IRMCT: Le dossier Kabuga Felicien et son actuel traitement suscite des interrogations

Félicien Kabuga

Par The Rwandan Lawyer

L’homme d’affaires rwandais, Félicien Kabuga est actuellement devant « Le Mécanisme résiduel des Tribunaux Internationaux malgré son état de santé fragile et ipso facto une série de ses garanties judiciaires enfreintes sur base des différents instruments internationaux des droits de l’homme et consacrant les principes de la bonne administration de la justice. Le long des lignes qui suivent, il importe de relever les violations politico-juridiques décelées dans le traitement du dossier en son état actuel et les perspectives juridiques sur ce dossier auquel les yeux du public rwandais sont rivés.

Faits

Félicien Kabuga est actuellement devant « Le Mécanisme résiduel des Tribunaux Internationaux à La Haye. Sa famille et lui-même attendent avec impatience une justice transparente.

Depuis que Félicien Kabuga est détenu il y a plus d’un an, son état de santé s’est considérablement détérioré. A presque 90 ans, il est complètement hébété, confus et extrêmement malade. Il ne sait pas où il est, ni ce qui se passe autour de lui. On lui a refusé un de ses droits humains fondamentaux, y compris le droit à un avocat équitable. Son avocat n’a pas réussi à établir une relation ou communication entre M. Kabuga et sa famille, au lieu de cela il travaille sur son propre compte, pour des intérêts que nous ignorons. La famille a été tenue dans l’ignorance et est désespérément inquiète pour leur père.

La famille craint également que le procès ne soit pas équitable en raison de son état de santé instable et l’incapacité d’être mentalement présent à son propre procès. Il y a aussi la menace sérieuse d’une décision d’expulser Félicien Kabuga vers Arusha en Tanzanie. Tout récemment, le procureur a déclaré que Félicien Kabuga était apte à comparaître devant le tribunal qui pourrait faire exécuter son expulsion vers le tribunal de Arusha en Tanzanie. La décision a été prise sur la base de rapports médicaux inconnus de la famille. De plus, quelques jours plus tard, il a été hospitalisé à deux reprises. Il est notre père et grand-père, nous exigeons justice et que ses droits humains les plus élémentaires et les besoins sont respectés et satisfaits. La famille de Félicien Kabuga s’inquiète sérieusement du manque de transparence du procès et partant du manque de justice.

De plus, les avoirs financiers de la famille sont saisis illégalement depuis 1999. Cet appauvrissement imposé à la famille Kabuga viole les droits humains et nous appelons aux défenseurs des droits humains de condamner de tels actes.

Analyse

Le dossier Kabuga Felicien et son actuel traitement suscite des interrogations quant au respect des principes garantissant le droit au process équitable dont il sied de faire etat comme suit.

-Les garanties judiciaires violées: 

Selon le prescrit de l’article 14 alinéa 3 du pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966,  toute personne accusée d’une infraction pénale a droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes: a) A être informée, dans le plus court délai, dans une langue qu’elle comprend et de façon détaillée, de la nature et des motifs de l’accusation portée contre elle; b) A disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et à communiquer avec le conseil de son choix; c) A être jugée sans retard excessif; d) A être présente au procès et à se défendre elle-même ou à avoir l’assistance d’un défenseur de son choix; si elle n’a pas de défenseur, à être informée de son droit d’en avoir un, et, chaque fois que l’intérêt de la justice l’exige, à se voir attribuer d’office un défenseur, sans frais, si elle n’a pas les moyens de le rémunérer.

De cette diposition légale est entamée par le IRMCT sous deux aspects. D’une part, le tribunal ose faire comparaître un vieillard malade et dépourvu de ses facultés mentales alors que la loi exige qu’il soit présent à son process et puis se défendre lui-même; or cette prérogative risque ne pas être valablement honoree dans le cas de Kabuga car il ne dispose pas de ses facultés mentales et psychologiques pour agir en justice.D’autre part, le IRMCT lui impose un avocat alors qu’il ne se sent pas confortable avec lui et lui refuse son droit de se chercher d’autres avocats même sur ses propres frais.

-La main noire de Kigali dans le transfert à Arusha

L’accusé s’est opposé depuis le début du procès a son éventuel transfert à Arusha en se basant sur les conditions de sante surtout durant cette pandémie de Covid-19 qui menace la planète et estimait que le milieu européen lui serait plus favorable surtout que là il pourrait accéder aux hôpitaux plus évolués et serait proche de sa famille. Objectivement, il n’ y a rien de mal que Kabuga soit jugé en Europe par l’IRMCT et rien ne justifie l’acharnement du ministère public qui persiste à réclamer son transfert en Tanzanie. A cet égard, on se demanderait s’il n’y aurait pas des velléités de Kigali derrière ces allégations sans fondement issues du ministère public ; les autorités du Rwanda voulant tout cyniquement gêner l’accusé car que ce soit en Europe que ce soit en Tanzanie rien ne changera le sort qui l’attend a savoir la condamnation ou l’acquittement. Par ailleurs, il y a lieu de songer aux conditions carcérales insalubres en Afrique au cas où il est jugé à Arusha et est condamné à l’emprisonnement.

3)Le blocage des comptes et la présomption d’innocence

En décidant de bloquer les comptes de Kabuga, le tribunal semble déjà condamner l’accuse alors qu’il jouit toujours de la présomption d’innocence aussi longtemps que son jugement définitif n’est pas encore rendu et toutes les voies de recours épuisées. Tout au plus, la responsabilité pénale étant personnelle, l’on se demanderait pourquoi la famille du suspect en pâtit financièrement. Ces principes sont établis par les différents instruments internationaux tels que le Pacte International Relatif aux Droits Civils et Politiques de 1966 en son article 14 ; la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 en son article 11 tous adoptés sous les auspices de l’ONU et dès lors il y a lieu de s’enquérir sur quel autre type de juridiction les mettrait en application si d’ores et déjà la cour onusienne qu’est le IRMCT les piétine sans vergogne.

4)Que devrait faire le Mécanisme Résiduel ?

Pour garantir une justice impartiale et équitable, le IRMCT devrait laisser l’accusé le temps de recouvrer sa santé afin qu’il puisse se défendre dans un état mental normal. En outre, son maintien sur le sort européen ne gêne personne et alors le parquet devrait cesser de l’importuner à ce sujet. Par ailleurs, il est grand temps que les comptes de l’accuse soient débloqués au profit de sa famille car un tel blocage laisse anticiper une partialité du tribunal qui semble le condamner prématurément. Enfin, le tribunal devrait mettre fin au contrat d’Altit car ses relations avec son client ne sont plus au beau fixe.

Conclusion 

Le dossier Kabuga Félicien ne cesse de ridiculiser l’IRMCT quant a son respect des principes du procès équitable au point de se demander les raisons de tout cela et qui tire les ficelles. Les relations entre le Rwanda et les Tribunaux internationaux ont toujours été conflictuelles car le premier voulait politiser les procès alors que ces derniers étaient serviteurs de la loi. Sans devoir chercher ailleurs, il s’avère que derrière toutes ces entraves procédurales que le vieux homme d’affaire subit devant la cour, il se cache une main noire de Kigali.