La multinationalité légalisée au Rwanda ou velléités expansionistes aux effets pervers?

Il est vrai que dans l’opinion publique congolaise, la question de la nationalité suscite des controverses, surtout lorsqu’il s’agit des rwandophones ou des banyamulenge. Les immigrés, les transplantés, les clandestins, les réfugiés… et pourtant la nationalité est un problème à la fois politique et juridique. Pourquoi la nationalité est-elle un problème dans la Région des Grands Lacs ? Cette région ignore-t-elle le droit ? En RDC, depuis l’époque belge jusqu’au régime de Mobutu, la question de la nationalité a été l’objet de satisfaction chez les uns, de frustration, de xénophobie chez les autres. Cela conduit à des attitudes d’exclusion, de règlements de compte, d’hostilités, de violations des droits de l’homme, des guerres dites de libération dont la guerre en cours déclenchée par les rebelles M23 rwandais se réclamant congolais.Sont-ils réellement congolais d’origine ou juste des anciens réfugiés dont se sert le Rwanda pour se maintenir en RDC pour se ravitailler en ressources naturelles? La présente analyse s’efforce de répondre à ce genre de questions tout en remontant aux varies origines du problème tenant compte des jalons posés ad hoc par le régime du FPR dès son accession au pouvoir à Kigali en 1994.

1.Les controverses sur la nationalité dans cette région des grands-lacs

Depuis l’avènement de la colonisation, on pourrait inventorier la loi sur la nationalité plus des dix textes qui vont du décret du 27 décembre 1892 jusqu’à la constitution du 18 février 2006. Seule l’interprétation et l’application posent problème.Aucune loi ne parle spécifiquement de la nationalité à accorder aux indigènes rwandais ou burundais établis au Congo;ni la Charte coloniale, l’Acte de Berlin de 1885, la Table Ronde de Bruxelles, ainsi que la Loi Fondamentale de 1960 abordent cette question. Malgré les allégations avancées par les rwandais, ces textes sont muets sur la question.Au lendemain de l’indépendance et dans le but d’éviter les déchirements ethnico- tribales, favorisant ainsi la réconciliation nationale, il faut soumettre la population au referendum constitutionnel à 1964 en vue de combler les lacunes de textes précédents. L’art 6 de la constitution de Luluabourg, reconnaît une seule nationalité Congolaise. Cette nationalité est attribuée à la date du 30 juin à toute personne dont un des descendants est ou a été établi sur le territoire du Congo avant le 18 octobre 1908. Mais au moment de sa promulgation, le pays sombra dans la rébellion et la tribu paya le lourd tribut, accusés de coalition avec l’ennemi.Le 24 novembre 1965, Mobutu accède au pouvoir. En 1971 partant de la Loi n° 71-020 du 26 mars 1971 et par la Loi n° 72-002 du 05 janvier 1972 relative à la Nationalité Zaïroise, il accorde la nationalité aux personnes originaires du Ruanda-Urundi établies au Congo à la date du 30 juin 1960. La nationalité est accordée aux personnes établies dans la province du Kivu avant le 1er janvier 1950 et qui ont continué à y résider depuis lors.Dans la 1ere Loi, on constate qu’elle ne concerne que les originaires du Ruanda-Urundi. L’on pensait ainsi mettre fin aux brutalités imposées aux rwandais de la part de Congolais par l’opération RRR (Rendez les Rwandais au Rwanda). En second lieu, le Directeur de Cabinet du Chef de l’Etat B. Bisengimana aurait pesé de son poids dans la signature de ces deux lois très largement favorables à ses frères. Ainsi, sera-t-il accusé  d’avoir régularisé les dossiers des nationalités de ses compatriotes Tutsis. Ces deux lois permirent aux immigrés rwandais d’obtenir les cartes d’identité zaïroise, des vastes concessions et des grandes entreprises au moment de la zaïrianisation, les postes importants dans le Gouvernement et les Services de Sécurité de l’Etat ainsi que dans les établissements universitaires.En 1980, submergés par des pétitions et revendications des hommes politiques, la question de la nationalité réapparaît sur scène et obligea les autorités de réagir. C’est ainsi qu’on promulgua la Loi n° 81-002 du 29 juin 1981 sur la Nationalité Zaïroise. Cette nouvelle Loi suscita des controverses. Le Zaïre fut accusé d’avoir peuplé le pays des étrangers et des personnes ayant la nationalité douteuse. Les Rwandais habitant le Nord Kivu adressent une lettre au Secrétaire Général de l’ONU demandant de créer un Etat séparé et indépendant du Nord Kivu. La raison est que la nationalité leur conférée venait d’être retirée. Malgré l’organisation de la Conférence Nationale Souveraine, les ressortissants rwandais n’obtiendront pas gain de cause. Néanmoins, la CNS retiendra le principe du respect de la loi sur la nationalité. Ce fait entraîna l’annulation de la représentation des sujets rwandophones aux travaux de la CNS. En parlant de la nationalité dans la Région de Grands Lacs, la question vise aussi les Burundais et le Rwandais que nous pouvons catégoriser en 2 groupes : les immigrés et les transplantés et le réfugiés. Les immigrés sont ceux qui sont arrivés avant la présence coloniale à cause des guerres des conquêtes au Rwanda et Burundi au 19 ème siècle à la recherche de l’espace vital. Patient Kanyamacumbi dira « les banyamulenge sont venus il y a plus de 2 siècles …mais ils étaient principalement Bahutu et Batutsi en provenance du Rwanda et du Burundi. Ils ont par ailleurs intégré en leur sein des éléments Tanzaniens des Bashi de Ngweshe et de Batela du temps du Baron Dhanis. » A ce niveau, les transplantés les personnes arrivées entre 1930 et 1950 dans le cadre de MIB et des populations rwandaises sont transplantées soit dans le but de pallier les famines au Rwanda et décongestionner un territoire surpeuplé, soit pour servir de main d’oeuvre dans les plantations du Kivu et dans l’industrie minière du Katanga. Pour Léon de Saint Moulin « le Kivu au contraire, a connu pendant les mêmes années 1948-1958 son accroissement le plus fort sur base d’un flux important d’immigration rwandaise organisée de 1945 à 1955. On estimait en cette dernière année que 170000 rwandais s’étaient installés au Kivu depuis le début de l’opération…d’après le recensement de 1970 au Kivu. Il y avait 335180 rwandais, installés pour la plupart au Nord Kivu ». Les plus grands problèmes pour les transplantés sont: la terre, la représentation politique et la nationalité. Les réfugiés sont ceux qui ont fait la révolution de 1959, les réfugiés burundais ayant fait le coup d’Etat depuis 1962. Depuis lors, la nationalité a été conférée à ces groupes sociaux devint l’objet des tractations chez le politiciens et chez les autochtones qui n’hésitent pas à les accuser d’avoir un projet d’annexion d’une partie du pays au Rwanda d’avoir élaboré le plan d’une nouvelle colonisation Tutsi, le Tutsiland et les indices le présagent.

