Walikale:Raïa Mutomboki « La chasse aux rwandophones »

La Monusco a évacué vers Goma, mercredi 18 juillet à Walikale-centre (Nord-Kivu), quarante huit personnes d’expression rwandaise qui disent être pourchassées par les miliciens Raïa Mutomboki. Parmi ces personnes, figurent treize épouses des militaires ainsi que des enfants.

Certaines de ces personnes souhaitent regagner leurs villages d’origine, notamment Masisi ou Rutshuru et les épouses militaires, elles, veulent être amenées au camp Katindo de Goma.

L’une de ces femmes a exprimé son inquiétude dans un entretien à Radio Okapi:

«Nous fuyons les Raïa Mutomboki, qui sont en train d’égorger les gens et nous. Nous sommes allés à la Monusco, qui nous a amenés ici. Ces Maï-Maï s’attaquent à nous parce que nous sommes des Rwandophones (hutus). Chez moi, c’est à Nyanzale et je viens de passer une année et demie à Walikale.»

«Moi, j’ai fui, j’ai peur des Raïa Mutomboki, qui tuent les gens à Walikale. J’ai fais des enfants avec un Rwandais. Alors, j’ai peur que mon enfant soit tué. Mais je suis Nande, chez moi c’est à Kanyabayonga», a témoigné une autre femme.

Deux autres personnes que la Monusco a ramenées au chef-lieu du Nord-Kivu ont également confirmé ces atrocités, disant avoir vu de leurs yeux les miliciens égorger des gens.

Des sources sur place à Walikale ont affirmé qu’un membre de la communauté hutu avait été enlevé par les Raïa Mutomboki à l’Hôpital général de référence où il était garde malade. La police locale a avoué ne pas savoir la destination exacte de l’infortuné.

En marge des combats qui opposent les rebelles du M23 et l’armée régulière à l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), des groupes d’auto-défense congolais se livrent à une « chasse aux rwandophones » à Walikale. Cette situation inquiétante, pourrait servir de prétexte à une intervention de l’armée rwandaise en territoire congolais.

La situation sécuritaire se complexifie au Nord-Kivu, à l’Est de la République démocratique du Congo (RDC). Un premier front est apparu il y a trois mois, entre la rébellion du M23, soutenue par le Rwanda, et l’armée congolaise (FARDC) à Bunagana et sur l’axe entre les villes de Rutshuru et Goma. Les rebelles contrôlent plusieurs localités et menacent désormais Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu. Au coeur du conflit : la place et la sécurité de la communauté rwandophone dans les Kivus. Le M23 se veut le porte-étendard de la communauté tutsie de la région, en proie aux attaques des FDLR, un groupe armé composé de hutus rwandais.

Depuis quelques jours, un nouveau front occupe l’armée congolaise, 150 km plus à l’Ouest, dans la ville de Walikale. Mardi 17 juillet, un groupe d’auto-défense Maï-Maï, baptisé Raia Mutomboki a pris le contrôle de la ville. Venus du Sud-Kivu, ce mouvement fait actuellement route vers le Nord, pour se battre contre le M23 dans son fief de Bunagana. Dans cette « logique« , les Raia Mutomboki se sont livrés à une véritable « chasse aux rwandaphones« , tutsis et hutus confondus, dans les rues de Walikale. La BBC et Radio Okapi, qui ont pu joindre des témoins sur place, racontent des scènes de paniques et confirment les exactions des miliciens Maï-Maï. La BBC, explique que l’ONG Médecins Sans Frontières n’est plus capable de venir en aide à la population et envisage de quitter Walikale si la situation se dégradait. Selon Radio Okapi, 48 « hutus rwandais« , victimes de Raia Mutomboki, ont été évacués par les casques bleus de la Monusco, vers la ville de Goma dès mercredi. Les témoins décrivent « avoir vu de leurs yeux les miliciens égorger des gens« .

L’entrée de ce groupe Maï-Maï dans le conflit inquiète les observateurs internationaux. « La chasse aux rwandophones » dans la région risque de donner le signal de départ à un « nettoyage ethnique » en règle de tout se qui ressemble de près ou de loin à un « rwandais« , sachant que depuis des dizaines d’années, les Kivus ont toujours été une zone d’échanges intenses entre le Rwanda et le Congo. Certains spécialistes de la région craignent que ces massacres donnent également «une vraie excuse au Rwandais pour entrer en RDC » et venir défendre les rwandaphones des Kivus.

R.O