RWANDA: Deux enseignants sont portés disparus!

Par Erasme Rugemintwaza

Depuis le 01/03/2022 jusqu’aujourd’hui le 07/01/2023, à l’heure où nous écrivons, deux enseignants au Groupe Scolaire de Muramba, District de Gakenke dans la Province du Nord sont portés disparus. Il s’agit de DUSABIMANA Eugène (32 ans, marié) et NKORERIMANA Fabrice (28 ans). Leurs proches parents viennent de passer tous ces neuf mois dans des recherches sans répit, mais pas de trace et surtout pas d’espoir de les retrouver. Qui s’est-il passé au vrai?

Tout commence le jour où Madame MUREBWAYIRE Christine, membre de la chambre basse du parlement rwandais, en visite dans le Groupe scolaire de Muramba, proféra des médisances ou plutôt maudit le journaliste Hassan CYUMA emprisonné, lui souhaitant de mourir en prison. Madame MUREBWAYIRE Christine est connue pour ses positions trop hardies et extrêmes dues au trauma psychologique causé par la mort de sa mère, tuée par l’Armée Patriotique Rwandais dans la foulée des guerres contre les Infiltrés (Abacengezi), et la condamnation à la perpète de son père, ex-FAR, reconnu coupable des crimes de génocide et l’un des commandants incontestables, « qualifié », des Abacengezi, selon les dires de sa propre fille MUREBWAYIRE Christine. Le jour fatal de sa visite, une petite vidéo, condamnant Hassan CYUMA à mourir en prison, fut prise et par après  brûla la toile. Nous sommes le 01/03/2022.

A cette date du 01/03/2022, DUSABIMANA Eugène et NKORERIMANA Fabrice furent arrêtés, sous les soupçons d’avoir pris et disséminer sur les réseaux sociaux, la petite vidéo du discours de MUREBWAYIRE Christine condamnant à mort Hassan CYUMA. Rappelons tout simplement qu’Hassan CYUMA est le surnom donné à NIYONSENGA Dieudonné, propriétaire de la chaîne YouTube ISHEMA TV. Hassan CYUMA est connu pour sa liberté de ton et ses reportages très critiques envers les autorités du Rwanda. Il a été condamné à 7 ans de prison ferme, reconnu coupable de quelques griefs dont le principal est lié au saga dû aux abus commis par les forces de l’ordre du pays lors de l’expropriation des habitants du bidonville de Bannyahe, comme «entrave à des travaux publics », sans oublier une accusation d’avoir « humilié les officiels de l’Etat », une accusation qui est pourtant caduque dans le droit rwandais depuis 2019. MUREBWAYIRE Christine s’en est pris à Hassan CYUMA, car disait-elle, ce dernier est contre l’Unité et la Réconciliation des Rwandais.

Mais au départ on a arrêté quatre à savoir DUSABIMANA Eugene, NKORERIMANA Fabrice, NDAYISABA Ildefonse, CYIZERE SANGANO Olivier, tous enseignants au Groupe Scolaire de Muramba comme cela a été confirmé par RURANGIRWA Ferdinand directeur du Groupe Scolaire de Muramba. Une semaine après NDAYISABA Ildefonse et CYIZERE SANGANO Olivier ont été relâchés mais DUSABIMANA Eugène et HAKORIMANA Fabrice sont restés retenus dans l’endroit et conditions non encore connus, voici déjà neuf mois.

Les proches parents de ces deux derniers à savoir la femme de DUSABIMANA Eugène, Madame KAMIKAMUNTU Henriette et la mère de NKORERIMANA Fabrice disent avoir fait recours, depuis le 03/03/2022, à plusieurs entités administratives et organes de sécurité, depuis la Station de Bureau Rwandais d’Investigation (RIB) de Cyabingo jusqu’au Ministère de l’Intérieur, demandant l’aide pour retrouver les leurs. Mais dans leur descente pour analyser le dossier, leur soumis dans les lettres du début juin 2022, les agents du Ministère de l’Intérieur sont allés d’abord au Groupe Scolaire de Muramba où le directeur a répété que les deux enseignants ont été bel et bien arrêtés par les agents du RIB et emmenés au poste de Cyabingo, mais quand fut le moment de recueillir des les témoignages de deux qui ont été  relâchés pour ne fut-ce que dire où ils ont été retenus pendant toute une semaine, ces derniers ont dit qu’il est impossible de savoir où ils ont été séquestrés. Ceci suppose automatiquement qu’ils ont été déplacés bâillonnés, ce qui constitue déjà une torture. Les agents du Ministère ont alors demandés aux parents des disparus d’approcher le Chef de la police du District de Gakenke. Le DPC (District Police Commander) a révélé que les  deux enseignants sont retenus à Kigali dans les hautes instances de sécurité; qu’ils sont bel et bien en vie et qu’ils seront relâchés mais qu’il était strictement interdit de leur rendre visite. Ceci se passa en juillet 2022.

Après deux mois d’attente, en Novembre 2022, le Ministère de l’Intérieur a répondu aux parents, cette fois-ci, que les deux enseignants, qui étaient retenus au quartier général du NISS (National Intelligence and Security Services) ont été relâchés et renvoyés chez eux. Mais la déception fut totale quant les agents du NISS dans le District de Gakenke ont dit aux parents (la femme de l’un  et la mère de l’autre) n’avoir jamais reçu ces personnes d’autant plus qu’ils n’ont pas instruit le dossier. Mais la police de Gakenke dit savoir où se trouvent ces gens et  qu’il est possible de leur rendre visite, donnant même le rendez-vous de la visite aux parents: Mais chose absurde, c’est qu’au jour du rendez-vous de la visite, la police s’est dessaisie et a dit qu’il est impossible de faire une quelconque visite à ces gens.

Le Maire du District de Gakenke, Monsieur NIZEYIMANA Jean Marie Vianney, quant à lui, affirme être au courant du problème, et promets que ces enseignants sont vivants et qu’un jour ou un autre ils vont revenir chez eux.

Conclusion

Neuf mois d’angoisse, neuf mois de va et vient dans les instances de sécurité, neuf mois de pauvreté des familles d’autant plus que les parents de ces enseignants n’ont pas droit aux salaires! Les parents se demandent, et tout le monde se demande la fin de ce thriller. Où sont réellement DUSABIMANA Eugène et NKORERIMANA Fabrice voici neuf mois : dans la Police, dans le RIB, dans le NISS ou tout simplement ad patres? Est-ce réellement pour cette simple histoire de vidéo du discours de cette Parlementaire, MUREBWAYIRE Christine alias « KIRIHAHIRA », qu’on a séquestré ces deux jeunes gens? Les parents et le monde entier demandent justice : les relâcher ou les traduire en justice.