront me compléter.

D’ores et déjà, je dois dire que Hassan Ngeze, dans ce deuxième livre, continue sur la même lancée que dans le premier. C’est-à-dire toujours plus de mensonges, de fabulations, et d’arguments fondés sur des rumeurs qu’il présente comme de la pure vérité. Il continue à se mettre en avant, arguant qu’il était, et qu’il est toujours, un homme extraordinaire, qui savait presque tout, en tout cas plus que tout le monde au Rwanda, à part une autre personne qu’il ne veut pas nommer. Mais aussi, et surtout, il y met plus de virulence à vilipender Anatole Nsengiyumva, c’est-à-dire moi-même, et les anciennes forces armées rwandaises. Nous allons le voir à fur et à mesure que nous avançons.

De la page 16 à la page 18 de ce livre, Hassan Ngeze parle de certaines personnes qui auraient été tuées par les ex-FAR, d’autres par le FPR. Pour ce qui est des ex-FAR, il affirme que c’est le Colonel Nsengiyumva qui a donné les ordres de commettre ces crimes à Gisenyi.

Je dois préciser que des enquêtes ont été menées à Gisenyi, un procès a eu lieu à Arusha, et il a été prouvé que les militaires qui étaient sous mon commandement n’ont pas été impliqués dans les tueries. Et c’est la vérité. Seuls trois individus, qui auraient participé, et qui étaient en tenue civile, ont été dénouncés par un certain témoin connu sous le pseudonyme de “DO”, qui n’a pu convaincre que trois juges sur cinq de la Chambre d’appel du TPIR. Mais je dois préciser que ce témoin DO était quelqu’un proche de Hassan Ngeze, et c’est ce dernier qui l’a formé pour témoigner contre moi. Ce témoin a même déclaré qu’il était chez Hassan Ngeze, lorsque les militaires sous mon commandement y sont allés pour perquisitionner et saisir les armes entre les mains des jeunes de Hassan Ngeze[16]. Que faisait-il là-bas, vers 05h00 du matin ? En fait, Hassan Ngeze et d’autres voyous de la ville de Gisenyi, voulant se distancier des crimes commis dans la ville de Gisenyi, et dans lesquels beaucoup parmi eux étaient impliqués, ont décidé de tout mettre sur la tête des militaires et de leur commandant, c’est-à-dire moi-même. Et Hassan Ngeze a essayé de coordonner ça. Mais ils ont fait cela de façon assez gauche, qu’ils sont devenus non crédibles. Même les trois prétendus militaires en tenue civile n’ont jamais été identifiés. Maintenant, Hassan Ngeze essaie de revisiter ce qu’il avait programmé, pour voir si cela peut causer quand même quelque tort contre moi. C’est cela la raison de ses élucubrations actuelles.

De la page 51 à 52, Hassan Ngeze se décrit comme une personne énigmatique et controversée. Mais il prétend que ce sont les autres qui le considèrent comme tel. Ainsi, il affirme que les gens se demandaient comment lui, Ngeze, qui rencontrait toutes les autorités comme il voulait, au bureau comme dans leurs domiciles, y compris le Président Habyarimana lui-même qu’il allait voir au bureau et à la maison, a été le même Ngeze qui séjournait tout le temps en prison sous le régime du même Président Habyarimana. Il dit que ceci est effectivement incompréhensible, car même lorsqu’il était en prison, ce sont les autorités ou leurs proches qui lui rendaient visite, ou lui amenaient à manger.

A mon avis, ceci est une tentative d’expliquer ce qu’il a dit dans son premier livre, et qui ne pouvait pas se comprendre, quand il a dit qu’il était reçu par toutes les autorités, y compris le Président Habyarimana, et que certaines parmi elles, le Président Habyarimana y compris, aimaient les analyses que Ngeze leur faisait. Il a compris que cela ne cadrait pas avec son statut d’éternel prisonnier, et il a écrit ces arguments pour justifier ses premières allégations.

Il est vrai que certaines autorités croyaient en Hassan Ngeze, car il les fascinait par sa témérité et son absence de peur de mentir. Mais Hassan Ngeze usait également de chantage contre certains, car il n’avait pas peur de le faire. Il a fait du chantage contre beaucoup de gens, et il leur extorquait beaucoup d’argent. Certains ont alors essayé de l’amadouer et de lui montrer qu’ils étaient avec lui. Ce sont ceux-là qui faisaient semblant de le soutenir, et qui le recevaient. Ce sont également ceux-là qui le défendaient, et qui intervenaient quand ils le pouvaient, lorsque Hassan Ngeze venait à être arrêté à cause de ses nombreux actes répréhensibles. Il y a quand même certains autres qui l’utilisaient pour régler certains comptes avec leurs adversaires. Il y en a enfin, qui croyaient que Ngeze faisait du bon travail. Ils se trompaient, car Hassan Ngeze écrivait des choses, sous prétexte que c’était pour la défense des Hutu, alors que c’était pour donner au FPR et ses alliés le prétexte d’attaquer et de condamner le régime Habyarimana. C’est ce qui se passait souvent. Mais concernant le Président Habyarimana, Ngeze ne le fréquentait aucunement, et je doute fort qu’il soit allé le voir à la maison une fois dans sa vie. En tout cas, des membres de la famille Habyarimana auxquels j’ai posé la question, m’ont affirmé que Ngeze n’a jamais mis les pieds chez le Président Habyarimana.

De la page 53 à la page 55, Ngeze explique comment il procédait pour avoir des informations de première main. Il affirme qu’il corrompait des agents dans les ministères, dont surtout les secrétaires et les plantons, en leur donnant de l’argent, contre des documents de l’Etat. Il procédait de la même manière dans le secteur privé et chez les militaires. Il corrompait aussi les opérateurs radio, les différents agents des réseaux des transmissions, etc…

Bien sûr il exagère sur le caractère systématique de ce genre de corruption, mais je confirme qu’il corrompait effectivement certains agents, qui lui vendaient des documents. Il y a également l’un ou l’autre opérateur radio qui lui vendait des messages radio. Mais ce n’était pas si systématique contrairement à ce qu’il affirme. Toujours est-il que ceci était très préjudiciable, car il s’agissait souvent de violations de la sécurité de l’Etat. Et très souvent, Ngeze utilisait les informations ainsi glanées à gauche et à droite, pour faire du chantage contre certains hauts fonctionnaires de l’Etat, leur soutirer de l’argent, ou acheter leur soutien pour intervenir chaque fois qu’il avait des problèmes. Mais aussi, et surtout, il vendait ces informations au FPR, via Monsieur Valens Kajeguhakwa, plus tard directement via des canaux que Hassan Ngeze connaît mieux.

Ce n’est pas moi seul qui confirme que Monsieur Hassan Ngeze coopérait avec le FPR. Il le reconnaît lui-même, et l’a dit lors de sa déposition devant le TPIR. Il suffit de lire la  Déposition de Hassan Ngeze devant le TPIR, dans l’affaire ICTR-99-52-T (affaire dite des Médias), transcriptions de l’audience du 26 mars 2003, p.19, 28 mars 2003, pp.44-48, 31 mars 2003, pp-19-26, 01 avril 2003, pp.27-46, 08 avril 2003, pp.17-20. Ngeze reconnaît qu’il échangeait des informations avec LIZINDE, quand ce dernier avait déjà rejoint le FPR. Il allait même le voir au CND, quand le bataillon du FPR y était, et il échangeait des informations avec Lizinde. Mais ceci est ce qu’il reconnaît. Il a fait trop de dégâts, non pas nécessairement pour la volonté de trahir, mais pour de l’argent.

Je sais également que, pour ce qui concerne les opérateurs de l’Armée qui auraient été approchés par Hassan Ngeze pour avoir des messages radio qu’ils recevaient ou envoyaient,  l’officier G2 à l’Etat-Major de l’Armée, alors le Colonel BEMSG Aloys NTIWIRAGABO, allait initier une enquête, quand les événements se sont précipités, et que nous avons dû quitter le pays. Mais Hassan Ngeze a fait trop de dégâts, et il reconnaît que ce qu’il faisait était répréhensible. Mais il en est très fier. C’est dommage qu’il puisse s’en vanter maintenant.

Lorsque Hassan Ngeze prétend qu’il écoutait les communications radio du FPR, il ment et/ou il exagère. Si cela avait été le cas, il n’allait pas s’empêcher de publier ne fût-ce qu’un seul message qu’il aurait capté. S’il n’allait pas le faire avant notre exil, il allait le faire une fois en exil. Ce ne fut pas le cas. Donc, il ment. S’iI dit la vérité, qu’il publie ne fût-ce qu’un seul message qu’il aurait capté dans le réseau du FPR.

En fait, Hassan Ngeze a commencé à voler les informations de l’Etat en corrompant certains agents, lorsqu’il travaillait encore directement sous Valens Kajeguhakwa. N’est-ce pas que ce dernier reconnaît avoir constitué des réseaux pour recueillir des renseignements, afin de les utiliser pour faire tomber le régime Habyarimana, et ce au profit du FPR ? Et à ce propos, Monsieur Valens Kajeguhakwa a dit qu’à partir de 1984, il disposait d’un réseau d’informateurs militaires au niveau des Etats-majors notamment, ainsi que des civils dans les ministères, les préfectures et les communes. Il affirme que ses informateurs étaient payés par le réseau de ses stations-service, pour extorquer des informations de toute sorte dans différents secteurs de la vie nationale, et après faire pression et chantage, pour provoquer une désaffection vis-à-vis du régime[17]. Hassan Ngeze était parmi les éléments au service de Monsieur Kajeguhakwa, et a longtemps travaillé dans le cadre de ces réseaux. Il n’a jamais cessé de le faire, même quand il semblait avoir divorcé d’avec son ancien patron, Monsieur Valens Kajeguhakwa.

A la page 55, Ngeze prétend que deux Français et l’épouse de l’un d’eux ont été assassinés par le FPR très tôt matin le 7 avril 1994, parce qu’ils écoutaient les communications du FPR, et que le FPR savait bien que ces Français étaient venus au Rwanda pour écouter ses communications.

Il veut parler des Adjudants-Chefs René MAÏER et Alain DIDOT, ainsi que de Gilda DIDOT,épouse de l’Adjudant-Chef Alain DIDOT. Ils ont été effectivement assassinés par le FPR, non pas très tôt matin le 7 avril 1994, mais plutôt le 8 avril 1994, à la résidence de l’Adjudant-Chef Didot, sise à environ 200 mètres du CND où était le bataillon du FPR. Ces deux sous-officiers français n’étaient pas venus au Rwanda pour écouter les communications du FPR. L’Adjudant-Chef Didot était là pour former nos militaires et gendarmes au métier de mécanicien radio, et pour l’entretien des postes radio, et c’est ce qu’il faisait. L’Adjudant-chef Maïer était conseiller à la Gendarmerie nationale. Ils ont été assassinés tout simplement parce qu’ils étaient des Français. Ce que dit Ngeze sur ce point, c’est ce qu’il a ramassé à gauche et à droite, il ne maîtrise pas le dossier. Il est vrai que l’Adjudant-Chef Alain Didot disposait d’une « radio-amateur » pour suivre des informations diverses et non pour écouter les communications du FPR. Hassan Ngeze devrait donner des exemples des messages que l’ Adjudant-Chef a interceptés et dire à qui il les a donnés ou à qui il a rapporté leur contenu. En tout cas l’Adjudant-Chef Alain Didot n’a jamais signalé aux services de sécurité qu’il interceptait des communications du FPR.

A la page 57, Ngeze parle d’une chance qu’il aurait eue, en disant : “Quand j’ai su que les Forces Armées Rwandaises viennent de perdre la guerre, après qu’elles aient fui au Congo, j’ai eu la chance de tomber sur tous les messages que les Forces gouvernementales avaient utilisés depuis 1990 jusqu’en 1994 lors de leur défaite. Je suis également tombé sur tous les télégrammes utilisés par le FPR”.

J’affirme que Hassan Ngeze est en train de mentir. Il n’a jamais eu accès à tous les télégrammes des FAR, qui étaient des milliers. Il en est de même des télégrammes du FPR. Il les a eus où ? Où sont-ils ? Il n’est pas en mesure de montrer ces télégrammes, ou du moins dire où ils sont, ni d’expliquer comment ils les auraient eus. Ce n’est pas vrai. Ça c’est de la fabulation.

A la même page, Ngeze affirme qu’il a reçu toutes les cassettes des émissions de Radio Rwanda et de Radio Muhabura. Non, ce n’est pas vrai. Nous avons tous eu quelques cassettes de Radio Rwanda, très peu de transcriptions de Radio Muhabura, mais personne ne peut alléguer avoir eu toutes les cassettes des émissions de ces deux radios. Y compris Hassan Ngeze.

A la page 61, Hassan Ngeze revient encore une fois sur sa situation privilégiée et se dit l’un des deux personnes les mieux renseignées sur le Rwanda. Il le dit en ces termes: “En peu de mots, je sens que je suis une des deux personnes qui sont les mieux renseignées sur le Rwanda plus que tous les autres, je dis ceci parce que, outre tout ce que je vous ai dit sur toutes les situations que j’ai vécues, j’ai également travaillé pour les services de renseignement des pays puissants; ceci m’a également permis d’accéder aux stocks de renseignements sur mon pays, voire des renseignements sur la région dans laquelle se trouve mon pays”.

Si réellement Hassan Ngeze a travaillé pour les services de renseignements des pays puissants, et ça je ne le lui dispute pas, c’est qu’il n’était qu’un simple informateur. Ce type de personne ne peut absolument pas avoir accès aux renseignements en possession des pays puissants qui l’utilisent. Ce n’est pas possible. A moins qu’il ne veuille dire autre chose, et qu’il l’exprime mal. Aussi, je me demande comment quelqu’un qui était un agent de renseignement des services de pays puissants, peut se complaire à étaler cela en public avec une si grande légèreté. C’est incroyable ! Enfin, Ngeze ne révèle toujours pas qui était la deuxième personne qui était la mieux renseignée sur le Rwanda, à part lui-même. Qui est cette autre personne ? Comment pouvait Ngeze savoir ce que les autres savaient, pour dire qu’il était une des deux personnes les plus renseignées du Rwanda ? Le lecteur pourra bien sûr apprécier.

De la page 63 à 64, sous l’alinéa 15.1., Hassan Ngeze revient sur la rangaine qui prétend que les tueries à Gisenyi ont été commises notamment par des militaires sous les ordres de leur Commandant, le Colonel Anatole Nsengiyumva, c’est-à-dire moi-même. Nous avons déjà vu ça dans le premier livre, “Igicumbi cy’Ikinyoma”, ainsi que dans plusieurs documents écrits par Hassan Ngeze. Mais cette fois-ci, il y met trop de virulence, et le mensonge devient de plus en plus fort.

Ainsi, Ngeze affirme que directement après l’attentat contre l’avion du Président Habyarimana, j’aurais tenu une réunion avec des jeunes qui devaient perpétrer les tueries, comme demandé par moi-même. Il affirme que cette réunion a eu lieu entre 21h00 et 22h00, après quoi les tueries contre les Tutsi ont commencé dans la ville de Gisenyi, pendant cette nuit. Des militaires se seraient également mêlés dans ces tueries.

Nous avons vu plus haut, que Ngeze avait plutôt dit que directement après l’attentat contre l’avion du Président, Anatole Nsengiyumva a tenu une réunion avec ses officiers, dont notamment le Capitaine Habimana et le Lieutenant Bizumuremyi, et la réunion a décidé que la résidence de Ngeze devait être attaquée, pour que Hassan Ngeze soit tué ainsi que tous ceux qui étaient chez-lui. Ngeze disait également que j’ai envoyé des militaires, ou des Interahamwe, selon le cas car il change chaque fois de version, pour l’arrêter et me l’amener au camp, où il aurait été détenu pendant trois jours, ou plutôt libéré directement après interrogatoire, car là aussi, il change de version tout le temps.

Non, tout ce que Hassan Ngeze dit ici est du pur mensonge, car sinon, il l’aurait dit dans les multiples documents qu’il a écrits, même si ces documents sont également des ramassis de mensonges. Si l’avion a été abattu à Kigali à 20h30, comment est-ce que, à Gisenyi, je pouvais avoir déjà commencé à tenir des réunions avec des jeunes, trente minutes après ? Ce n’est pas possible, et je précise qu’à Gisenyi, il n’y a pas eu de tueries la nuit du 6 au 7 avril 1994, et la nuit a été calme. Les troubles ont commencé le lendemain 7 avril 1994, pendant la journée. Je l’ai déjà expliqué, et tous les témoins l’ont dit, y compris des témoins de l’accusation. Ceux que Ngeze avait préparés pour dire ce qu’il dit maintenant ont été non crédibles.

De la page 64 à 67, alinéas 15.2. à 15.4., Ngeze parle des cas de Monseigneur KALIBUSHI et de Monsieur Alphonse KABILIGI. J’aimerais reprendre tout ce que dit Ngeze dans ces alinéas, pour que le lecteur puisse comprendre combien le mensonge a été poussé trop loin, jusqu’à devenir assez absurde. Ainsi, Ngeze écrit ce qui suit:

15.2. Qu’est-il arrivé à Monseigneur Kalibushi ?

Même si on laisse de côté le génocide qui visait les Tutsi, il y a aussi la cupidité de ceux qui voulaient absolument s’enrichir. Certaines autorités cupides ont été impliquées dans le pillage.

C’est dans ce cadre qu’Anatole Nsengiyumva a mis en place un groupe qui devait aller piller et lui ramener les biens pillés. Il a pillé les habitations des militaires belges qui venaient d’être évacués, et il a pillé à Nyundo. C’est au cours de ces pillages que les différents propriétaires étaient tués, car lorsqu’on vous pillait, on vous tuait également.

15.3. Le jour de la mort et de la résurrection de Monseigneur Kalibushi Wenceslas

Les tueurs sont allés piller à Nyundo, ils ont pris Monseigneur Kalibushi, ils l’ont déshabillé et il est resté complètement nu. Ils l’ont enlevé d’un endroit appelé Nyundo, et ils se sont empressés de le montrer à Anatole Nsengiyumva qui leur avait demandé d’aller le prendre. Quand ils sont arrivés au camp militaire, ils n’ont pas trouvé Anatole. Ils sont allés le chercher à l’hôtel Méridien, mais entre-temps ils avaient demandé à Monseigneur Kalibushi de s’asseoir par terre, complètement nu, juste comme lorsqu’il est né.

Quand ils sont arrivés à l’Hôtel Méridien, ils y ont trouvé certains Ministres du Gouvernement des Abatabazi qui n’étaient pas d’accord avec les tueries, et qui ont condamné cet acte. Les tueurs ont continué leur trajet et se sont dirigés vers un endroit appelé Commune rouge où Kalibushi devait être tué.

Alors ces ministres ont directement cherché Nsengiyumva Anatole, lui ont demandé de faire vite pour aller sauver Monseigneur Kalibushi qui avait été emmené par les tueurs; les ministres n’ont pas su que c’est lui [Anatole] qui leur avait donné la mission.

Alors le Colonel Nsengiyumva Anatole, honteux et confus, a obéi aux ministres, et s’est empressé d’aller à la Commune rouge là où on tuait des innocents, il a trouvé que Monseigneur n’avait pas encore été enterré vivant, et a demandé aux tueurs de le libérer.

