DECLARATION DE MOÏSE NYARUGABO: MENACES ET ESCROQUERIE RHÉTORIQUE!

Dans un ton ferme le sénateur Moïse NYARUGABO a déclaré dans une vidéo qui circule ce qui suit :

«Nous ,nous sommes demandeurs pour la paix. Et je pense qu’ils n’ont pas de choix et Muhindo (député Muhindo Nzangi) devrait comprendre ça. Nous n’avons que deux choix : ou nous allons vivre ensemble comme des frères,où nous allons mourir ensemble comme des idiots. C’est à eux de choisir. Mais je veux dire aussi. Ceux qui veulent faire du populisme que je vois là,qui veulent en fait gagner un peu de popularité sur le cendre d’un peuple,sur le cendre des Banyamulenge, où dans l’étang de leur sang, ils vont s’y noyer »

En suivant les propos de Moïse NYARUGABO, avec ma maîtrise des tactiques rhétoriques puisées de la culture de sa communauté (rwandophone),je suis arrivé à trois conclusions :

1. Il s’agit du «sophisme de l’appel aux conséquences» : NYARUGABO cherche à justifier leur thèse de la création de la commune de Minembwe en créant l’illusion que,faute de la soutenir ou se plier à leur volonté,se produiront des conséquences fâcheuses pour les populations locales et l’élite qui s’y oppose.

2. C’est aussi le «sophisme du faux dilemme » : Moïse NYARUGABO veux monter qu’il n’y a pas d’alternative possible entre le maintien de la commune telle qu’elle a été créée dans la violation des normes et supprimer définitivement cette commune.

3. Avec cette rhétorique sophistique, Moïse NYARUGABO poursuit trois objectifs : tenter de légitimer la création de cette commune,se camoufler derrière le mot «paix» tout en brandissant leur capacité de nuisance(sachant qu’ils sont en réalité belliqueux) et enfin, imposer un sentiment de peur( «appel à la terreur», c’est aussi un sophisme, un argument rhétologique fallacieux qui est utilisé)

Notre modeste expérience dans cette région des Grand-Lacs et la maîtrise des enjeux et des acteurs du conflit dans toutes leurs dimensions (anthropologie, ethnologie, sociologie et histoire) nous a suffisamment appris que les discours des uns et des autres constituent des instruments de guerre et de déstabilisation. Ils illustrent des tactiques visant à créer les réalités pour atteindre les objectifs recherchés.

S’il y avait une vision «globale» de la sécurité au sein de nos services de sécurité ou si c’était donné à tout le monde de dénicher les tactiques que contiennent les discours des uns et des autres,on aurait peut-être prévenu plusieurs catastrophes qui endeuillent la région depuis le 1 octobre 1990, le jour où tout commença !

En plus d’attirer l’attention de mon peuple pour plus de vigilance, je voudrais dire au compatriote et honorable Moïse NYARUGABO de cesser ces menaces inutiles. La paix au Kivu n’est pas tributaire de la création frauduleuse de la commune de Minembwe. C’est bien le contraire ! La paix chez nous(Kivu) ne doit pas être conditionnée par la création un quelconque territoire administratif ou coutumier autonome des Banyamulenge.

Je dénonce cette attitude qui consiste à faire croire systématiquement que lorsqu’on ne cède pas à des revendications communauristes les gens vont mourir en masse. C’est arrogant, c’est criminel, c’est menançant… ! Avec ou sans Minembwe (commune) la communauté Banyamulenge et les communautés voisines doivent vivre en paix. C’est le principe qu’un homme d’État que vous êtes devrait défendre. C’est à l’État de prendre ses responsabilités pour discipliner toute le monde et impulser les facteurs de la paix intercommunautaire. Minembwe ne doit pas être érigé en commune tout simplement parce que l’élite des Banyamulenges veut qu’il soit ainsi.

Le processus doit être consensuel (implication de toutes les communautés locales) et respectueux des lois de la république. C’est ça l’alternative ! Et je pense que la commission annoncée par le Président Félix Tchisekedi et les démarches au niveau de l’Assemblée nationale et conseil d’État consistent à exploiter cette alternative. Pourquoi l’élite Banyamulenge s’y oppose ?

Azarias Ruberwa s’est prononcé contre la mise sur pied de cette commission, disant que ça serait discriminatoire, à moins que la commission étudie travail sur toutes les ETD nouvellement créées (plusieurs centaines). Ici encore, c’est du pire sophisme, une argumentation fallacieuse de comparaison inappropriée. Comment peut-on créer une commission pour des entités territoriales qui ne posent aucun problème de procédure de création, des limites contestées,de reconnaissance par la population et qui ne sont pas en conflit avec la loi ?

30 octobre 2020

Marcelin CIKWANINE

DDH et expert en DESC

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