Le problème de la réparation des préjudices subis par l’accusé acquitté après la détention provisoire arbitraire au Rwanda

Par The Rwandan Lawyer

Introduction

Le droit positif rwandais ainsi que les normes internationales garantissent le principe de la liberté de la personne humaine et interdisent toute violation de ce principe.La détention provisoire dite encore la détention préventive dans certaines législations est l’incarcération que subit l’auteur présumé d’une infraction aux yeux de la loi pénale avant qu’il soit statue sur l’infraction. Pour être plus explicite Jean Velu la définit comme «la détention d’une personne arrêtée ou incarcérée en raison d’une infraction commise à la loi pénale et qui se trouve détenue, soit dans les locaux de la police, soit dans une maison d’arrêt, alors qu’elle n’a pas encore été jugée.

Alors la détention provisoire est l’une des violations de liberté de la personne humaine qui consiste à arrêter la personne suspectée d’avoir commis une infraction pénale et la placer entre la main de l’autorité habilité à la mise en mouvement de la poursuite pénale envie d’assurer la bonne marche du dossier ainsi que d’éviter toute atteinte à l’ordre social

L’article 29 de la constitution de la république du Rwanda consacre le principe de la présomption d’innocence pour la personne poursuivie depuis le début de la procédure jusqu’au moment où l’affaire ait la force de la chose jugée.

La détention provisoire joue un rôle primordial, que ça soit dans la phase préliminaire ou dans la phase préparatoire car elle permet au magistrat d`instruction de mener une enquête sur l’affaire débattue devant eux sans crainte de la fuite de l’inculpé ou du trouble de la société. Cette mesure n’a pas pour objet de punir ou de sanctionner le prévenu qui, à ce stade de la procédure, est seulement soupçonné d’avoir commis un délit, mais elle cherche plutôt à prévenir quelque chose comme la fuite ou les répétions d’un délit supposé, dans l’attente d’un jugement.

Elle parait comme une mesure conservatoire dont il convient de restreindre l’application aux exigences de la recherche, la constatation et la poursuite des infractions.

En dépit de son caractère exceptionnel, la détention ne va pas sans causer de préjudices à la personne qui en fait l’objet dans la mesure où l’organe de répression agit par ses prérogatives de la puissance publique en lui privant de l’un de ses droits fondamentaux de la personne qu’est la liberté d’aller et venir. Il s’agit d’un préjudice d’autant plus important que la personne concernée par la mesure subit la peine avant la condamnation.

En choisissant ce sujet, nous ne nous sommes pas intéressé aux arrestations administratives qui s’opèrent hors du cadre de la procédure pénale pour prévenir ou lutter contre les troubles à l’ordre public ni aux détentions provisoires dirigées contre une catégorie de personnes qui accusent une certaine défiance mentale (débilité, déséquilibre mental grave ou démence). Nous avions l’ambition plutôt d’analyser le problème lié à la réparation des préjudices causés par la détention provisoire d’un accusé acquitté en droit positif rwandais, ainsi que de discuter sur les mécanismes d’amélioration de la responsabilité civile qui résulte de ladite détention. Dans ces développements, nous allons traiter de la privation de liberté d’une personne pendant le déroulement de la procédure pénale que ça soit au niveau de la phase d’instruction ou celui du jugement.

Nous nous écartons de la garde à vue qui est l’exécution d’un procès-verbal d’arrestation et constituant un titre de rétention que dresse l’enquêteur.

Elle concerne donc le cas d’une détention provisoire régulière qui aboutit à un acquittement ou non-lieu de l’infraction. A analyser toutes ces dispositions, l’on constate que le droit rwandais règlemente cette privation de liberté qu’est la détention provisoire.

Voilà pourquoi nous pensons que les résultats de notre recherche vont aider à comprendre et relever toutes ces préjudices et à critiquer l’irresponsabilité du Ministère Public vis-à-vis  de leur réparation.

Bien que la liberté de la personne humaine soit garantie par le droit rwandais ainsi que les normes internationales, il peut arriver que la personne soit privée de cette liberté dans l’intérêt d’assurer la bonne marche de l’instruction. La liberté de la personne humaine est la règle, tandis que la détention provisoire est l’exception à ce principe.

Après la détention par la police judiciaire et le ministère public la personne détenue doit comparaître devant le juge pour qu’il décide soit de son acquittement soit de son emprisonnement en attendant le jugement proprement dit. Dès que le détenu se présente devant le juge, ce dernier peut rendre l’ordonnance de sa liberté provisoire lorsqu’il constate que sa détention n’est pas fondée.

Les articles 258, 259 et 260 du Code civil livre troisième consacre la responsabilité civile soit directe, soit indirecte donne droit à la personne lésée par la détention illégale ou arbitraire de tenter une action contre l’auteur de l’acte ou son employeur en vue d’être indemnisé. Quel est la nature des préjudices causés par la détention provisoire du détenu acquitté ? Quid les mécanismes juridiques susceptibles à mettre en œuvre pour réparer de tels préjudices ?

Notre étude est subdivisé en deux parties précédées par une introduction générale et clôturés par la conclusion générale assortie elle-même des suggestions. Dans la première partie intitulée « De la nature des préjudices causés par la détention provisoire », nous allons analyser juridiquement les types de préjudices causés par la détention provisoire illégale ou arbitraire. Dans la deuxième chapitre intitulé « Des mécanismes juridiques envisageables à la procédure de la responsabilité civile causée par la dite détention » nous allons dégager certaines suggestions considérées comme solutions aux difficultés liées à la procédure d’indemnisation des victimes de la détention illégale ou arbitraire.

I. DE LA NATURE DES PREJUDICES CAUSES PAR LA DETENTION PROVISOIRE

1.1.Cadre notionnel du préjudice

Selon NGAGI A. :« L’existence d’un préjudice est une condition indispensable de la responsabilité civile. Le préjudice est aujourd’hui synonyme du dommage. La nécessité du dommage n’est que l’application de la grande règle « Pas d’intérêt, pas d’action » CHARTIER Y. « estime que : les caractères donnant lieu à la réparation peuvent être analysés en partant d’une double constatation. D’une part, il existe des constances. Ce préjudice présente quatre traits essentiels, d’une portée ailleurs inégale… Mais d’autre part, il comporte parfois certaines particularités…».En principe, le préjudice doit être certain, personnel, direct, licite et bien sûr ne doit pas avoir été déjà réparé. 

1.1.1. La certitude du préjudice en matière de détention provisoire 

On ne peut pas retenir un préjudice éventuel, car ce serait prendre un risque d’un enrichissement sans cause. On parle du préjudice certain, lorsqu’il n’y a pas de doute quant à sa réalité ainsi ce préjudice devrait être indemnisé. Il faut néanmoins réaliser qu’un dommage futur certain doit être réparé pourvu qu’on puisse en apprécier les quantums, contrairement au préjudice éventuel. 