L’évêque a été libéré et emmené dans des maisons qui appartenaient à l’Eglise, où on appelait “Chez Monseigneur”, il s’est reposé là-bas, jusqu’au moment où les évêques congolais sont venus le prendre et l’emmener à Goma.

Monseigneur Kalibushi, à cause de la faiblesse humaine, n’a pas su que celui-là qui l’a enlevé des mains des tueurs, est le même qui leur avait demandé d’aller le tuer. Dans une interview que l’évêque a eu avec la Radio Canal Afrique d’Afrique du Sud, il a dit qu’il avait été sauvé par le diable qui tuait les autres, que c’est ce diable qui est venu l’enlever de la tombe.

Finalement les Inkotanyi ont gagné la guerre, l’évêque est rentré, tandis que Nsengiyumva a fui, et plus tard il a été arrêté par le Tribunal d’Arusha. Il a été par la suite libéré parce qu’il a été mal accusé, on l’a chargé faussement, alors que les nombreux crimes qu’il avait commis étaient bien connus par le monde entier. C’est justement là où se trouve l’ignorance de l’association Ibuka qui se complait à s’immiscer dans les procès et à fabriquer de faux témoins qui s’empressent d’accuser mensongèrement des innocents, et ainsi ils sont incapables d’accuser des criminels comme Nsengiyumva Anatole.

C’est cela qui est arrivé à Monseigneur Kalibushi. Il est important que la vérité comme celle-ci soit connue, car l’histoire c’est l’histoire.

A Gisenyi, je veux dire au moins dans les communes de la ville, si le Colonel Nsengiyumva ne s’était pas impliqué dans les tueries pour les diriger et inciter ceux qui tuaient à le faire, les tueries n’auraient pas été comme elles ont été, car c’est lui qui recevait des rapports journaliers sur le déroulement des tueries.

Anatole Nsengiyumva a tué de façon atroce le nommé Alphonse Kabirigi qui travaillait à la CEPGL, et qui était marié à une femme russe. Ce Kabirigi était originaire de Nyaruhengeri, dans Butare. La raison de cet assassinat, alors que l’autre était Hutu, c’est qu’il n’est jamais allé chez-lui pour lui prêter allégeance, ou pour lui présenter des cadeaux. Il paraît qu’il se comportait comme les Tutsi. Nsengiyumva l’a d’abord pillé avant de le tuer. Il avait une belle voiture de marque AUDI, et elle fut aussi une des causes de son assassinat.

15.4. Tout ceci doit être dit

Si on parlait des gens qui ont été tués par Anatole Nsengiyumva, ou ceux qu’il a fait tuer, on écrirait des livres que l’on ne pourrait pas trouver de place pour les conserver, mais il faut quand même le dire.

Même si le Colonel Nsengiyumva Anatole dit qu’il est chrétien, c’est lui qui a tué le plus de prêtres, des religieuses et des religieux, sans oublier de nombreux chrétiens qui priaient avec lui le dimanche, et qui recevaient des sacrements à l’église comme lui.

Hassan Ngeze”.

Ce cas de Monseigneur Kalibushi est un exemple patent du mensonge grotesque de Hassan Ngeze, ainsi que sa volonté tenace de nuire. En effet, il ne sait même pas ce qui s’est réellement passé, mais il présente des scénarios, juste pour faire condamner Anatole Nsengiyumva, qui a sauvé l’évêque. Ce cas est long à expliquer, mais à l’intention des lecteurs, je vais essayer de le résumer.

D’abord, c’est la première fois que j’entends quelqu’un qui m’implique dans le pillage. Personne d’autre, même à travers de simples rumeurs, ne m’avait accusé de ce crime. Mes militaires n’ont pas été accusés de cela non plus. Donc, quand Ngeze allègue que j’ai pillé, ou que j’aurais créé un groupe chargé de piller pour moi, c’est une façon de continuer à me charger mensongèrement. Sinon, il l’aurait déjà dit dans ses nombreux documents qu’il a écrit avant. Mais surtout, d’autres témoins auraient dit la même chose, ce qui n’a jamais été le cas. Par contre, tout le monde a entendu le cas de Hassan Ngeze qui aurait utilisé ses équipes de jeunes qu’il appelait ses “garde-corps”, pour piller un peu partout, y compris à Kigali, notamment dans les locaux appelés “Etablissements Rwandais”. Et ce fut la raison de ses multiples va-et-vient entre Kigali et Gisenyi pendant les malheureux événements. Il devait évacuer les biens pillés de Kigali à Gisenyi pour les vendre, notamment à Goma. Je précise que je ne l’ai pas personnellement vu, mais cela se dit même aujourd’hui. Nous avons vu qu’il est allé piller à MAGERWA – Magasins Généraux du Rwanda – à Kigali, sauf qu’il camoufle cela en des actions visant à chercher de la nourriture pour ravitaller des Tutsi qu’il aurait sauvés. Ceci aussi, il ne l’avait pas écrit dans les documents diffusés avant, notamment les différents numéros de son journal Kangura, ou alors tous les autres documents que nous avons vus ci-dessus. Et j’affirme qu’il n’allait pas manquer de se faire cette publicité.

Concernant l’enlèvement de Monseigneur Kalibushi de Nyundo, ceci s’est passé dans la matinée du 8 avril 1994. Ce sont ces voyous qu’on traite aujourd’hui d’Interahamwe, qui ont commis ce forfait. Ils étaient conduits par un certain Damas KALIKUMUTIMA, mais j’ai su cela plus tard quand nous étions au camp des réfugiés de Mugunga près de Goma. C’est ce Damas Kalikumutima qui s’en vantait, tout en se moquant de moi pour avoir sauvé Monseigneur Kalibushi. Que s’est-il donc passé ?

Normalement, dès le début des troubles, la Gendarmerie avait ses hommes qui gardaient les déplacés qui s’étaient assemblés à la Cathédrale de Nyundo (à 12 Km de la ville de Gisenyi). Elle les a renforcés. Nous croyions qu’il n’y avait plus de problème de ce côté-là. Dans la matinée de ce 8 avril 1994, alors que je descendais du camp militaire de Gisenyi pour me rendre au bureau préfectoral voir le Préfet, arrivé devant l’Hôpital de Gisenyi, j’ai vu une camionnette Toyota avec à bord des gendarmes, et qui roulait à très grande vitesse en provenance de la direction de Ruhengeri. Je me suis arrêté et j’ai fait signe au véhicule des gendarmes de s’arrêter. Je les ai grondés en leur disant qu’ils roulaient trop vite, et qu’ils pourraient causer un bête accident.

Le sous-officier gendarme qui était à bord – je crois qu’il s’appelait BYAGO d’après ce que j’ai su par la suite – est venu vers moi, affolé, et m’a dit que “Mon colonel, on vient d’enlever l’évêque”. J’ai demandé de quel évêque il s’agissait et ce qui s’était passé. Il m’a dit qu’il s’agissait de Monseigneur Kalibushi, que des gens armés sont venus et ont tiraillé, ont enlevé l’évêque et sont directement venus vers Gisenyi. Il a précisé qu’ils l’ont emmené dans un minibus et il a indiqué la couleur. Je me suis renseigné auprès de gens qui se trouvaient dans les parages, qui m’ont indiqué qu’ils venaient de voir ledit minibus passer, et qui roulait à tombeau ouvert. Ils m’ont indiqué la direction suivie par le véhicule. Sans hésiter, j’ai suivi la même direction et j’ai continué à me renseigner. Finalement, arrivé au quartier Majengo de Gisenyi, autrement appelé “Gacuba II”, j’ai vu le minibus qui s’éloignait en direction de Byahi. J’ai roulé vite, et j’ai vu le véhicule qui se dirigeait vers le cimetière. J’ai accéléré car ce que je voyais ne présageait rien de bon.

Quand je suis arrivé au cimetière, le minibus venait de s’immobiliser à côté d’une tombe déjà creusée.[18] Il y avait beaucoup de personnes dans le minibus, tandis que l’évêque venait d’être débarqué, avec deux personnes qui le tenaient par le bras, mais que je ne connaissais pas. Quand je suis arrivé, j’ai compris qu’ils l’amenaient pour le tuer. J’ai immédiatement réagi en prenant un bras de l’évêque, et en le tirant vers moi, pour le mettre dans mon véhicule. Les bandits ont maintenu leur prise sur l’autre bras de l’évêque, qui était complètement apeuré. J’ai tiré de mon côté, ils ont tiré de leur côté. Finalement, je ne me rappelle pas de ce que j’ai dit en criant, et ils ont lâché. Je me suis dépêché de mettre l’évêque dans mon véhicule et j’ai démarré en trombe.

En cours de route, je me suis demandé où j’allais mettre l’évêque. Je n’allais pas l’emmener à Nyundo, car là il y avait de la menace, puisque c’est de là qu’il avait été enlevé. Je n’allais pas le mettre chez-moi, car il y avait plusieurs autres personnes qui y avait trouvé refuge. La maison était pleine. J’ai décidé de l’emmener à l’Hôtel Méridien Izuba de Gisenyi. Arrivé là-bas, j’ai demandé à Monsieur Martin NKWAKUZI, le manager de l’Hôtel, de donner une chambre à Monseigneur Kalibushi, ainsi que tout ce dont il aurait besoin, en matière de restauration. Martin Nkwakuzi m’a demandé qui allait payer, et je lui ai dit que le diocèse de Nyundo allait payer, et qu’il n’y avait pas de problème. J’ai directement fait garder l’hôtel par des gendarmes fournis par le Major Biganiro à qui j’ai rapporté l’incident, et qui venait par ailleurs d’être informé par ses hommes.

J’ai continué à rendre visite à Monseigneur Kalibushi, pour voir si tout allait bien. Le deuxième jour, une dizaine de prêtres, une religieuse et un civil nommé Isaïe Sagahutu, ont été amenés à l’Hôtel Méridien pour rejoindre Monseigneur Kalibushi. Quand je les ai vus, j’ai demandé au manager de l’Hôtel de leur donner également des chambres et de s’occuper d’eux, que le diocèse allait payer. Quand je suis revenu les voir, j’ai trouvé qu’ils avaient tous, y compris Monseigneur Kalibushi, déménagé dans une villa qui se trouvait non loin de là, et qui appartenait au diocèse de Nyundo. J’ai assuré la sécurité de la villa également. Ils ont vécu là-bas, et la paroisse de Gisenyi a continué à les aider au point de vue restauration, tandis que moi j’assurai leur sécurité et leur rendais visite régulièrement. J’ai bien entendu informé régulièrement l’Etat-Major de la situation.

Un moment donné, Monseigneur Kalibushi a exprimé sa volonté de se réfugier au Zaïre (actuelle RDC). J’en ai informé l’Etat-Major. Peu de temps après, j’ai reçu la visite du responsible du renseignement auprès du Premier Ministre Kambanda, qui m’a dit qu’il venait au nom du Premier Ministre, qui me demandait de lui écrire une lettre expliquant pourquoi je me sentais incapable d’assurer la sécurité de l’évêque et de ceux qui étaient avec lui à Gisenyi, jusqu’à demander de les évacuer au Zaïre. J’ai refusé d’écrire la lettre, et j’ai demandé à ce responsible de dire au Premier Ministre que la sécurité de l’évêque et de son équipe était menacée, mais que je ne peux pas écrire une lettre attestant que je suis “incapable” d’assurer la sécurité.

Début juin 1994, quand le FPR a massacré les évêques Hutu à Gakurazo, les gens se sont agités à Gisenyi, disant qu’ils ne comprenaient pas comment je devais continuer à garder Monseigneur Kalibushi et son équipe à Gisenyi, lorsque le FPR vient de massacrer les évêques Hutu. J’ai senti la menace grandir, et j’ai envoyé un message à l’Etat-Major demandant d’intervenir auprès du Gouvernement pour m’autoriser d’évacuer tout le monde vers Goma, et que si cela n’était pas possible, que l’on ne me tienne pas responsable de ce qui pourrait arriver.

En réaction, le même responsible des renseignements auprès du Premier Ministre est revenu. Cette fois-là, il m’a dit que le Gouvernement était d’accord que je puisse évacuer tout le monde vers le Zaïre. J’ai décidé d’évacuer tout le monde dans la soirée, pour éviter tout incident qui pourrait être causé par ceux qui voudraient s’y opposer. Le même jour, un prêtre du nom de VYÉCKOSLAV KURIC, qui représentait le nonce apostolique pendant cette période, est arrivé à Gisenyi, et je lui ai dit ce que je prévoyais faire dans la soirée. Il y a eu aussi le Ministre des Affaires sociales, Monsieur HABINEZA Jean de Dieu qui est venu me voir au nom du Gouvernement. Je lui ai dit ce que j’avais l’intention de faire. Tous étaient d’accord avec moi.

J’ai contacté le Commandant de la Gendarmerie, pour solliciter de lui une escorte armée. Dans la soirée vers 19h00-19h30, tout était prêt. J’ai demandé à Monseigneur Kalibushi et à son équipe de prendre leurs bagages (ils n’en avaient pas beaucoup) pour que je les évacue vers Goma. Ce qu’ils ont fait directement.

Entre-temps, pendant la journée, j’avais contacté le Commandant de la région militaire à Goma, le Général TEMBELE, pour qu’il m’aide à solliciter l’autorisation des autorités zaïroises, y compris le Gouverneur du Nord Kivu, le responsable du SNIP, et les autorités en charge des douanes et de l’immigration, pour que la frontière puisse être ouverte à l’heure où je vais évacuer l’évêque et son équipe, et que l’on me permette de faire cette évacuation.

Quand je suis arrivé à la frontière avec Monseigneur Kalibushi et son équipe, avec l’escorte de la gendarmerie, accompagné du père VYEKOSLAV KURIC et du Ministre HABINEZA Jean de Dieu, j’ai trouvé que tout avait été fait côté zaïrois. Non seulement la frontière avait été ouverte, mais aussi, toutes les autorités concernées, y compris les autorités religieuses de Goma, étaient là et attendaient. Elles ont accueilli l’évêque et son équipe, j’ai fait remise-reprise, et j’ai remercié. Monseigneur Kalibushi et son équipe m’ont remercié, m’ont dit au revoir, et ont été emmenés à l’évêché de Goma. J’en profite pour remercier le Général TEMBELE, les autorités civiles, militaires et religieuses de Goma, et tous ceux qui m’ont aidé dans cette opération.

Quelques temps après, Monseigneur Kalibushi se serait rendu aux Pays-Bas avec quelques membres de son équipe. Quand nous étions déjà en exil au Zaïre, au camp des réfugiés de Mugunga, des gens auraient entendu Monseigneur Kalibushi s’exprimer sur les ondes d’une radio (je crois que c’est Radio Netherlands), en disant qu’il avait été sauvé in extremis par le chef de ceux qui commettaient les massacres. Je ne l’ai pas entendu personnellement. Mais partout où je passais, j’étais la risée de ceux qui me reprochaient d’avoir tout fait pour sauver Monseigneur Kalibushi et son équipe, y compris lorsque le FPR continuait à massacrer des gens, dont les évêques Hutu à Gakurazo. C’est alors que le nommé Damas KALIKUMUTIMA a dit aux gens, en ma présence, que c’est lui qui dirigeait l’équipe qui avait enlevé l’évêque, et que je suis intervenu pour le sauver. Il se moquait de moi lui aussi, à cause de ce que disait alors Monseigneur Kalibushi. J’ai été déçu par la déclaration de Monseigneur Kalibushi, mais je suis resté serein.

Pourtant, le jour où j’ai sauvé Monseigneur Kalibushi d’une mort certaine, il m’a écrit une lettre pour me remercier. Quand j’ai emmené tout le monde à Goma, il m’a écrit une autre lettre le lendemain pour me remercier également. Mais il y avait dans son entourage quelques extrémistes, qui l’ont certainement conseillé de me charger plus tard, d’où cette interview donnée à partir des Pays-Bas de me considérér comme « le chef de ceux qui commettaient les massacres ». Je n’ai commis aucun massacre, et je n’ai ni encouragé, ni toléré les massacres. Mon jugement est clair sur ce point. Je souligne que j’ai protégé Monseigneur Kalibushi et son équipe pendant plus de deux mois.

Voilà, c’est, grosso modo, ce qui s’est passé dans l’affaire Monseigneur Kalibushi. Ce que raconte Hassan Ngeze, ce sont de simples balivernes. Quand il dit que Monseigneur Kalibushi avait été déshabillé et était complètement nu, il ment, car l’évêque était habillé d’un bon costume civil, sans cravate, mais un costume de qualité d’ailleurs. Quand Ngeze dit que ceux qui avaient enlevé l’évêque sont venus me le montrer au camp militaire et ne m’y ont pas trouvé, il ment également, car je descendais du camp pour me rendre à la préfectrure, quand j’ai rencontré les gendarmes qui poursuivaient le véhicule des kidnappeurs. Quand il dit que ces voyous sont allés me chercher à l’Hôtel Méridien, il ment car c’était tôt dans la matinée, et je n’habitais plus l’hôtel Méridien que j’avais quitté fin 1993. Quand il dit que des ministres du Gouvernement des Abatabazi qui n’étaient pas d’accord avec l’enlèvement de l’évêque m’ont demandé d’aller le sauver, il ment, car c’était le 8 avril 1994, et le nouveau gouvernement n’avait pas encore été mis en place. Le Gouvernement Kambanda a été mis en place ce jour du 8 avril 1994 dans la soirée à Kigali, et il a prêté serment le 9 avril 1994. Quels autres ministres qui se seraient donc trouvés à Gisenyi, à l’Hôtel Méridien dans la matinée du 08 avril 1994 ?

Hassan Ngeze, dans sa volonté inébranlable de me causer du tort, parle de ce qu’il ne maîtrise pas, invente, fabrique, pour me vilipender tout simplement. Mais, juste comme les témoins auxquels il avait demandé de me charger mensongèrement, ses allégations ne tiennent pas la route, et il n’est plus crédible. Cet exemple de Monseigneur Kalibushi est plus parlant.

J’en arrive au cas d’Alphonse Kabiligi. Cette personne travaillait effectivement à la CEPGL (Communauté Economique des Pays des Grands Lacs) à Gisenyi. C’était quelqu’un de bon caractère. J’ai su plus tard qu’il avait été tué, mais quand je ne le voyais plus, je croyais qu’il avait quitté Gisenyi comme beaucoup de personnes quittaient alors les villes et regagnaient leurs régions d’origine, quand il y avait encore un semblant de sécurité dans leur région. Quand j’ai su qu’il était mort, je n’ai pas eu de détails sur sa mort. C’est à Arusha que j’ai eu les détails sur ce qui s’était alors passé.

Hassan Ngeze dit que c’est moi qui l’ai tué, et qu’avant de le faire, je l’ai d’abord pillé. Ceci est ridicule, car ce cas a été traité devant le TPIR, et les détails se trouvent dans mon jugement qui est public, et qui peut être consulté pour ça. Je dois ajouter qu’une personne très proche de Kabiligi Alphonse est venue devant le TPIR dire ce qui s’est réellement passée. Je ne vais malheureusement pas révéler son identité, car il s’agit d’un témoin protégé. Mais si on lit le jugement, on comprend bien ce qu’elle a dit. Elle n’a jamais dit que j’ai tué Kabiligi, ni que j’ai commis un pillage. Elle ne dit même pas que je sois arrivé chez Kabiligi. Les choses sont claires.

