Par Ben Barugahare
Me Bukuru Ntwari est décédé après être tombé du quatrième étage de l’immeuble Inkundamahoro de Nyabugogo. Divers médias pro-gouvernementaux ont interprété cette mort comme un suicide et leur version était contradictoire en ce qu’ils se mirent précipitamment à inventer la raison qui l’a poussé à se suicider comme si le disparu le leur avait dit et comme s’ils avaient surpris sa femme et son amant en pleine action; tandis que d’autres médias indépendants ont attribué l’incident à un assassinat planifié pour le punir de sa position politique qui dérangeait le régime rwandais qu’il accusait de soutenir les groupes armés qui persécutent quotidiennement les Banyamulenge en RDC et continuent de les tuer en toute impunité. A-t-il vraiment décidé de tomber seul ou a-t-il été poussé par quelqu’un ? Le présent article analyse les différents facteurs à l’origine de cette mort inattendue.
La famille de Me Bukuru Ntwari, un militant contre les violations des droits humais dont est victime le peuple Banyamulenge habitant dans le sud-est de la République démocratique du Congo, a déclaré que l’activiste était tombé d’un immeuble commercial situé à Kigali, la capitale du Rwanda, et était décédé.
Les médias locaux ont largement rapporté sa mort mercredi suggérant qu’il s’agissait d’un suicide.
Mais la BBC a été informée par les membres de la famille qu’ils soupçonnaient un meurtre planifié. Un proche parent de Me Ntwari a déclaré que « nous soupçonnons un meurtre pré-planifié contre notre voix principale ».
Une enquête a été ouverte sur sa mort, a révélé l’Office rwandais des Investigations. Me Bukuru Ntwari, qui est avocat, était connu pour son franc-parler, en particulier contre le meurtre de Banyamulenge dans leur région d’origine de la province du Sud-Kivu en RD Congo. En tant que défenseur contre la violence dans la région, il l’a qualifié de « génocide ».
Les groupes qui vivent dans la région montagneuse de la RDC sont souvent attaqués par de nombreux groupes ethniquement liés qui s’affrontent dans cette région.
Il y a eu de nombreuses déclarations selon lesquelles certains groupes armés sont soutenus par le gouvernement du Burundi ou du Rwanda, mais les autorités des deux pays ont nié l’allégation. La famille de Me Bukuru Ntwari a allégué qu’il avait été tué et une enquête a été ordonnée sur la cause de sa mort.
Le véritable meurtrier de Me Bukuru Ntwari
Me Bukuru Ntwari a été manifestement poussé par un tueur à gage. En effet, les différents media qui prenaient la positions du suicide avaient l’intention de museler le point de vue contraire et cette tentative échoua car les raisons du suicide présumées n’étaient pas justifiées ni dans les faits ni en droit étant donné que le regretté Bukuru n’a pas révélé son grief aucun témoin qui pourrait par la suite confirmer un tel alibi.
Implications du Rwanda dans la persécution des Banyamulenge en RDC
Suite aux diverses violations des droits humains délibérément commises contre la communauté des Banyamulenge résidant à Minembwe par d’autres ethnies telles que les Bafulero ; Babembe et surtout par la rébellion nommée Red Tabara opérant dans la zone qui combattrait prétendument le gouvernement burundais et qui est une création rwandaise et comprenant certains éléments des Forces de défense rwandaises, Me Bukuru Ntwari a osé dénoncer le rôle du Rwanda dans les tueries dont sa communauté est victime à travers différents médias et cela n’a pas été apprécié par le régime rwandais
Le prétexte d’adultère qui aurait été commis par sa femme dans l’immeuble est une pure invention étant donné que l’immeuble Inkundamahoro n’est pas un hôtel et l’épouse de feu Bukuru Ntwari a déclaré qu’il s’agit d’une intention cynique d’exacerber sa douleur. Tout au plus‚ en matière de preuve‚ comme ils prétendent que le mari cocu s’était plaint d’être trompé ils auraient dû débusquer sa femme et son amant dont les faits ont occasionné le soi-disant suicide.