1.1.2 Le caractère personnel de la détention provisoire 

Ceci signifie que le préjudice doit être personnel à celui qui en est victime. C’est pourquoi d’ailleurs les ayants droit demandent réparation du préjudice personnel qui leur est causée par la mort de la victime d’un accident et non, en tant qu’héritiers de la victime, donc ils demandent réparation du préjudice qu’ils éprouvent personnellement.

1.1.3. Le caractère direct et l’illicéité du préjudice résultant de la détention provisoire

Pour que le préjudice soit réparé, il doit être une suite directe et immédiate et direct du comportement fautif, sinon, si la suite est lointaine, le dommage ne sera pas réparée.

Dans ce cas, il faut que la violation ou le dédommagement concerne un intérêt légitime c’est-à-dire un intérêt qui est protégée par la loi. En effet, il se conçoit très mal d’admettre d’indemniser ce qui est contraire à la loi ou à l’ordre public.

1.1.4.  Le préjudice ne doit pas avoir été réparé 

En effet, la victime ne peut obtenir réparation qu’une seule fois. Lorsque la victime est indemnisée, le préjudice disparait. Elle ne peut plus demander la réparation du moins lorsque l’indemnisation a été totale, elle ne peut non plus cumuler plusieurs indemnités pour le même préjudice.

 1.2.Le responsable de la réparation

L’article 18, al.1 de la constitution de la République du Rwanda dispose que « La liberté de la personne est garantie par l’Etat.» La constitution, norme qui se trouve au plus haut sommet de la hiérarchie des normes juridiques en droit positif rwandais, charge l’Etat de garantir la liberté des personnes.

Néanmoins, L’Etat ne peut garantir cette liberté sans veiller à la sécurité publique de l’ordre public par la neutralisation des agents perturbateurs. Cette liberté n’est pas absolue puisqu’elle peut être retirée, lorsqu’intervient la mise en détention dans les cas déterminés par la loi. C’est ainsi que le législateur rwandais a organisé de manière expresse, par la loi  nº 027/2019 du 19/09/2019portant code de procédure pénale, le régime de la mise en détention provisoire.

Nous sommes en face d’une responsabilité de régime administrative qui engage l’Etat. Ainsi, la responsabilité de l’Etat ou de la puissance publique englobe, on le sait, la responsabilité administrative, la responsabilité du fait des lois et la responsabilité du fait de la fonction juridictionnelle ». Depuis 1970, le code français de procédure pénale reconnait qu’une personne ayant fait l’objet d’une mesure de détention provisoire et bénéficiant postérieurement d’une ordonnance de non-lieu ou d’une décision d’acquittement, peut, obtenir une indemnisation à charge de l’Etat. Cette réparation trouve son fondement dans le principe selon lequel, même à l’absence de faute imputable à ses agents, la puissance publique doit supporter les conséquences du risque social crées par le fonctionnement du service de la justice. 

De par son monopole d’édiction des normes juridiques sur son territoire, corollaire du principe de souveraineté, l’Etat doit supporter toutes les conséquences qui en découlent ainsi que celles provenant de la fonction juridictionnelle lorsque le juge applique la loi sans dol de sa part. Il s’agit d’une responsabilité sans faute de l’Etat comme nous l’avons dit, puisque, poursuivant l’intérêt général qui, dans cette situation se traduit par la sauvegarde de la sécurité publique et de l’ordre public, il est obligé d’édicter des normes restrictives de liberté qui doivent être appliquées par les biais des organes judiciaires et juridictionnels. L’intérêt particulier devant céder la place à l’intérêt général, quitte à rétablir l’équilibre par l’indemnisation sans que le préjudicié ait à prouver la faute de la part de l’Etat, ce qui ne signifie pas qu’il n’y a pas faute.

1.2.1. Le fondement juridique de la réparation

La procédure pénale et le droit administratif ne prévoient pas de régime d’après lequel le juge peut fonder sa décision relative à la réparation du préjudice causé par une détention provisoire légale injustifiée, alors qu’il est absolument tenu de se prononcer sur un litige lui soumis, nous pouvons nous demander s’il peut y avoir une autre voie à emprunter. En effet, le problème qui nous préoccupe dans cette analyse concerne, avant tout la réparation d’un préjudice sans considérer son dommage. Si nous faisons abstraction à la nature du dommage, nous tombons directement à la matière civile qui traite de la réparation d’un dommage causé par « tout fait quelconque ». C’est une partie du contenu de l’article 258 du code civil, livre troisième des contrats et obligations conventionnelles.

Dans des domaines ou l’action publique peut être source de préjudice à l’égard des particuliers, le législateur a prévu des mécanismes de réparation comme l’expropriation pour cause d’utilité publique, mais en ce qui concerne la détention provisoire aucune mesure n’a été prévue alors qu’en cette matière le dommage reste inévitable. Même si une loi spéciale fait défaut, une loi qui tiendrait compte de la nature particulière de la matière quant à la responsabilité sans faute de l’Etat reste indispensable, l’on ne laisserait pas le préjudicié dans l’ombre de l’acquittement ou du non-lieu. La voie qui reste à emprunter est le droit commun de la réparation prévue en matière civile par l’article 258 du code civil livre troisième des contrats ou des obligations conventionnelles.

La question qui se pose directement se rapporte à la manière de concilier la nature exceptionnelle du préjudice et l’application du droit commun de la réparation. Comme la loi interdit au juge de se prononcer par voie des dispositions générales et réglementaires sur les causes qui lui sont soumises, elle l’autorise à établir une règle comme s’il avait à faire œuvre du législateur en s’inspirant de la jurisprudence, de la coutume, des principes généraux ou de la doctrine.

Dans son pouvoir de faire œuvre de législateur que lui reconnait la loi, le juge s’inspirera dans le règlement de ce contentieux, des seules sources possibles que sont la jurisprudence et la doctrine. Les principes généraux du droit apparaissent le plus souvent dans l’application de la loi sans se rendre compte étant donné que dans la plupart des cas ils guident le pouvoir légiférant. Quant à la coutume, il serait très rare de trouver cette source dans la résolution d’un tel conflit. Si nous revenons à la jurisprudence étrangère très abondante à la matière, soulignons qu’elle fait défaut dans les décisions judiciaires internes.  Le juge devra consulter la jurisprudence étrangère pour combler des lacunes qui peuvent résulter de la nature même de la responsabilité.  Cette nature se rapporte à la faute qui est différente de celle du droit commun de la réparation, au dommage qui est institutionnalisé, au lien de causalité et l’évaluation du préjudice. 