Ngeze prétend également que Kabiligi a été tué, parce qu’il avait refusé de venir chez-moi prêter allégeance, et me donner des cadeaux, ou qu’il se comportait comme les Tutsi. Ceci est ridicule. Par contre, tout le monde sait que c’est Hassan Ngeze qui traitait Kabiligi de complice de l’ennemi. Nous voyons ceci dans le numéro 9 du Journal KANGURA de Hassan Ngeze, où Alphonse Kabiligi figure sur une liste de complices de l’ennemi. Sous le titre KANGURA IRAKOMEZA GUTUNGIRA AGATOKI IBIRO BY’IPEREREZA, qui veut dire KANGURA CONTINUE D’INFORMER LE SERVICE CENTRAL DE RENSEIGNEMENT”, nous lisons notamment ce qui suit:

“Pendant cette période où nous sommes menacés par les Inyenzi qui se sont donné le nom d’Inkotanyi, Kangura informe le Service Central de Renseignements que les villes de Gisenyi et de Goma sont devenues un centre important de rencontre des Inkotanyi et de leurs complices. Ceci a fait qu’il y ait des soupçons que c’est là que transitent de nombreuses armes qui entrent dans notre pays, pour les raisons suivantes:

  1. Le consulat ougandais a été installé à Goma à cause des mauvais desseins des Inkotanyi, ainsi, quand les armes en provenance de Kampala et ailleurs par Valises diplomatiques arrivent à Goma et traversent la frontière par la voie de Rwandais qui travaillent à la BDGL, MULPOC, CEPGL, la BRALIRWA, et nous pouvons citer principalement:
  • NZAMBA Antoine, BDGL (Goma-Zaïre)
  • TWAGIRAYEZU Ephrem, (Gisenyi-Rwanda) MULPOC
  • KABILIGI Alphonse, CEPGL , Gisenyi-Rwanda
  • MUNYESHYAKA Faustin (Bralirwa) Gisenyi-Rwanda
  • RYEZEMBERE Fulgence (Bralirwa) Gisenyi-Rwanda

Quand les armes des Inkotanyi arrivent à Gisenyi, MUNYESHYAKA Faustin qu’on surnomme RUHUTINYANYA et MBONIMPAYE Elie les emmènent directement à Kigali, et il est bien connu qu’ils passaient tous leurs weekends dans la capitale, avant le 01/10/1990.

[…]

Demandez à KABILIGI si son frère[19] n’est pas au front des combats à côté de ceux qui nous attaquent en venant de l’Ouganda, puis continuez en lui demandant ses astuces consistant à changer souvent de véhicules lui et KAYIHURA Charles, puis qu’il vous dise ses objectifs lui et le nommé MUHAMYANKAKA Damien qui a été un haut fonctionnaire d’Air Rwanda, quand ils arrivent au bar de Monsieur MUGENZI de Goma […]”.

Le numéro 9 de Kangura qui contient cet article date de janvier 1991, et est signé:

La Rédaction – Kangura

GISENYI-INFO

C’est-à-dire que c’est Hassan Ngeze lui-même qui l’a signé. Donc, d’après Hassan Ngeze, Alphonse KABILIGI qui travaillait à la CEPGL, participait dans l’introduction dans le pays des armes au profit des Inkotanyi, en collaboration avec d’autres complices des Inkotanyi. Et ce même Alphonse KABILIGI avait un frère dans les rangs du FPR au front des combats. Ngeze l’a rappelé. Et si moi je disais que c’est peut-être pour cela que KABILIGI aurait été tué. Dans ce cas, qui, de Hassan Ngeze et d’Anatole Nsengiyumva, pourrait être soupçonné d’être directement ou indirectement responsable de la mort de Monsieur Alphonse KABILIGI ? Ici aussi, le lecteur pourra apprécier.

Hassan Ngeze s’époumone à dire qu’Anatole Nsengiyumva a tué beaucoup de prêtres, de religieux et religieuses, et beaucoup de chrétiens. Tout ceci est ridicule, car il a été démontré devant la Cour que cela ne rime à rien. Ngeze n’a pas été content, car il avait préparé des témoins pour me faire condamner, mais ils ont été non crédibles. Il essaie de mener un combat d’arrière-garde. Voilà la vérité.

De la page 67 à 69, Hassan Ngeze décrit Anatole Nsengiyumva, et la façon dont je m’acquittais de ma tâche à l’Armée. Je laisse ici les anciens militaires des FAR me juger, et pas Hassan Ngeze qui ne pige rien au métier des armes, et au travail au sein d’un Etat-Major d’une armée.

Il s’étonne de comment j’ai pu être trouvé non coupable pour certaines charges dont j’étais accusé. Pourtant les choses sont claires dans le jugement par des juges professionnels. Qui est Ngeze pour mettre cela en doute ?

De la page 70 à 73, Ngeze se targue d’avoir été un expert en renseignement, à qui le Gouvernement avait recours pour lui faire des analyses dans ce domaine. Il dit qu’un moment donné, il était plus fort que les services de renseignement officiels. Je trouve personnellement que ceci est une exagération, dans la mesure où Hassan Ngeze ne peut pas dire sur quels critères il basait ses analyses, ni comment il pouvait dire qu’il était plus fort que les services de l’Etat. Il parle du Major EPIPHANE, en disant que ce dernier pourrait témoigner sur ce que dit Ngeze. Mais, à ma connaissance, le Major Epiphane HANYURWIMANA n’a jamais été un responsible d’un service de renseignement, quel qu’il soit. Je n’ai jamais vu quelqu’un qui se gonflait comme Hassan Ngeze, pour dire qu’il était plus fort que tout le monde en ceci ou en cela. Normalement, ce sont les autres qui devraient le dire, et non pas l’individu lui-même. Je trouve donc cette approche assez grotesque.

De la page 78 à 79, Ngeze parle encore de la mort des politiciens dits “de Gitarama”. Mais il ment dans ce qu’il dit, car il ne les a jamais vus. En effet, quand LIZINDE a été arrêté et détenu dans la prison de Ruhengeri, il n’y avait plus de politiciens de Gitarama là-bas, car ils sont morts entre 1973 et 1976. Je dis ceci parce que dans son livre, “Mon père, cette autre partie de moi qu’on m’a arrachée”, Jeanne Habyarimana, la fille de feu le Président Habyarimana, reprend ce que Monsieur Jean Marie Vianney NDAGIJIMANA, ancient ambassadeur, a écrit dans son livre “France-Rwanda: Ultime automne. Le jour où le Président Habyarimana a perdu son bouclier”, évoquant ses entretiens avec le Président Habyarimana, au sujet de la mort des politiciens de Gitarama. Nous lisons notamment, ce qui suit:

Lors de ce séjour à Paris, le Président Habyarimana a fait allusion à la question de la mort des politiciens de la première République, notamment aux accusations portées contre lui par Messieurs Dismas Nsengiyaremye et Faustin Twagiramungu, le pointant comme responsible de ces décès tragiques.

Après cette évocation, l’ambassadeur Ndagijimana voulut savoir si cette question ne risque pas un jour ou l’autre de resurgir. La réaction du Président ne se fit pas attendre: “L’air assez contrarié, Habyarimana me coupa net dans mon élan, mais n’éluda pas la question. Très calmement, il m’indiqua qu’il ne souhaitait pas revenir sur les détails de “cette affaire”. Il souligna qu’un procès avait eu lieu, et que, jusqu’à preuve du contraire, les responsables de ces assassinats avaient été condamnés par la justice. Il précisa qu’en revanche, il assumait la responsabilité du coup d’état mais pas des assassinats qui l’ont suivi. Le Président précisa: Les “Ministres et autres politiciens arrêtés en 1973 et ensuite assassinés en prison, je ne l’ai su qu’en 1976. C’est le Major Lizinde, mon directeur de sûreté, qui en est responsable; c’est lui qui a pris la décision de les assassiner avec la complicité de quelques-uns de ses amis, à savoir le directeur de la prison de Ruhengeri, l’officier qui est avec lui à présent au FPR, et quelques autres officiers qui étaient là en ce moment-là. […]”[20].

Je dis ceci également, parce qu’en 1978, il y a eu l’affaire des mercenaires belges qui ont été détenus dans la prison de Ruhengeri, et qui ont pris la place qu’occupaient ces prisonniers politiques qui n’étaient plus là.

Quand LIZINDE a été arrêté ainsi que ceux qui faisaient partie de son groupe, ils ont été détenus dans la même prison, et ont pris la place des mercenaires qui avaient été renvoyés dans leur pays – la Belgique. Il n’y avait aucun ancien politicien dans la prison de Ruhengeri. Et Hassan Ngeze ne peut donner aucun nom d’un de ces prisonniers politiques qui aurait été en prison en même temps que LIZINDE. Il ne peut pas. Et LIZINDE a été arrêté en 1980. Dans tous les cas, si le Président Habyarimana a su en 1976 que les politiciens sont morts, Ngeze ne peut pas prétendre qu’il a vu ces prisonniers politiques en 1980.

Un autre grand mensonge de Hassan Ngeze, c’est qu’il prétend avoir été arrêté dans l’affaire LIZINDE. Ce n’est pas vrai. Quand le procès Lizinde et consorts a été ouvert en 1981, je commandais le Bataillon commando Ruhengeri, et ce sont les militaires de cette unité qui gardaient la prison pendant cette période, et c’est eux qui escortaient les prisonniers du groupe LIZINDE, quand ils allaient au tribunal ou en revenaient. J’étais présent quand le procès se déroulait. Eh bien, Hassan Ngeze ne figurait pas parmi les prisonniers du groupe Lizinde. Jamais.

J’ai posé la question à Monsieur Justin MUGENZI, qui m’a affirmé qu’il n’a jamais été en prison de Ruhengeri en même temps que Hassan Ngeze. Et Justin Mugenzi n’a pas séjourné dans le quartier des prisonniers politiques de Ruhengeri. Effectivement, quand je suis passé par la prison de Ruhengeri lors de l’affaire des mercenaires, le Lt-Colonel Uwihoreye (alors encore Capitaine), m’a présenté Monsieur Mugenzi Justin, qui était alors avec les autres prisonniers de droit commun dans la cour de la prison. Il m’a dit que Monsieur Mugenzi faisait partie de l’équipe de direction du Collège officiel de Mburabuturo, quand Uwihoreye y était encore élève au secondaire. Mugenzi était alors avec les autres prisonniers ordinaires, dans la cour intérieur de la prison, et non pas dans l’aile que devaient occuper les prisonniers politiques.

Je ne sais pas ce que disent Messieurs HATEGEKIMANA Gilbert alias SHITANI et celui que l’on appelait “Professeur PACHA” que Hassan Ngeze donne comme témoins de ce qu’il dit, mais Monsieur Justin MUGENZI dément catégoriquement les allégations de Ngeze, et Mugenzi a complètement raison sur ce point. Donc Hassan Ngeze ment à ses lecteurs sur cette question des circonstances de la mort des politiciens de Gitarama. Oui, ils sont effectivement morts et tout le monde le sait et le déplore, mais pas de la façon dont parle Hassan Ngeze. Je trouve personnellement indécent que de chercher à jouer avec cet événement très pénible et malheureux.

A la page 80, Ngeze affirme que Lizinde l’avait choisi, parce qu’il l’aimait, pour qu’il travaille pour lui dans le cadre du renseignement. Je ne peux pas lui disputer ceci, mais certainement qu’il jouait l’informateur, et n’était en tout cas pas un agent officiel du service central des renseignements. Les titres qu’il se donne dans ce domaine sont assez pompeux, mais incorrects.

A la page 90, alinéa 20.1., Ngeze affirme que le Colonel SERUBUGA a remplacé le Président Habyarimana au poste de Chef d’Etat-Major de l’Armée, quand ce dernier est devenu Président de la République. Et il ajoute que Serubuga a maintenu ce poste jusqu’à l’avènemnt du multipartisme. Ceci n’est pas vrai. Le Colonel Serubuga était Chef d’Etat-Major Adjoint, et le Chef d’Etat-Major était toujours le Président Habyarimana. Le Colonel Serubuga n’est devenu Chef d’Etat-Major qu’en janvier 1992, jusqu’en juin de la même année, et ce à titre provisoire, était-il précisé. En juin 1992, il a été mis à la pension pour limite d’âge, et remplacé par le Général Déogratias NSABIMANA (qui était alors, encore Colonel). Donc Monsieur Hassan Ngeze dit souvent n’importe quoi, et veut faire croire aux gens qu’il maîtrise tout, jusqu’à se faire passer pour un spécialiste de l’histoire du Rwanda depuis la période des rois (la monarchie).

De la page 91 à 92, sous l’alinéa 20.3., Ngeze dit que depuis 1988, les membres de la belle-famille du Président Habyarimana étaient les plus forts et avaient la parole dans le pays, ceci parce que leur famille était plus large que celle du Président Habyarimana. Mais, qui sont ces membres de la belle-famille qui avaient la force dans le pays plus que n’importe qui d’autre ? Ceci fait partie des rumeurs les plus folles qui ont circulé dans le pays un moment donné, surtout lors du multipartisme, dans le cadre de la diabolisation du Président Habyarimana et ses proches. Sinon, est-ce que Hassan Ngeze peut donner ne fût-ce que quelques cinq noms de personnalités, membres de la belle-famille du Président Habyarimana, qui avaient la première parole dans le pays ? Il ne suffit pas de raconter, il faut aussi donner la preuve de ce qu’on écrit, ou alors préciser qu’il s’agit de rumeurs qui circulaient. Ce serait plus honnête.

De la page 92 à la page 95, Hassan Ngeze raconte, encore une fois, comment le Colonel Mayuya a été assassiné et pourquoi. Il commence en alléguant que le Colonel Serubuga était très proche de la belle-famille du Président Habyarimana, et que l’épouse du Président, ainsi que ses frères et autres membres de la belle-famille se sentaient forts, parce que le Colonel Serubuga, un proche ou un membre de cette famille, commandait l’Armée. Mais, selon Hassan Ngeze, un moment donné, le Président Habyarimana a voulu remplacer le Colonel Serubuga par le Colonel Mayuya qui ne faisait pas partie de la famille de Madame Habyarimana, ni de la famille Habyarimana, mais qui était lui aussi originaire du Bushiru. Mais, selon Ngeze toujours, le Président Habyarimana aurait oublié que son secrétaire particulier, le Colonel Elie Sagatwa, était lui aussi son beau-frère, donc frère de Madame Habyarimana. Donc le secret de remplacer le colonel Serubuga a transpiré, et la belle-famille a décidé de tuer le Colonel Mayuya, pour qu’il ne remplace pas le Colonel Serubuga.

Comme toujours, Ngeze se souvient d’Anatole Nsengiyumva, donc moi-même. Il affirme que l’assassin du colonel Mayuya a été recruté par moi-même. Il s’agit du Sergent Biroli, originaire de Gikongoro, et un militaire commando de Kanombe, selon Hassan Ngeze. Le sergent Biroli a donc tué le Colonel Mayuya, et a été lui-même tué par un poison qui lui aurait été administré par une dame originaire de la région du colonel Anatole Nsengiyumva. Et la mort du colonel Mayuya signifiait, selon Ngeze, le début de la fin du régime Habyarimana. Voilà grosso modo ce que dit Hassan Ngeze sur la mort du Colonel Mayuya.

J’ai parlé de cette affaire dans les pages qui précèdent. Et j’ai promis que je donnerai plus de détails dans un autre document. Mais d’ores et déjà, je dois préciser que le Colonel Serubuga et le Colonel Mayuya étaient originaires de la même commune, et je crois du même secteur ou de deux secteurs voisins. Et leurs familles étaient amies. Ça je le savais. Le Colonel Serubuga n’était pas du tout membre de la belle-famille du Président Habyarimana.

Qui a dit à Hassan Ngeze que le Président Habyarimana avait eu l’intention de remplacer le Colonel Serubuga par le Colonel Mayuya ? Ceci fait plutôt partie des rumeurs qui ont circulé bien avant l’assassinat du Colonel Mayuya. En ce moment-là, le Colonel Mayuya était allé se faire soigner en Europe, et des rumeurs ont circulé, disant qu’il avait été empoisonné par le colonel Serubuga. Mais il n’en était rien, car le Colonel Mayuya avait plutôt les “calculs biliaires”. Il a été soigné et il a été guéri.

Si le Président Habyarimana avait voulu remplacer le Colonel Serubuga avant l’assassinat du Colonel Mayuya, il allait quand même le remplacer aussi, après la mort du colonel Mayuya, surtout s’il était prouvé que c’est Serubuga qui avait comploté contre le regretté. Ngeze ne va quand même pas nous dire qu’il a su tout cela, et que le Président Habyarimana n’en a rien su !

Il est bizarre d’affirmer que le Président Habyarimana a voulu remplacer le colonel Mayuya pour éloigner Serubuga prétendument plus proche de la belle-famille, et qu’il a oublié que son secrétaire particulier, le colonel Sagatwa, était son beau-frère, ce qui a permis au secret d’être connu par la belle-famille, et qui aurait entraîné l’assassinat du Colonel Mayuya. Comment est-ce que Ngeze a connu cela ? Ceci n’est que simples spéculations, comme Ngeze est passé maître dans l’art de spéculer. Vous aurez remarqué que nulle part dans ses livres, il ne donne ses sources ou ses références. C’est quand même bizarre pour quelqu’un qui se prend pour un chercheur et un analyste de premier plan !

Quant au recrutement de l’assassin, je suis là pour dire qu’il s’agit de simples fabulations de Hasssan Ngeze, qui ne manque aucune occasion de me charger de tous les maux, possibles et impossibles. Je ne connaissais pas le sergent Biroli, et je n’avais jamais entendu parler de lui. Quand le colonel Serubuga est venu me dire que le colonel Mayuya venait d’être tué, et que le Président Habyarimana venait de me désigner pour remplacer le Colonel Mayuya, je lui ai demandé qui avait tué Mayuya. Le Colonel Serubuga m’a dit qu’il paraît que c’est un sous-officier du camp Kanombe, mais non autrement identifié jusque-là. Il n’avait pas lui-même assez d’informations sur le sujet. Quand j’ai couru à Kanombe pour prendre le commandement du camp et du bataillon para-commando, pour ramener le calme et la sécurité au camp, je ne connaissais pas encore qui avait tué le colonel Mayuya. Je l’ai su quand je suis arrivé à Kanombe. Et j’ai appris que le sergent Biroli était un sous-officier de la base logistique de l’Armée – BASE AR – dans la compagnie Quartier Maître – QM. Il n’était pas du Bataillon para-commando, contrairement à ce que veut nous faire croire Hassan Ngeze. Voilà ce qui s’est passé, et j’aurais l’occasion  de donner encore plus de détails. Mais Hassan Ngeze a menti sur toute la ligne, concernant l’assassinat du colonel Mayuya.

Pour ce qui est de la mort de l’assassin Biroli, nous avons été tous surpris et déçus par ce qui est arrivé, car sa disparition nous a empêchés de savoir les détails sur les raisons qui l’ont poussé à assassiner le Colonel Mayuya, ou s’il avait un quelconque commanditaire.

