Par Sylvestre Nsengiyumva
« Le fait d’avoir arrêté le génocide ne vous donne pas le droit de terroriser et de tuer ceux qui en ont été rescapés. C’est insensé de tout le temps célébrer les morts, tout en tuant les vivants… » Ainsi parlait, hier encore, Diane Rwigara, jeune fille universitaire tutsie.
« Vous avez déclenché intentionnellement le génocide tutsi en descendant l’avion du Président hutu. Puis vous avez massacré des innocents hutu qui nous avaient cachés, avant de vous en prendre aujourd’hui à nous… » Ainsi parlait, l’année dernière, Callixte Nsabimana, jeune homme universitaire tutsi. Plus encore que les quelques balles tirées aux abords de Nyungwe et (bêtement) revendiquées par ses soins depuis une chambre close des bas-fonds de Moroni, voilà d’ailleurs la phrase qui avait poussé Kigali à mettre sur sa tête 12 millions de dollars, mort ou vif ! Car l’enjeu est de taille…
Seulement voilà, à ce rythme, les caisses risquent de se vider bientôt puisque, comme on le voit aujourd’hui et comme on l’a vu hier et avant-hier, le pauvre « Sankara » n’est pas le seul tutsi à vibrer sur cette longueur d’onde. Y a même comme une hémorragie, et tout porte à croire que le phénomène ira crescendo ! Des tutsi de tous horizons sont fermement engagés dans ce « révisionnisme » d’un genre inédit, et pas des moindres : intellectuels de haut vol, médecins, journalistes ayant pignon su rue, professeurs d’universités, anciens haut- gradés, grands hommes d’affaires, religieux,…
Tous « questionnent » ce génocide, chacun à sa manière: y a ceux qui en attribuent le déclenchement, conscient et cynique, à Paul Kagame et son mouvement politique et armé, ceux qui dénoncent sa concomitance avec un autre, celui des hutu, entamé bien avant et perpétré par l’armée tutsie, d’autres qui dénoncent la gestion m’enfoutiste de l’après génocide, etc. Ce phénomène est tellement extraordinaire qu’il appelle cette question inévitable : comment diable en sommes-nous arrivés là?!
Au commencement était une erreur fatale de calcul politique, quand des stratèges mal inspirés ont décidé l’instrumentalisation outrancière de ce drame humain, jusqu’à faire du génocide le mythe fondateur du nouveau régime. Comme il fallait s’y attendre, cette machine implacable à « broyer du hutu » allait se révéler, à terme, le véritable tendon d’Achille sur lequel toute personne en rupture avec le FPR- hutu, tutsi ou même étranger- se doit tout naturellement de cibler!
L’autre énormité qu’on peut relever, parmi tant d’autres, c’est d’avoir fait preuve d’une méconnaissance inouïe de la société rwandaise d’après 1959. Dans ce Rwanda en effet, qui est tout sauf un ramassis de tribus, et « hutsisé » à outrance (biologiquement et sociologiquement), comment imaginer que tu peux globaliser les Hutu sans faire souffrir les Tutsi ?! Comment « se venger » sur un « juste » hutu et rêver faire le bonheur de ses protégés tutsis qu’il vient de sauver au risque de sa propre vie et celle de sa famille ? Comment tuer ou faire souffrir gratuitement un homme hutu innocent, et penser rassurer ainsi sa femme tutsie et sa famille ?! Comment parquer deux millions de hutu dans des prisons-mourroirs, et espérer que leurs « partenaires » tutsis de tous bords se tueront à la tâche, le cœur léger, pour leur apporter tous les jours à manger?!
La liste serait longue de ces « conneries » fatales qui nous conduisent là où nous en sommes, et qui nous rappellent étrangement les Interahamwe qui, dans leur délire génocidaire, avaient fini par massacrer plus de Hutu et de Hutsi, que de Tutsi! Et maintenant alors? Maintenant, avec certainement beaucoup d’autres, je m’interroge: qu’en serait-il advenu si, après guerre, des personnalités juives de premier plan avaient défié l’Agence Juive Mondiale sur la question fondamentale de la gestion de la mémoire de la Shoah? Ou si Aznavour, Manoukian et bien d’autres, avaient « questionné » le génocide arménien?!