1.2.1.1. La faute

Nous pouvons souligner dans les précédents développements que dans le cas sous examen nous sommes en face d’une responsabilité civile délictuelle. Cette responsabilité, tout comme la responsabilité contractuelle, est fondée sur la notion de faute. Celui à qui la faute est imputée, devient responsable de la réparation du préjudice causé.

Si en matière de droit comme de la réparation, le demandeur doit prouver la faute sur base des articles 9 de la loi n0 8/2004 portant code de procédure civile, commerciale, sociale et administrative et 197 du code civil livre troisième des contrats ou des obligations conventionnelles, en matière de réparation du préjudice consécutif à une détention provisoire légale injustifiée, l’ex-détenu n’est pas tenu de prouver la faute.

Nous savons déjà que le préjudice de droit commun et le préjudice exceptionnel dont il est question différente par nature des responsabilités qu’ils engagent.

 La première relève de la responsabilité avec la faute, ce qui suppose que la victime doit prouver la faute dans le chef de l’auteur du dommage. 

Le second provient d’une responsabilité sans faute de l’Etat ou encore appelée par LINGIBE, « responsabilité pour risque » pour signifier que, en autorisant la  détention provisoire, le législateur qui agit au nom et pour le compte de l’Etat, savait d’ores et déjà que le risque pour la personne en faisant l’objet doit en résulter et qu’en outre , la victime de cette mesure ne devra  pas prouver la faute dans le chef des organes de l’Etat, en l’occurrence les organes judiciaires compétents pour placer la personne poursuivie en détention. Le risque est également social dans ce sens que l’Etat agit au nom de la société sachant surement que celle-ci devra en supporter les conséquences. Il n’est donc pas question d’appréciation de la faute de l’Etat car elle est présumée. Le seul fait pour un innocent d’être en prison constitue en lui-même un préjudice. Il s’agit d’une dérogation au droit commun.

1.2.1.2 Le dommage

L’énoncé de l’article 258 du CCL III des contrats et des obligations conventionnelles commence par « tout fait quelconque de l’homme… ». En matière de procédure pénale, le fait est la détention provisoire qui cause problème. Le dommage est institutionnalisé en ce sens que la constitution du 04/06/2003 prévoit en son article 18, al. 2, la possibilité d’une détention, mais dans les cas prévus par la loi en vigueur au moment de la commission de l’acte. 

1.2.1.3. Le lien de causalité

En droit civil, droit commun de la procédure, il existe une exigence d’un lien u de cause à effet entre le fait et le préjudice ou le dommage. Il appartient au demandeur de la prouver. Un fait peut se produire et causer un préjudice autre que celui qui est supposé avoir été causé ou une victime peut subir un préjudice et croire qu’il est causé par un fait qui, pourtant n’est pas l’origine. 

Il a été jugé par la commission nationale française de réparations des détentions dans les décisions du 19 septembre et du 11 octobre 2002  que, indépendamment de toute autre recours, la personne qui a fait l’objet d’une détention provisoire dispose contre l’Etat d’une action principale et autonome en réparant de l’ensemble du préjudice, à la seule condition qu’il ait été causé par la détention. La même commission a rejeté, dans une décision du 21 novembre 2002 (no 02 RDP 050), le préjudice lié au dépôt du bilan de la société dirigée par le requérant en motivant « qu’il s’est écoulé 20 mois entre l’incarcération et le dépôt du bilan de ladite société, dans laquelle l’épouse du requérant a continué à travailler pendant la durée de la détention ».  Et dans sa décision du 15décembre 2000, la commission a jugé, au vu d’un rapport d’expertise que « si, la maladie dont souffre incontestablement la requérante, est apparue en 1998, au cours de la détention provisoire, il n’existe pas cependant de lien de causalité entre l’apparition du maladie et l’incarcération ; qu’en revanche, il n’existe un lien de causalité entre l’incarcération et une prise en charge tardive (25 jours sans aucun soin) et qualitativement inférieure à ce qu’elle aurait été à l’extérieure du milieu carcéral ».

Divers aspects du préjudice sont abordés jusqu’à statuer sur l’impact psychologique ou la même commission a pu, dans une décision du 03 mai 2002, relever le fait que le demandeur a souffert d’un Etat d’anxiété directement lié à l’incarcération, établi par expertise psychologique et, dans une décision du 19 septembre 2002, l’état dépressif dans lequel la longueur de la détention a progressivement plongé le requérant. Ces jurisprudences montrent combien l’existence d’un lien entre le fait et le préjudice est nécessaire en cette matière pour établir la responsabilité de réparer. Le juge rwandais statuant sur la réparation peut donc s’inspirer de la jurisprudence étrangère qui est abondante dans ce domaine, en combinaison avec les conditions de l’art. 258 du décret précité en faisant œuvre de législateur.

1.2.2. Les cas susceptibles de réparation

Il va sans dire qu’une personne ayant fait l’objet de détention et qui, par la suite est condamnée à l’une des peines prévues par la loi ne peut pas réclamer l’indemnisation de la période passée en détention, fut-ce supérieure à la peine prononcée car, elle est considérée comme ayant été à l’origine de sa mise en détention. Il en est de même de la personne, quoique relâchée sous un acquittement ou non-lieu, aura affiché un comportement ayant motivé sa mise en détention par exemple en se soustrayant à l’action de la justice par la fuite ou à certaines obligations en cas de placements sous contrôle judiciaire.

1.2.2.1. Acquittement pour innocence

Dans la plupart des cas, le juge déclare le prévenu non coupable au motif que les moyens de preuves apportées par l’O.N.P.J. n’ont convaincu le juge de la culpabilité et que même l’instruction menée par le juge lui-même n’a pas conclu à la culpabilité. Dans ces conditions, il déclare l’accusé innocent et prononce son acquittement. 

Jean PRADEL dans son précis de Droit pénal comparé précise que « une indemnité peut être accordée au détenu après un acquittement ou au non-lieu ». Dans le système romano-germanique, poursuit l’auteur, « des lois particulières accordent à l’ex-détenu le droit de solliciter une indemnité par exemple en France depuis 1970 et en Italie depuis 1985.

En effet, du moment qu’aucune preuve n’a pu établir que le prévenu a commis l’infraction et que ce dernier prétend avoir subi un dommage qui est d’ailleurs pratiquement inévitable pendant sa détention provisoire il serait de droit qu’il soit rétabli dans ses droits afin que l’équilibre rompu entre lui et la collectivité revienne à la normale. Cette acception découle de l’obligation constitutionnelle qui incombe à l’Etat de protéger tous ces citoyens et d’assurer l’égalité de tous devant la loi. Une personne innocentée par une décision judiciaire coulée en force de chose jugée devrait, à la sortie de la prison, recouvrer tous ses droits. L’expression « être mis hors de cause » pourrait signifier à notre sens que la personne a été innocentée par une décision judiciaire qui établit qu’elle n’a aucune relation avec les faits qui étaient à la base de ses poursuites pénales.