Dans les pages qui précèdent, j’ai parlé de l’arrestation du colonel Ndibwami, du Major Havugwintore, du Colonel BEM Nkuliyekubona (que Ngeze ne mentionne pas) et de quelques autres civils, relativement à ce dossier. J’en donnerai encore plus de détails, dans l’autre document que j’ai évoqué. Mais toujours est-il que ces personnes n’ont pas été trouvées coupables de l’assassinat du Colonel Mayuya.

A la page 118, alinéa 22.6., Hassan Ngeze revient encore sur les nombreuses fois qu’il a été mis en prison. Et il allègue que cela a commencé lorsqu’il a été mis en détention dans le dossier de tentative de coup d’Etat de Lizinde. Je réaffirme que Hassan Ngeze n’a pas été mis en prison dans l’affaire Lizinde. Sauf s’il a été vite libéré avant le jugement, car il ne figure pas parmi ceux qui ont été jugés avec Lizinde. J’ai bien dit que j’étais présent quand ces gens étaient jugés, et Hassan Ngeze ne figurait pas parmi eux, et n’est pas sur la liste de ceux qui étaient dans le procès Lizinde et consorts. Ce qu’il allègue est donc faux.

De la page 147 à la page 152, Hassan Ngeze s’attaque encore à moi, prétendant que j’aurais mis un certain Jean Baptiste GACUKIRO dans un trou au camp Kigali, pendant cinq ans, et qu’à sa sortie sur intervention des organisations de défense des droits de l’homme, je l’aurais expulsé du Rwanda, pour le Congo (RDC), sans possibilité de revenir au Rwanda. Sa famile aurait été interdite de quitter Gisenyi pour aller le voir à Goma où il vivait. Après l’assassinat du Président Habyarimana, j’aurais donné les ordres aux militaires d’aller directement tuer les Tutsi habitant les environs du camp militaire, y comprise la famille de GACUKIRO. Ngeze continue en disant qu’après la sortie du pays pour l’exil au Zaïre, Gacukiro aurait tenté de me faire arrêter, qu’on m’a cherché, mais que je me suis caché, avant de quitter le Zaïre pour d’autres pays, dont le Cameroun où j’ai été arrêté et emmené à Arusha.

Tout ceci est une fabrication malveillante de Hassan Ngeze. Je sais que Monsieur Jean Baptiste Gacukiro aurait fui le pays en 1992 pour le Zaïre, où il habitait à Goma. Sa famille vivait à Gisenyi, à part qu’il avait pris une autre femme à Goma. Si je l’avais détenu pendant cinq ans, c’est-à-dire que je l’aurais arrêté en 1987. Mais pourquoi l’aurais-je arrêté à cette période ? Je précise que je ne pouvais pas arrêter des civils et les détenir au camp militaire de Kigali. Tous les militaires qui ont vécu dans le camp Kigali savent bien qu’il n’y avait pas de trou dans lequel des gens étaient détenus. Le commandant du camp pendant la période de guerre, le Lieutenant-colonel Denys NKIZINKIKO, vit au Rwanda, et peut m’être témoin sur ce point. Je n’ai jamais vu Gacukiro (que je connaissais très bien) au camp Kigali en détention. Je ne connais aucun dossier dans lequel Gacukiro aurait été impliqué, pour lequel il devait répondre devant les militaires. Par ailleurs, je n’avais aucun pouvoir d’expulser quelqu’un du pays, dans quelques circonstances que ce soit. Monsieur Hassan Ngeze veut confondre le service G2 de notre temps, avec le DMI actuel.

Je sais que Monsieur Gacukiro vivait à Goma comme je viens de le dire, et quand je suis allé commander le secteur opérationnel de Gisenyi, je le rencontrais souvent à Goma et on se saluait, car nous nous connaissions depuis très longtemps. Il ne m’a jamais parlé d’un éventuel séjour au camp Kigali, séjour que j’allais absolument savoir, si jamais cela s’était réellement passé.

Quand l’avion du Président Habyarimana a été descendu, j’ai plutôt recommandé la vigilance et la discipline de la part de mes militaires, et quand les tueries ont commencé dans tout le pays, je les ai exhortés à se tenir en dehors des troubles, et d’essayer plutôt d’aider les personnes menacées qu’ils auraient à rencontrer. Ils l’ont fait. Je l’ai expliqué devant le TPIR, et ce que j’ai dit est vérifiable. Mes hommes ne se sont donc jamais mêlés dans les tueries, et ceci a été confirmé par le TPIR, qui a par ailleurs mené des enquêtes sur ce sujet.

Je sais pourtant, que Monsieur Jean Baptiste Gacukiro, après son retour au Rwanda suite à la prise du pouvoir par le FPR, a été une des personnes virulentes, qui tenaient absolument à ce que les autorités qui étaient en place au Rwanda puissent payer pour la mort des personnes qui leur étaient proches. Ceci peut se comprendre, dans la mesure où sa famille avait été massacrée par les tueurs, mais je n’avais même jamais su ce qui s’était alors passé.avec sa famille. Il a fait trop de déclarations, il a fabriqué des accusations, mais jamais il n’a dit que je l’avais gardé dans un trou au Camp Kigali pendant cinq ans, il n’a dit nulle par que je l’aurais expulsé du Rwanda pour ne plus y revenir, ni que j’étais responsible du massacre de sa famille. D’où est-ce que Hassan Ngeze a ramassé ses allégations alors ? Toujours la volonté de nuire, sans aucune preuve de ce qu’il avance.

En novembre 1999, Monsieur Jean Baptiste Gacukiro a fait une déclaration, où il a évoqué notamment son exil à Goma. Après avoir parlé de certaines autres choses, il a dit ce qui suit:

“Je tiens toutes ces informations de mon ami Mathias NYAGASAZA qui me tenait régulièrement au courant des événements de l’époque puisqu’il assistait à toutes les réunions. Il se trouve actuellement à Nairobi au Kenya. A titre d’exemple, quand il a vu mon nom sur les listes des personnes à éliminer dressées par les planificateurs du génocide, il m’a dit de quitter le pays sinon, je serai bientôt tué. C’est ainsi que je me suis réfugié à Goma avant le déclenchement du génocide à grande échelle dans la Préfecture de Gisenyi[21]. De Goma, j’ai adressé des messages à mes amis et mes proches pour les inviter à quitter le Rwanda. Ceux qui m’ont écouté, ont échappé aux massacres, d’autres qui n’ont pas pris au sérieux mes conseils au motif qu’ils étaient sous la bonne protection de la MINUAR ont été tués. Je recevais aussi ces informations de mon ami feu GAHUTU Saidi un Interahamwe qui est mort de maladie à Gisenyi, pendant sa détention”.

Je ne dis pas que ces déclarations de Monsieur Jean Baptiste Gacukiro sont vraies. Ells font partie de ses nombreuses fabrications. Il a fait beaucoup d’autres déclarations montées de toutes pièces. Elles sont disponibles. Mais s’il avait été expulsé du Rwanda par moi-même, c’est ce qu’il allait dire, au lieu de dire qu’il a fui suite aux informations lui fournies par les deux personnes, concernant la menace à sa sécurité. Donc, Hassan Ngeze a encore une fois menti sur toute la ligne.

A Goma, je n’ai jamais été recherché par qui que ce soit pour être interrogé sur quoi que ce soit. Je ne me suis jamais caché pour quelque motif que ce soit. J’étais souvent en compagnie du Commandant de la région militaire, je voyais souvent le Commandant de la circonscription de gendarmerie, et je voyais le responsible du SNIP. Je les connaissais tous. Personne ne m’a dit qu’il y avait une quelconque accusation contre moi à laquelle je devais répondre. J’ai vécu dans la ville de Goma, puis au camp des réfugiés de Mugunga, depuis notre sortie du pays jusque fin 1995.

D’où est-ce que Hassan Ngeze a eu ses affirmations, selon lesquelles j’ai failli être arrêté, et que j’aurais fui ? Mensonge assez absurde et ridicule.

De la page 181, alinéa 27.1. jusqu’à la page 184, alinéa 27.3., Hassan Ngeze parle encore une fois de son arrestation directement après la mort du Président Habyarimana, sa détention au camp militaire sur demande de l’Etat-Major de l’Armée qui voulait qu’il soit arrêté et tué. Il parle également de personnes Tutsi qui auraient été arrêtées cette même nuit, une heure seulement après avoir appris la nouvelle de la mort du Président, détenues au camp militaire avec lui, avant d’être tuées par les militaires, à l’exception de Ngeze lui-même, et d’une femme qui vit actuellement au Canada, selon les déclarations de Ngeze. Il ajoute qu’au mois de juin 1994, il a encore été arrêté, détenu au camp militaire de Gisenyi, que le Colonel Bagosora l’y aurait vu quand il passait pour se rendre en Afrique du Sud, que Monsieur Joseph Nzirorera l’y a vu également, qu’il a demandé à Anatole Nsengiyumva – moi-même – de le libérer, mais que j’aurais refusé en disant que Ngeze est un employé de la CIA américaine.

Nous avons déjà rencontré des allégations  analogues et j’en ai parlé. J’ai montré que Hassan Ngeze n’a pas été arrêté la nuit du 6 au 7 avril 1994, ni détenu au camp militaire jusqu’au 9 avril 1994. J’ai expliqué que cette nuit-là, la situation a été très calme à Gisenyi, qu’aucune personne n’a été tuée, et que de toute façon, aucune personne civile n’a été détenue au camp militaire, à part Hassan Ngeze au mois de mai 1994. Je le confirme.

C’est vrai, un moment donné, Monsieur Nzirorera est passé au camp pour me demander du carburant, et je l’ai orienté vers une station d’essence qui servait les autorités civiles et autres personnes non militaires. C’était le 08 mai 1994, et il a vu effectivement Monsieur Ngeze au camp militaire, car il avait été intercepté la veille. C’est ce même jour que Hassan Ngeze a été libéré dans les circonstances que j’ai expliquées.

Au mois de juin 1994, Hassan Ngeze n’a pas été arrêté par les militaires du camp militaire de Gisenyi, et n’a par conséquent pas été détenu dans ce camp. Le Colonel Bagosora ne l’y a donc pas vu. Je dois souligner que le Colonel Bagosora n’est pas allé en Afrique du Sud en juin 1994.  Il est parti le 23 mai 1994, pour se rendre en Afrique du Sud et aux Seychelles. Il est parti par le même avion que Monsieur Nzirorera Joseph qui, lui, se rendait en Afrique du Sud seulement. Le Colonel Bagosora est rentré des Seychelles et arrivé à Gisenyi le 19 ou le 20 juin 1994. Ngeze n’était pas au camp non plus. Donc, le colonel Bagosora n’a jamais vu Hassan Ngeze en détention au camp militaire de Gisenyi. Monsieur Nzirorera l’y a vu. Mais c’était exactement le 08 mai 1994, et c’est ce même jour que Ngeze a été libéré, après avoir passé une seule nuit en détention. Comme Ngeze a su, via les dossiers du TPIR, que le Colonel Bagosora s’est rendu en Afrique du Sud un moment donné, il en profite pour intégrer cet élément dans ses allégations, pour faire croire qu’il dit la vérité. Et pourtant, il ment.

En mai 1994, je n’avais jamais entendu dire que Hassan Ngeze travaillait pour la CIA américaine. Je ne pouvais donc pas dire qu’il était un agent de la CIA, pour refuser de le libérer. C’est lui-même qui s’en vantait, lorsqu’il était en détention à Arusha. Nous voyons même dans ses livres, qu’il affirme avoir travaillé pour les services de renseignements des grandes puissances. Il en est fier quand il le dit. Je ne l’ai donc pas maintenu en détention en disant qu’il était un agent de la CIA, car je ne le savais pas. Et même si je l’avais su, ce n’était pas le moment de m’embarquer dans un tel dossier. Je n’avais aucun problème avec la CIA. Nous avons par ailleurs vu que Ngeze prétend plutôt, qu’il était arrêté parce qu’il évacuait des Tutsi au Zaïre. D’où vient donc cette histoire de la CIA ? De toute façon, il n’a jamais été détenu au camp militaire de Gisenyi en dehors de la seule fois du 7 au 8 mai 1994. Voilà la vérité.

On dirait que Hassan Ngeze est malade d’Anatole Nsengiyumva. Ainsi, de la page 188, alinéa 27.9. à la page 189, alinéa 27.10., il se révolte presque, en avançant qu’il ne comprend pas pourquoi Anatole Nsengiyumva n’a pas été accusé correctement, ce qui a fait que les juges l’ont relâché. Mais, je rappelle que Hassan Ngeze a tout fait, notamment en écrivant aux juges de ma Chambre en première instance, aux juges de la Chambre d’appel, ainsi qu’aux autres autorités du TPIR, pour essayer d’influencer le Jugement. Il croyait que ses mensonges allaient convaincre les Juges. Il a été déçu. Maintenant, il essaie de voir ce qu’il peut faire encore une fois, pour voir s’il peut réussir à me faire du mal. C’est la raison de tout cet acharnement. On dirait que ce deuxième livre a été écrit pour atteindre ce but. Le mensonge ne paye pas tout le temps, même si quelques fois, il peut faire des dégâts.

De la page 192, alinéa 27.14. à la page 193, alinéa 27.15., Hassan Ngeze se plaint du fait que les officiers des ex-FAR qui étaient avec lui en détention à Arusha, moi y compris, ainsi que Monsieur Joseph Nzirorera, avons refusé de témoigner pour lui. Il essaie d’expliquer les raisons qui nous ont poussés à refuser, notamment que nous ne voulions pas que le Procureur sache que des crimes ont été commis par certains d’entre nous, et qu’ils étaient restés inconnus de l’Accusation, ou que d’autres ne voulaient pas faire condamner Anatole Nsengiyumva.

Oui, Ngeze a voulu nous forcer à témoigner pour lui, pour faire croire qu’il était détenu au camp militaire de Gisenyi de la nuit du 6 au 7 avril 1994 jusqu’au 9 avril 1994, et qu’il y a été détenu plusieurs autres fois après ça, ceci pour qu’il puisse éviter les accusations portées contre lui pour des faits supposés avoir été commis pendant cette période. Mais ce n’était pas la vérité, et nous n’avons pas voulu nous impliquer dans ses mensonges, surtout qu’il le faisait quelquefois en usant de chantage et de menace, comme il avait eu l’habitude de le faire, lorsque nous étions encore au pays. Il est même allé jusqu’à soumettre une requête disant qu’il était psychologiquement affecté par le fait que nous ne voulions pas témoigner pour lui, et demandait d’être envoyé chez le médecin pour examen et traitement. La Chambre d’Appel a rejeté cette allégation.

Oui, il voulait nous impliquer dans ses mensonges. Vous verrez qu’avant qu’il ne sache les charges portées contre lui et la période à laquelle elles se rapportaient, il n’avait jamais dit qu’il était détenu au camp militaire de Gisenyi de la nuit du 6 au 7 avril 1994, jusqu’au 9 avril 1994. Il disait qu’il avait été arrêté, emmené au camp, interrogé, puis relâché immédiatement. Nous avons vu cela dans certains de ses documents que j’ai évoqués ci-dessus.

De la page 217, alinéa 29., jusqu’à la page 224, alinéa 29.10., Hassan Ngeze se vante d’avoir été le chouchou de nombreuses autorités officielles de l’Etat, et de certaines personnes privées, dont surtout Monsieur Valens Kajeguhakwa. Il affirme qu’il a beaucoup utilisé ces autorités, dont surtout beaucoup de ministres, pour obtenir des bourses d’études pour les Tutsi, surtout ceux qui vivaient à l’extérieur du Rwanda. Qu’il parvenait aussi à obtenir des cartes d’identité rwandaises pour ces Tutsi réfugiés, surtout ceux vivant au Zaïre, et des passeports rwandais. Puis il affirme que, passant par les Colonels SERUBUGA et RWAGAFILITA, ainsi que par le Préfet NSHUNGUYINKA, il obtenait des permis de conduire pour beaucoup de gens. Il prétend qu’il a été la personne qui a pu obtenir le plus de bourses pour les Tutsi réfugiés et pour d’autres personnes.

Je ne peux pas lui disputer ce qu’il dit ici, car je n’ai aucun élément pour le faire. Seulement, je me demande toujours comment il parvenait à savoir qu’il était la personne qui faisait ceci ou cela, plus que tout le monde au Rwanda. Comment pouvait-il savoir par exemple, qu’aucune autre personne ne pouvait faire octroyer plus de bourses, plus de passeports, ou plus de permis de conduire que lui. D’où avait-il ces données ? Peut-il citer d’autres personnes qui le faisaient, mais moins que lui ?

De la page 224, alinéa 29.11., jusqu’à la page 226, Hassan Ngeze se vante, en disant que depuis le début de la guerre en 1990, il avait plus de moyens de renseignement que les services de renseignement de l’Etat rwandais et les services de renseignement du FPR. Il affirme que “des Blancs” lui avaient donné beaucoup de moyens, de façon qu’il était en mesure de connaître les plans du Gouvernement et ceux du FPR, bien avant qu’ils ne soient exécutés, qu’il savait bien ce que ces deux parties au conflit avaient fait, où ils avaient fait ceci ou cela, et les erreurs qu’ils avaient commises.

Je trouve personellement que ceci est une exagération, voire une fabulation, car Ngeze ne peut pas dire sincèrement qu’il connaissait toutes les possibilités du Gouvernement et celles du FPR. C’est ce qu’il affirme, mais je ne suis pas d’accord avec ça.

A la page 226 toujours, alinéa 29.12., Ngeze affirme qu’il a travaillé pour des services de renseignements étrangers, et que ce n’est pas lui qui leur a demandé du travail, mais que c’est plutôt ces services de renseignement étrangers qui, après avoir apprécié ses analyses sur la situation dans la région, lui ont demandé de travailler pour eux. Nous avons vu qu’il revient souvent sur ce travail au profit des services de renseignement étrangers. Ailleurs, il a dit que c’était des services de renseignements des pays puissants. C’est lui qui le sait, mais si cela est réellement vrai, je crois qu’il était plutôt un simple informateur, plutôt qu’un analyste des situations qui prévalaient dans notre pays, et dans notre région. Les services des pays puissants avaient d’autres moyens humains plus capables de mieux faire des analyses viables. C’est ce que je crois.

A la page 281, alinéas 36.3., 36.4., et 36.5., nous lisons les allégations suivantes de Hassan Ngeze:

“36.3. En date du 03.04.1994:

Habyarimana est allé à Nairobi au Kenya inviter le Président Daniel Arap Moi et lui demander conseil. Le Président Kenyan a dit qu’il n’ira pas dans ce sommet, qu’il y enverra son Vice-Président, George Saitoti.

36.4. En date du 04.04.1994:

Habyarimana est allé à Kampala chez Museveni pour s’entretenir avec lui concernant ce sommet.

