À l’occasion du trentième anniversaire du génocide rwandais, Jean-Marie Vianney Higiro, ancien directeur de l’Office Rwandais de l’Information (ORINFOR) et professeur de communications à l’Université de Western New England, offre une réflexion critique sur la narration historique actuelle du Rwanda, contrôlée par le Front Patriotique Rwandais (RPF) et son président, Paul Kagame. Ayant fui le Rwanda au début du génocide en 1994, Higiro exprime son inquiétude face à la représentation dichotomique du conflit, où les Hutus sont universellement criminalisés en tant que génocidaires et les Tutsis sont vus exclusivement comme des victimes.
Dans son message, Higiro réexamine les événements qui ont mené à l’invasion militaire du RPF en 1990 depuis l’Ouganda, soulignant les antécédents historiques de violence politique interne à la dynastie Tutsi avant la colonisation. Il conteste la simplification du récit génocidaire qui, selon lui, ignore les massacres perpétrés par le RPF contre des Hutus et des Tutsis considérés comme collaborateurs pendant et après l’invasion.
Higiro critique également la politique d’équilibre ethnique et régional du régime de Habyarimana, tout en mettant en lumière comment des Tutsis ont prospéré dans le secteur privé malgré les allégations de discrimination systématique. Il expose les actions brutales du RPF lors de son occupation des préfectures de Byumba et Ruhengeri, incluant des exactions contre les civils et la pratique d’une politique de la terre brûlée.
Le professeur invite les jeunes Rwandais à adopter une approche critique des récits historiques et à reconnaître la complexité des identités et des événements historiques qui façonnent le Rwanda contemporain. Il appelle à un dialogue inclusif parmi les élites Hutu, Tutsi, et Twa pour rédiger un nouveau contrat social qui reconnaisse la souffrance de tous les Rwandais, indépendamment de leur ethnicité, et qui remette en question le monopole du pouvoir par le RPF.
Ce message de Jean-Marie Vianney Higiro est un appel poignant à la réflexion et à la réconciliation. Il met en lumière la nécessité d’une histoire plus nuancée et moins polarisée qui inclut toutes les voix rwandaises. Tout en reconnaissant la complexité des tensions ethniques et politiques, Higiro défie la narrativisation simplifiée et souvent manipulée du génocide par le régime actuel. En appelant à une réévaluation des événements historiques et à une justice plus équilibrée, Higiro espère contribuer à un avenir où tous les Rwandais peuvent coexister pacifiquement.