Les combats à Goma: les obus sont tombés au Rwanda voisin

Les affrontements se sont poursuivis lundi entre les rebelles du M23 et l’armée congolaise aux portes de Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo, tandis que la tension montait avec le Rwanda voisin qui a accusé la RDC de l’avoir « délibérément » bombardé, ce que Kinshasa a aussitôt démenti.

La rébellion congolaise du Mouvement du 23 mars (M23), qui a lancé une offensive depuis jeudi et débordé l’armée congolaise, avait stoppé son avance dimanche à quelques kilomètres du centre de Goma, apparemment sans chercher à prendre la ville.

Lundi les mutins ont lancé un ultimatum au gouvernement congolais, lui demandant d’ici 24 heures de démilitariser la ville et d’ouvrir des négociations. Devant le refus de Kinshasa, la rébellion a repris dans l’après-midi ses tirs d’artillerie.

Selon une source hospitalière, une vingtaine de blessés auraient été admis à l’hôpital Heal Africa, dont l’un est décédé. Aucun autre bilan n’était disponible.

L’ONU a annoncé l’évacuation pour mardi de ses employés « non essentiels », les Casques bleus restant en revanche dans Goma pour assurer leur mission de protection des civils.

Inquiets de voir des militaires et des responsables administratifs fuir la ville durant le week-end, les civils qui en avaient les moyens sont partis vers le sud ou vers la ville rwandaise de Gisenyi, située à moins d’un kilomètre à vol d’oiseau de Goma.

« Il ne se passe rien à Goma, on ne sait rien, mais comme on a vu tout le monde partir, on s’est dit qu’on allait faire pareil », a raconté à l’AFP l’épouse d’un commerçant de Goma.

Le flot des Congolais fuyant vers Gisenyi est resté toutefois limité.

Capitale de la région du Nord-Kivu, Goma compte environ 300.000 habitants, plus de nombreux déplacés. La ville a déjà occupée à deux reprises en 1996 et 1998 par des rebellions.

Le M23 a été créé début mai par des militaires, qui après avoir participé à une précédente rébellion, ont intégré l’armée en 2009, à la suite d’un accord de paix. Ils se sont mutinés en avril, arguant que Kinshasa n’avait pas respecté ses engagements.

Ils réclament notamment le maintien de tous les officiers dans leurs grades et refusent « le brassage » (affectations dans d’autres unités et d’autres régions) que veut leur imposer Kinshasa, ce qui les éloignerait de leur zone d’influence dans l’est.

Mais la région composée des provinces des Nord et Sud-Kivu est aussi le théâtre de conflits quasiment ininterrompus depuis une vingtaine d’années en raison de ses richesses en ressources minières (or, coltan, cassitérite) et agricoles, que se disputent le gouvernement congolais, divers mouvements rebelles et les pays voisins de la RDC, l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi.

Kinshasa refuse catégoriquement de négocier avec le M23 qu’il qualifie de « forces fictives mises en place par le Rwanda pour dissimuler ses activités criminelles en RDC », selon le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende.
Lundi après-midi les rebelles ont tiré plusieurs obus de mortier vers l’aéroport tenu par la garde républicaine congolaise et le camp militaire de Katindo, selon une source militaire occidentale.

La tension est aussi montée avec le Rwanda, le puissant voisin, qui a accusé l’armée congolaise de l’avoir « délibérément » bombardé avec un tank et des mortiers.

L’armée congolaise a réfuté avoir ordonné de tels tirs, sans exclure la possibilité d’un tir accidentel, annonçant une enquête.

Sur le plan diplomatique, la communauté internationale a vivement réagi à la reprise des combats.

La France devait présenter lundi une résolution au Conseil de sécurité de l’ONU demandant un renforcement des sanctions internationales contre les rebelles congolais. Cette résolution évoquera l’implication éventuelle d’autres pays dans le conflit, a annoncé l’ambassadeur de France à l’ONU, Gérard Araud.

L’ONU, comme la RDC, accuse le Rwanda de soutenir le M23, ce que Kigali a toujours démenti.

Le Conseil de sécurité avait déjà demandé samedi l’interruption « immédiate » de tout soutien extérieur et de toute fourniture d’équipement au M23. Dimanche, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, avait assuré que les 6.700 Casques bleus basés dans le Nord-Kivu allaient y rester.

L’Union européenne, l’Union africaine et les Etats-Unis ont également condamné lundi l’offensive rebelle.

AFP