Rapport de Human Rights Watch : Les Forces Rwandaises et le M23 Accusés de Ciblage Indiscriminé des Civils près de Goma

Le 26 septembre 2024, l’organisation Human Rights Watch (HRW) a publié un rapport accusant le groupe rebelle M23 et les Forces de Défense Rwandaises (RDF) d’avoir tiré de manière indiscriminée sur des civils et des camps de déplacés dans des zones densément peuplées à proximité de la ville de Goma, dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC). Cette action aurait causé la mort de nombreux civils et représente une violation flagrante des droits de l’homme. Ce rapport évoque également la responsabilité des Forces Armées de la RDC (FARDC) et de groupes armés alliés, qui ont exposé les civils déplacés à des risques accrus.

Selon HRW, le conflit a causé des souffrances immenses aux populations civiles prises entre les feux croisés des différentes forces. Depuis le début de cette année, des affrontements entre le M23, soutenu par les RDF, et les FARDC ont mis en danger environ 500 000 personnes déplacées aux abords de Goma, les exposant aux tirs croisés d’artillerie lourde.

Le rapport souligne que ces attaques se sont intensifiées en mai 2024, lorsqu’un assaut qualifié de « particulièrement grave » a été mené contre les camps de Lac Vert et de Mugunga, situés à une quinzaine de kilomètres à l’ouest de Goma. HRW indique qu’entre 10h00 et 11h00 le 3 mai, au moins trois roquettes de type 122 mm ont été tirées en direction de ces camps par les forces M23 et RDF, tuant au moins 17 civils, dont 15 enfants, et en blessant 35 autres.

Les civils pris pour cible n’ont pas seulement été victimes de tirs d’artillerie, mais également d’autres abus. HRW rapporte que les FARDC et les combattants alliés, tels que ceux de Wazalendo, ont violé les droits des civils en entrant dans les camps, où ils ont commis des exactions, dont des meurtres et des agressions sexuelles. Un incident particulièrement troublant est relaté, où un soldat FARDC, refusant de payer sa consommation d’alcool, a ouvert le feu et tué une jeune fille, avant d’être lui-même lynché par des habitants révoltés.

Les violences sexuelles sont également évoquées de manière détaillée. Clémentine de Montjoye, chercheuse principale de HRW en Afrique, a expliqué que des témoignages recueillis auprès des victimes et des organisations humanitaires, comme Médecins Sans Frontières (MSF), révèlent que des femmes et des jeunes filles ont été victimes de viols tant par les rebelles du M23 que par les soldats FARDC ou les miliciens Wazalendo. Selon MSF, entre novembre 2023 et avril 2024, une femme sur dix dans certains camps de déplacés autour de Goma a déclaré avoir été violée.

HRW appelle toutes les parties à respecter le droit international humanitaire et à éviter de placer des bases militaires à proximité des camps de déplacés. L’organisation exhorte également les commandants des forces en présence à prendre leurs responsabilités et à rendre compte des exactions commises par leurs hommes.

Clémentine de Montjoye a réitéré que la communauté internationale, y compris l’ONU, l’Union Européenne, et les États-Unis, devrait maintenir et renforcer les sanctions contre les dirigeants du M23, ainsi que contre les autorités impliquées dans ces crimes, tant en RDC qu’au Rwanda. Elle a déclaré que fournir des armes aux groupes commettant de telles atrocités pourrait être considéré comme une complicité de crimes de guerre.

Depuis la reprise du conflit entre le M23 et les FARDC à la fin de 2021, la situation humanitaire dans l’est de la RDC n’a cessé de se dégrader. Aujourd’hui, environ 2,4 millions de personnes sont déplacées dans la seule région du Nord-Kivu, et le nombre total de déplacés internes dans le pays atteint près de 7 millions, selon l’ONU. Cette crise s’inscrit dans un contexte de guerre par procuration, exacerbée par la rivalité pour le contrôle des ressources minières.

Le rapport mentionne également les conclusions des experts de l’ONU publiées en juillet 2024, qui estiment que le Rwanda dispose de 4 000 soldats présents en RDC, combattant aux côtés du M23. Interrogé par la BBC à ce sujet, le porte-parole du gouvernement rwandais n’a pas nié ces accusations, tout en soulignant le manque de volonté politique de Kinshasa pour résoudre la crise persistante dans l’est du pays.