1.2.2.2. Acquittement au bénéfice du doute 

L’adage latin « in dubio pro reo » qui signifie que « le doute profite à l’accusé » constitue une garantie essentielle de la liberté des droits des hommes. Il est consacré en droit interne rwandais par la loi no Nº 027/2019 of 19/09/2019 portant Procédure Pénale qui dispose en son art. 111 que «le doute profite au prévenu » et ajoute que « si une instruction aussi complète que possible n’est pas parvenue à lever le doute de culpabilité, le prévenu doit être acquitté ». Ici, il est important d’établie une différence entre le doute et l’absence de preuves. Dans certains cas, le juge peut se trouver dans une situation où il ne dispose pas de preuves suffisantes pouvant emporter sa conviction et prononcer l’acquittement au bénéfice du doute. Il peut exister donc une confusion entre insuffisance de preuves ou carrément défaut des preuves et doute. C’est l’exemple.

Le doute a lieu lorsque des éléments de preuves produites, certains font croire au juge de la culpabilité du prévenu pendant que d’autre penchent de la non culpabilité. Il y a dans ces conditions, division de preuves empêchant le juge d’avoir une conviction totale requise pour se déterminer. Sur base des éléments présentés, le juge ne peut déterminer si oui ou non l’accusé a commis une infraction. Dans ce cas, il y a doute sur la culpabilité car d’après l’art 153 de la loi précitée, une instruction complète n’est parvenue à lever le doute sur la culpabilité.

L’article précise expressément qu’il doit acquitter. C’est un impératif. Cette disposition parait comme corollaire du principe de la présomption d’innocence. Que le prévenu ait ou non commis les faits, tant que les éléments de preuves rapportés n’ont pas été à mesure de convaincre le juge de la culpabilité ou la non-culpabilité de l’auteur pré de l’auteur présumé, celui-ci jouit toujours de la présomption d’innocence, principe consacré aussi bien par les textes internationaux. 

Le professeur Srevens estimait que « le règle in dubio pro reo eut pu être étudié en même temps que l’intime conviction du juge mais qu’elle se rattachait mieux au problème du fardeau de la preuve. »

En effet, d’après Screvens, si celui à qui incombe la charge de la preuve n’est pas parvenue à rattacher complètement les faits de l’auteur présumé de l’infraction et que par conséquent le doute subsiste dans l’intime conviction du juge, celui-ci a l’obligation d’acquitter au bénéfice du doute. « in dubio pro reo » Le prévenu en profite en bénéficiant d’un acquittement quand bien même il aurait commis les faits.

Par là, nous nous sommes demandé si le prévenu ayant été acquitté au bénéfice du doute aura droit à l’indemnisation au même titre qu’une personne acquittée pour innocence. Avant l’intervention d’une décision judiciaire définitive d’acquittement, les deux prévenus jouissent du principe constitutionnel de la présomption d’innocence. La personne ayant bénéficié du doute continu d’être considérée comme innocente en vertu de ce principe même si réellement elle a commis les faits. Elle bénéficie donc de tous les effets découlant d’une décision judiciaire d’acquittement y compris le droit de réclamer l’indemnisation d’un préjudice causé par une détention provisoire devenue injustifiée puisque la culpabilité n’a pas pu être établie.

D’après l’article 111 de la procédure pénale, le législateur a été très ferme. In ne tolère même pas une portion de doute, fût-elle infirme, pour rendre une décision de culpabilité. En réalité, c’est cette présomption d’innocence qui confère tous les avantages inhérents à une décision d’acquittement motivée par le doute qui plane sur la culpabilité que tous les moyens de preuves n’ont pu établir. 

1.2.2.3. Le cas de non-lieu

Par le principe de l’opportunité des poursuites, le parquet peut, s’il estime que, sur base des éléments recueillis au cours de l’instruction préparatoire, les faits ne sont pas constitutifs d’infraction ou que les charges contre l’inculpé sont insuffisantes., décider de ne pas engager les poursuites devant les juridictions de jugement en constatant un non-lieu de l’infraction. L’art 44 de la loi organique n° 03/2004 du 20/03/2004 portant organisation et compétence et fonctionnement du ministère public consacre le principe de l’opportunité de poursuites et indique à l’alinéa 3 que « lorsque le parquet décide de ne pas poursuivre il classe le dossier sans suite et avise le plaignant et/ou partie civile pur qu’il puisse faire valoir de leurs droits auprès des juridictions civiles » ajoutant à l’alinéa 4 que « le classement sans suite définitif d’un dossier relève de la compétence du Procureur Général de la République. »  

L’art.5 de la loi Nº 027/2019 of 19/09/2019 portant procédure pénale dispose en substance que : « l’action publique s’éteint par la mort du prévenu, la prescription, l’amnistie, l’abrogation de la loi et la chose jugée. Elle peut également s’éteindre par amende transactionnelle ou par désistement de la plainte, lorsque la loi en dispose autrement ».

Lorsqu’une infraction est commise, il y a naissance automatique d’une action publique qui tend à être mise en mouvement, puis exercée.

Cependant, il existe des causes légales qui mettent fin à son exercice avant qu’elle ne soit exercée ou lorsqu’elle est en cours d’exercice. Ce sont les causes de l’extinction de l’action publique énumérées à l’article 5 de la loi précitée. Par ces causes, les faits perdent de leur caractère infractionnel, il n’y a pas lieu de parler l’infraction, c’est un non-lieu. Dans ce cas, le parquet disposant de l’opportunité de poursuite, classe sans suite le dossier de l’affaire.

En droit pénal français, le juge de l’instruction rend une ordonnance de non-lieu lorsque, en présence des résultats apportés par l’information, il estimera qu’il n’y a pas lieu de continuer les poursuites intentées, cette ordonnance arrêtera l’action publique qui avait été mise en mouvement par l’ouverture de l’information .

En droit belge, l’art 128 du C.I.C prévoit que « si les juges sont d’avis que les faits ne présente ni crime, ni délits, ni contravention ou qu’il n’existe aucune charge contre l’inculpé, il se déclare qu’il n y a pas lieu à poursuivre ; et si l’inculpé a été arrêté, il sera mis en liberté » et ajoute que « ce texte n’est pas limitatif car d’autres situations imposent le prononcé d’une ordonnance de non-lieu à savoir l’existence d’une cause de justification, d’une circonstance absolutoire spéciale telle que la dénonciation, la soumission, la parenté ou l’alliance, ou d’une fin de non-recevoir (prescription, amnistie, chose jugée) ».

