RWANDA: Idamange Yvonne condamnée à 15 ans de prison

Par Erasme Rugemintwaza

La Chambre Spéciale de la Haute Cour pour les Crimes internationaux et le Terrorisme a condamné, ce 30 Septembre 2021, Idamange Iryamugwiza Yvonne à 15 ans de prison et deux millions de Francs rwandais d’amende.

Idamange Iryamugwiza Yvonne, une mère de 42 ans, est largement connue depuis le début du mois de février 2021 pour ses propos critiques sur la chaine YouTube, critiquant le régime de Kigali. Elle a toujours dit que c’était à cause de l’injustice très manifeste au Rwanda qu’elle a décidé à ses risques et périls de parler en public. Elle est accusée de six chefs d’accusations dont les principales se résument en incitation à la violence ou d’émeutes en public, tout cela pour provoquer des troubles à l’ordre public. Et malgré son statut de rescapée du Génocide, comme trois après elle Karasira Uzaramba Aimable, Idamange Iryamugwiza a été accusée de nier ou diffamer le Génocide contre les Tutsis.

Signalons que lors de son arrestation, la police rwandaise avait indiqué qu’Idamange avait aussi blessé un officier avec une bouteille et que ses vidéos mélangeaient la politique, la folie et les propos criminels. Mais Lewis Mudge de Human Right Watch avait assuré que « Ce procès semble destiné à intimider toute personne envisageant d’exprimer des opinions critiques ou controversées»

C’est dans la salle du Palais de la Cour, sis à Nyanza dans le sud du pays, que les trois juges du panel du procès -lequel panel Idamange avait refusé en juin 2021- ont rendu public le verdict. Ni Idamange, ni ses avocats, ni le parquet n’étaient présents dans la salle archi-quadrillée par les forces de sécurité.

En fait Idamange fait face à six chefs d’accusations dont 5 découlent de ses émissions sur YouTube. Ces charges sont notamment (1) incitation à l’insurrection ou soulèvement public, (2) de dénigrement d’artefacts commémoratifs du génocide, (3) de publications de rumeurs, (4) d’agression et de coups et blessures, (5) d’entraves aux organes chargée d’application des lois et fin des fins (6) d’émission d’un chèque sans provision en 2018.

Madame Idamange n’a été acquittée pour aucune de ces six charges retenues contre elle, et c’est par le concours pénal qu’elle écope de 15 ans de prison ferme contre 30 ans requise par le parquet. Comme la plupart des charges retenues, contre elle, sont basées sur les émissions sur la chaîne YouTube portant son nom d’ « Idamange », Idamange n’a jamais refusé ni l’authenticité ni la propriété de ces émissions qu’elle a toujours considérées comme son droit inaliénable d’expression reconnue par la Constitution du Rwanda.

Mais le Tribunal a toujours montré à Idamange que ses propos sur YouTube sont des diffamations mensongères, sans source connue, et pouvant provoquer les troubles de l’ordre public. Idamange a été aussi reconnue coupable d’émission d’un chèque sans provision en 2018, infraction qui normalement expire après 3 ans. 

Rappelons depuis juin 2021,Idamange s’était résolue à ne plus comparaître devant le tribunal qu’elle accuse de partialité; aussi le tribunal voulait-il que l’affaire soit traitée à huis clos, ce qu’Idamange et ses avocats ne comprenaient pas d’autant plus qu’elle est poursuivie pour ses émissions qui circulent en public, sur YouTube. Mais le parquet alléguait que le procès en public pouvait donner à Idamange l’occasion, cette fois-ci officielle, de faire sa propagande d’inciter le public à se le révolter  contre le pouvoir et l’autorité publics, et qu’elle pourrait continuer de renier le Génocide, ce qui pourrait troubler la quiétude des rwandais.

Me. Félicien Gashema, un de ses avocats (l’autre étant Me Bikotwa Bruce), a fait savoir que c’est après avoir reçu la copie de jugement du Tribunal qu’ils seront s’ils feront appel ou non selon la volonté d’Idamange.

Signalons qu’un aperçu succinct remarque un fait persistant dans ces procès dans lesquels les accusés se réclament victimes « politiques ». Tous les accusés se résolvent, à mi-chemin, à une décision fatalement fatidique de ne plus comparaitre dans leurs procès, pour la même raison: la partialité des tribunaux. Une justice taillée à mesure, qui n’est plus rendue au nom du peuple!