Avant de me rendre compte que la réponse, effrayante, se trouve dans la question: l’extinction probable, à moyen ou long terme, de la mémoire ! Ne voit-on pas, d’ailleurs, déjà venir? Dans des pays où les Tutsi sont libres, c’est à dire à l’étranger, les commémorations ont commencé à tourner au pathétique. Ainsi par exemple en avril dernier, j’assistais d’une terrasse de café à un de ces rassemblements, auxquels bien évidemment même les Hutsi sont regardés de travers (encore une connerie)! La foule était tellement éparse que le pauvre reporter photographe de Igihe.com en était réduit à se contorsionner, tel un gymnaste de haut niveau, pour essayer des angles de vues improbables de nature à produire des clichés donnant l’illusion du nombre! Ça promet d’ailleurs encore du sport l’année prochaine puisque, après ce « cirque », l’un des participants me rejoignit, pour me confier: on ne m’y reprendra plus, c’est ma dernière fois ! Avant d’ajouter : et je suis loin d’être le seul…
Sylvestre Nsengiyumva,
Vitre article a de la substance. Mais il me semble que les Rwandais honnêtes reconnaissent que Kagame n’a pas arrêté les massacres des Batutsi qualifiés de génocide. En effet, c’est un fait établi qu’il a systématiquement rejeté les demandes des autorités militaires rwandaises dont l’objet était de stopper les opérations militaires contre les FAR afin de leur permettre de mettre fin aux massacres contre les Tutsi. Toute personne honnête comprend parfaitement qu’il était impossible pour ces autorités des FAR de mener à la fois deux combats à savoir 1/ se battre contre des milliers de soldats du FPR appuyé par les soldats ougandais, tanzaniens et burundais et 2/ empêcher et mettre fin aux massacres des Tutsi. Alors que des milliers de Batutsi, femmes, enfants et hommes de tous âges et conditions étaient massacrés, Nonobstance l’insistance du Colonel Bagosora, Général Gatinzi alors chef d’Etat-major à ‘intérim, Général Ndindiliyimana et Généra Bizimungu d’une part et du Général Dallaire, commandant de la MINUAR d’autre part auprès de Kagame au bénéfice des ces premiers, pour Kagame, des milliers de cadavres de Batutsi étaient point secondaire. Dans son livre, « J’ai serré la main du diable », Général Dallaire précise le nombre de fois il est allé à Mulindi seul et/ou accompagné par les autorités militaires rwandais pour implorer Kagame en vain afin qu’il accepte permettre aux à ces dernière de mettre hors-jeu les auteurs des massacres des Batutsi. La réponse de Kagame fut cynique, cinglante et incompréhensible pour tout homme pourvu d’humanité élémentaire. Alors que c’est bien lui-même qui a donné l’attaque de la Garde présidentiel d’une part et l’attaque généralisée dans la capitale d’autre part, Kagame a exigé que Général Gatsinzi puis Général Bizimungu désarment totalement dela Garde présidentielle et de tous les soldats des FAR. Il a demandé l’impossible en connaissance de cause. Il a même tenté de prendre en otage les officiers des FAR accompagnés du Général Dallaire pour l’implorer afin qu’il accède favorablement à leur demande. De même il a tenté de tuer Bagosora et autres accompagnés du Général Dallaire alors qu’ils étaient venus à Mundi pour le même but : après le passage des véhicules en direction de Mulindi, sur ordre de Kagame, ses soldats ont posé des mines sur la route afin empruntée au retour par les intéressés. C’est un garde du corps du Général Dallaire qui les a vues avant que l’irréparable ne soit commis. Dans son livre ci-dessus indiqué, ce dernier expose en détail ce qui s’est exactement passé.
Au regard des faits détaillés dans le livre du Général Dallaire, pourtant ami et conseiller officieux de Kagame, celui-ci n’a arrêté n’a sauvé aucun Tutsi et subséquemment, il n’a jamais arrêté les massacres des Batutsi qualifiés de génocide. Toute affirmation contraire constitue une contre-vérité.
Kagame avait des milliers de soldats à Kigali à l’époque des faits. Ils étaient lourdement armés et étaient opérationnels pour intervenir utilement au profit des Batutsi. Pourquoi n’a-t-il pas ordonné à ses milliers de soldats de mettre hors-jeu les auteurs des massacres des Batutsi et qui, au surplus, étaient moins armés qu’eux ? Pourquoi n’a-t-il pas ordonné à ses milliers de soldats qui étaient pourtant à quelques kilomètre des Bisesero d’intervenir pour neutraliser les auteurs des massacres des Batutsi de Bisesero évoqués dans les accusations grotesques contre les soldats français ?