La Fermeture des Églises au Rwanda : Entre Contrôle Étatique et Critique Sociale

Paul Kagame

Le 14 août 2024, lors de la cérémonie de prestation de serment des députés, le Président de la République du Rwanda, Paul Kagame, a abordé la question de la fermeture de près de 8000 églises dans le pays. Ces fermetures ont été justifiées par le gouvernement en raison du non-respect des normes réglementaires par ces églises. Cependant, au-delà des considérations légales, le Président Kagame a sévèrement critiqué les motivations des fondateurs de certaines de ces églises, les accusant d’exploiter la foi des Rwandais à des fins lucratives.

Lors de son discours, le Président Kagame a remis en question l’origine et la prolifération rapide des églises au Rwanda, appelant les citoyens et les députés à réfléchir sur la manière dont ces institutions religieuses sont apparues. Il a exprimé son inquiétude face à l’influence grandissante de certaines églises sur la population, insinuant que ces dernières détournent les énergies qui devraient être consacrées au développement économique et à la résolution des problèmes quotidiens des Rwandais.

Le Président Kagame n’a pas mâché ses mots en qualifiant certains pasteurs de « fous » qui manipulent leurs fidèles en prétendant avoir des révélations divines. Il a souligné l’absurdité de la situation où des individus sans scrupules utilisent la religion pour s’enrichir aux dépens des croyants, créant ainsi un chaos spirituel et social dans le pays. Le Président a déclaré qu’il ne tolérerait pas cette situation et qu’il était déterminé à mettre fin à ces abus.

Le Président Kagame a également évoqué des exemples d’autres pays africains, comme le Kenya, où des pratiques religieuses extrêmes ont conduit à des tragédies, en référence à des cas où des pasteurs ont interdit à leurs fidèles de se nourrir, entraînant des décès. Il a averti que le Rwanda ne devait pas suivre ce chemin et que les églises qui ne respecteraient pas les lois seraient fermées.

Cependant, cette situation soulève des questions sur la responsabilité du gouvernement rwandais dans la prolifération des églises. En effet, après le génocide de 1994, les services de renseignement rwandais ont favorisé la création de nombreuses églises émergentes dans le cadre d’une stratégie visant à affaiblir les grandes institutions religieuses, notamment l’Église catholique, fortement critiquée pour son rôle durant le génocide. Cette prolifération a également servi de moyen pour la FPR de contrôler la population par le biais des leaders religieux et de détourner l’attention des problèmes réels du pays.

La critique du Président Kagame envers les églises est donc à la fois une dénonciation de pratiques religieuses douteuses et un aveu implicite des erreurs commises par son propre gouvernement dans la gestion de la vie religieuse au Rwanda. La question reste de savoir si cette répression des églises aboutira à un réel assainissement du paysage religieux rwandais ou s’il s’agit simplement d’un autre moyen de renforcer le contrôle étatique sur la société.