2.Analyse: la double nationalité pronée par le Rwanda ou  une épée à double tranchants

Le Rwanda d’après 1994 est habité non seulememt par les gens qui y résidaient mais aussi ceux qui sont rentrés venant de l’étranger surtout des pays voisins comme le Burundi, la RDC, l’Ouganda et la Tanzanie. Comme pour tendre un piège aux Etats d’où ils provenaient,les nouveaux dirigeants du pays ont institué la double nationalité et tous ces anciens réfugiés ont gardé leur nationalités pour dire qu’ils sont restés ougandais, congolais, burundais et tanzaniens; qui plus est, la plupart sont d’ailleurs restés dans  ces pays hôtes semant ainsi la confusion et pourquoi pas l’insecurité récurrente.

1)Banyamulenge et bagogwe sont-ils rwandais ou congolais?

Après la victoire du FPR et son occupation du pays, il y a des flux de réfugiés venant de toutes parts regagnant leur pays d’origine qu’est le Rwanda. Ainsi au Rwanda nous avons des milliers de banyamulenge et de bagogwe dans la fonction publique, dans la police et dans l’armée .Toutefois, voulant exploiter le fait qu’ils n’ont pas perdu la nationalité congolaise, leurs frères ou parents possédant du bétail à l’est de la RDC sont restés, les frontières rwando-congolaises étant perméables de façon que des mouvements de ces populations allant ou venant dans les deux directions n’ont pas cessé surtout qu’au Rwanda ce sont leurs frères qui dirigent le pays. Quand on pose aux banyamulenge et aux bagogwe la question de savoir s’ils sont rwandais ou congolais,ils vous respondent qu’ils sont rwandais mais que quand un interet s’impose ils devienent des congolais surtout qu’ils y ont vecu.

