Vendredi de gratitude: Gerald Niyomugabo, le Sauveur du Rwanda

Gérard Niyomugabo

Par Ariane Mukundente

Il y a trois jours, le 30 Août, c’était la journée internationale des victimes de disparition forcée. Je savais tout de suite qui j’allais dédier le Vendredi de gratitude d’aujourd’hui : Gérald Niyomugabo. J’ai voulu le faire depuis longtemps, mais à chaque fois je ne trouvais pas le moment approprié.

S’il y a une personne que j’aurais aimé rencontrer dans ma vie, c’est bien, ce jeune homme, Gérald Niyomugabo. J’ai entendu parler de lui pour la première fois après la mort de Kizito en lisant le livre de ce dernier. Je ne me rappelle pas d’avoir entendu son nom avant. Si c’est le cas après l’arrestation de Kizito avril 2014, son nom ne me disait rien pour le retenir et m’en rappeler. Quand j’ai eu connaissance de l’homme dans le livre de Kizito, j’ai couru fouiller sur internet pour en savoir plus sur lui. Je trouve un article d’Igihe qui souligne sa disparition le 4 Avril 2014 et d’autres quelques années après qui relatent en détail de sa kidnapping et sa disparition forcée.

Pourquoi ce jeune homme m’a intrigué ? Parce que j’ai découvert en lui l’intelligence à l’état pur et un homme spirituel au vrai sens du terme dont le Rwanda post-génocide avait besoin. Je le découvre comme il faut en dévorant l’émission de Kizito ‘’umusanzu w’umuhanzi’’ (https://youtu.be/OvZkL8-XgL0). Je vous recommande énormément d’écouter cette émission. C’est un bijou. Une émission que chacun rwandais devrait écouter pour apprendre la beauté de notre culture, le respect de l’autre, les valeurs humaines…… Après cette émission de Kizito et Niyomugabo, vous serez transformés. Depuis lors, j’ai voulu connaître Niyomugabo à travers ses livres. Je les ai cherchés partout sans succès. À n’importe quel prix, j’aimerais être en possession de ses écrits. Quelqu’un, quelque part dans ce monde peut-il m’aider à trouver ne fût-ce qu’un de ses livres ?

D’où vient cet homme exceptionnel ? Dans une semaine, Gérard Niyomugabo aurait soufflé son 41ième bougie, car il est née le 10 Septembre 1981 à Nyanza dans l’ancienne préfecture de Butare. Il fait son école primaire dans son village à l’école primaire de Rwanamiza et continue ses études secondaires au Groupe scolaire de Butare. Pour ces études post-secondaires, la seule information que j’ai obtenu ce qu’il a une maîtrise en littérature africaine et un doctorat en gestion. Mais je n’ai trouvé nulle part où il a fait ces études. Il était chercheur dans plusieurs domaines, mais surtout sur la culture, l’histoire et la religion.

Il a un CV bien garni. Il a enseigné à l’Université National du Rwanda et participé dans plusieurs émissions radiophoniques au Rwanda. La plupart des gens doivent se rappeler du contenu de ces émissions tels que Benimana, Ityazo et Kubaho Niwe sur Radio Amazing Grace avec Ntamuhanga Cassien. Mais aussi les émissions sur d’autres radios comme Radio One, Isango Star, sans oublier l’émission ‘’Usine des rwandais’’ sur Contact FM. Évidemment, l’émission ‘’umusanzu w’umuhanzi’’, où il avait des débats animés avec son ami Kizito Mihigo. Dans toutes ces émissions le jeune philosophe prêchait pour le retour aux valeurs traditionnelles rwandaises pour panser les plaies du Rwanda. Il était devenu si populaire que ces émissions attiraient les rwandais de tous les horizons pour de discussions dans un hôtel à Kigali où il donnait des conférences.

