Burundi: l’armée réaffirme sa neutralité, appelle au respect des droits garantis par la Constitution

Le ministre burundais de la Défense a réaffirmé samedi la neutralité de l’armée et demandé de cesser les atteintes aux droits constitutionnels des Burundais, quelques heures après l’annonce par son homologue de la Sécurité publique d’un durcissement de la répression de la contestation qui agite le pays.

Le général Pontien Gaciyubwenge a également appelé les acteurs politiques à éviter tout comportement indigne et action de nature à replonger le pays dans le sombre passé qu’il a vécu, en référence à la sanglante guerre civile (1993-2006) ayant opposé l’armée tutsi à des groupes rebelles hutu, qui hante encore les esprits et dont le pays – à l’histoire récente jalonnée par les massacre entre les deux communautés – peine à se remettre.

Le ministère met en garde ceux qui s’arrogent le droit de porter gratuitement atteinte aux droits que la Constitution garantit aux paisibles citoyens et leur demande d’y mettre fin sans délais, a déclaré le général Gaciyubwenge, lisant une déclaration à la presse, à l’issue de laquelle il a refusé de répondre aux questions.

Il semble faire implicitement référence à l’action de la police qui empêche depuis sept jours les opposants à un troisième mandat du président Pierre Nkurunziza de converger vers le centre-ville pour y manifester, provoquant des heurts réguliers, brutalement réprimés.

Le ministre de la Défense a souligné que personne ne peut demander à l’armée du Burundi d’adopter un comportement, une attitude ou des méthodes qui sont en contradiction avec l’accord d’Arusha et à la Constitution.

Les Accords d’Arusha, signés en 2000, ont ouvert la voie à la fin de la guerre civile. Ils prévoient notamment que les corps de défense et de sécurité sont non partisans et ne favorisent ni ne désavantagent aucun parti politique ou groupe ethnique.

Le ministre de la Sécurité publique, Gabriel Nizigama, avait promis samedi matin de durcir la répression contre les opposants au 3e mandat, dénonçant une entreprise terroriste au lendemain d’attaques à la grenade ayant tué deux policiers à Bujumbura.

Il avait affirmé que la police, en collaboration avec l’armée du Burundi, (allait) tout mettre en oeuvre pour arrêter ce soulèvement.

Jusqu’ici, les deux ministres faisaient ensemble leurs déclarations publiques relatives à la contestation en cours. Des proches du ministre de la Défense ont expliqué à l’AFP que des hauts gradés de l’armée l’avaient pressé de ne pas faire participer l’armée à la répression, de rappeler la neutralité des militaires et de se démarquer publiquement des positions très tranchées de son collègue.

Depuis le début du mouvement, l’armée s’interpose régulièrement entre la police et les manifestants pour éviter les dérapages. Les protestataires considèrent que les soldats sont neutres et les protègent des abus des policiers, acquis selon eux au Cndd-FDD au pouvoir.

Le général Gaciyubwenge met en garde également toute personne physique ou morale qui répandrait des messages divisionnistes et incendiaires visant à saper la paix et l’unité nationale et appelle la classe politique à respecter et faire respecter cet accord et la Constitution, sans autre détail.

La contestation a éclaté le 26 avril, au lendemain de la désignation par son parti, le Cndd-FDD, pour être son candidat à la présidentielle. Les opposants à cette candidature estiment qu’un nouveau mandat du président Nkurunziza, élu en 2005 et réélu en 2010, serait inconstitutionnel et contraire aux accords d’Arusha qui limitent à deux le nombre de mandats.

AFP