En manière de conclusion,objectivement parlant Banyamulenge et Bagogwe sont des purs rwandais et leur congolité participe de la politique du mensonge que continue de cultiver le Rwanda pour insécuriser la région,supercherie selon laquelle ils sont congolais comme les autres et ont droit au gateau national. Ainsi le général Kabarebe s’improvisait Kabare congolais et devenant manu militari chef d’état major général de l’armée de la RDC en 1996; ce qui lui donna l’occasion de piller les minerais dont ce pays regorge au point qu’il est parmi les milliardaires du Rwanda. D’ailleurs, la richesse estimée à 600 millions de dollars attribuée à Kagame est provenue de ce butin.

2)Rwandais venus d’ouganda

Les Rwandais venus d’Ouganda ont gardé leur citoyenneté ougandaise et la plupart ayant fait fortune là-bas sont restés dans ce pays. Les ougandais d’origine se plaignent de leur présence et n’eût été la protection du président Museveni qui reconnait leur contribution dans la guerre qui lui a offert le pouvoir en 1986, ils en auraient été chassés depuis longtemps. Dans sa politique expansioniste, le président Kagame s’est targué de pouvoir les utiliser pour espionner le régime ougandais et pouvoir le renverser un jour. Ainsi, parmi les raisons de la récente rupture diplomatique entre le Rwanda et l’Ouganda figurait l’interception de communications qui intéressaient le Rwanda passant par MTN-Uganda qu’une rwandaise intentionnellement affectée là-bas transmettait à Kigali. Que dire des assassinats ciblés du généraux James Kazini en 2009 et Kaweesi Felix en 2017 qui n’appréciaient les ingérences du Rwanda dans les affaires ougandaises.

3)Rwandais venus du Burundi

Les Tutsi venus du Burundi se sont activement impliqués dans les troubles qui ont ensanganté le pays en 2015 quand le Rwanda voulait renverser le régime Nkurunziza exploitant le fait qu’il voulait briguer un troisième mandat.En effet,tout un bataillon de Rwandais avait investi la capitale et s’est livré aux assasinats ciblés dont le plus sinistrement célèbre est celui du général Adolphe Nshimirimana, alors chef des renseignements et démasqué,ils n’ont pas pu regagner le pays de provenance à pied et les services de renseignement burundais les captureront un à un; ce qui chagrina Kagame pris au dépourvu quand sa tactique accoucha d’une souris.

4)Rwandais venus de Tanzanie

La plupart d’intellectuels réfugiés rwandais n’ont pas regagné le pays en 1994 et s’étaient intégrés dans l’administration publique et dans l’armée du pays. Quand feu colonel Karegeya Patrick,ancien chef des renseignements extérieurs devenu alors dissident contre Kigali dévoila en 2012 au président Jakaya Kikwete le plan Kagame-Museveni de la création d’un empire hima sur toute la sous-région grâce à tous ces éléments déjà implantés sur place, tous ces rwandais furent expulsés du pays.

Conclusion

La nationalité en RDC est exclusive, la double nationalité n’est pas admise. Tel est l’interprétation de la constitution du 18 février 2006. Tandis qu’au Rwanda, la double nationalité est admise mais sa jouissance effective n’est pas toujours assurée et le problème se pose en termes d’égalité pour les citoyens. Avec les guerres civiles, le génocide, l’exclusion des uns (Hutu) se fait toujours sentir (voir le processus électoral) et leur marginalisation est visible. La question devenant de plus en plus difficile, l’identité transnationale profite aux vélléites expansionistes et parasitistes au moyen desquels le Rwanda et l’Ouganda ont intérêt à toujours se créer des rebellions dans ce vaste pays truffé de ressources qu’ils exploitent chaque fois que de besoin. Est-ce que ce mensonge institutionnalisé va perdurer?Quand le monde les démasquera, tout s’écroulera comme un château de cartes.