Le chef de la diplomatie belge, Didier Reynders, a pris vendredi ses distances avec les propos du président français François Hollande, qui a jugé cette semaine “tout à fait inacceptable” la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo (RDC). “Je regrette toujours qu’il y ait des déclarations très fortes qui sont davantage destinées à l’opinion nationale”, a-t-il dit.
Arrivé jeudi soir à Kinshasa pour participer au 14e sommet de la Francophonie, M. Reynders a rencontré vendredi matin le Premier ministre Augustin Matata Ponyo, avant de s’entretenir avec le député d’opposition Samy Badibanga. Les deux interlocuteurs tiennent des discours très différents sur l’état de la démocratie au Congo.
“En ce qui concerne la démocratie, ce pays a réalisé beaucoup de progrès”, a affirmé M. Matata en demandant “combien de parlements en Afrique ont un tel pourcentage de députés issus de l’opposition”. S’il admet “des insuffisances, comme dans le monde entier” en matière de droits de l’homme, le Premier ministre estime que son pays est “une jeune démocratie qu’on ne peut pas comparer aux vieilles démocraties”.
Opinion nationale
Pour M. Badibanga, au contraire, “on ne peut pas vraiment parler de progrès démocratiques”. Le député, qui préside le groupe de l’Union pour la Démocratie et le Progrès social (UDPS) à l’Assemblée nationale, pointe en particulier la lenteur de la réforme de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) et la difficulté de nommer un porte-parole de l’opposition comme le prévoit la Constitution.
Du côté belge, M. Reynders a dit “appuyer le Premier ministre dans ses démarches de réforme” tant économiques que politiques. “Les réformes doivent se faire à un rythme soutenu”, a-t-il ajouté, lors d’un point de presse conjoint avec M. Matata. Un peu plus tard, lors un entretien avec la presse belge, le ministre a pris ses distances avec la condamnation ferme du président François Hollande, qui suscite de nombreux commentaires à Kinshasa. “Je regrette toujours qu’il y ait des déclarations très fortes qui sont davantage destinées à l’opinion nationale”, a dit le chef de la diplomatie belge.
M. Hollande a suscité cette semaine un certain émoi à Kinshasa, en jugeant “tout à fait inacceptable” la situation démocratique. Il a toutefois baissé le ton, dans un entretien télévisé jeudi soir, au cours duquel il a évoqué – sans les détailler – “les progrès qui viennent d’être accomplis” au Congo. “Les temps ont changé. La France est désireuse de respecter ses interlocuteurs”, a ajouté M. Hollande, qui ne veut pas s’ériger en “arbitre ou (en) juge”.
M. Hollande a prévu de rencontrer samedi le leader historique de l’UDPS, Etienne Tshisekedi. Ce dernier conteste toujours l’élection de Joseph Kabila lors de l’élection présidentielle de novembre 2011. Il refuse de participer aux institutions, au contraire d’une bonne partie des élus de son parti qui, à l’instar de M. Badibanga, ont choisi la voie de l’opposition parlementaire.