36.5. En date du 05.04.1994:

Le Président Habyarimana est allé à Gbadolite au Congo pour s’entretenir avec Mobutu en ce qui concerne ce sommet. Alors Mobutu a dit à Habyarimana qu’il n’ira pas dans ce sommet à cause des raisons de sa sécurité, et il lui a demandé de ne pas y aller non plus, d’y envoyer plutôt un de ses ministres, et si nécessaire d’y envoyer son Premier Ministre. Mobutu lui a promis de continuer à réfléchir sur cela, et qu’il allait lui dire sa décision définitive plus tard”.

Eh bien, tout ceci est faux. En effet, en date du 03 avril 1994, le Président Habyarimana était à Gisenyi chez-lui dans sa résidence privée au bord du Lac Kivu. Pendant la journée, en compagnie de Monsieur Jacques-Roger Booh-Booh et d’autres personnes, il a déjeûné chez Monsieur Alphonse HIGANIRO à Kigufi, et le soir, il a reçu chez-lui Monsieur Booh-Booh et d’autres personnes. Moi-même, j’étais par hasard présent chez le Président Habyarimana. Je dis donc ce que je sais. Le Président Habyarimana n’est donc pas allé au Kenya ce jour-là.

Le 04 avril 1994, le Président Habyarimana n’est pas allé à Kampala voir le Président Museveni. Il est allé plutôt à Gbadolite chez le Président Mobutu.

Le 05 avril 1994, le Président n’est pas allé à Gbadolite, car il y avait été la veille 04 avril 1994. Je le sais car il m’a demandé d’appeler l’Etat-Major de l’Armée pour lui envoyer un  hélicoptère très tôt matin le 04 avril, pour qu’il aille à Kanombe prendre son avion et aller à Gbadolite. Le soir du 04 avril 1994, Radio Rwanda a dit dans ses informations que le Président Habyarimana venait de rentrer de Gbadolite où il avait effectué une visite d’une journée. Monsieur Honoré NGBANDA, ancien conseiller du Président Mobutu pour les affaires de sécurité a écrit un livre, et a beaucoup parlé de cette visite du Président Habyarimana à Gbadolite le 04 avril 1994. Donc tout ce que raconte Hassan Ngeze sur tout ça est faux.

De la page 286 à la page 287, alinéas 36.9. et 36.10., Hassan Ngeze écrit des choses ridicules et révoltantes à la fois, et que je tiens à dénoncer avec force et amertume. Il écrit ce qui suit:

36.9. Les querelles entre Habyarimana et son épouse nous ont causé des problèmes

En date du 5, Habyarimana s’est querellé avec son épouse, à cause de problèmes ordinaires qui opposent habituellement mari et femme. Habyarimana avait courtisé la femme d’un autre homme dont je ne veux pas dire le nom. Il lui avait demandé de venir le voir au Village Urugwiro où il y avait son bureau, juste là où travaille Kagame même aujourd’hui.

Ce jour du 05.04.1994, Habyarimana est allé chez Mobutu, mais en quittant chez-lui à Kanombe, il s’était querellé avec sa femme, et ils ne se parlaient pas.

Le soir, quand Habyarimana est rentré, au lieu d’aller chez-lui à Kanombe, il s’en est allé au Village Urugwiro, retrouver sa concubine.

Alors Habyarimana a passé la nuit au Village Urugwiro avec la femme d’autrui, et le matin en date du 6, il est directement allé à Dar-es-Salaam en Tanzanie, sans passer chez-lui à Kanombe.

Au retour, le soir, l’avion a été abattu, mais à cause d’un miracle inexpliqué jusqu’à ce jour, l’avion est tombé chez-lui dans la parcelle, à côté de la piscine. Pourquoi dois-je revenir sur cette mort ?

Quand Habyarimana était en compagnie de Mobutu dans la matinée à Gbadolite, Mobutu lui a promis qu’il allait chercher des renseignements, qu’il allait lui dire ce qu’il en pensait.

Selon les recherches de Mobutu, il a pu savoir qu’il y avait un plan de tirer sur l’avion ce jour-là ou le lendemain. Alors Mobutu a téléphoné chez Habyarimana à Kanombe en le cherchant, il ne l’a pas trouvé, il a parlé à son épouse, et lui a demandé de dire à Habyarimana quand il va rentrer à n’importe quelle heure, de téléphoner à Mobutu pour qu’ils se parlent.

Parce que l’épouse de Habyarimana s’était querellée avec son mari, elle a préféré écrire un bout de papier demandant à son mari de téléphoner à Mobutu de façon urgente, elle l’a mis sur le lit pour que son mari le voit quand il va rentrer.

Habyarimana n’est pas rentré car il était avec la femme d’autrui qu’il avait détournée, et ils ont passé la nuit ensemble au Village Urugwiro. Il n’est pas du tout arrivé à Kanombe, pour savoir que Mobutu l’avait cherché.

36.10. Le lendemain, Habyarimana est allé en Tanzanie; quand il est rentré, il a été abattu.

S’il avait parlé avec Mobutu, il ne serait pas allé dans ce sommet, parce que Mobutu allait lui dire comment était tout le plan de son assassinat, et ainsi l’empêcher d’aller en Tanzanie.

Voilà comment Habyarimana a découché, passant la nuit avec la femme d’autrui, ce qui l’a empêché d’être informé de la mort qui l’attendait, et ainsi sa mort nous a amené des malheurs qui nous poursuivent même maintenant”.

Ceci n’est rien d’autre que du cynisme outrancier de la part de Hassan Ngeze, qui, personnellement, me révolte. Je ne peux pas comprendre comment quelqu’un de sérieux peut aller jusqu’à inventer de telles balivernes assez insolentes, cavalières et outrageantes. Mais ça c’est typiquement Hassan Ngeze. En effet, je ne sais pas si quelqu’un d’autre aurait entendu parler de cette sornette, qui ne peut même pas être considérée comme une simple rumeur. On dirait que Hassan Ngeze tient absolument à salir la mémoire de feu le Président Habyarimana, en racontant de telles inepties. L’outrance de ses allégations n’a d’égal que sa volonté tenace de nuire.

Le 05 avril 1994, le Président Habyarimana n’est pas allé chez le Président Mobutu à Gbadolite, car il y avait été la veille 04 avril 1994. Je l’ai expliqué ci-dessus; et d’ailleurs, tout le monde le sait. Ceci montre donc que Hassan Ngeze a inventé son anecdote malveillante, pour un but non avoué. Pour qui roule-t-il ? Habyarimana n’était pas de la catégorie des hommes qui découchent. Et la situation ne pouvait aucunement permettre de telles absurdités. Hassan Ngeze est un grand menteur, et c’est ancré dans sa nature. Le problème, c’est qu’il gave les gens de ses mensonges, et leur fait croire qu’il raconte la vérité. Mais au fur et à mesure qu’il continuera à écrire ses brûlots, les gens se rendront compte de leur caractère frivole. Mais il aura fait beaucoup de dégâts.

Le 05 avril 1994, le Président Habyarimana était chez-lui à Kanombe, et il y a reçu des gens dans la soirée. Ecoutons par exemple ce que nous dit Madame HABIMANA NYIRASAFARI Gaudence, qui fut une des personnes à avoir rencontré le Président Habyarimana ce jour-là, en compagnie de son mari. Elle fait la déclaration suivante, dans le livre de Jeanne Habyarimana, sous le titre “L’entretien ultime par Gaudentia Nyirasafari”:

“Le 5 avril 1994 vers 15h, le téléphone sonna à mon domicile. Une connaissance, un Tutsi ami d’enfance de mon époux appela de Bujumbura avec une inquiétude dans sa voix.

Je lui ai passé mon mari, et sans détour, il dit à mon époux, “le FPR estime qu’il n’y a pas moyen pour nous les Tutsi, de prendre le pouvoir au Rwanda tant que le Président Habyarimana est aux commandes du pays; il est toujours populaire; aucun Tutsi ne pourra le battre aux élections. Il faut donc l’éliminer physiquement. Cela a été décidé dans une réunion des chefs Inkotanyi au Burkina-Faso. Et comme le Président Habyarimana se rend demain à Dar-es-Salaam, ce sera une bonne occasion… Arrange-toi pour le lui dire tout de suite. Je suis un Inkotanyi, mais j’aime Habyarimana depuis que je le connais au collège. C’est un grand homme (Ni umugabo pe !)”.

“Nous avons pris tout de suite rendez-vous avec le Président à sa résidence à Kanombe pour cette question urgente, et il nous a reçu le même jour vers 18h. Dès notre arrivée, nous donnons l’information que nous a transmise notre ami du Burundi. Nous le supplions de se faire représenter par son Ministre de confiance à cette conférence à Dar-es-Salaam en insistant sur la dangerosité de ce voyage. Il nous répondit: “D’autres m’en ont déjà parlé, en particulier mon frère le Président Mobutu, qui vient de m’appeler encore à ce propos pour la nième fois aujourd’hui”. Il nous rappela qu’il s’agit d’une conférence sur la paix, qu’ en aucun cas il ne peut se dérober devant son devoir impérative, et que la paix est sa raison d’être. Il ajouta: “Si je dois mourir, ce sera mon jour et n’oubliez que nul ne peut échapper à son destin, (ntawe urenga nyamusi)”.

Il insista sur cette dernière phrase.

Nous disons au revoir à la Première dame, et le Président nous dit tour à tour: “Au revoir Phocas; merci pour votre honnêteté et votre franchise. Je regrette seulement de ne pas avoir pu vous consulter plus souvent, mais on y remédiera plus tard”; “au revoir Madame, rappelez-moi dès mon retour de Tanzanie pour poursuivre l’importante discussion sur la gouvernance”. Je répondis au revoir Monsieur le Président, en faisant un effort énorme pour ne pas laisser éclater ma profonde tristesse et pour ne pas dire adieu. J’ai pensé alors aux paroles que ma mère nous disait souvent “quoi qu’il arrive, garde le sourire et reste digne”. C’était le cas en ce moment précis”.

Ce témoignage de Madame Nyirasafari Gaudence est concis et clair. Qu’en dit Hassan Ngeze alors ? Va-t-il continuer à raconter ses futiles énormités ? Va-t-il au moins nous dire comment il aurait su que Madame Agathe Habyarimana avait écrit un bout de papier qu’elle aurait déposé sur le lit ? Non, le Président Habyarimana n’est pas allé à Gbadolite le 5 avril 1994, il y est allé le 4 avril 1994. Non, il n’a pas découché ce jour-là, et ce n’était pas son genre. Il n’est pas allé à Dar-es-Salaam à partir du Village Urugwiro, mais bien à partir de sa résidence de Kanombe. Voilà le genre de bagatelles que Monsieur Hassan Ngeze veut continuer à servir à l’opinion publique. Il devrait désormais s’abstenir de raconter ces ragots. Mais je sais que ça fait partie de sa vie. Ça fait partie de sa nature. Malheureusement.

Je me souviens par exemple d’une fois, à l’UNDF, alors que nous étions en train de prier encore une fois, il est venu nous interrompre, pour nous apprendre que d’après ses investigations, il avait découvert que certains parmi nous étaient des agents du Procureur du TPIR, et qu’ils nous trahissaient. Nous lui avons demandé de nous dire qui sont ces gens, et comment il était parvenu à les identifier. Il a été incapable de le faire. Nous avons unanimement décidé de le mettre en quarantaine. C’est-à-dire que nous nous sommes abstenus de lui parler, et quand il voulait approcher quelqu’un ou un groupe de gens, nous l’évitions. Nous avions trouvé que c’était plutôt lui qui voulait cacher ses activités, en les attribuant à d’autres. Après deux mois, nous avons trouvé qu’il souffrait de cet isolement, et nous avons levé la mesure. Ceci pour dire combien Hassan Ngeze est quelqu’un qui aime inventer des histoires, et qui ment sans rire. Pour moi, quand il parle de ses “investigations”, de ses “analyses”, de ses “recherches”, ça ne veut pas dire grand-chose.

De la page 329 à la page 330, alinéa 42.1., Ngeze prétend encore une fois qu’il a été en prison avec Lizinde, dans la même affaire de tentative de coup d’Etat. Il affirme qu’il avait été arrêté parce qu’il distribuait des tracts [émis par Lizinde], mais qu’il a finalement été libéré à cause de son jeune âge, et a laissé Lizinde en prison.

Hassan Ngeze s’est rendu compte qu’il ne pouvait pas continuer à mentir qu’il était avec Lizinde en prison pour la même affaire, car ceux qui étaient impliqués dans cette affaire ont été jugés, et Ngeze ne faisait pas partie de ceux qui ont été jugés. Mais dans son premier livre – Igicumbi cy’ikinyoma – page 82, Ngeze affirme que les politiciens de Gitarama qui étaient dans la prison de Ruhengeri sont morts entre 1974 et 1981. Et il allègue qu’il a vu comment les derniers sont morts, car il était en prison à Ruhengeri avec Lizinde, dans la même affaire. Or, en 1981, c’est l’année où le premier procès Lizinde a été ouvert. Hassan Ngeze n’était pas là, et on n’a jamais parlé de lui. Monsieur Justin Mugenzi qu’il donne comme témoin de sa présence dans la prison de Ruhengeri, m’a affirmé n’avoir jamais vu Hassan Ngeze dans la prison de Ruhengeri, lorsque Mugenzi y était. Je continue donc à dire que Ngeze a menti sur ce point aussi, à moins qu’il ne dise qu’il se serait trompé de dates. Et ce n’est pas pour rien qu’il évite le plus possible de parler des dates pour les différents événements et faits qu’il raconte.

QUATRIEME PARTIE: CONCLUSION

Pour donner mes avis et considérations sur le contenu des livres de Monsieur Hassan Ngeze, j’ai d’abord expliqué comment je l’ai connu, et quelles furent mes relations avec lui. Ceci m’a servi à montrer que je connais bien cette personne et que mes commentaires se fondent sur une connaissance plus ou moins poussée de Hassan Ngeze.

J’ai parlé, en long et en large, de quelques problèmes qui l’ont opposé à moi tout au long d’une certaine période, depuis l’année 1994. J’ai même repris certains documents qu’il a écrits, et j’ai expliqué les circonstances. Ceci permettra une compréhension de son comportement dans ses écrits, lorsqu’il s’acharne trop contre ma personne. En faisant ceci, je n’avais pas l’intention de me défendre par rapport aux nombreuses accusations qu’il porte contre moi dans ses deux livres, car j’ai eu assez de temps de me défendre, et j’ai été crédible. Ceci l’a fortement ébranlé, lui qui a toujours rêvé de me faire du mal. Tout ceci est repris dans ce document.

Le contenu des livres de Hassan Ngeze, selon moi, est résumé par le titre que j’ai repris ci-dessus: “Les livres de Hassan Ngeze: Un ramassis de mensonges, de fabulations et de rumeurs”. En lisant ce document, le lecteur se rendra compte que je n’ai pas exagéré dans mes explications, surtout que j’ai souvent étayé mes dires par des documents écrits par Hassan Ngeze lui-même.

Tout au long de ses livres, Monsieur Hassan Ngeze se qualifie de personne intelligente, qui fréquentait les hautes autorités, lesquelles autorités l’aimaient bien, à cause des analyses de situations qu’il leur faisait, raison pour laquelle elles étaient heureuses de le recevoir dans leurs bureaux, ou chez-elles à la maison. Il se targue d’avoir disposé de plus de moyens que l’Etat, ce qui lui permettait d’être l’une des deux personnes les mieux renseignées du pays. Il n’oublie pas de dire qu’il travaillait aussi pour les services de renseignements des grands pays, qui lui donnaient des moyens. Mais il se garde de dire qui est la deuxième personne qui était aussi renseignée que lui.

Ngeze réserve beaucoup de place à sa défense relativement aux événements très malheureux d’avril-juillet 1994. Essayant de s’en distancier, il les mets sur le dos des militaires “de Habyarimana”, et principalement du Colonel Anatole Nsengiyumva, c’est-à-dire moi-même. J’ai expliqué d’où vient tout ça. Et j’ai montré toutes ses contradictions sur ce point, notamment lorsqu’il s’appesantit sur le fait qu’il aurait été arrêté par moi-même la nuit du 6 au 7 avril 1994, et détenu au camp militaire de Gisenyi jusqu’au 9 avril 1994. J’ai montré que ceci était faux, et le lecteur verra que ce que je dis est tout-à-fait vrai. Il affirme même, à travers certains documents que j’ai repris dans cette mise au point, qu’en plus de cette première arrestation, il a été arrêté huit autres fois, dans la seule période d’avril à juillet 1994. J’ai montré que c’est faux. Et il ne disait pas ça dans les documents écrits avant de savoir qu’il était accusé devant le TPIR.

Hassan Ngeze se décrit comme un homme bon, aimé par tout le monde, surtout par les hautes autorités. Mais ce qu’il écrit montre qu’il est plutôt rancunier, et est toujours animé par la volonté de nuire. Récemment, il a expliqué à quelqu’un qui lui demandait pourquoi il s’acharne tant contre Anatole Nsengiyumva dans ses livres, et Ngeze a répondu: “Je hais ce type, et je dois tout faire pour lui faire perdre la tête”. J’ai reçu ce message, mais je reste serein.

Comme démontré par ce qu’il écrit dans ses deux livres et dans les autres documents que j’ai repris ci-dessus, ainsi que d’autres que je vais reprendre en annexe, Monsieur Hassan Ngeze écrit trop de choses, animé par un égotisme sans mesure, tellement qu’il se contredit souvent sans s’en rendre compte.

Monsieur Hassan Ngeze est également obnubilé par la volonté assez basse de salir la mémoire de feu le Président Habyarimana, tellement qu’il ne tient même pas compte du fait que les données disponibles contredisent ses allégations. Je l’ai montré ci-dessus. C’est quand même aberrant et révoltant à la fois.

Hassan Ngeze se fout du fait de dire la vérité. Ce qui compte pour lui, c’est se mettre en valeur, et paraître important devant le monde. Il fait tout dans ce sens. Lui demander de dire la vérité, lui demander de faire montre de sincérité, d’honnêteté ou d’humilité, c’est trop lui demander. Et de toute façon, il s’en fout. Ce n’est pas dans sa nature.

Je reprends en annexe, quelques autres documents écrits par Hassan Ngeze, qui permettront au lecteur de mieux comprendre que ce que j’ai dit dans ce document, est vrai. Ngeze a promis d’écrire prochainement d’autres livres. Je pense qu’il n’apportera rien d’intéressant ou de nouveau, si ce n’est d’inventer d’autres sornettes, et d’enfoncer des personnes qu’il ne porte pas dans son coeur, pour leur causer du tort. C’est ce qui lui plait le plus.

Puisse le lecteur mieux comprendre le contenu des livres de Monsieur Hassan Ngeze, et faire la part des choses. Et que les livres à venir ne puissent plus induire le lecteur en erreur.

Je reprends en annexe les documents suivants[22]:

  • Lettre du 26 octobre 2001 de Monsieur Hassan Ngeze adressée à Monsieur Stephen Rapp du Bureau du Procureur du TPIR, demandant la traduction de lettres supposées avoir été écrites par Hassan Ngeze au Lt Colonel Anatole Nsengiyumva.
  • Lettre urgente du 04 janvier de Hassan Ngeze, adressée à l’Officier Commandant du Centre de Détention des Nations Unies à Arusha, et à d’autres autorités du TPIR.
  • Lettre de Hassan Ngeze à Serushago Omar du 17 août 2001.
  • Déclaration de Serushago Omar du 17 août 2001, relative à la lettre de Hassan Ngeze.
  • Lettre du Général Gratien Kabiligi, Colonel Théoneste Bagosora, Lt Colonel Anatole Nsengiyumva et Major Aloys Ntabakuze du 14 août 2003, adressée au Président du TPIR, et dénonçant le comportement irrégulier et préjudiciable de Hassan Ngeze.
  • Lettre du 13 juin 2006 de Hassan Ngeze, qui est une demande de pardon de Hassan Ngeze adressée au Président Kagame, via le représentant spécial du Gouvernement Rwandais auprès du TPIR, Monsieur Aloys Mutabingwa.