Dans cette situation, il ya un obstacle à la poursuite et à la chambre du conseil le constate en rendant une ordonnance de non-lieu sr les réquisitions conformes ou non de l’ONPJ et ceci nous amène à estimer que la décision de non-lieu se fonde sur des motifs qui peuvent être groupés en deux catégories :

D’une part, il y a des motifs de droit, autrement dit, des motifs qui sont prévus expressément par la loi et liés à l’extinction de l’action publique notamment la prescription, l’amnistie et la chose jugée.

D’autre part, il existe des motifs fondés sur les faits tels que l’absence ou l’insuffisance de charges contre l’inculpé, la non identification du coupable ou lorsque le magistrat instructeur estime les poursuites inopportunes relevant du fait qu’au vu des faits, les conditions légales d’incrimination ne sont pas réunies.

Dans ce dernier cas, l’action publique n’est pas définitivement éteinte ; elle peut reprendre par une réouverture de l’information sur charges nouvelles par les déclarations des témoins, pièces. Procès-verbaux qui, n’ayant pu être soumis à l’examen du juge d’instruction, sont cependant de nature soit à fortifier les charges qui auraient été trop faible, soit à donner aux faits nouveaux du développements utiles à la manifestation de la vérité.

D’après cette analyse, nous nous posons la question concernant les cas de non-lieu susceptibles d’indemnisation du préjudice causé par une détention provisoire injustifiée. A notre avis, et sur base des observations que nous venons de faire, une réponse se dégage. Les motifs ayant traits à l’extinction de l’action publique, à l’exclusion de la mort du prévenu a fait l’objet d’une détention. Quant aux motifs fondés sur des considérations de faits, l’ex-détenu ne pourra s’en prévaloir dès lors que les poursuites peuvent reprendre sur base de charges nouvelles.      

Nous estimons qu’à côté des motifs de droit tels que l’amnistie, la prescription et la chose jugée, il y a lieu de noter également l’impossibilité de qualification des faits comme motif de non-lieu à la base duquel, comme pour ces premiers, l’ex-détenu préjudicié pourra exercer une action en réparation.  L’impossibilité de qualification intervient lorsque les faits tels qu’ils sont établis, ne tombent sous le coup d’aucune loi répressive.  Cependant soulignons une nuance en ce qui concerne l’amnistie. Lorsqu’elle intervient postérieurement à la mise en détention, nous pensons que l’ex-détenu ne peut s’en prévaloir étant donné que l’ordonnance de mise en détention aura été rendue avant l’effacement du caractère infractionnel des faits pour lesquels la détention a eu lieu. C’est l’avis de Patrick LINGIBE qui cite trois cas d’exclusion du système indemnitaire prévu par le nouvel article 149 du code de procédure pénale française tel que modifié par la loi no 2000-516 du 15/06/2000 parmi lesquels figure l’amnistie postérieure à la mise en détention provisoire. Toute fois dans le cas d’une procédure en cours, si la remise en liberté de la personne n’est pas décidée dans un délai raisonnable, une réparation pourrait être envisagée pour la partie de la détention postérieure à l’amnistie. C’est ce qui ressort du premier alinéa de l’article L.781-1 du code d’organisation judiciaire français. Là, intervient la notion de retard de l’organe habilité dans la mise en liberté de l’intéressé qui, par la mesure de l’amnistie est en droit d’être. 

1.3. Les différentes sortes de préjudices réparables 

On distingue 3 sortes de préjudices à savoir le préjudice matériel ;le préjudice moral ;le préjudice corporel

1.3.1. Le préjudice matériel

C’est celui qui a un caractère patrimonial : qui consiste à une perte de valeur de patrimoine, ceci peut se constater lorsqu’il ya destruction ou la détérioration d’un bien, il peut aussi exister suite à une sorte de somme d’argent ou alors lorsqu’il ya le manquer à gagnera.

1.3.2. Des préjudices patrimoniaux

La détention provisoire ou définitive entraine l’arrêt ou la suspension des activités qu’exerçaient avant celui qui la subit. Qu’il soit commerçant, fonctionnaire d’une administration publique ou privée, étudiant de quelque autre profession qu’elle soit. Le détenu est astreint à suspendre momentanément ou définitivement ses préoccupations quotidiennes pour être gardé par la force publique pendant un certain temps de sa détention. Il s’en suit dès lors qu’il subit une perte dans ses activités, à tel enseigne, qu’un rétablissement de ce préjudice s’impose aussi au moment de sa libération lorsqu’il été constaté que la détention était injuste.

A notre avis, la réparation de ces préjudices devrait se faire en faisant rentrer la victime de la détention injuste de la situation dans laquelle elle vivait avant cette détention (damnum emergens), mais aussi le manque à gagner ( lucrum cessans), c’est-à-dire les bénéfices qu’il aurait pu réaliser s’il n’avait pas été détenu. 

En toute logique, et pour les cas par exemple cité d’un commerçant, la détention provisoire entraine le plus souvent l’arrêt de ses activités et la perte conséquente de son capital, ainsi que des intérêts il pourrait bien réaliser par l’exercice bénéfique de ses opérations commerciales. Il s’impose donc qu’il récupère ses affaires telles qu’elles se composaient au moment de la détention mais aussi qu’y soient ajoutées des intérêts qu’il aurait produits durant la période de la détention injuste. Nous déplorons ici l’impossibilité de le faire récupérer ce qu’il a perdu pendant la détention provisoire en estimant qu’il serait temps que les victimes d’une telle détention puisse intenter l’action en dommage et intérêt. 

1.3.3. Le préjudice moral

C’est celui qui a un caractère extra patrimonial, on peut notamment citer l’atteinte à la réputation d’une personne, à l’honneur par exemple la perte de droits civils et politiques.

1.3.3.1.  La perte d’honneur et réputation 

Sous les menottes, la personne est humiliée de façon que quand l’opération de la police judiciaire est médiatisée notamment en la diffusant à la télévision où l’on voit les images, le public peut réagir de deux façons. D’un côté, ceux qui compatissent avec lui y voient une injustice et une méchante intention de le ridiculiser et même les plus influents peuvent tenter un plaidoyer pour qu’il soit relaxé ou assurent sa défense sur ces mêmes media ; de l’autre, il y a des gens sans circonspection qui abondent dans le même sens que l’accusation et le considèrent comme un criminel selon la prévention pour laquelle il est arrêté et poursuivi effaçant d’un coup la précédente image d’homme intègre, de femme exemplaire que cette personne représentait dans leur vie quotidienne et il ne sera pas facile de leur enlever ce cliché de voyou au torse dénudé qui défrayé la chronique.

1.3.3.2.  La perte de droits civiques et politiques

Parmi les répercussions de la détention, qu’elle soit provisoire ou définitive, l’une le plus importante sur le plan juridique est la perte de droit civique et politique par le détenu.  En effet, l’état de la détention fait perdre au concerne tous les droits qu’il jouissait en sa qualité de citoyen ressortissant de la nation. Il ne pourra les récupérer qu’après avoir purgé l’emprisonnement lui infligé, bien sûr s’il n’a pas été prononcé à perpétuité. Il s’en dégage que le détenu à vie perd irrémédiablement ses droits civiques et politiques, dans ce sens qu’il est appelé à rester le reste de vie dans un établissement pénitentiaire.