Patriotique dans l’âme, avec Cassien Ntamuhanga et d’autres jeunes, ils fondèrent le mouvement ‘’Abaryankuna’’, un mouvement qui trouve sa source dans le Rwanda monarchique quand les temps étaient durs et que le Rwanda était au bord du gouffre à cause des rivalités pour le pouvoir. Ce mouvement du Rwanda d’après 1994 avait comme objectif d’éradiquer la rancœur entre les rwandais pour bâtir un Rwanda inclusif qui aboutira à une paix durable et solide une fois pour toute.

Il a écrit plusieurs livres dont les plus populaires sont, ‘’Inzira y’abanyarwanda kuva bahiga kugera bahigwa’’ où il raconte l’histoire du Rwanda 1200 ans avant Jèsus-Christ jusqu’à en 1994 de notre ère. Ce livre n’a jamais vu le jour, car sa sortie était prévue pour Avril 2014. Il fut kidnappé avant sa publication. Il paraît que toute sa philosophie se trouve dans ce livre non encore publié. Il y a aussi ‘’Umusongero ku ijambo ry’Imana y’i Rwanda’’ sorti en 2013. Dans ce livre, il raconte comment les colons ont détruit la culture rwandaise. Il prêche à ce qu’Imana du Rwanda soit connu des tous par la phrase ‘’ Mana y’i Rwanda ingoma yawe yogere hose’’ qui se trouve sur le bas de la couverture de tous ces livres. Il a écrit ‘’Gatebe gatoki ya Gahutu na Gatutsi mu gihugu cya Kanyarwanda’’ où il relate les ravages des ethnies Hutu-Tutsi dans la société rwandaise. Le livre ‘’Nta Yezu nta Ruganzu’’ sorti février 2014, montrant la comparaison entre le roi du Rwanda Ruganzu II Ndoli et Jèsus, d’une part et entre la Reine-mère Nyirarumanga et la Sainte-vierge Marie, d’autre part.

La fin de ce génie du Rwanda est tragique comme tous les hommes exceptionnels de ce pays, d’ailleurs. Il disparut sur la surface de la terre le 4 Avril 2014 dans la même période que ses amis Kizito Mihigo et Cassien Ntamuhanga. Pour tous les trois la Police rwandaise dit qu’elle ne sait pas où ils se trouvent et que les recherches sont en court. Coup de théâtre ! qQuelques jours plus tard, elle fait balader Kizito Mihigo et Ntamuhanga devant les médias en avouant que c’est elle qui les avait arrêtés. Pourquoi avoir menti, alors ? Cherchez l’erreur.

Malheureusement pour Niyomugabo personne ne l’a revu depuis le 4 Avril 2014. Il quitta ce monde à l’âge de 33 ans comme Jèsus de Nazareth qu’il aimait se moquer dans ses émissions, au grand dam de Kizito Mihigo. Le Rwanda devient orphelin plus que jamais sans le savoir. Le Rwanda perdait son sauveur. Oui, je dis bien le sauveur, car le Rwanda post-génocide avait besoin plus que tout de la philosophie de ce jeune homme. Je ne serais même être en mesure de dire que la petite graine d’unité qu’il aurait semée, peut-être, est tombée quelque part pour grandir plus tard. Car les divisions ethniques et la haine font des ravages à l’intérieur du pays comme à l’extérieur.

Mais les paroles des prophètes ne tombent jamais dans le vide. J’ose espérer que celles de Niyomugabo et de Mihigo ne disparaîtront pas avec eux. Le Rwanda actuel a besoin plus jamais de leur philosophie. C’est une question de vie ou de mort pour éradiquer la haine entre rwandais et les guerres cycliques qui ont caractérisé le Rwanda jusqu’à maintenant. C’est pour cela que c’est à grand cri que je vous demande de rendre un hommage vibrant à ce fils du pays, Niyomugabo Gérald. Une belle chose ne meurt pas avant d’avoir purifié quelque chose.

Gerald Niyomugabo, niyubahwe !