Pour continuer à entretenir un tel mensonge, le régime rwandais a décidé d’éliminer ce leader d’opinion et continue d’intimider d’autres intellectuels qui travaillent dans la fonction publique. Ainsi, Dr Shyaka Mugabe Aggée, directeur du centre de gestion des conflits à l’Université du Rwanda, interrogé sur la violence exercée contre ses frères et sœurs à Mulenge a attribué les facteurs à des conflits inter-ethniques entre eux et les ethnies voisines en mettant de côté le fait que ces criminels ainsi que la rébellion Red Tabara sont soutenus par le gouvernement rwandais et que certains soldats rwandais peuvent être identifiés parmi eux. Il va de soi que s’il osait le faire‚ il aurait automatiquement perdu son poste ou victimisé d’une façon ou d’une autre.
Par ailleurs, le Rwanda ne souhaite pas que les personnes qu’il abrite comme réfugiés retournent au Congo, leur terre natale car il se cache derrière eux pour instituer des rébellions prétendument revendiquant leurs droits mais sa vraie intention étant de toujours qu’ils puissent lui faciliter l’accès au sol de la RDC pour en extraire ses minerais naturels par le biais d’interminables rebellions armées.
Pire, lorsque le gouvernement rwandais décide de réprimer les grèves souvent menées par ces réfugiés soit dans le camp de Gihembe situé à Gicumbi dans la province du Nord soit à Kiziba à Karongi dans la province de l’Ouest du pays, il utilise leurs enfants qui sont enrôlés dans l’armée et dans la police qui l’aideront par ailleurs à organiser des rébellions en RDC. A titre d’illustration, le général Laurent Nkunda était un soldat de l’APR ; de même, le général Ntaganda Bosco ; le colonel Mutebutsi et d’autres dirigeants ont été formés par l’APR et cette opportunité a permis au régime rwandais de les leurrer en les envoyant revendiquer leurs droits face au pouvoir de la RDC qui les persécuterait d’une façon ou d’une autre pendant qu’en même temps il déployait son armée pour conquérir des régions au sous-sol riche en ressources naturelles.
Ces soulèvements de Bagogwe et de Banyamulenge ne sont pas prometteurs pour les autorités rwandaises qui devront faire face à leur refus de participer aux futures expéditions militaires sur le territoire de la RDC.
Les Banyamulenge et les Bagogwe sont-ils rwandais ou congolais?
La confusion de citoyenneté est entretenue par le Rwanda à deux niveaux. D’un côté, ce sont des citoyens rwandais tutsi qui ont fui le pays en raison des persécutions politiques dont ils ont fait l’objet et ont été accueillis en RDC en tant que réfugiés ; la raison pour laquelle ils ont massivement rejoint la rébellion du FPR pour retourner dans leur pays natal le Rwanda. De l’autre côté, les territoires qu’ils habitent appartenaient au Rwanda surtout acquis avec les conquêtes des rois rwandais Ruganzu Ndoli et Kigeri IV Rwabugiri qui ont organisé des guerres dans la région de l’Est de la RDC ;dans le Sud-Est et Sud-Ouest de l’Ouganda ; d’insinuer qu’ils s’y sont installés par la suite et qu’ils doivent revendiquer leurs droits aux terres acquises il y a belle lurette si les règles de la prescription sont prises en considération; tout en foulant aux pieds le principe de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation.
Cependant, la plupart des Bagogwe et des Banyamulenge se croient congolais et ce sentiment patriotique les pousse à désapprouver les plans expansionnistes du Rwanda de les monter contre leurs compatriotes de la RDC, ce qui déplait le régime du FPR qui dès lors cherche des stratégies pour arrêter ce patriotisme qui peut perturber son plan en assassinant leurs dirigeants influents.
Le régime rwandais avait un grand intérêt à l’élimination de Me Bukuru Ntwari étant donné sa position politique ouvertement hostile à ses plans politiques régionaux. Il l’avait habilement planifié et intelligemment mis en œuvre mais malheureusement pour les criminels l’analyse prudente des circonstances entourant l’alibi du suicide conduit à une série de doutes. De plus‚ tout observateur au courant des politiques régionales du Rwanda dans les grands lacs où vivaient les Banyamulenge et les Bagogwe découvre facilement les tenants et aboutissants de la persécution qui prévaut contre ces tribus par le régime de Kigali. La récente fusillade des réfugiés du camp de Kiziba en est un exemple criant.