Anatole Nsengiyumva

Lt Col BEMS

Annexe 1

Lettre du 26 octobre 2001 de Monsieur Hassan Ngeze adressée à Monsieur Stephen Rapp du Bureau du Procureur du TPIR, demandant la traduction de lettres supposées avoir été écrites par Hassan Ngeze au Lt Colonel Anatole Nsengiyumva.

 

Ngeze Hassan

Journaliste

Presse et Liberté

Affaire 97-27-I

Vendredi 26 octobre 2001

À          : M. Stephen Rapp, Senior Trial Attorney

Bureau du Procureur Affaire Médias

Réf.: Demande de traductions officielles, des lettres de Hassan Ngeze envoyées au Colonel Nsengiyumva, datées du 16 mars 1994, 10 avril 1994, 10 mai 1994, 16 mai 1994, 8 juin 1994. En anglais et en français.

Cher Monsieur,

J’ai entendu en France et en Afrique du sud que le bureau du Procureur a encore l’intention de déposer une motion demandant à la cour d’amender sa liste actuelle de témoins et ajouter deux autres témoins. Dans l’affaire Médias. Après que le prétendu témoin X ait rencontré des difficultés, le Bureau du Procureur a trouvé une autre voie d’amender sa liste périodiquement.

Il n’y a aucun doute que le Bureau du Procureur est en train de traverser une étape cruciale dans son accusation, pour cela, je ne serai pas surpris, si ladite motion qui ajoute deux témoins rwandais vivant en exil est déposée au cours de la session prochaine.

En tant qu’accusé devant ce tribunal, et conformément à l’article 20 du statut, paragraphe 4(e), les mercenaires américain John Floyd et canadien Martel, et leur Nathalie Leblanc, n’ont aucun pouvoir pour représenter mes intérêts, “je les hais” ils sont là en tant que “chercheurs d’or”, ils sont là contre ma volonté, ils sont là parce qu’ils veulent de l’argent. Ceci doit être compris comme ça. Comme prévu, et conformément à l’article sus-cité, j’ai le droit de préparer ma défense et je suis en train de le faire. Si la motion que vous prévoyez de déposer est acceptée, j’aimerais que votre bureau me donne les copies de chaque lettre traduites en anglais et en français. Ces lettres ont été saisies à ma résidence de Nairobi le 18 juillet 1997.

Les lettres que je suis en train de vous demander, sont celles que j’ai envoyées au colonel Anatole Nsengiyumva, lors de mes arrestations (huit fois) de mars à juillet 1994, elles sont datées du 16 mars 1994, 10 avril 1994, 10 mai 1994, 8 juin 1994, quelques-unes ont été obtenues du Gouvernement de Kigali par le bureau du Procureur, d’autres ont été saisies à ma résidence de Nairobi avec des milliers d’autres documents lors de mon arrestation, en 1997.

  1. Meno, procureur dans l’affaire Médias m’a envoyé la moitié des traductions, quelques-unes d’entre elles n’étaient même pas traduites dans les langues utilisées au tribunal. L’anglais et le français. Toutes ces lettres montrent combien j’étais persécuté à mort par l’Armée rwandaise dirigée par le colonel Nsengiyumva Anatole en 1994.

D’anciens officiers supérieurs de l’Armée Rwandaise y compris le Colonel Anatole qui sont détenus à l’UNDF veulent témoigner pour dire comment j’étais en conflit avec l’armée, si on leur demande de le faire, une motion a été déposée par l’accusé le 9 juin, la traduction de ces lettres serait utile à toute personne concernée.

Moi-même Hassan Ngeze, voudrais commencer à utiliser ces traductions avec Omar Serushago, et le témoin ABH qui sont attendus du 13 au 14 novembre 2001 et les 15, 20, 23, 26 et 27. Madame Charity Kagwi qui doit diriger le contre-interrogatoire d’Omar Serushago pourrait aussi avoir besoin de ces documents.

Voici certaines de ces letttres reçues du Bureau du Procureur:

  1. Le 16 mars 1994, j’ai été menacé de mort par l’Armée Rwandaise, et j’ai envoyé deux lettres au Chef de l’Armée à Gisenyi, le Colonel Anatole Nsengiyumva.
  2. Le 10 avril 1994, j’ai été libéré de la détention où j’ai passé trois jours, après mon arrestation, qui a eu lieu le 6 avril 1994 tard dans la nuit.
  3. Le 21 avril 1994, l’Armée Rwandaise a lancé une attaque contre ma résidence.

Le 8 juin 1994 comme d’habitude, l’armée rwandaise a lancé une attaque contre ma résidence.

Après tous ces événements, des lettres étaient envoyées au colonel Nsengiyumva Anatole.

Meilleurs souvenirs

(Signature de Hassan Ngeze)

Copie pour information:

  1. Président N. Pillay
  2. Juge Gunawardana
  3. Juge Mose
  4. Avocats dans l’affaire Médias
  5. Chef de la section des langues du TPIR
  6. Colonel Anatole Nsengiyumva
  7. Général Kabiligi
  8. Général Ndindiliyimana
  9. Colonel Bagosora
  10. Les détenus de l’UNDF.

 

Annexe 2

Lettre urgente du 04 janvier de Hassan Ngeze adressée à l’Officier Commandant de l’UNDF et à d’autres autorités du TPIR

 

Hassan Ngeze – prisonnier purgeant la peine de prison à perpétuité

depuis le 3 décembre 2003

AU TPIR- UNDF

Lettre urgente du 4 janvier 2005

À : Saidou Guindo – Adjoint au Chef de la Sécurité – Officier Commandant de l’UNDF

Copie pour information:

  1. Le greffier du TPIR
  2. Le Chef de la Sécurité du TPIR
  3. Claude Bouchard, adjoint au chef de la sécurité
  4. Dr Okitapoy Michel, chargé des affaires sociales
  5. Nyangezi Isidore, officier chargé des opérations.

 

Réf.: Préoccupations de Hassan Ngeze soumises à l’officier commandant et aux autorités du Tribunal

Je voudrais porter à votre connaissance une information qui pourrait, d’une façon ou d’une autre, avoir des connections avec la sécurité de l’UNDF.[23]

La situation actuelle

La plupart des détenus qui sont ici sont d’anciens dignitaires de la République Rwandaise. Certains parmi eux étaient des officiers supérieurs, des ministres, des responsables de partis politiques et d’autres étaient de hauts fonctionnaires civils du Gouvernement rwandais. Parmi lesdits détenus, inclus ceux qui ont été condamnés, ce ne sont pas nécessairement des criminels ou des responsables de ce pour quoi ils ont été détenus ou condamnés, il y en a ceux qui n’ont pas participé dans les tueries mais qui n’étaient pas intéressés à sauver ou voir des vies des innocents être sauvées. Ce groupe bien précis, malgré le pouvoir qui leur était conféré par la constitution, ils considéraient que sauver des citoyens innocents n’était pas leur affaire.

Le cas de Hassan Ngeze

Depuis 1980, j’ai été mis en prison 35 fois et j’ai comparu devant une Cour militaire. Actuellement, je suis en train de purger une peine de prison à perpétuité à l’UNDF en attendant le résultat de mon appel, et si je ne suis pas acquitté, je serai envoyé dans un pays à determiner par le Tribunal pour y purger le restant de ma peine.

Au Rwanda, j’ai comparu devant une Cour militaire. Cette sorte de cour était une cour extraordinaire qu’on trouvait dans tous les régimes dictatoriaux, le Rwanda inclus.

Il n’est pas croyable que la dernière session de cette Cour était présidée par les Juges Bagosora Théoneste et le colonel Efraim Setako, qui sont détenus avec moi à l’UNDF et font face à des charges comme n’importe quel accusé de génocide.

Evénements avant et après l’assassinat de feu le Président

  1. En décembre 1993, j’ai publié dans mon journal Kangura No 53 que le Président Habyarimana serait tué au début avril 1994.
  2. Pour cela, j’ai dû visiter et rencontrer feu le Président Habyarimana et je lui ai expliqué ce qui concerne son possible assassinat.
  • Plus tard j’ai discuté de ce possible assassinat avec le Général Roméo Dallaire qui était en ce moment-là le chef de la MISSION DES NATIONS UNIES AU RWANDA.
  1. Malgré mes mises en garde répétées, mon information a été ignorée et rejetée.
  2. Le 6 avril 1994, Habyarimana a été tué.
  3. La nuit du 6 avril 1994, j’ai été arrêté par le Colonel Nsengiyumva Anatole et détenu au camp militaire pour trois jours du 6 avril au 9 avril 1994.
  • Pendant la période d’avril 1994, l’Etat-Major de l’Armée a lancé dans tout le pays un message demandant que l’on tire sur moi à vue.
  • Je garde avec moi 17 télégrammes militaires envoyés par le Chef de l’Armée et contenant des ordres pour m’assassiner.
  1. Ceux qui ont rédigé les ordres, ou ceux qui ont été impliqués d’une façon ou d’une autre dans la rédaction de ces ordres visant à tirer sur moi à vue, sont maintenant détenus avec moi à l’UNDF.
  2. Au cours de mon procès devant le TPIR, j’ai dit à ces militaires détenus que j’aurais des difficultés à prouver mon alibi comme quoi j’étais détenu au camp militaire commandé par le colonel Anatole Nsengiyumva pendant la période du 6 avril au 9 avril 1994. Je leur ai également rappelé les messages qui avaient été lancés partout dans le pays et concernant mon arrestation et mon assassinat.
  3. Le détenu Joseph Nzirorera – alors secrétaire général du MRND – quand il est venu au camp militaire, il m’a vu en détention avec mes deux bras liés derrière le dos avec une corde[24], au camp militaire commandé par le Colonel Anatole Nsengiyumva.
  • Un moment donné en mai 1994, l’Armée a décidé de me tuer. Après, je fus envoyé à Kigali dans une jeep militaire, avec mes deux mains liées derrière le dos. A notre arrivée à Kigali, le général Kabiligi a demandé aux officiers qui m’avaient amené pourquoi ils m’avaient amené vivant, alors que les ordres disaient que je devais être tué. C’est alors que le général Bizimungu est intervenu et a dit que tous les ennemis doivent être interrogés avant d’être tués. C’est ainsi que j’ai eu la vie sauve.
  • Lors d’un autre incident, j’ai été emmené au camp militaire avec 10 Tutsi que j’étais en train d’aider pour traverser la frontière et aller au Congo. Là-bas, j’ai trouvé un télégramme qui donnait ordre de tuer Hassan Ngeze et ces Tutsi.

Ce qui s’est passé, quand j’étais en exil

Un jour, en exil, quand le Général Kabiligi a su que j’allais rencontrer le Pape Jean Paul II, dans la Cité du Vatican, il a décidé de me rencontrer à Nairobi, et m’a supplié de prendre avec moi les documents des réfugiés, qui, selon Kabiligi, voulaient que je les donne au Pape Jean Paul II. Comme les documents étaient à Goma au Zaïre, j’ai utilisé mon argent et loué un petit avion pour visiter le Congo. A notre arrivée au Congo, j’ai laissé l’avion à l’aéroport de Goma et je me suis rendu au camp des réfugiés de Mugunga. Au camp, Kabiligi m’a dit que les documents n’étaient pas encore prêts, et insista pour que je puisse aider. En conséquence, je dus attendre le deuxième jour pour avoir les documents, j’acceptai d’attendre et je renvoyai l’avion à Nairobi. Aux environs de 18h00 ce jour-là, un soldat vint me voir et me donna le message selon lequel un groupe de commandos conduits par le Major Ntabakuze avait prévu de me tuer cette nuit-même. Il me conseilla de ne pas passer la nuit au camp des réfugiés pour sauver ma vie. J’ai décidé de quitter immédiatement le camp des réfugiés et me suis rendu dans un hôtel des environs. Avant de partir, j’ai dit à ma famille que j’avais une réunion à Goma et que j’allais les voir le lendemain. J’avais un ordinateur portable et une télévision. Ma famille demanda à une personne appelée Calcul de passer la nuit dans ma tente pour veiller sur mes biens. En fait, ma famille ne savait pas pourquoi je quittais le camp des réfugiés ce soir-là. Ce jour-là vers minuit, un groupe de militaires envoyés par Aloys Ntabakuze mena une opération commando et tira beaucoup de cartouches dans ma tente. M. Calcul qui était dans ma tente mourut sur le coup. Les tueurs conduits par Aloys Ntabakuze pensèrent que c’est moi qu’ils avaient tué.

Au camp des réfugiés, l’armée vaincue a continué à tuer des innocents. Ils se sont même infiltrés au Rwanda pour tuer les survivants.

La situation à l’UNDF

Quand j’ai été emmené dans cette détention, je pensais que mon innocence serait facilement prouvée.

Je ne m’attendais pas à voir le Tribunal agir au-delà de sa compétence temporelle puisqu’il a basé sa décision en grande partie sur les numéros de Kangura publiés pendant la période de 1990, 1991, 1992, et 1993, qui tombe hors du mandat du Tribunal. En plus de cela, je ne pensais pas que le Tribunal ne prendrait pas en compte le fait qu’il y avait plusieurs journaux publiés au Rwanda, parmi lesquels un grand nombre de journaux qui publiaient les informations en faveur du FPR pendant cette période.

Je ne croyais pas que le Tribunal n’allait pas évaluer mon action de sauver 1000 Tutsi (ce que j’ai fait au risque de perdre ma vie) à sa juste valeur plutôt que de prendre un point de vue négatif et biaisé concernant mon audace pendant la période du génocide dans mon pays.

Je ne croyais pas non plus que j’allais être condamné pour des crimes apparemment commis par quelqu’un d’autre, tel qu’il est clairement exprimé dans les paragraphes 1068, 954 et 719 du jugement. Je ne croyais pas par ailleurs qu’il ne me serait pas permis de présenter la preuve matérielle pour prouver ma défense d’alibi pendant la période du 6 au 9 avril, quand le tribunal a refusé d’appeler les témoins de la défense, notamment le Colonel Bagosora Théoneste, Général Bizimungu Augustin, Général Gratien Kabiligi; et le Colonel Nsengiyumva Anatole qui a donné ordre de m’arrêter avec comme résultat ma détention au camp militaire et lesdits officiers m’ont fait arrêter 8 fois pendant la période entre avril 1994 et juillet 1994 pour avoir sauvé la vie d’environ 1000 Tutsi. Comme conséquence de ce refus, je n’ai pas pu appeler le Major François Xavier Nzuwonemeye qui avait reçu les instructions de lancer dans tout le pays le message de me tuer sur le champ et Joseph Nzirorera qui a été témoin de ma détention au camp militaire avec mes deux mains liées avec une corde derrière le dos pendant ces arrestations. Tous ces témoins étaient et sont toujours présents à l’UNDF.

Comme je l’ai dit ci-dessus, du 6 au 9 avril 1994, j’étais au camp militaire de Gisenyi, détenu par Anatole Nsengiyumva. Ma maison a été détruite et incendiée par l’Armée[25], sous le prétexte que j’aidais les Tutsi à traverser la frontière pour aller au Zaïre.

D’innocentes personnes étaient détenues avec moi, la plupart d’entre eux ont été tuées par l’armée, le Procureur ne sait pas ça, et c’est la raison pour laquelle certains de ces officiers militaires ont refusé de témoigner pour ma défense avec comme raison qu’ils avaient peur que d’autres accusations seraient ajoutées dans leur acte d’accusation si jamais elles sont connues.

Le détenu Nzirorera qui m’a vu en détention a refusé de témoigner pour moi sous prétexte que témoigner pour moi reviendrait à accuser l’armée de Habyarimana qui a été complètement impliquée dans les massacres.

Serushago a mensongèrement témoigné contre moi, quand il a dit qu’il m’a vu le 7 avril 1994, alors que j’étais en train d’être torturé dans le camp militaire d’Anatole.

Enfin, mon co-appelant Ferdinand Nahimana, avec Kabiligi, Bagosora, Anatole Nsengiyumva et Aloys Ntabakuze ont ourdi un grand complot contre moi. Ferdinand Nahimana leur a dit qu’ils devraient user de tous les moyens possibles pour me discréditer et me faire condamner.

C’est pourquoi ils ont requis une enquête qui a été conduite par Jean Pelé Fomété, Chef de la section Gestion des Chambres. Nous savons tous le résultat du rapport. “Voir le rapport Fomété requis par les officiers supérieurs”.

Ferdinand Nahimana et ces militaires ont eu ce qu’ils voulaient, à savoir que je sois condamné à la prison à vie. Ils avaient peur que si jamais je suis libéré je pourrais devenir un témoin du Procureur contre eux à cause de ce que je sais en tant que journaliste concernant leur implication dans le génocide au Rwanda. Leur principal objectif était de me voir discrédité devant les Juges du Tribunal.

Cher commandant, l’objet principal de cette lettre est de vous informer de la situation que j’ai endurée avant 1994, la période après 1994, et la situation actuelle.

Le 6 avril 1994, dans tous les camps militaires du pays, les officiers supérieurs ont donné ordre d’arrêter des milliers de personnes dont des Tutsi et des Hutu des partis d’opposition, et tous ont été tués durant la période du 6 au 9 avril 1994, par les officiers supérieurs détenus à l’UNDF.

Le Procureur n’a pas accusé ces militaires pour ces crimes odieux, c’est pourquoi ils ont dit qu’ils ne peuvent pas donner au Procureur l’opportunité de connaître ces crimes.

J’ai été condamné pour des crimes dénoncés par Serushago, qui étaient supposés avoir été commis entre le 6 avril et le 9 avril 1994, alors que j’étais détenu par Anatole Nsengiyumva. Nzirorera a refusé de témoigner pour ce qu’il a vu concernant ma détention, sous prétexte que témoigner pour moi reviendrait à accuser ses amis officiers supérieurs.

En bref, c’est ça que je voulais vous dire aujourd’hui, pour que vous soyez au courant de ce que j’ai enduré et que j’endure toujours.

J’aimerais que vous informiez toutes les sections concernées si nécessaire.

Je vous demande également d’envoyer la copie de cette lettre à toutes les adresses reprises ci-dessus.

Respectueusement soumis.

(Signature de Hassan Ngeze)

Annexe 3

Lettre de Hassan Ngeze du 17 août 2001 adressée à Serushago Omar

 

Pour    : Mon frère Serushago Omar

Cher frère, assalam aleykum warahamaturulaahi taala wa barakatuh

Je t’écris cette lettre pour te rappeler que cette vie que nous vivons sur cette terre est très courte. Je viens juste de lire ce qui est repris dans ton témoignage que tu as donné au Procureur en date du 9 et du 11 juillet surtout concernant les mensonges que tu formules contre moi, j’ai été comme foudroyé et j’ai préféré préparer de longues prières pour que Dieu puisse t’aider, et te fasse comprendre qu’il ne te sert à rien de dire des mensonges contre moi pour me faire couper la tête.

