Kigali, en prévision des élections législatives d’août-septembre 2013, vient de modifier la loi sur les partis politiques, pour sceller irrémédiablement l’espace politique.
On croyait qu’au Rwanda, les institutions et les lois liberticides avaient atteint le fond et qu’il était inimaginable que le régime rwandais plombe encore l’espace politique. Eh bien, non, la dictature rwandaise ne connaît pas de fond. En effet, une nouvelle institution, l’Office rwandais de la gouvernance, créée en 2011, ainsi que la nouvelle loi sur les partis politiques nouvellement adoptée parla Chambredu Sénat, vont se charger de continuer à enfoncer le régime dans un abîme abyssal.
S’agissant de l’enregistrement et de l’agréation des partis, les compétences ont été transférées à une nébuleuse, appelée Office de la gouvernance citée plus haut dont l’indépendance est très contestable et douteuse puisque son mode de désignation ainsi que son contrat de performance relève du pouvoir discrétionnaire du Gouvernement.
Alors que selon l’ancienne loi, les partis politiques annonçaient seulement leur participation aux élections, selon la nouvelle loi, afin de barrer la route aux partis politiques d’opposition, il est question maintenant de demander à l’autorité politique l’autorisation de pouvoir participer aux élections et tenir des réunions publiques. On croit tout simplement rêver.
Les interdictions faites aux partis politiques (articles 20 à 39) reposent sur des critères aussi imprécis que flous tels que : actes divisionnistes, informations pouvant inciter à la division, actes prêtant main forte à l’ennemi, dire la vérité pendant la campagne électorale, éviter des faux contentieux, ternir l’image du Rwanda, déclarations pouvant entraîner toute sorte de discrimination et de division, actes pouvant provoquer la guerre, avoir l’idéologie génocidaire, et cætera. C’est dire que pour n’importe quoi, une formation politique peut se trouver injustement sanctionnée, suspendue ou tout simplement interdite.
Alors que les conditions d’enregistrement des articles 9, 10 et 11 de la loi peuvent être remplies, un parti peut se voir refuser l’agréation de manière arbitraire sans qu’il puisse recourir contre la décision de l’Office de la gouvernance. Ajouter à cela que ce dernier n’a pas l’obligation de justifier sa décision.
Il y a lieu aussi de constater une propension large du pouvoir judiciaire à se mêler des affaires qui relèvent de la gestion interne des partis politiques.
Enfin, s’il faut saluer la participation volontaire au forum des partis politiques, la reconnaissance des partis politiques d’opposition n’est pas non plus acquise.
Pour qui doutait encore de la volonté du pouvoir en place à monopoliser seul la vie publique, et à occuper avec ses partis satellites, tout l’espace politique, la preuve est faite et que les yeux se dessillent.
En conclusion, le parti FDU-Inkingi condamne une loi scélérate adoptée sans consultation dans le seul dessein d’empêcher aux partis politiques d’opposition l’agréation et la compétition pour le suffrage des citoyens.
Empêché déjà à tenir son congrès constitutif pour son enregistrement en tant que parti politique légalement constitué, avec une loi sur les partis en si net recul démocratique et un office de la gouvernance à la botte du régime rwandais, le parti FDU-Inkingi voit se fermer le dernier rideau du pluralisme démocratique au Rwanda. Il continuera à exiger cette ouverture de l’espace politique avec tous les moyens légaux et appelle tous les Rwandais à rester mobilisés pour réclamer leurs droits fondamentaux.
Fait à Paris, le 13 mai 2013
Dr Emmanuel MWISENEZA
FDU-Inkingi
Commissaire à l’Information et àla Communication