Lorsque la détention est provisoire ou définitive mais pour une durée déterminée mais pas à vie, à l’issue d’un certain laps de temps. Le détenu est libéré, pour reprendre le cours normal de ses activités ou de sa vie en général. Il lui faut alors un certificat d’élargissement, qui atteste soit qu’il a déjà purgé sa peine, soit qu’il est en liberté provisoire, ou qu’il est purement ou simplement acquitté dans le cas d’espèce.  Ce certificat constitue alors la matérialisation du rétablissement du détenu injustement dans ses droits civiques et politiques.

1.3.4. Le préjudice corporel

C’est celui qui atteint une personne dans son corps, ce préjudice est constitué par deux types d’éléments :

-Des éléments matériels à savoir les frais médicaux ont dû engager pour se faire soigner et le manque à gagner résultant de son incapacité de travail ;

-Les intérêts moraux :la souffrance physique et la souffrance morale.

Lorsqu’on revoit les exemples de détention cités ci-haut, il est incontestable que chaque cas se trouve sa place de préjudice. Quant aux jugements précités, on constate que les prévenues ont été acquitte par le tribunal. A notre avis, le silence devant de telle violation des droits de libertés de la personne est impardonnable surtout dans un pays qui se veut être un Etat de droit. Enfin, en se basant sur ces quelques exemples, nous voyons bien des cas des violations de libertés de la personne existent bel et bien dans notre pays. De violation qui peuvent se commettre soit au niveau de la police judiciaire, au niveau du parquet, au niveau des juridictions et même au niveau de prison. On ne saurait analyser tous les cas de violation des droits et des libertés de la personne. Nous n’avons retenu que ceux en rapport avec la détention suivie par une décision d’acquittement devenu définitive.

II.PERSPECTIVES D’UNE EVENTUELLE INDEMNISATION DE LA DETENTION ILLEGALE OU INJUSTE AU RWANDA 

Le prévenu est illégalement ou injustement détenu lorsque le délai du Procès-Verbal d’Arrestation ou du Mandat d’Arrêt Provisoire a expiré alors qu’il reste à la maison d’arrêt, lorsqu’il vient a être innocenté et acquitté malgré le temps qu’il a passé en détention provisoire avant le jugement de fond ou pour des besoins d’enquête il a été appréhendé 

2.1.La détention provisoire : quelle réparation en cas d’abus ? 

La détention provisoire est une mesure que peut prendre une juridiction, le plus souvent le juge d’instruction, à l’encontre d’une personne mise en examen, prévenue ou accusée, et au terme de laquelle l’intéressé est placé sous écrou pour une période plus ou moins longue, bien qu’il n’ait pas encore été statué sur sa culpabilité. La détention provisoire est une mesure que peut prendre une juridiction, le plus souvent le juge d’instruction, à l’encontre d’une personne mise en examen, prévenue ou accusée, et au terme de laquelle l’intéressé est placé sous écrou pour une période plus ou moins longue, bien qu’il n’ait pas encore été statué sur sa culpabilité. Cette mesure, organisée par l’article 144 du Code de procédure pénale, est justifiée grosso modo par l’intérêt social et la bonne administration de la justice. La mise en détention provisoire d’un certain nombre de personnalités mises en cause dans le cadre des « affaires », dont la presse écrite et audiovisuelle s’est faite largement l’écho, a permis de porter sur la place publique une mesure pour le moins équivoque. Toutefois, nous constatons avec regret que l’intérêt critique porté à la mesure de détention provisoire n’était pas réellement perceptible lorsqu’il concernait un quidam. En effet, ce caractère équivoque ne l’est devenu qu’à partir du moment où cette mesure a touché des notables. Or, la détention provisoire est une mesure très grave en soi.

En effet, elle attente aux garanties fondamentales des droits de la personne devant la Justice, principalement à celle de la présomption d’innocence qui doit auréoler toute personne mise en examen. Pourtant, les chiffres confirment l’importance de la mesure de mise en détention provisoire et par-là même les coups portés à l’Innocence immaculée de toute personne.  Cette grave entorse légale à cette présomption devient d’autant plus injuste, cruelle, voire destructive que la personne victime d’une mesure de détention provisoire se voit en bout de piste du débat judiciaire relaxée ou acquittée. Se pose inévitablement alors la question cruciale de la réparation de cette détention injustifiée, la réparation de l’Irréparable. A cet effet, la loi n° 70-643 du 17 Juillet 1970 a opéré deux réformes. L’une, a porté sur une modification d’ordre sémantique mais donne le ton de la réforme voulue. En effet, la détention est désormais appelée « détention provisoire », ce dernier terme ayant remplacé celui de « détention préventive  ». Cette différence de vocable visait en principe à mettre en évidence un changement d’approche du législateur  : désormais, la liberté est la règle, la détention l’exception. L’autre, a institué, pour la première fois en France, un régime d’indemnisation de la détention provisoire en cas de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement.

La loi n° 96-1235 du 30 Décembre 1996 relative à la détention provisoire et aux perquisitions de nuit en matière de terrorisme a apporté, dans son article 9, une modification notable et importante quant à la caractérisation du préjudice à indemniser. Par-delà cette modification législative intervenue en 1996, plusieurs projets de textes visent à réparer directement ou indirectement le préjudice d’une détention provisoire injustifiée.  Cette effervescence de textes est donc l’occasion de nous pencher sur le régime juridique de l’indemnisation de la détention provisoire après avoir exposé le principe sur lequel se fonde ce système d’indemnisation. Enfin, nous exposerons les modifications qui nous paraissent souhaitables d’apporter en vue d’améliorer le système indemnitaire actuel.

2.2. L’indemnisation des préjudices causés par les agents de la police judiciaire

Si l’on qualifie la mission de la police judiciaire, toute situation de fourvoiement de l’institution dans une mauvaise voie en tant que des violations de la loi, concernent tout autant la matière civile que le contentieux pénal. Ainsi, pourraient constituer des violations de la loi, la détention arbitraire ou illégale ainsi que toute autre mesure de la phase préliminaire de la poursuite pénale réalisée au mépris de la loi. C’est le plus souvent, à propos de poursuites pénales que l’on parle des violations de la loi. Mais sans doute parce que ce sont les plus graves, puisqu’elles touchent à la liberté des personnes.

