Le 3 septembre 2024, Aimable Karasira, ancien professeur à l’Université du Rwanda et personnalité publique connue pour ses prises de position critiques vis-à-vis du gouvernement, s’est présenté devant la cour pour solliciter la libération de ses avoirs saisis, estimés à plus de 100 millions de francs rwandais, afin de pouvoir payer son propre avocat. Il a exprimé son refus d’être assisté par un avocat désigné par l’État, réservés aux personnes sans ressources suffisantes, et a insisté sur le fait qu’il possède les biens nécessaires pour financer sa défense.
Karasira a expliqué à la cour que parmi les éléments cités par le ministère public dans l’acte d’accusation figure la saisie de certains de ses avoirs financiers, situés entre 30 et 40 millions de francs rwandais. Le procureur a justifié cette saisie en affirmant que ces fonds proviendraient de sources criminelles, ce que Karasira a partiellement reconnu en déclarant : « Je comprends la saisie de ces fonds comme preuves potentielles. » Cependant, il a contesté la saisie d’autres fonds, notamment en dollars et en euros, qu’il a déposés dans diverses banques avant l’an 2000. Il estime que cette somme, ainsi que 15 parcelles qu’il possède, devraient lui permettre de couvrir les frais de son avocat.
Karasira s’est demandé pourquoi, dans le cadre de son procès, il lui est interdit d’utiliser ses propres biens pour se défendre, alors qu’il avait précédemment obtenu l’autorisation de débloquer 7 millions de francs pour rémunérer ses avocats lors d’une audience sur sa détention provisoire.
Le ministère public a persisté dans sa position, affirmant que la totalité des biens de Karasira était bloquée en raison des accusations portées contre lui, notamment le manque de transparence quant à l’origine de sa fortune. « S’il souhaite prouver la provenance de ses fonds, il devra entamer la procédure au fond, » a ajouté le procureur. Karasira est accusé de six chefs d’inculpation, parmi lesquels la négation du génocide, l’incitation à la violence publique, et l’incapacité à justifier l’origine de ses biens. Il réfute fermement l’ensemble des accusations.
Le dossier de Karasira a pris un nouveau tournant en mai dernier lorsque son avocat, Me Gatera Gashabana, s’est retiré de l’affaire pour des raisons personnelles, laissant ainsi l’accusé sans défenseur attitré. Depuis, Karasira cherche à engager un nouvel avocat, mais il refuse l’aide de l’État, arguant qu’il possède les moyens nécessaires pour se défendre. Il a même évoqué la possibilité de collecter des fonds auprès de ses amis s’il en était réduit à cette option.
Le tribunal a donné à Karasira trois options : se défendre seul, payer ses avocats ou accepter l’aide d’un avocat commis d’office. Karasira a sollicité un délai pour organiser sa défense, affirmant qu’il possède les ressources nécessaires pour financer son propre avocat. Il a insisté sur le fait qu’il avait enseigné à l’université et qu’il détenait des biens familiaux qui pourraient couvrir ses frais de justice. Le juge lui a accordé jusqu’au 5 novembre pour trouver un avocat, mais Karasira a exprimé son mécontentement face à cette décision, jugeant qu’il n’aurait pas suffisamment de temps pour se préparer convenablement à la procédure.
Ainsi, Karasira se trouve dans une situation délicate, où ses biens sont saisis par l’État sous l’accusation de provenir d’activités criminelles, tout en revendiquant son droit de les utiliser pour organiser sa défense. Cette affaire met en lumière des questions critiques concernant la transparence des biens et les droits de l’accusé face à des accusations graves, ainsi que les enjeux politiques sous-jacents dans un contexte où Karasira est connu pour avoir critiqué publiquement le régime en place.