En février 2024, depuis la Maison de Correction de Sebikhotane au Sénégal, un groupe de détenus, parmi lesquels figurent Ntahobari Shalom, Ndayambaje Elie, Ngirabatware Augustin, Kamuhanda Jean de Dieu, Kambanda Jean, Nyiramasuhuko Pauline, Renzaho Tharcisse, et Ngirumpatse Matthieu, ont adressé une lettre ouverte aux juges du Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) ainsi qu’au Mécanisme pour les Tribunaux Pénaux Internationaux (MTPI). Ce courrier, destiné à être transmis au Conseil de Sécurité des Nations Unies, met en lumière leurs préoccupations quant à l’exécution et aux résultats de la mission de justice confiée à ces institutions internationales.
Dans leur lettre datée du 12 février 2024, les signataires expriment leur déception face à ce qu’ils considèrent comme l’échec du TPIR à accomplir pleinement sa mission. Ils reconnaissent certes que le tribunal a statué sur des aspects du génocide rwandais, notamment en déclarant certains accusés innocents. Toutefois, ils soutiennent que le TPIR a également consacré une forme d’impunité pour les criminels d’une partie au conflit, tout en condamnant des innocents de la partie défaites, manquant ainsi à son objectif de réconciliation nationale.
Les détenus appellent les juges à prendre exemple sur les trois procureurs en chef successifs du TPIR entre 1995 et 2003 – Richard Goldstone, Louise Arbour et Carla del Ponte – qui ont publiquement déclaré que la justice n’avait pas été rendue de manière satisfaisante concernant la tragédie rwandaise. Ces procureurs ont attribué cet échec à l’obstruction systématique de l’actuel gouvernement rwandais, qui aurait empêché le tribunal de mener à bien sa mission.
La lettre fait également référence à des notes diplomatiques de 2020 de représentants des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’Union Européenne, qui remettent en question la résolution adoptée par l’Assemblée Générale des Nations Unies en rapport avec la commémoration du génocide rwandais de 1994. Ces documents suggèrent que les crimes commis devraient être reconnus comme des génocides tant contre les Tutsis que les Hutus, une position que le TPIR n’a pas officiellement endossée.
Les auteurs de la lettre ouverte implorent le Conseil de Sécurité de l’ONU de reconsidérer les éléments prouvant l’échec du TPIR/MTPI afin de corriger les erreurs passées et de permettre au peuple rwandais de bénéficier d’une justice équitable, préalable indispensable à une réconciliation durable.
Ce courrier met en évidence la complexité et les défis de la justice internationale, notamment dans le contexte d’après-génocide, où la recherche de la vérité, la réparation des torts et la réconciliation nationale restent des processus longs et difficiles. Les signataires, en exprimant leur désarroi et leur espoir d’une meilleure justice, rappellent l’importance de réexaminer les actions passées pour bâtir un avenir où la paix et la justice prévalent.