Dans le système judiciaire, beaucoup de préjudices se commettent et sont restés sans réparation suite à l’absence de la procédure efficace en matière d’indemnisation des dommages qui résultent des actes préjudiciaux ou encore aux lois qui ne sont pas claires en matière de réparation des préjudices causés

Dans l’accomplissement de leur mission, les membres de la police judiciaires peuvent causer des préjudices aux citoyens soit intentionnellement soit non intentionnellement. Même si les lois et les règlements prévoient l’indemnisation de ces préjudices, les problèmes subsistent.

En revanche, tout au long de notre travail, il a été démontré que les droits de la personne humaine se trouvent bafoués à l’encontre de la loi. Dans leurs fonctions, les membres de la police habilités à exercer la phase préliminaire de la poursuite pénale, peuvent commettre des actes préjudiciables à des personnes poursuivies de commettre l’infraction et engagent leur responsabilité.

Parmi les préjudices les plus sérieux que causent les OPJ se trouvent comme nous l’avons précisé celui de dépasser le délai légal de la mise en détention la personne présumée auteur de l’infraction.

Ils peuvent commettre les actes préjudiciables soit intentionnellement tel que l’utilisation des tortures physiques ou morales dans le but d’accéder aux aveux des personnes poursuivies, soit non intentionnellement lorsqu’ils commettent les actes préjudiciables sans être animés par l’animus nocendi.

La plupart des infractions commises par les OPJ durant le déroulement de la phase préliminaire causent des préjudices aux personnes poursuivies et donnent droit aux personnes lésées de faire valoir ce que la loi les permette.

Il s’agit ici de la responsabilité civile délictuelle par opposition à la responsabilité civile contractuelle reconnue par le droit commun. Le délit est un fait illicite, une faute, un fait intentionnel qui cause un dommage. En droit rwandais, la responsabilité civile délictuelle et la responsabilité civile quasi-délictuelle ont pour siège de leur fondement dans les articles 258 à 262 du code civil livre III. 

La responsabilité civile comme conséquence juridique négative de la phase préliminaire peut être analysée en 2 catégories à savoir : La responsabilité civile directe ou personnelle et la responsabilité civile indirecte. La responsabilité civile personnelle ou directe est réglementée par les art.258 à 259 du code civil livre III.  Dans notre étude, nous allons parler uniquement de la responsabilité civile indirecte car les relations qui unissent les OPJ à l’administration sont comme celles prévues entre les commettants et les préposés, réglementées par le code civil51.

En effet, le non-respect de la phase préliminaire de la poursuite pénale par des membres de la police judiciaire habilités à l’exercer, peut entraîner la responsabilité du pouvoir public en vertu de l’art.262 du code civil livre III qui affirme qu’on est responsable du dommage qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre.

Les OPJ, lorsqu’ils mènent une investigation policière, ils agissent dans leur fonction au nom de l’Etat qui exerce sur eux une autorité de contrôle, de surveillance et de direction. Au terme du code civil livre III, on peut rapprocher cette relation à celui du commettant et de l’agent ou préposé (art.262). Les relations qui unissent les OPJ à l’Etat est une relation de subordination et par conséquent au nom et pour le compte duquel il agit.

Le législateur rwandais n’a pas à notre connaissance consacrée la procédure de l’institution de la responsabilité civile de l’Etat ; les victimes des actes préjudiciables liés à la phase préliminaire de la poursuite pénale ne reçoivent rien aux différents dommages qu’ils ont subi.

L’Etat en tant que commettant n’est responsable que des personnes qu’ils emploient, celles à qui il est en droit de donner les ordres parce qu’elles sont volontairement placées à son égard dans une situation de subordination.

Il y a lieu de constater que les préjudices causés par les agents du pouvoir judiciaire y compris les OPJ sont extrêmes et ce sont eux qui restent dans bon nombre des cas sans réparation à cause notamment du manque des instances devant lesquelles les victimes peuvent faire valoir leurs droits soit à cause de l’ignorance de la victime ou de ses ayants droit, de leurs droits d’être indemnisés.

2.3. Solution au problème d’indemnisation de la victime de la phase préliminaire

Dans leurs fonctions, les membres de la police habilités à exercer la phase préliminaire de la poursuite pénale, peuvent commettre des actes préjudiciables à des personnes présumées auteurs de l’infraction et engagent leur responsabilité.

Parmi les préjudices les plus sérieux que causent les OPJ se trouvent comme nous l’avons précisé celui de dépasser le délai légal de la mise en détention la personne présumée auteur de l’infraction.

Ils peuvent commettre les actes préjudiciables soit intentionnellement tel que l’utilisation des tortures physiques ou morales dans le but d’accéder aux aveux des personnes présumées auteurs de l’infraction, soit non intentionnellement lorsqu’ils commettent les actes préjudiciables sans être animés par l’animus nocendi.

La plus par des infractions commises par les OPJ durant le déroulement de la phase préliminaire causent des préjudices aux personnes suspectées et donnent droit aux personnes lésées de faire valoir ce que la loi les permettent.

Il s’agit ici de la responsabilité civile délictuelle par opposition à la responsabilité civile contractuelle reconnue par le droit commun. Le délit est un fait illicite, une faute, un fait intentionnel qui cause un dommage. 

En droit rwandais la responsabilité civile délictuelle et la responsabilité civile quasi-délictuelle ont pour siègent de leur fondement dans les articles 258 à 262 du code civil livre III. 

La responsabilité civile comme conséquence juridique négative de la phase préliminaire peut être analysée en 2 catégories à savoir : La responsabilité civile directe ou personnelle et la responsabilité civile indirecte.

La responsabilité civile personne est réglementée par les art.258 à 259 du code civil livre III. 

Dans notre travail, nous allons parler uniquement de la responsabilité civile indirecte car les relations qui unissent les OPJ à l’administration sont comme celles prévues entre les commettants et les préposés, réglementées par le code civil65(*)

En effet, le non-respect de la phase préliminaire de la poursuite pénale par des membres de la police judiciaire habilités à l’exercer peut entraîner la responsabilité du pouvoir public en vertu de l’art.262 du code civil livre III. Qui affirme qu’on est responsable du dommage qui est causé par la fait des personnes dont on doit répondre.

Les OPJ, lorsqu’ils mènent une investigation policière, ils agissent dans leur fonction au non de l’Etat qui exerce sur lui une autorité de contrôle, de surveillance et de direction. Au terme du code civil livre III, on peut rapprocher cette relation à celui du commettant et de l’agent ou préposé (art.262)

Les relations qui unissent les OPJ à l’Etat est une relation de subordination et par conséquent au non et pour le compte duquel il agit.

Le législateur rwandais n’a pas à notre connaissance consacrée la procédure de l’institution de la responsabilité civile de l’Etat ; les victimes des actes préjudiciables liés à la phase préliminaire de la poursuite pénale ne reçoivent rien aux différents dommages qu’ils ont subi.

