Par Erasme Rugemintwaza
La triste nouvelle est tombée hier dans la matinée, la jeunesse mélomane rwandaise est plus qu’attristée en témoigne la toile. Mais cette mort en prison, ressuscite le spectre des âmes « mortes » en prisons rwandaises!
De son vrai nom, Joshua Tuyishime, JAY POLLY, est un rappeur de 33 ans qui s’est imposé sans trop de sueurs sur la scène de la musique rwandaise voici déjà plus d’une quinzaine d’années. C’est la génération de Tom Close, de Rafiki, de Butera Knowless, de King James, de Dream Boyz, et j’en passe. Mais cette jeunesse talentueuse, qui va vraiment révolutionner la musique rwandaise vers des airs à la mode comme Hip Hop, R&B, AfroBeat,… ne fut pas à l’abri du Malin rwandais : l’ethnisme. On se souviendra toujours du premier trophée de Primus Guma Guma Super Star(PGGSS), une campagne publicitaire de la Brasserie et Limonaderie du Rwanda (Bralirwa), pour aussi promouvoir la musique rwandaise, qui fut tendancieusement attribué à Tom Close Tutsi, alors que c’est Jay Polly, Hutu qui le méritait à bien d’égards. Pour clore ce débat frustrant qui risquait de ressusciter les vieux démons ethniques, le second trophée, lui fut attribué.
Et Jay Polly est mort presqu’en prison car il a passé TRENTE minutes seulement dans l’Hôpital de Muhima où il a été admis presque mort. C’est donc en détention qu’il a rendu son dernier soupir. Un tout petit rappel est que Jay Polly, était en détention depuis avril 2021, après avoir été arrêté durant une fête, dans la période où les fêtes sont interdites suite aux mesures barrières de prévention de coronavirus ; on dit que dans ladite fête circulaient de produits stupéfiants, mais sa sœur a démenti en disant que c’est un piège qu’on lui a tendu. Soulignons, tout simplement que l’industrie de la musique est aussi, la maison des drogues! Et ceci est une contamination séculaire mais plus précisément une influence américaine actuelle sur le monde! Pour être une vedette de la musique, il faut incarner une idole américaine les Lill Wayne, 50 Cent, les Kanye West et même le grand Jay-Z, Robert Kelly ont toujours des cigales, des liqueurs dans leurs chansons. Cette idolâtrie est un opium de la jeunesse.
La communication officielle émanant du Service Correctionnel Rwandais (RCS) dit que Jay Polly a consommé des boissons à base de l’alcool (utilisé normalement par les détenus après le rasage), en mélange avec de l’eau et du sucre.
Mais la mort de Jay Polly ressuscite le spectre des disparitions en détention dans les prisons rwandaises. On se rappelle la mort du chanteur du gospel Kizito Mihigo, trouvé pendu dans sa cellule. Sa mort a été attribuée au suicide. Elle ressuscite aussi de très nombreuses morts (plusieurs centaines) depuis décembre 2020 dans la prison surpeuplée de Muhanga où sont écroués plus de 7.000 prisonniers. Cette mortalité effrayante selon Médecins Sans Frontières (MSF), est la conséquence, non seulement des maladies dues à l’exiguïté et aux intempéries des cellules de détention, mais aussi des blessures infectées, et aux coups…
Mais aussi il y a lieu de rappeler que l’ancien directeur de bureau de Kagame, Kalisa Mupende est mort dans la prison militaire après avoir été condamné à 10 ans de prison pour corruption. On ne peut pas oublier le médecin personnel de Kagame, Emmanuel Gasakure, qui été abattu par la police alors qu’il était en détention. Et beaucoup de personnes abattues dans les cachots, avec le même allégation de vouloir s’évader alors qu’elles sont menottées. L’on peut être tenté de dire que mourir en détention, chez au Rwanda est un fait devenu règle général, en sortit indemne est au contraire l’exception!
Ainsi les prisons rwandaises deviennent des mouroirs. Avant d’y aller il faut faire un testament. Le régime de Kagme a intérêt à revoir les conditions de détention et les droits humains en général, sinon un jour « Une goutte suffira pour déborder le vase. »
Et Jay Polly qui défia toutes les tares ethniques de la société rwandais pour s’imposer comme un vrai Rwandais, n’est plus. Sur tweeter on lit « Notre légende est disparu », « Tu nous as donné des bonnes vibrations, à travers ta musique », « En soi, Jay Polly est pour moi 2Pac du Rwanda. On dira toujours que c’est lui qui a semé l’amour du Hip Hop dans la jeunesse rwandaise ». Son amie Kessy Kayonga n’en croit pas ses oreilles, car elle perd un ami dont l’image est celle d’un homme toujours content, altruiste, selon ses confidences. Moi j’y crois, car la mort est naturelle, mais j’ajoute: « RIP, JP!»