La Liberté de Conscience et de Religion en Danger au Rwanda

Le 30 août 2024, à Paris, l’Observatoire des Droits de l’Homme au Rwanda (ODHR), sous la présidence de Laurent Munyandilikirwa, a publié une déclaration alarmante concernant la situation des libertés religieuses au Rwanda. Le document met en lumière une série de mesures drastiques prises par le gouvernement rwandais sous la direction du Président Paul Kagame, visant à restreindre la pratique de la foi dans tout le pays.

Depuis le 28 juillet 2024, de nombreux lieux de culte ont été fermés, privant ainsi des milliers de fidèles de la possibilité de pratiquer leur religion. Cette décision, justifiée par le gouvernement au nom du respect des normes légales, est perçue par l’ODHR comme une atteinte directe à la liberté de conscience et de religion, pourtant garanties par la constitution rwandaise et les instruments internationaux des droits de l’homme ratifiés par le Rwanda.

Selon les responsables du Rwanda Governance Board (RGB), ces fermetures sont motivées par le non-respect des conditions légales régissant les édifices religieux. Les lois en question, notamment la loi N°72/2018 du 31 août 2018 et le règlement N°001 du 8 mars 2019, imposent des exigences strictes, telles que l’obtention d’un agrément et la possession d’une personnalité juridique, des normes architecturales spécifiques, ainsi que des qualifications académiques pour les leaders religieux. Cependant, l’ODHR et d’autres observateurs estiment que ces mesures sont excessives et servent à restreindre délibérément l’expression religieuse dans le pays.

Lors d’un récent débat télévisé sur la chaîne RBA1, le ministre de l’Administration locale a défendu ces actions, invoquant une prolifération « inquiétante » des confessions religieuses, des pratiques religieuses « désorganisées » et des enseignements « trompeurs ». Il a également souligné l’existence de fraudes financières au sein de certaines de ces organisations. En conséquence, 336 lieux de culte ont été fermés et 43 confessions religieuses suspendues pour non-conformité aux exigences légales.

Cette situation rappelle les événements de 2018 et 2019, lorsque plus de 15 000 lieux de culte avaient été fermés sous des prétextes similaires. À l’époque, la répression avait été suivie d’arrestations de leaders religieux qui avaient osé dénoncer ces fermetures. Aujourd’hui encore, les voix dissidentes sont réduites au silence par l’intimidation et la menace.

Le silence de l’Église catholique au Rwanda face à ces fermetures est particulièrement frappant. Alors que de nombreux lieux de culte catholiques ont été fermés depuis juillet 2024, la hiérarchie ecclésiastique, autrefois vocale, reste aujourd’hui muette. Cette inaction est interprétée par certains comme le résultat de la proximité de plusieurs évêques avec le parti au pouvoir, le Front Patriotique Rwandais (FPR). Ce silence contraste fortement avec les événements de 1994, où l’Église catholique avait été sévèrement touchée par le génocide, perdant de nombreux membres du clergé.

L’ODHR s’inquiète de cette nouvelle vague de répression et appelle les autorités rwandaises à respecter les droits fondamentaux des citoyens, notamment leur droit à la liberté de conscience et de religion. Les restrictions actuelles sont perçues non seulement comme une violation des droits humains, mais aussi comme un signe de malaise croissant au sein du régime rwandais. Le Président Kagame semble déterminé à renforcer son contrôle sur la société civile, y compris les communautés religieuses, ce qui pourrait avoir des conséquences graves pour la paix sociale au Rwanda.

Le chemin à suivre pour le Rwanda est incertain, mais ce qui est clair, c’est que les droits fondamentaux des citoyens, en particulier la liberté de conscience et de religion, doivent être protégés et respectés. Le silence des autorités religieuses face à ces violations ne fait qu’aggraver la situation.