L’Etat en tant que commettant n’est responsable que des personnes qu’ils emploient, celles à qui il est en droit de donner les ordres parce qu’elles sont volontairement placées à son égard dans une situation de subordonné.

2.3.1 Les conditions de la responsabilité civile indirecte

Pour que l’administration puisse répondre des actes préjudiciables émanant de son agent, il faut que ces éléments soient remplis :

· Il faut un lien de préposition ou de subordination qui existe ente l’OPJ et le pouvoir public (art.260 C.C.L.III) ;

· Il faut qu’il y ait une faute qui doit exister dans le chef du préposé

· Il en résulte que pour obtenir de l’Etat la réparation d’un préjudice, la victime doit prouver une faute du préposé (OPJ), aucune présomption de faute de l’Etat n’était établie par la loi.

· Donc la responsabilité civile est différente de la responsabilité morale qui peut exister sans préjudice ni l’action intentée par la personne lésée.

· Les actes préjudiciables commis par les OPJ durant le déroulement de la phase préliminaire de la poursuite pénale doivent être commis à une personne extérieure.

· Il faut qu’il y ait le rapport entre l’acte dommageable et l’exercice des fonctions66(*)

Pour qu’un acte préjudiciable pèse sur la tête de l’Etat, il faut que le dommage soit causé par l’OPJ durant le moment de l’exercice des fonctions qui lui sont confiées

Cette solution s’impose en bonne justice, on ne voit pas pourquoi l’Etat peut répondre des comportements des membres de la police judiciaire qui n’ont rien à voir avec ses fonctions. A titre exemplatif, si un OPJ intolérant rentre chez lui et frappe son domestique qui n’a pas bien prépare le joking matinal (le petit déjeuné) et lui cause un préjudice ; c’est l’évidence, réclamer la réparation à l’Etat.

2.3.2 De la réception de l’indemnisation par la victime

Lorsque les membres de la PJ commettent les actes préjudiciables lors du déroulement de la phase préliminaire, la personne condamnée aux dommages et intérêts devrait s’acquitter de cette obligation immédiatement après que les voies de recours soient épuisées. La question des privilèges reconnus à l’administration telle que la non-exécution forcée contre l’administration et l’insolvabilité de l’Etat ne devaient pas être soulevés. Il appartient au législateur rwandais de déterminer la procédure d’indemnisation les victimes, sinon il serait sans importance pour la victime du non-respect de la phase préliminaire de la poursuite pénale d’intenter une action contre un OPJ et il serait inutile de prononcer dans un jugement des montants qui ne seront pas obtenus par la victime ou ses ayants droits.

Comme nous l’avons constaté, parmi les conséquences qui découlent des vices dans les enquêtes préliminaires, il y a la non poursuite des infractions. Cette conséquence cause les dommages aux victimes de ces infractions au cas où, par le fait d’un OPJ, la poursuite est rendue quasi impossible. D’emblée, l’infraction n’est pas punie. 

En plus, selon la gravité de l’infraction, elle peut causer des préjudices tant moraux que matériels aux victimes. C’est dans ce sens que nous avons évoqué le cas d’un enfant qui a contaminé le VIH/SIDA suite à l’infraction de viol qui n’a pas été réprimée. Or, en vertu de l’article 258 du CCLIII, « Tout fait quelconque de l’homme qui cause un dommage à autrui, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Mais, l’identification de ces dommages et des victimes est difficile du fait de l’ignorance de la population. Mais par le simple constat des inspecteurs ainsi que les revendications éventuelles de la population, les cas sont identifiables. 

D’où, nous voyons que, puisque les OPJ agissent au nom de la puissance publique (Etat), cette réparation devrait être la charge de l’Etat. C’est ainsi que la mise sur pieds d’un fonds d’indemnisation des victimes des vices de l’enquête préliminaire serait l’une des solutions en vue de rendre justice à ces victimes. Les fonds proviendraient des frais recueillis dans les actes administratifs et judiciaires divers ainsi qu’à une contribution sur le budget de l’Etat. Cela pourrait avoir un impact positif sur le suivi régulier des OPJ et le renforcement de leurs capacités techniques et matérielles par l’Etat qui ne veut pas engager des dépenses dans les indemnisations du fait de ses agents. 

La victime doit produire les justificatifs de sa demande : certificat médical, arrêt de travail et pertes de revenus, factures, devis… En cas de blessure, le tribunal peut ordonner une expertise afin d’en évaluer l’importance soit d’office, soit à la demande de la victime. Dans l’attente du résultat de l’expertise, la victime peut obtenir le versement d’une provision (avance sur indemnité).

Nous en venons ainsi tout naturellement au concept de réparation. Réparer, au sens où nous l’entendons ici, c’est rétablir, autant qu’il est possible, l’équilibre détruit par le dommage.
Hélas, il est le plus souvent impossible de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si le dommage ne s’était pas produit. 

L’État assume tellement volontiers son devoir de réparation qu’il offre parfois spontanément une indemnisation conséquente, à laquelle ses plus hauts représentants ajoutent parfois des excuses, que les victimes préféreraient recevoir d’un OPJ présumé responsable du dysfonctionnement, mais qui, pour sa part, se considère plutôt lui-même victime d’un manque de moyens de l’institution. Cette responsabilité incombe à l’État tenu de réparer le dommage causé par la défaillance du service, que la faute alléguée soit celle de son agent. Lorsque les membres de la PJ commettent les actes préjudiciables lors du déroulement de la phase préliminaire, la personne condamnée aux dommages et intérêts devrait s’acquitter de cette obligation immédiatement après que les voies de recours soient épuisées. La question des privilèges reconnus à l’administration telle que la non-exécution forcée contre l’administration et l’insolvabilité de l’Etat ne devrait pas être soulevés.

Lorsque les membres de la Police Judiciaire commettent les actes préjudiciables lors du déroulement de la phase préliminaire, la personne condamnée aux dommages et intérêts devrait s’acquitter de cette obligation immédiatement après que les voies de recours soient épuisées. La question des privilèges reconnus à l’administration telle que la non-exécution forcée contre l’administration et l’insolvabilité de l’Etat ne devait pas être soulevés.

CONCLUSION GENERALE 

Le Rwanda se trouve parmi les rares pays qui n’indemnisent pas les citoyens injustement détenus ou condamnes sous le prétexte de raisons d’investigation ; suspicion de culpabilité tout en faisant fi des arrestations arbitraires ; des règlements de compte ; des actions téméraires et vexatoires qui peuvent se tramer au grand dam d’un citoyen souvent politiquement indésirable ; ce sans exclure les effets néfastes d’une telle détention si elle dure à l’encontre de sa victime. Nous recommandons que le législateur rwandais puisse se conformer aux engagements internationaux du pays pour mieux garantir les droits fondamentaux du citoyen au lieu de continuer à institutionaliser l’arbitraire.