Régime FPR vs religions : les musulmans dans le collimateur

Par The Rwandan Analyst

Récemment, le président Kagame Paul dans son discours a parlé des interventions des RDF au Mozambique et a révélé que parmi les rebelles d’Al-shabab il y avait des rwandais. Comme les rebelles mozambicains avaient précédemment déclaré qu’ils pouvaient exporter leur guerre au Rwanda en représailles contre son implication dans la guerre civile de leur pays, la conséquence était que soit des attaques seront menées, soit des rebelles planifiant de telles batailles seront interceptés. Sans surprise, un bon nombre de jeunes musulmans ont été arrêtés qui auraient été pris en flagrant délit avec des explosifs pour bombarder de nombreux bâtiments de la capitale Kigali. Font-ils vraiment partie des rebelles d’al-shabab? quels sont les vrais mobiles du régime rwandais pour appréhender ces jeunes musulmans innocents ? Les présentes lignes visent à discuter de ce genre de questions.

Relations entre le régime rwandais et les confessions religieuses

Depuis qu’il a pris le pouvoir en 1994, le régime du FPR est en conflit avec les institutions religieuses opérant au Rwanda, les accusant globalement de ne pas avoir empêché les haines interéthniques qui ont abouti à des tueries qui ont ensanglanté le pays.

Église catholique

Durant ses avancées pendant la rébellion, les militaires de l’APR s’en sont pris aux religieux et n’ont pas hésité à les assassiner. Ainsi, à Byumba, plus tard en avril 1994, des militaires du FPR ont tué un prêtre espagnol, Joaquin Valmajo, et trois prêtres rwandais : les abbés Joseph Hitimana, Faustin Mulindwa, et Fidèle Mulinda. Le 25 avril 1994, des militaires ont intercepté le père Valmajo et ses collègues rwandais à Kageyo et les ont empêchés de continuer jusqu’à Rwesero. Ils les ont insultés devant les militaires de la MINUAR, qui ne sont pas intervenus, et leur ont ordonné de se rendre dans la ville de Byumba. Une fois sur place, le père Valmajo a été en contact avec les autorités espagnoles par radio pendant trois jours puis a disparu. Après des demandes urgentes du gouvernement espagnol, un responsable du FPR a demandé des informations au colonel Kayumba Nyamwasa, alors chef adjoint de l’état-major de la police nationale et de fait chef du renseignement militaire. Le colonel Kayumba a rapporté que des soldats du FPR avaient tué le prêtre et cette conclusion a été transmise au gouvernement espagnol. Le 21 avril 1994, le FPR a tué des prêtres catholiques qui s’étaient réfugiés au séminaire de Rwesero. Ces prêtres sont : Christian Nkiliyehe, Anastase Nkundabanyanga, Joseph Hitimana, Gaspard Mudashimwa, Alexis Havugimana, Celestin Muhayimana et Augustin Mashyenderi. Jusqu’à présent, aucun militaire du FPR n’a été poursuivi. Les meurtres de ressortissants étrangers tels que le Père Valmajo d’Espagne, tué à Nyinawimana en avril 1994 ; Père Claude Simard, un Canadien tué le 17 octobre 1994; trois employés espagnols de l’organisation non gouvernementale Medicos del Mundo tués le 18 janvier 1997 ; Le père Guy Pinard, un Canadien tué le 2 février 1997, le père Curick Vjechoslav de Croatie assassiné à Kigali en 1998, et le père Duchamp, un Canadien. La plus connue et la plus condamnée des exécutions par des soldats du FPR fut le meurtre de l’archevêque catholique de Kigali, trois autres évêques et dix prêtres de la paroisse de Byimana, près de Kabgayi, début juin. Le seul prêtre qui a survécu à l’attaque a raconté que le groupe du clergé avait été arrêté par le FPR à Kabgayi et déplacé à Byimana le 2 juin. Plusieurs jours plus tard, des soldats qui gardaient le clergé ont fait irruption dans la pièce où ils étaient rassemblés et les ont abattus. Le prêtre qui a réussi à s’enfuir a ensuite été capturé par des militaires du FPR qui n’ont accepté de le relâcher qu’après avoir accepté leur version des faits, à savoir que les militaires ont commis les tueries en représailles au massacre de leurs propres familles. Lorsque le FPR a reconnu officiellement la responsabilité des massacres quelques jours plus tard, il a déclaré qu’un des meurtriers avait été tué en fuite et que les autres étaient recherchés et seraient jugés. Apparemment, aucun n’a jamais été attrapé et les autorités du FPR n’ont jamais rendu publique aucune preuve pour étayer leur affirmation selon laquelle ces meurtres étaient des faits de représailles non autorisés. L’archevêque Vincent Nsengiyumva était connu pour sa proximité avec Habyarimana, mais tous les membres du groupe n’occupaient pas un tel poste. L’évêque Thaddée Nsengiyumva, également assassiné, était favorable à une réforme politique et avait cherché à éloigner l’église du gouvernement Habyarimana. Le 5 juin 1994, des soldats du FPR ont ainsi exécuté sommairement trois évêques catholiques : Vincent Nsengiyumva, archevêque de Kigali ; Thaddée Nsengiyumva, évêque de Kabgayi ; Joseph Ruzindana, évêque de Byumba ; et neuf prêtres catholiques : Mgr. Innocent Gasabwoya, ancien vicaire général évêque de Kamonyi ; Mgr. Jean-Marie Vianney Rwabilinda, le père Emmanuel Uwimana, chancelier du petit séminaire de Kabgayi, le père Sylvestre Ndaberetse, le père Bernard Ntamugabumwe, le père François Xavier Muligo, le père Alfred Kayibanda, et Fidele Gahonzire Des soldats humains du FPR ont également exécuté le frère Jean Baptiste Nsinga, président de Frères St Joseph. La persécution du clergé catholique s’est poursuivie en RDC où ont été tués l’archevêque Christophe Munzihirwa de Bukavu et Mgr Nikwigize Phocas ancien évêque de Ruhengeri.

