La saisie d’équipements électroniques au Bénin : une violation des droits fondamentaux des prisonniers rwandais du TPIR ?

Le 6 septembre 2024, John Philpot, un avocat international de la défense expérimenté, ayant plaidé devant la Cour Pénale Internationale (CPI) ainsi que le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR), a publié une lettre dénonçant une saisie d’équipements électroniques appartenant à des prisonniers du TPIR au Bénin. Cette confiscation, effectuée le 16 août dernier par l’administration pénitentiaire béninoise, inclut des ordinateurs, des disques durs, des clés USB et, selon toute vraisemblance, des téléphones portables.

Les prisonniers concernés, condamnés par le TPIR, utilisent ces outils pour des raisons variées et cruciales, notamment la gestion de leurs archives judiciaires et politiques. Ces équipements contiennent des informations essentielles relatives à l’administration de leur peine, des réclamations de remboursements pour frais médicaux, ainsi que des documents confidentiels liés à leurs dossiers juridiques. Plusieurs d’entre eux sont engagés dans l’écriture de livres ou travaillent sur des demandes de révision de leurs jugements ou de mise en liberté. Le matériel saisi inclut des informations sensibles, comme les identités des témoins protégés, aussi bien pour la défense que pour l’accusation.

La confiscation de ces appareils soulève de sérieuses questions quant à la violation des droits fondamentaux de ces détenus. En effet, la correspondance entre les prisonniers et leurs avocats, protégée par le secret professionnel, se trouve également compromise. De plus, cette situation pourrait mettre en danger les témoins, notamment ceux résidant au Rwanda, en Afrique ou en Occident, en raison de la nature hautement confidentielle des informations contenues dans les archives.

Les peines prononcées par le TPIR sont, selon plusieurs observateurs, extrêmement longues. Pour les détenus concernés, le suivi de leurs affaires judiciaires et la possibilité de solliciter une révision de leurs dossiers représentent souvent la seule perspective d’espoir. La saisie de leurs outils de travail ne fait qu’aggraver leur détresse et complexifie encore davantage leurs démarches pour obtenir justice.

John Philpot et d’autres défenseurs de ces prisonniers dénoncent une situation injuste. Ils considèrent que ces hommes, bien qu’ils aient été condamnés, sont avant tout des prisonniers politiques. À ce titre, ils méritent un traitement respectueux de leurs droits fondamentaux. La confiscation de leurs équipements ne peut être perçue autrement qu’une entrave à leurs droits, et une violation flagrante des principes de justice équitable.

Philpot appelle la communauté internationale à soutenir la demande de restitution des ordinateurs, disques durs et clés USB des prisonniers du TPIR. Dans sa lettre, il insiste sur le caractère essentiel de ces outils pour la défense des détenus et pour la protection des témoins, déjà exposés à des risques considérables.

Cette situation met également en lumière la nature du régime en place au Rwanda, dirigé par le Président Paul Kagame, accusé depuis de nombreuses années de réprimer toute forme d’opposition politique. L’implication du Rwanda dans ces affaires, ainsi que le contrôle qu’il exerce sur les institutions judiciaires internationales, soulèvent de sérieuses interrogations sur l’indépendance et l’impartialité de ces dernières. Les liens politiques entre le régime de Kigali et les instances internationales sont un facteur qui ne peut être ignoré dans l’analyse de cette affaire.

Cette saisie d’équipements électroniques au Bénin doit être dénoncée non seulement comme une atteinte aux droits des détenus, mais également comme une nouvelle illustration des difficultés persistantes dans la quête de justice pour les prisonniers politiques du TPIR.