Même si tu parviens à tout inventer contre moi et que ça devient crédible, tu ne tarderais pas de réaliser que cela ne t’a servi aucunement. Rappelle-toi également que même si nous pourrions ne pas nous rencontrer, nos enfants eux se rencontreront. Voici quelques points parmi ceux que je te rappelle.

Dans ma vie, je n’ai jamais eu de problème ni avec toi, ni avec ta famille.

Quand ta femme est arrivée au Kenya pour l’exil, rappelle-toi que c’est moi qui l’ai aidée en lui donnant deux cents dollars pour qu’elle puisse se débrouiller -200$.

Même toi quand tu es venu me voir à Nairobi, tu te rappelles que j’ai enlevé mon meilleur costume que j’avais et que je te l’ai donné et tu le portes jusqu’à présent, tout cela te montre qu’il n’y avait aucun problème entre nous, et que nous étions des frères.

Rappelle-toi que tu es un de ceux qui m’ont fait arrêter, même si je t’accueillais chez-moi comme un frère, cela ne t’a pas empêché de me faire arrêter alors que tu sais bien que je suis ton frère.

Laissons ça de côté, et voyons ce qui s’est passé.

Tu sais bien que depuis le 6 avril 1994, toi et moi ne nous sommes entretenus aucune fois. Et nous ne nous sommes rencontrés nulle part, toi et moi. Je sais bien que tu sais toi-même que durant les trois mois de la guerre, je n’ai jamais eu la paix.

Tu sais bien que la nuit du 6 avril 1994, directement après la mort de Habyarimana, j’ai été directement arrêté et détenu jusqu’en date du 9 avril 1994 soir, parce que j’avais écrit que Habyarimana sera tué et tout le monde sait ça.

Tu sais bien que pendant les trois mois de la guerre d’avril seulement, j’ai été détenu  huit fois par le commandement de l’Armée, et même des télégrammes ont été diffusés, disant que quiconque me verra devra tirer sur moi, parce qu’on disait que je travaillais avec les Inyenzi. C’est Dieu qui m’a sauvé. Tu sais bien et tu peux témoigner toi-même que tous les Tutsi musulmans qui se sont réfugiés chez-moi, j’ai réussi à leur faire passer la frontière en utilisant des fûts, j’ai pu les faire arriver tous au Zaïre, et même arrivés au Zaïre, j’ai pu les loger dans mes maisons que j’avais là-bas au Zaïre.

Tu sais bien que même d’autres Hutu qui étaient pourchassés et qui se sont cachés chez-moi, j’ai pu les évacuer au Zaïre. Tu sais que c’est cette action d’évacuer les gens au Zaïre qui a été la cause qui a fait que les autorités civiles et militaires m’ont pourchassé et m’ont condamné à mort, tu sais bien comment les militaires ont lancé une attaque contre ma résidence pour la détruire et tuer tous ceux qui étaient là, et que j’ai été sauvé par les militaires qui vivaient chez le nommé Kayonga, dont les nommés Jef et Régis, et ces militaires habitaient dans le même quartier que nous, et c’est eux qui se sont battus toute la nuit avec les militaires qui avaient été envoyés par le colonel Anatole Nsengiyumva pour me tuer et tuer tous ceux qui étaient chez-moi.

Dans ton témoignage tu dis que tu m’as vu et que nous nous sommes parlés, vraiment tu mens, car toi et moi nous ne nous sommes rencontrés nulle part, et tu ne m’as pas vu chez le nommé Hassan Gitoki.

En bref je voudrais t’informer que le Procureur veut te faire dire ce qu’il a été incapable de faire dire aux autres. Il y a deux femmes témoins à qui le Procureur a voulu faire dire ce qui n’a jamais existé, il vient de voir que ça ne marche pas et d’ailleurs toi aussi tu sais très bien qu’il n’est pas facile de dire ce qui n’a pas été, surtout quand moi aussi je me suis très suffisamment préparé pour lui montrer que ce que dit ce témoin sont des fabrications.

Alors en peu de mots, je voulais te dire qu’il serait mieux que tu dises la vérité que tu connais et que tu as vu toi-même, car il ne te servirait à rien même dans l’avenir d’entendre que tu m’as fait tuer alors que tu sais bien que je suis innocent. Pendant les seuls trois mois de la guerre, tu sais très bien que j’ai été emprisonné huit fois par le Commandant militaire dans la région de Gisenyi Monsieur le Colonel Nsengiyumva Anatole. La plupart du temps lors de mes arrestations, j’étais envoyé à Kigali avec mes mains liées, pour que je sois tué là-bas, tu connais tout ça, tu sais qu’à aucune occasion pendant cette période de guerre je n’ai eu de conversation avec toi.

Je te demande de réfléchir encore une fois comme mon frère, et dire ce que tu sais, car je ne vois pas l’intérêt que tu aurais de mettre mon sang sur tes mains. Néanmoins pour ce qui me concerne, je me suis suffisamment préparé par rapport à tout cela, dans mes prières je prie pour toi, pour que le Bon Dieu te fasse comprendre qu’il ne te sert à rien de dire des mensonges contre moi.

Assalam aleykuma warahamaturulaahi taala wabarakatuh

N.B.: Où est-ce que les choses se gâtent ?

Le bureau du Procureur est plein de gens ignorants seulement, quand ils se rendent compte que leurs enquêtes ne donnent rien et qu’ils n’ont rien pour accuser quelqu’un , au lieu de libérer la personne, ils préfèrent inventer des choses qu’elle n’a pas faites, l’exemple la plus simple est que même toi on te demande de dire des choses alors que tu sais très bien qu’elles ne se sont jamais passées, tout en sachant que je n’ai jamais parlé avec toi pendant la guerre. Vraiment mon frère, responds-moi et dis-moi ce que tu penses de ça.

[26] 

Annexe 4

Déclaration de Monsieur Serushago Omar du 17 août 2001, relative à la lettre de Hassan Ngeze

Déclaration volontaire

Je soussigné, Omar Serushago, détenu au centre de détention du Tribunal Pénal International pour le Rwanda à ARUSHA, déclare avoir reçu une lettre écrite en Kinyarwanda en provenance de M. Hassan Ngeze, donnée par l’Imam MUSTAPHA KIHAGO lorsqu’il venait faire la prière à M. OMAR Ruggiu.

C’était juste après trois minutes de son arrivée à 15h00 à l’annexe de l’UNDF. Il m’a donné cette lettre en cachette et directement j’ai appelé l’officier de sécurité JAIRO Joseph qui était sur place au bureau, en vue qu’il appelle le commandant M. SAÏDOU ou le commandant en second M. BOUCHARD de venir voir la lettre le plus tôt possible. Les deux chefs sont arrivés dans la demi-heure et ont interrogé l’Imam.

L’Imam a accepté pratiquement avoir amené cette lettre en provenance de Hassan Ngeze.

A de nombreuses reprises Hassan Ngeze essaie de me joindre par l’intermédiaire de l’Imam, qui fait savoir qu’il y a un cadeau en provenance de Ngeze.

A vrai dire l’objectif est de me corrompre, de ne pas témoigner tout ce que je sais sur lui.

Fait à l’annexe UNDF, le 17-Août-2001

Omar Serushago (sé)

Quartier Pénitentiaire

Témoin, M. Claude Bouchard, Commandant en second (sé)

Annexe 5

Lettre du Général Gratien Kabiligi, Colonel Théoneste Bagosora, Lt Colonel Anatole Nsengiyumva et Major Aloys Ntabakuze du 14 août 2003, adressée au Président du TPIR et dénonçant le comportement irrégulier et préjudiciable de Hassan Ngeze

Arusha, le 14/08/2003

A Monsieur le Juge Président du Tribunal Pénal International pour le Rwanda

Objet : Dénoncer le comportement irrégulier et préjudiciable de Hassan Ngeze

Monsieur le Juge Président,

Nous, les Accusés Général Gratien Kabiligi, Colonel Théoneste Bagosora, Lt Colonel Anatole Nsengiyumva, et Major Aloys Ntabakuze, avons l’honneur de nous adresser à votre haute autorité pour porter à votre connaissance les agissements irréguliers et préjudiciables de la part de Monsieur Hassan Ngeze, accusé devant la Chambre I de première instance du TPIR.

En effet, dans sa lettre du 11 août 2003, adressée à la Chambre I de première instance, Monsieur Hassan Ngeze a communiqué en annexe, les identités des témoins protégés OAF et OAB qui ont déposé dans notre affaire en juin dernier en faisant entendre qu’il compte s’appuyer sur leurs déclarations dans notre affaire lors de sa présentation qui aura lieu du 18 au 22 août 2003. Monsieur Fardinand Nahimana, son coaccusé, qui a reçu une copie de cette lettre, a été ahuri par cette divulgation et a voulu s’informer auprès de nous si une demande officielle avait été faite par la Défense de Ngeze aux fins d’obtenir de notre Chambre l’autorisation de divulgation des identités de ces témoins protégés et si cette demande avait été honorée. A la réponse négative, Monsieur Ferdinand Nahimana nous a montré le document en annexe parce qu’il trouvait que cette procédure n’était pas régulière.

Nous avons été surpris de constater les faits et nous avons jugé utile et urgent de dénoncer Monsieur Hassan Ngeze avec la plus grande énergie. Nous ne voulons pas que l’on puisse penser que nous aurions collaboré avec lui dans ces manoeuvres irrégulières qui violent les décisions de la Chambre en matière de protection des témoins. Nous nous dissocions totalement de lui et confirmons que nous n’avons jamais cédé ou transféré à Hassan Ngeze des documents confidentiels dans notre affaire.

Nous estimons que cet incident est très grave. C’est une situation tout à fait anormale. En aucun cas, une telle divulgation ne devrait se produire. C’est pourquoi nous demandons qu’une enquête soit ouverte pour déterminer les sources d’information et d’alimentation de Monsieur Hassan Ngeze ainsi que la motivation qui se cache derrière ses agissements frauduleux. Par ailleurs, ce n’est pas pour la première fois que Monsieur Hassan Ngeze soit impliqué dans de telles irrégularités. De notre côté, nous nous engageons à collaborer pleinement avec l’équipe que vous voudrez bien mettre en place pour mener cette enquête.

Pour assurer l’intégrité des procédures au sein du Tribunal, cette affaire devrait être élucidée sans tarder. Mais nous demandons, qu’entre-temps, les documents déposés par Hassan Ngeze soient retirés sans délai de son dossier et qu’il lui soit également exigé de remettre d’autres copies qui seraient en sa possession. Au cas où cette mesure urgente ne serait pas prise, nous allons donner instructions à nos avocats d’entamer, dès ce vendredi, les démarches nécessaires pour pouvoir participer aux audiences de la Chambre I dans l’affaire Hassan Ngeze afin de défendre nos intérêts.

Veuillez agréer, Honorable Juge Président, les assurances de notre haute considération.

Les signataires

Général Gratien Kabiligi (sé)                                     Colonel Théoneste Bagosora (sé)

Lt Col Anatole Nsengiyumva (sé)                              Major Aloys Ntabakuze (sé)

Cc:

Madame le Juge Navanethem Pillay, Président de la Chambre I (Affaire des Médias)

Monsieur le Juge Erik Mose, Président de la Chambre I (Affaire des Militaires I)

Monsieur le Greffier du TPIR

Madame le Procureur du TPIR

Les Avocats de la Défense (Affaire des Militaires I)

Les Avocats de la Défense (Affaire des Médias)

Monsieur Saidou Guindo, Commandant de l’UNDF

Annexe 6

Lettre du 13 juin 2006 de Hassan Ngeze qui est une demande de pardon de Hassan Ngeze adressée au Président Kagame, via le Représentant Spécial du Gouvernement Rwandais auprès du TPIR, Monsieur Aloys Mutabingwa

 

Mardi                                                                         13 juin 2006

 

Pétition à: Son Excellence Paul Kagame

Président du Rwanda, B.P. 15 Kigali

Rwanda

 

De: Hassan Ngeze – Prisonnier condamné à la prison à perpétuité – Affaire en Appel

                                    (Affaire: ICTR No 99-52-A)

Son Excellence Aloys Mutabingwa – Représentant Spécial du Gouvernement rwandais auprès du Tribunal Pénal International pour le Rwanda – TPIR

Cc:

  • Les Juges de la Chambre d’Appel
  • Juge Eric Mose – PRÉSIDENT DU TPIR
  • Juges de la Chambre de Première Instance du TPIR (Tous)
  • Honorable Adama Dieng, Greffier du TPIR
  • Le Procureur du TPIR
  • Koffi Atta Annan Secrétaire Général de l’ONU, New York
  • Son Excellence Jakaya Mrisho Kikwete, Président de la République Unie de Tanzanie
  • Ministre de la Justice de Tanzanie
  • Ministre des Affaires Etrangères de Tanzanie
  • Honorable John Chiligati, Ministre de l’Intérieur de Tanzanie
  • Madame Edda Mukabagwiza, Ministre Rwandais de la Justice, B.P. 160 Kigali-Rwanda
  • Président d’Ibuka au niveau national – Rwanda
  • Robert Ménard – Secrétaire Général de Reporters Sans Frontières (RSF) Paris-France
  • La Défense et l’Accusation – Affaire des Médias
  • Comité International pour la Défense des Journalistes
  • La Presse (Toute)

Réf: Demande du Prisonnier Hassan Ngeze à Son Excellence Président Kagame pour que sa pétition soit examinée en même temps que la demande de l’ancien Président Pasteur Bizimungu pour demander pardon pour la réconciliation parmi les Rwandais.

 

Votre Excellence:

  1. Je vous écris pour demander pardon à votre fonction après avoir passé plus de 9 ans en prison, condamné pour des crimes que je n’ai pas commis. Je fais ceci tout en ayant à l’esprit que mon affaire est en appel devant la Chambre d’Appel contre la décision de la Chambre de première instance qui m’a condamné à la prison pour le reste de ma vie.

Mandat du Tribunal

  1. Avant de continuer, je veux dire que ledit tribunal avait reçu mandat pour les crimes commis au cours de la période du 1er janvier au 31 décembre 1994 sous le Statut du Tribunal International  que je reproduis ci-dessous:

“Mis en place par le Conseil de Sécurité agissant sous le Chapitre VII de la “Charte des Nations Unies, le Tribunal Pénal International pour le Rwanda chargé de juger les personnes présumées responsables de génocide et d’autres violations graves au droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais responsables de tels actes ou violations commis sur le territoire d’Etats voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994 (ci-après dénommé “Tribunal International pour le Rwanda”) fonctionnera conformément aux dispositions du présent Statut”.

  1. Je sais que Pasteur Bizimungu est lui aussi en train de demander pardon, et comme lui je demande, ayant en esprit la réconciliation, vous examinerez favorablement ma pétition, sans vous embarrasser de mon affaire qui est pendant devant la Chambre d’Appel, que vous envisagerez de me pardonner, tenant compte des raisons que je reprends ci-dessous.

Votre Excellence – Le Président du Rwanda

J’aimerais dire ce qui suit:

  1. Je suis un journaliste qui a exercé comme tel pendant plusieurs années au Rwanda. En tant que reporter d’investigation, j’ai essayé de faire mon possible, malgré les faiblesses humaines, d’être témoin et de m’assurer que les événements de cette année-là soient enregistrés pour toujours pour l’Histoire. En tant que journaliste, j’ai couru le risque d’être arrêté, et effectivement j’ai été arrêté, détenu par le régime que vous avez chassé, à différentes occasions, et j’ai comparu devant la Cour militaire. Colonel Ephraim Setako et Bagosora Théoneste, actuellement détenus à l’UNDF, la présidaient [la Cour militaire]. Ainsi, je suis maintenant détenu avec des personnes qui ont été responsables de ma détention injuste au Rwanda.
  2. Mon intention en fondant ce Journal Kangura était de publier les informations. Ceci est le rôle de tout journaliste. En publiant les informations, un journaliste doit tenir compte de l’environnement social, politique, culturel, traditionnel et économique de la société qu’il/elle veut informer à travers un journal. Ainsi, les articles, les histoires, les nouvelles, etc, contenus dans ce journal reflètent l’état d’esprit et le tempérament de la société en question. En tant que journaliste au Rwanda, mon objectif en publiant les informations dans un journal était conditionné par l’environnement de la société que je tentais d’informer, tel que, les articles sur avec qui Brad Pit sortait ou ne sortait pas n’auraient pas eu de conséquences sur la moyenne des Rwandais.
  3. Mon journal n’a jamais été publié pendant le génocide. Kangura était un journal qui reproduisait des articles qui étaient en circulation depuis plus de 40 ans, pourtant je suis en prison pour des articles qui ont été écrits et publiés même avant ma naissance.
  4. Le but de publier les 10 commandements des Hutu dans Kangura numéro 6 et les 19 commandements des Tutsi dans Kangura numéro 4, tous les deux de l’année 1990, était d’informer le grand public des conséquences dangereuses de telles philosophies destructives et les inviter à résoudre leurs différends autour d’une table. Je ne suis pas l’auteur des 10 commandements des Hutu et des 19 commandements des Tutsi.
  • La création et la publication de ces 10 commandements a été faite en Belgique et réédités dans certains journaux rwandais avant qu’ils soient reproduits dans Kangura. Même au moment de leur réédition, j’étais dans la prison de Kigali pour avoir prédit la guerre de 1990.
  • L’histoire des 10 commandements est détaillée dans un livre intitulé “La Justice Belge face au génocide Rwandais” publié par un certain Vincent Ntezimana. Il en a également fait une large diffusion au Rwanda.
  • Selon mes informations et ce que je crois, la distribution de ces commandements au Rwanda a été faite principalement par[27]:
  1. Nzabagerageza Charles, Préfet de Ruhengeri à cette époque,
  2. Mme Mukobwajana, épouse de Nzabagerageza,
  • Nyabusore, doyen à l’université de Busogo,
  1. Rwabukumba, beau-frère de Habyarimana,
  2. Rwigema Pierre Célestin qui travaillait pour Rwabukumba, et beaucoup d’autres membres de l’Akazu.
    • Les 19 commandements ont été en circulation depuis 1959 dans la région des Grands Lacs (Rwanda, Burundi, Zaïre, Uganda, Kenya, Tanzanie) et ailleurs et ont été publiés dans différentes brochures/livres et journaux.
  1. Je condamne le génocide
  • J’ai toujours condamné les actes cruels de l’ancienne armée de feu le Président Habyarimana qui tuaient sans pitié leurs innocents frères et soeurs sans raison suite à la chute de l’avion transportant feu le Président Habyarimana. Leurs dits actes étaient injustes et inhumains. J’ai toujours condamné cela, puisque feu le Président Habyarimana n’était pas le seul Président africain qui mourait dans un crash d’avion. Ça s’est passé au Mozambique, et pourtant les militaires et d’autres officiels du Gouvernement n’ont pas tué leur peuple pour cela. Dans le cas du Rwanda, l’armée de Habyarimana que vous avez vaincue n’avait aucune raison de diriger des massacres des populations innocentes dans tout le pays et de fournir des armes aux Interahamwe tout en sachant que cet acte allait conduire aux massacres massifs de Tutsi innocents.
  • Il importe de souligner que lorsque feu le Président Habyarimana décida de tuer l’ancien Président Kayibanda et tous ses nombreux ministres, la population n’a pas utilisé ce motif pour s’entre-tuer.
  • Ma thèse est que les responsables militaires et les autres leaders qui ont entraîné les Interahamwe, et leur ont fourni des armes avant les événements du 6 avril 1994, devaient être tenus responsables du Génocide qui a eu lieu en 1994.
  1. Mon rôle pendant le Génocide
  • Emu par les atrocités commises par l’armée de l’ancien régime, j’ai sauvé la vie de 1000 Tutsi dans ma ville natale de Gisenyi et 500 Tutsi à Kigali. Cet acte peut être vérifié auprès de ces survivants du génocide. En les emmenant au Congo avec l’utilisation de fûts vides et des centaines de Tutsi de Nyamirambo, ainsi que d’autres endroits dans Kigali et aussi en les transportant vers l’Hôtel des Mille Collines, d’autres à l’Eglise Saint Paul, en guidant les autres qui étaient recherchés par les officiers de l’Armée de Habyarimana qui les pourchassaient pour les tuer.
  1. Ma coopération avec la MINUAR, et l’échec de la MINUAR d’agir à temps
  • Après la signature des Accords d’Arusha en août 1993, je travaillais avec les Nations Unies au Rwanda, et j’étais leur principal informateur.
  • Grâce à moi, la Mission des Nations Unies au Rwanda (MINUAR) était au courant de tout ce qui était planifié par les Interahamwe et leurs leaders. Pourtant, ils n’ont pas empêché les Interahamwe de recevoir l’entraînement et les armes.
  • Pendant le génocide, les Nations Unies avaient des informations préalables de ce qui était en train d’être planifié par les Interahamwe et par l’armée de Habyarimana.
  • A l’époque où ils étaient au Rwanda, ils ont laissé des Tutsi innocents entre les mains des tueurs, tout en sachant que ces Tutsi innocents étaient sous leur protection.
  • Les Nations Unies étaient au Rwanda quand le génocide a commencé, elles ont vu le début du génocide d’avril à juillet 1994.
  • Et, tout en sachant ce que je leur avais dit avant les événements, elles ont décidé de quitter le pays et ont refusé de protéger des populations innocentes.
  • Le Colonel Isoa Ticoka, adjoint du commandant de la Mission des Nations Unies au Rwanda (MINUAR) est témoin de ce qui concerne ma contribution relativement aux informations de première main que je leur donnais depuis août 1993 jusqu’à la fin de leur séjour au Rwanda.
  • Le tribunal des Nations Unies – TPIR – ne doit pas m’utiliser comme bouc émissaire à cause de l’échec de la MINUAR de sauver la population. J’ai travaillé avec les Nations Unies en tant que leur principal informateur au Rwanda[28]. Elles savaient tout des atrocités avant qu’elles ne se produisent, et pourtant, elles ont refusé de sauver des civils innocents pourchassés par l’Armée de Habyarimana et les Interahamwe.
  • Il est à noter que ce ne sont pas tous les officiers de l’armée ni tous les politiciens qui ont participé au Génocide puisqu’ils n’ont pas été d’accord avec les actes injustes commis par l’armée de Habyarimana pendant le génocide.
  • Il y a aussi des politiciens et les soi-disant intellectuels, qui n’ont pas directement participé dans le génocide, mais qui ont failli à s’opposer publiquement aux atrocités commis pendant la période d’Avril-Juillet 1994. (Ils se considèrent maintenant comme des lâches).
  1. Récompense des Officiers de l’ancienne Armée pour avoir aidé les Tutsi
  • Pendant la période du 6 au 9 avril 1994, j’ai été mis en détention militaire par Anatole Nsengiyumva, pendant laquelle pendant les trois mois qu’a duré la guerre, ma maison a été attaquée huit fois par l’Armée de feu le Président Habyarimana pour mon audace montrée en sauvant les Tutsi pendant la période qui va d’avril à juillet 1994.
  • J’ai été arrêté et jugé devant le TPIR puis condamné pour le reste de ma vie sur base de preuves fabriquées.
  1. Je suis innocent.
  • Mon innocence peut être vérifiée en mettant en place une équipe d’enquête qui devrait vérifier le registre de ma détention pendant la période entre le 6 avril 1994 et le 9 avril 1994 au camp militaire de Gisenyi sous les ordres du terrible Anatole Nsengiyumva. Ladite enquête, je suis sûr, découvrira la vérité, que en fait, j’étais en détention militaire durant la période du 6 au 9 avril 1994, que je ne pouvais en aucune manière commettre ou participer dans la commission de crimes allégués d’avoir été commis par moi pendant ladite période du 6 au 9 avril 1994. Je souhaite que cette équipe puisse rencontrer les Tutsi qui ont été sauvés par Hassan Ngeze, en les évacuant au Congo en utilisant des fûts vides et des centaines de Tutsi évacués de Nyamirambo et d’autres endroits dans Kigali, en les transportant à l’Hôtel des Mille Collines, les autres à l’Eglise Saint Paul, guidant d’autres qui étaient recherchés par l’Armée de Habyarimana qui les pourchassait pour les tuer.
  • Je crois aussi que ladite enquête pourra montrer que ma maison a été attaquée 8 fois par la même armée durant la période d’avril à juillet 1994 pour avoir aidé les Tutsi, elle serait capable de se renseigner sur le fait que les fréquentes attaques militaires contre ma résidence durant les mois du génocide étaient ordonnées par le terrible Anatole Nsengiyumva.
  1. Les vrais coupables
  • Les politiciens qui ont accepté d’envoyer les miliciens suivre l’entraînement pour commettre les atrocités, devraient être tenus responsables du génocide rwandais.
  • Les responsables militaires, qui ont fourni des armes aux miliciens, ainsi que ces officiels du Gouvernement qui ont refusé d’arrêter les civils qui possédaient des armes sans autorisation, tous ceux-là devraient être tenus responsables.
  • Les soi-disant intellectuels, qui ont refusé de cacher ou d’héberger leurs voisins Tutsi qui étaient pourchassés par l’armée de Habyarimana travaillant avec les Interahamwe, tous ceux-là devraient être tenus responsables du génocide. Il y a aussi des politiciens et quelques soi-disant intellectuels qui n’ont pas participé directement dans le génocide, mais qui ne se sont pas opposés publiquement contre son exécution pendant la période d’avril-juillet 1994 (maintenant ils se considèrent comme des lâches).
  • Les tueurs Interahamwe, [pas la majorité des Rwandais], mais ils étaient puissants, à cause de leur alliance avec des officiers supérieurs de l’armée et une clique de politiciens puissants, qui ont planifié, mis en exécution et supervisé la tragédie rwandaise.
  • Ces petits groupes de tueurs, appuyés par l’Armée et les politiciens, qui les ont appuyés, ont réussi à effrayer et terroriser tout le monde qui n’appuyait pas leurs actes. C’est ainsi que certaines personnes sont devenues lâches parce qu’elles avaient peur des Interahamwe.
  • La grande partie de l’Histoire incorrectement enseignée aux Rwandais par nos anciens colonisateurs a également joué un grand rôle. Ceux qui ont colonisé les Rwandais ont créé des divisions entre les Rwandais en apprenant aux uns qu’ils étaient supérieurs aux autres, tout en leur disant qu’il y a un groupe de ceux qui doivent rester toujours esclaves des autres. Ils ont appris aux gens qu’un groupe ethnique a débarqué au Rwanda avant tous les autres et que ce groupe était venu des pays d’Afrique centrale, y compris le Cameroun. C’est pourquoi après, l’Armée de Habyarimana ainsi que ses alliés politiciens en avril-juillet 1994, ont abandonné les paysans mourant de choléra dans les camps des réfugiés en République Démocratique du Congo et sont allés au Cameroun, d’où ils avaient appris qu’ils étaient originaires. Certains de ces anciens dignitaires, Militaires, ministres, leaders politiques, sont arrivés au Cameroun avec des biens pillés qui appartenaient au Gouvernement rwandais, y compris des véhicules de luxe, et divers matériels pillés au Rwanda. La soi-disant élite Hutu qui est allée au Cameroun faisait partie de cette mauvaise histoire qui a enseigné aux Hutu qu’ils étaient venus du Cameroun. Le discours fait par Léon Mugesera (à Ngororero) le frère de Christophe Mfizi, peut être comprise dans le cadre de la même philosophie de ces Hutu de l’élite qui ont fui vers le Cameroun, (heureusement, il fut facile pour le TPIR de les arrêter là où ils croyaient naïvement et erronément qu’ils seraient en lieu sûr).
  1. Conclusion

En conclusion, je pense très humblement que je pourrais être acquitté par la Chambre d’Appel mais cela seul ne va pas créer un bon sentiment parmi mes concitoyens rwandais. A mon point de vue, pour prouver que je suis et que j’ai toujours été innocent, je dois éclaircir ma position en racontant la vérité réelle concernant mon rôle pendant le génocide dans ma chère Patrie où mes frères et soeurs innocents ont été tués sans pitié par l’Armée de Habyarimana. Le drame qui s’est déroulé aux yeux du monde en 1994 était vraiment épouvantable. Pour ceux d’entre nous qui étions là-bas en ce moment-là, les spectacles et les sons ont fusionné dans nos esprits jusqu’à notre mort. Je suis l’un des nombreux Rwandais qui ont été pris dans la violence.

  1. Promesse de promouvoir la réconciliation si je suis pardonné
  • Si je suis pardonné, je vais travailler à promouvoir la réconciliation dans mon Pays.
  • J’aimerais insister que je vis avec l’injustice chaque jour. En prison depuis plus de 9 ans pour des crimes que je n’ai pas commis, je suis un être humain civilisé et injustement condamné par le Tribunal. En faisant cela, le Tribunal a injustement élargi sa compétence temporelle en prenant en considération les publications de Kangura qui n’a jamais été publié pendant la période du génocide. Ce n’est pas seulement ça, le Tribunal n’a jamais mené une enquête pour vérifier le fait que j’étais en détention militaire pendant la période du 6 avril 1994 – 9 avril 1994, durant laquelle les crimes allégués sont censés avoir été commis par moi, et en plus le Tribunal s’est basé sur de la preuve fabriquée.
  • En plus de tout ceci, malheureusement, le Tribunal a échoué dans son devoir en ne donnant pas crédit à mes actes de sauver 1500 Tutsi à mes risques et périls, en me donnant une peine sévère de prison pour le reste de ma vie.
  • Au cours de mon témoignage devant le tribunal, je n’étais assisté par quelque conseil de la défense que ce soit à un moment crucial du procès et le Tribunal a refusé de me donner un conseil en qui j’avais confiance qui pouvait conduire mon procès à ce stade et m’aider à dévoiler ce que je savais en tant que journaliste d’investigation, et ceci m’a causé un préjudice et je n’ai pas pu donner les détails aux Rwandais et au monde sur ce que j’avais dans ma mémoire concernant les officiers supérieurs de l’Armée, les grands leaders politiques et les étrangers qui, d’une façon ou d’une autre, ont rendu le génocide possible.
  • Pendant mon témoignage devant le TPIR, les Juges tout en sachant que je n’étais pas un avocat, m’ont permis de conduire mon procès sans avocat ou sans être assisté par des conseils professionnels. Pour cette raison, je n’ai pas été capable de dire au Tribunal ce que les Rwandais et le monde attendaient de ma formidable mémoire de ce que je savais en tant que journaliste d’investigation.
  • Je voudrais aussi dire humblement qu’aucune section du Gouvernement ne corrigera cette injustice.
  1. Demande de prise en considération de ces autres facteurs qui suivent lors de l’examen de la présente pétition:
  • POLITIQUE D’EMPRISONNEMENT DU TPIR
  • Conformément à la directive pratique du TPIR sur la procédure de désignation de l’état dans lequel une personne condamnée doit purger sa peine de prison, il est dit que:

“Le Président du Tribunal International, sur la base des renseignements lui fournis et de toutes autres enquêtes qu’il décide de faire, désigne l’Etat où la peine sera purgée. Il sera particulièrement tenu compte de la proximité de la famille du condamné. Avant de décider sur l’affaire, le président peut consulter la Chambre qui a prononcé la peine ou le Juge qui a présidé et/ou le Greffier. Le Président peut également demander l’avis de la personne condamnée et/ou le Bureau du Procureur”.

  • Toute ma famille, Enfants, Mère, Soeurs, Frères, qui sont enregistrés comme réfugiés en Europe, ont demandé aux pays européens où ils sont enregistrés comme réfugiés de m’accepter comme prisonnier purgeant le reste de peine là-bas, pour qu’il leur soit plus facile de me rendre visite.
  • J’ai une fiancée qui a la nationalité américaine et britannique, elle est actuellement en train de discuter avec les gouvernements américain et britannique, si je peux purger le reste de ma peine dans l’un ou l’autre de ces pays, pour rendre possible les visites.
  • En tant que Président qui a été élu par les Rwandais, pour la Réconciliation entre les Rwandais, vous avec le pouvoir d’accorder le pardon à tout prisonnier rwandais n’importe quand et n’importe où il/elle peut être en train de servir sa peine durant votre mandat.
  1. Mon souhait

Excellence, vous avez les moyens et le pouvoir d’ordonner une enquête sur ce qui s’est passé concernant ma détention et mes efforts pour sauver les Tutsi. En faisant cela, j’espère que vous comprendrez que je ne demande pas pardon parce que je suis coupable, mais plutôt parce que je crois que ma condamnation s’est basée sur des considérations politiques plutôt que légales. En m’accordant le pardon, vous pouvez montrer au monde que la justice peut prévaloir sur la politique.

Je sais que vous aurez la prévoyance de bien comprendre cela puisque le Rwanda a besoin de justice, de réconciliation et de paix. La justice devant le TPIR n’est qu’une façon de ressusciter notre nation. En tant que nation, nous devons également trouver un moyen à travers lequel nous devons nous réconcilier avec le passé. J’espère que, avec votre sagesse et votre prudence, vous reconnaîtrez que les journalistes endurent la persécution partout dans le monde, et qu’il y en a toujours beaucoup qui ont peur et qui sont circonspects, toutefois, les journalistes sont là pour la société et peuvent être des intermédiaires pour le changement. Ainsi, je vous demande instamment d’examiner favorablement mon cas.

Pour les raisons susmentionnées, je crois sincèrement que j’ai droit au Pardon Présidentiel en même temps que l’Ancien Président Pasteur Bizimungu.

Votre Humble Pétitionnaire

Hassan Ngeze

UNDF – ARUSHA

(Signature)

[1] Je suis le seul survivant, mes deux autres officiers ont été assassinés par le FPR.

[2] NYIRIMANZI, alias MANZI, qui a assassiné les évêques à Kabgayi, et qui, pour le moment, a été récompensé en le nommant pour représenter le Rwanda au Kenya, où il a reçu comme mission d’assassiner les Hutu qui y ont trouvé refuge, seulement le Kenya le connaît très bien, il connaît sa méchanceté lui inculquée par Museveni, et ceci demande que les Rwandais qui vivent au Kenya (les Hutu) doivent en permanence rester conscients du fait que ce Manzi a reçu la mission de les faire assassiner, les faire expulser [du Kenya], et les empêcher de vivre en paix.

[3] Une fois par jour à cette époque, tous les détenus priaient ensemble, sauf Hassan NGEZE qui est musulman.

[4] Souligné dans le texte.

[5] Biganiro était Major, et non pas Capitaine.

[6] C’est plutôt Ngeze qui est venu nous voir au bar TAM-TAM près du Lac, car nous ne l’avions pas trouvé à Gisenyi-Information, et nous avions laissé un message. Et Ngeze n’avait pas encore écrit le premier numéro de son journal Kangura. Kangura était donc jusque-là, inconnu. Il a été fondé peu après.

[7] La lettre est en annexe, de même que la déclaration  de Omar Serushago dénonçant cette tentative de Hassan Ngeze.

[8] Les problèmes du prisonnier Hassan Ngeze soumis à l’Officier Commandant [du Centre de détention de l’ONU] et aux autorités du Tribunal.

[9] La lettre est en annexe.

[10] C’est lui-même qui le dit, je ne sais pas si c’est vrai. Toujours est-il qu’il a été arrêté plusieurs fois effectivement. Quant au nombre de fois, je ne peux pas le confirmer.

[11] Déclaration des juges de la Chambre de première instance dans le procès dit “des Médias”, au paragraphe 878 du Jugement Nahimana et consorts, du 03 décembre 2003.

[12] Quand il entre dans un bureau, Hassan Ngeze prend tout ce qui lui tombe sous la main, le subtilise, et vérifie plus tard si cela est utile.

[13] Il ne savait bien sûr pas que les camps allaient être attaqués le lendemain.

[14] Magasins Généraux du Rwanda qui se trouvaient à Gikondo.

[15] Monsieur Ephrem Setako était plutôt sous-chef.

[16] Bien sûr, comme Ngeze, DO prétend que ces militaires venaient attaquer le domicile de Ngeze.

[17] Valens Kajeguhakwa, 2001, Rwanda, De la terre de paix à la terre de sang et après ?, pp.202-204.

[18] Depuis longtemps, c’était la pratique pour la ville de Gisenyi de garder un certain nombre de tombes déjà prêtes, pour aider ceux qui venaient enterrer leurs morts. Ce n’était donc pas une pratique de circonstances.

[19] Le frère de Kabiligi Alphonse, un ancien adjudant-chef de l’armée rwandaise nommé Bayingana Pierre, avait effectivement rejoint le FPR. A ne pas confondre avec Major Peter Bayingana, officier du FPR.

[20] Jeanne Habyarimana, Mon père, cette autre partie de moi qu’on m’a arrachée, Editions Scribe, pp.198-199. Elle se réfère au livre de Jean Marie Vianney Ndagijimana mentionné ci-dessus, Editions La Pagaie, pp.65-67.

[21] C’est moi qui souligne.

[22] Je n’ai pas repris les nombreuses requêtes de Hassan Ngeze devant le TPIR, visant à se distancier des événements de Gisenyi, et les mettre sur le dos des militaires, et d’Anatole Nsengiyumva plus particulièrement. Beaucoup de documents étaient en Anglais ou en Kinyarwanda, et je les ai traduits en Français. Quelques-uns étaient en Français et je les ai repris comme tel. Les notes de bas de page sont de moi.

[23] UNDF veut dire “United Nations Detention Facilities”, ce qui veut dire en français “Centre de Détention des Nations Unies”.

[24] Les bras de Hassan Ngeze n’ont jamais été lies derrière le dos. Ceci est un autre mensonge.

[25] Sa maison n’a jamais été ni détruite, ni incendiée.

[26]  Une lettre entre frères en Islam qui demande que l’on ne se dise que la vérité. (Cette note de bas de page est de Hassan Ngeze).

[27] Il ne donne pas ses sources d’information, ni ce qui fonde sa conviction (..ce que je crois..), et pourtant il affirme que des gens ont fait ceci ou cela, et publie leurs noms.

[28] Comment a-t-il su qu’il était le principal informateur ?