ADEPR

Cette église de Pentecôte souffre maintenant d’une crise de gouvernance où le Conseil de gouvernance rwandais (RGB) nomme quotidiennement des pasteurs partisans du FPR et licencie les pasteurs qui n’ont pas épousé son idéologie. Cette pratique a désorienté les adeptes de cette église de sorte qu’ils ont commencé à la quitter et à rejoindre d’autres nouvelles sectes pullulant dans le pays.

Le FPR et les musulmans

La présence de RDF au Mozambique où il combat al-shabab est l’occasion de persécuter les musulmans rwandais qui ne sont pas partisans du FPR.

Le tandem chiites et sunnites

La communauté musulmane du Rwanda (RMC) est constituée de sunnites et ces derniers ne représentent pas tous les musulmans étant donné qu’il existe également des chiites et que les deux tendances suivent souvent des positions théologiques conflictuelles. Au début du régime du FPR, les musulmans étaient en bons termes avec le gouvernement et certains disaient qu’ils n’avaient pas été impliqués dans le génocide, faisant fi de grandes figures comme Ngeze Hassan et Yussuf Munyakazi qui sont emprisonnés par le TPIR pour ce crime.

Avec le temps, le FPR s’est ingéré dans l’élection des muftis. La question qui n’est pas encore traitée est que le régime soutient les candidats venant de l’association des musulmans du rwanda(AMUR) dominée par les sunnites alors que les chiites occupent aussi un bon nombre et sous la règle « divide ut imperas », les chiites sont considérés comme des terroristes et des ennemis de la nation.

 Les jeunes arrêtés

La police rwandaise a arrêté 13 personnes soupçonnées d’avoir fomenté des attaques « terroristes » dans la capitale Kigali et les a présentées devant les médias. Les suspects ont été arrêtés avec du matériel de fabrication de bombes, notamment des explosifs, des fils, des clous et des téléphones, a indiqué la police nationale rwandaise dans un communiqué. Les enquêtes ont révélé que la cellule terroriste travaillait avec les Forces démocratiques alliées (ADF) », a-t-il déclaré, faisant référence à un groupe djihadiste présumé actif dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) voisine. Le redoutable ADF, historiquement un groupe rebelle ougandais, a été accusé d’avoir tué des milliers de civils dans l’est de la République démocratique du Congo. Certaines de ses attaques ont été revendiquées par le groupe État islamique, qui a désigné l’ADF comme province de l’État islamique d’Afrique centrale (ISCAP). En mars, les États-Unis ont officiellement lié l’ADF au groupe EI et identifié son chef comme Seka Musa Baluku. En août, l’Ouganda a déclaré qu’il avait déjoué un attentat-suicide sur les funérailles d’un haut commandant militaire et de police, Paul Lokech, et l’a imputé à l’ADF. Lokech, surnommé le « Lion de Mogadiscio », avait dirigé des unités de l’Union africaine qui ont mis en déroute Al -Al-Shabaab lié à Qaïda depuis la capitale somalienne en 2011. A Kigali, un porte-parole de la police rwandaise a déclaré que la première arrestation avait eu lieu en août et d’autres en septembre. Le complot d’attaque présumé a été annoncé alors que les troupes rwandaises combattent des djihadistes liés à l’EI dans le nord du Mozambique. Cependant, pour les analystes qui connaissent bien le fonctionnement des services rwandais de renseignement, ces jeunes musulmans arrêtés et apparemment avouant le complot présumé pour bombarder des bâtiments de la capitale sont tout simplement innocents et ils sont sous intimidation après avoir été torturés dans des maisons apprêtées pour ces forfaits.

 La véritable identité des terroristes présumés

Le groupe est constitué de jeunes chiites considérés comme ennemis par le groupe sunnite et victimes de fausses dénonciations de RMC comme l’a confirmé le Check de Nyanza dans la province du Sud. Parmi eux, il y a ceux qui avaient disparu plus tôt. L’identification de ces jeunes innocents prouve que le régime ne fait que justifier ses implication au Mozambique et intimider la partie des musulmans qui ne se plient pas facilement au FPR.

Conclusion

Ne faites rien sans nous ; c’est le message général adressé à toutes les institutions privées dont les commerçants mais aussi le clergé. La désintégration des religions par le régime s’apparente à ce qui se fait dans le secteur privé où des magnats prolifiques s’appauvrissent lorsqu’ils osent exclure le régime dans leurs affaires. Sinon, les musulmans rwandais doivent faire attention et s’en tenir à leur unité car le régime veut les diviser comme il l’a fait pour les autres religions.